Posté le : 07 mai 2023 à 12:01:11
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Le trajet dure à peine vingt minutes. C’est l’occasion pour les deux représentants de parler d’idéologie et de politique. Vingt minutes, ce n’est pas beaucoup, et donc la conversation ne rentre pas dans les détails. Ce qui est clair, cependant, c’est que les opinions politiques des deux ne divergent que dans les plus petites des parenthèses.
Le convoi tourne à gauche sur la Place de la République, vide comme d’habitude à cette heure qui s’expose bien trop au soleil. Le portail étroit s’ouvre et les voitures passent le seuil pour entrer dans la cour. Moralez et Poliakov sortent de la voiture et se dirigent vers l’entrée du palais et Javier Isered, le Ministre des Affaires Étrangères, les y accueille chaleureusement et leur résume le planning avant de commencer.
Quelques instants après, ils sont accompagné vers la salle de presse qui les attend où ils sont pris en photo dans le cadre magnifique du palais. Les deux interlocuteurs serrent la main et livrent leur meilleur sourrire aux caméras. Ensuite, une petite pause est prévue, sachant que l’invitée priscyllienne a effectué un trajet sûrement fatiguant.
On lui montre donc sa suite, un ensemble de chambres à hauts plafonds amplement décorés. Un drapeau priscyllien attaché au rebord de la fenêtre, signe de bienvenue, sillonne dans la brise. Rogelio Moralez s’excuse et laisse Madame Poliakov se reposer avant le déjeuner, qui est prévu une demie-heure après.
Pendant cette demi-heure, Moralez se rend dans le hall et reparle avec son Ministre, sans vraiment l’écouter. Tout cela le fatigue. Au moins, il se dit, Poliakov lui avait semblé plus intéressante que prévu. Elle avait un air de confiance en soi absolu, il constatait, qui attirait les yeux du public comme par la force d’un aimant.
Le déjeuner est prévu non dans la somptueuse salle à manger, mais dans un cadre plus familier : sur la terrasse, on a installé une table pour les quatres personnages importants (Moralez, Isered, Bolinov et Poliakov) à l’abri du soleil, dans un courant d’air agréable avec vue sur la mer.
Quand Moralez se rend à table, pile à la bonne heure, il constate que Madame Poliakov est déjà là, en pleine discussion avec Bolinov. Quelques minutes plus tard, le premier plat est servi. Au choix, les invités peuvent déguster des crustacés où du gaspacho de comcombre à l’ail, une spécialité malévienne. C’est l’occasion pour commencer à parler politique, et comme d’habitude, Moralez y ajoute une petite poignée de mélancolie.
« Ce gaspacho me rappelle mon enfance. Ma mère en faisait quand il faisait chaud, et toute la table était soulagée de la chaleur qui entoure si souvent l’heure du midi. Tout comme votre culture, la nôtre offre une diversité de plaisirs qui ajoutent à la qualité de vie. Je viens à mon propos : ne serait est-ce pas un atout d’un pays d’avoir accès aux biens d’une autre culture ? Disons que la Malévie puisse faire l’expérience de l’excellence culinaire priscyllienne et que les Priscylliens aient le luxe de profiter de la réciproque ? Ce serait excellent! Je vous propose donc tout d’abord que nos deux pays deviennent des partenaires par le commerce. Je vous propose de créer un contrat propre à nos deux nations pour établir un échange culturel et économique sans précédent, pour jouer sur les points forts de l’un et de l’autre. Qu’en pensez-vous ? »