29/03/2015
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Conférence de Science-Fiction d'Halvø

La 12e édition de la conférence de Science-fiction d'Halvø qui a ouvert ses portes en ce 20 juin 2011 et pour encore 4 jours porte cette année une saveur particulière. A la suite de l'annonce par le Gouvernement du développement d'un programme spatial national qui sera porté par l'Agence Spatial Tanskienne de Recherche et d'Exploration, l'engouement pour l'espace atteint cette année des sommets.

Loin des quelques 280 000 visiteurs attendus en moyenne, cette édition voit grand, voit double et semble atteindre l'espace plus que des sommets. Quelques 500 000 à 600 000 tanskiens et tanskiennes mais aussi touristes étrangers sont étendus pour une édition rallongée d'une journée pour l'occasion. Le programme de l'année a aussi grandement été aménagée afin de laisser place à des projets, récits mais aussi en partie découvertes et recherches liées à l'espace proche, à l'orbite basse ou à la Lune. Bien loin de l'usuel voyage galactique qu'offre la conférence, c'est dans un espace plus proche que l'attention de cette année devrait être portée.

L'Agence Spatiale Tanskienne de Recherche et d'Exploration suit par ailleurs cette édition de prêt à indiquer son directeur Rami Kanerva. Plusieurs projets, bien que de science fiction, peuvent toujours fournir des idées intéressantes, impensées voir ingénieuses y compris pour des projets existants. Le Congrès Fédéral ayant donné son accord pour un certain nombre de programmes, des idées sur l'ALTAIR (Alternative Advanced Independant Rocket) peuvent apparaître. Il est par ailleurs prévu que plusieurs démonstrations virtuelles d'imageries de l'ALTAIR soient présentées par un stand de l'ASTRE. Celui-ci occupe logiquement le centre de la conférence qui deviendrait presque un moyen de promouvoir la politique nationale, mais aussi peut être de susciter des passions.

Le dernier jour disposera, pour se faire, d'un centre de tests préliminaires. Si il s'agit plus d'une attraction que d'un réel centre de détection, certains laissent entendre que l'ASTRE pourrait chercher à y trouver des profils encore jeunes (souvent adolescents) mais prometteurs que l'agence pourrait suivre activement ou passivement que ce soit pour des ingénieurs ou encore, peut être, des astronautes.

Sur un plan plus éloigné du réel, cette année devrait aussi s'achever en grande pompe par la présentation future du prochain RPG spatial en monde ouvert : "Antares Galactica" du studio Bathasda à l'origine de Searim I, II, III, IV et V ainsi que leurs 12 DLCs. Plusieurs autres jeux indépendants en particulier d'Anomalia Interactive avec son "Hearts of Star IV" doivent aussi faire l'objet de démonstration au public par des gameplays ou bien des trailers qui ne ressembleront aucunement au jeu.
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Festival du livre de Førdeild

L'important festival du livre de Førdeild va ouvrir prochainement ses portes et pour 4 jours dans l'importante cité côtière du sud est des régions principales. C'est dans l'enceinte de la Cité Universitaire des Arts et des Lettres que se tient cet évènement depuis désormais 29 ans. Cette année le bâtiment de philosophie a aussi été requis pour l'occasion face à l'affluence record espérée, au-delà donc du bâtiment d'art tanskien et d'anthropologie habituellement réservés.

C'est, comme chaque année, dans le cadre de ce festival que ce sera aussi remis le prix Courgon du meilleur roman, de la meilleure bande dessinée et du meilleur ouvrage scientifique ayant attrait aux Arts et aux Lettres pour l'année 2011. La ministre de la Culture, Lynd Ingib, viendra faire une visite attendue pour l'annonce des prix dans ce qui constitue son fief électoral où elle avait été élue majoritairement député au premier tour en 2004 (52%) et 2010 (63%).

Cette année est notamment mis en avant "Un Haffenois du futur", une bande dessinée d'une rare violence dans ses dessins et propos relatant le récit d'un survivant du massacre de Port-Haffen par des troupes listoniennes plus tôt dans l'année. Acclamé par la critique en dépit d'un dessin jugé parfois trop explicite, la bande dessinée a aussi du sa renommée en Tanska du fait de l'Opération Mallard.

Le meilleur roman devrait quant à lui revenir au grand écrivain originaire d'Halvø, André Stenström, pour son troisième roman "Nuit d'antan" considéré par beaucoup comme le livre de l'année (toutes catégories confondues) en dépit d'un style toujours similaire à ce qu'il avait fait par le passé.
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Régate de Norja

Cette semaine a eu lieu la 253e Régate annuelle de Norja. Ou 252e. Ou 254e. Personne ne sait en réalité vraiment quand elle a commencé officiellement. Un total de 122 équipages ont participés à cette course mythique au travers des canaux de la vieille ville dans un esprit des plus festif. La régate de Norja regroupe des embarcations particulières. Composée d'un équipage de 12 personnes, dont 8 rameurs, elle ne dispose que d'une petite voile à l'avant du navire sur un mat ne dépassant pas les 3 mètres de haut. Comme à son habitude depuis désormais quelques décennies, la course s'est en réalité divisée entre deux courses. La première, professionnelle, marque la grande étape du Championnat Fédéral de Course sur Canaux et comprenait 17 équipages. La seconde, comprenant le reste de participants, est bien plus festives, lente, aléatoire, désordonnée. En bref, elle n'intéresse pas les passionné de sport mais bien les passionnés de fête et d'animation. Comme l'an passé, près de la moitié des embarcations n'ont pas pu finir la course. Une dizaine d'équipages ont pris l'eau, sans victime mais cela nécessitera tout de même plusieurs jours de nettoyage des embarcations, tout de bois et de toile.

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La volonté municipale de conserver l'idée initiale de la course a permis de garder la simplicité des embarcations. Aucun électronique n'est permis, aucune motorisation, aucune aide. Les mesures sécuritaires sont elles aussi réduites, ce qui n'est pas sans critiques régulières. Les accidents, peu mortels, sont réguliers mais amènent presque systématiquement à provoquer un mort par an sur le championnat et de façon régulière lors de la régate annuelle du fait de l'importance numérique des équipages. Cette année, les organisateurs se sont dit particulièrement ravis. Plus de 400 000 tanskiens non-norjiens ont fait le déplacement, marquant l'une des journées les plus actives de la Capitale sur l'année. A cela s'ajoute, le fait que la course amateur a lieu le dimanche, soit le lendemain de la course professionnelle.

Cette année, comme depuis 7 ans, l'équipage du "Petit norjien", dominé par la capitaine Greta Östlund, l'a emporté mais avec seulement 3 secondes d'avance. Plus petite avance depuis 5 années.
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Le Norjien -- Histoire

L'archipel de Nellnely-Nacuot, une (re)découverte du nationalisme tanskien ?

La sortie d'un ouvrage de recherche historique sur l'exploration tanskienne au XVIe siècle provoque une poussée de révisionnisme historiques dans les groupes nationalistes à l'opposé des bancs de l'université

Par Oleana Järnefelt (Norja), le 3 septembre 2012

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Fin 1542, Oddkell Seifsson a bord de son célèbre Astrolabe dont la proue orne encore le quai n°1 de la Gare Centrale de Norja traverse la mer des Burbujas et rentre dans l'Océan Carmin. Là bas, des mots de l'explorateur, il y découvrira un archipel sublime, verdoyant, aux habitants vivants en harmonie avec la nature. Au nom du roi Harald VIII de Norja il réclame l'île. Il revient en 1544 à Norja, célébré par la bourgeoisie commerçante de la ville en parlant, d'un continent au delà du nouveau monde, plus impressionnant et riche encore que celui découvert il y a peu. L'histoire de l'Astrolabe (qui effectuera plus tard la première circumnavigation tanskienne), la légende de Seifsson, et le mythe du continent de Seiflønd était né, et avec lui l'imaginaire tanskien de la navigation et de l'exploration.

Jusqu'ici, la recherche historique tanskienne avait estimé qu'en réalité Seifsson n'avait jamais réellement pénétré dans l'Océan Carmin et avait en réalité finit sur une île de l'actuelle Maronhi voir une grande île encore mal connue de l'Alguarena. L'ouvrage paru récemment aux presses universitaires de Kalfafell par l'historien moderniste reconnu Aslak Liikanen est revenu récemment sur ces estimations. En retraçant le parcours de Seifsson et de l'Astrolabe à partir de ces récits de voyages mais surtout des descriptions faites par les deux biologistes de l'équipage, le professeur estime que c'est bien dans l'actuel archipel de Nellnely (en Kah-tanais) ou Nacuot (en Alkatien), partagé entre Kah-Tanais et Akaltiens que Seifsson aurait découvert.

Dans son récit, Seifsson y dépeint ainsi des rivages densément peuplés, des richesses visibles à des lieues en mer et une population pacifiée qui ne demandait qu'à recevoir la bénédiction de Dieu et de la civilisation. "Aucun village n'était distant de l'autre de plus d'un tir de fusil. L'on pouvait caboter de village en village en quelques minutes de navigation. Le sol était gorgé de plantes, les eaux agitées de poisson, la température clémente et les habitants dociles et agréables."

Si la description avait provoqué les passions de nombre de marins et de commerçants tanskiens, le développement de la colonie de Järvi (actuelle Province Fédérale d'Etelämanner), plus proche, mieux connue et lucrative, bloqua tout financement d'expéditions supplémentaires. Ayant déposé, de ces mots, une lettre de marque du Roi prenant possession de l'île - qu'il estimait être un continent -, Oddkell Seifsson ne put pourtant jamais y remettre les pieds. La véracité des descriptions de Seifsson est toujours sujette à d'importantes controverses historiques entre mythe, description extravagante et possible réalité.

Par ses recherches, Aslak Liikanen réouvre ainsi la question de la naissance du mythe de Loforðlønd (la Terre Promise en tanskien). Au cœur d'un important débat historique, Loforðlønd anima les premiers planisphères rédigés en tanskien représentant tantôt un continent au sud ouest du Paltoterran, tantôt entre le Nazum et l'Afarée. Liikanen expose ainsi une nouvelle théorie fondée sur les récits de voyages des explorateurs tanskiens étant passé par le sud de l'Afarée : les archipels du Wanmiri à l'archipel Nacuot auraient été percu comme faisant partis d'un seul et même continent à l'ouest de Paltoterra et au sud du Nazum. Un sixième continent imagé et imaginé au gré des voyages et des imprécisions de cartographies, une terre promise, le Loforðlønd.

Rôle dans la construction nationale tanskienne

Comme l'avance Liikanen, ne s'éloignant pas cette fois de la recherche historique actuelle sur l'époque moderne tanskienne mais la confirmant davantage, l'imaginaire du Loforðlønd a joué un rôle notoire dans la construction de la pensée politique tanskienne, en particulier sur l'ancrage d'une pensée libérale. Plus précisément, les courants de l'histoire des idées aboutissent actuellement à l'idée selon laquelle le développement d'un mythe du Loforðlønd - que les Tanskiens y aient cru ou non est encore sujet à de nombreux débats - a entraîné la formulation et la propagation d'une idée libérale centrée sur l'aboutissement de l'individu par la recherche de son propre Loforðlønd pour trouver le Loforðlønd tanskien.

De ce fait, le développement individuel bénéficiant à l'individu, il bénéficie aussi à la population - puis au peuple tanskien - dans la recherche de sa propre terre promise. Celle-ci s'est peu à peu, au fur et à mesures que l'exploration a affiné les cartes et dévoilé l'absence d'un sixième continent, divergé vers la construction d'un Loforðlønd directement sur les terres habitées par les tanskiens, amenant ainsi au développement des idées progressivement républicaines et socialistes. La construction individuelle puis collective d'une Terre Promise menant à la progression de l'idée d'égalité, aussi bien dans l'économie que dans les droits des individus. Idée que l'on retrouvait encore en 1942 dans la guerre de la fédéralisation lorsque les colonies demandaient à "faire partie du Loforðlønd" - pour celles qui ne voulaient pas l'indépendance.

Le mythe de la Terre Promise pour Tanska aurait ainsi joué un rôle important dans le développement progressif d'un proto-nationalisme tanskien mais aussi des idées libérales. Les dernières recherches tendent néanmoins à pousser aussi sur l'influence du développement de la Sérénissime et des Couronnes-Unies de Caratrad comme ayant été des vecteurs d'incitations au développement du commerce maritime tanskien, et de ce fait d'une forme de libéralisme cette fois-ci plus économique.

Une histoire reprise par la droite nationaliste

La propagation de la recherche, saluée par ses pairs, de Liikanen s'est toutefois récemment étendue à la sphère publique et en particulier du côté des mouvances nationalistes toujours en quête de préciser le mythe de l'histoire nationale tanskienne.

Comme l'avait démontré la sociologue Alma Bloch en 1962 dans son célèbre "mythe et nationalisme du Tanskien moyen", le développement d'une pensée pleinement nationaliste tanskienne à la fin du XIXe siècle et tout au long du premier XXe siècle s'est avant tout fait sur la base du mythe de la construction d'une Terre Promise.

Celle-ci, auprès du "Tanskien moyen", se faisait autour de deux piliers articulant la pensée nationaliste. Le premier était la nécessité de retrouver, sur les terres tanskiennes historiques (Norja et Halvø principalement), les racines des premiers tanskiens en se basant sur la reprise, en 1543, de la ville d'Halvø par la Principauté de Norja. Le second étant de trouver de nouvelles terres promises.

Halvø, principale ville d'origine des populations tanskiennes fut partiellement abandonné au profit de Norja au cours des XI et XIIe siècle avant d'être reprise en 1543 du fait d'intérêts commerciaux (et aucunement d'un retour à des sources). Cette date, qui coïncide presque avec le premier voyage de Seifsson est fondatrice dans la construction du mythe de Loforðlønd : elle permet la construction en revenant aux terres "ancestrales", et l'autre construction par la projection d'une "terre promise" par delà les mers.

C'est ainsi autour de ce duopole que le nationalisme tanskien et que la rhétorique nationaliste s'est bâtie. Elle explique, d'après les travaux de l'école historique dite de "Järvi", l'attachement de l'Empire Tanskien aux colonies de Järvi et de Ny-Norja, perçue tour à tour comme le réel Loforðlønd, indispensable, donc, à la nation tanskienne.

Mes travaux n'ont pas pour vocation d'alimenter le nationalisme"

C'est ainsi, sur le fruit de cet historique de construction du nationalisme tanskien, que depuis plusieurs semaines on a pu observer une utilisation des travaux de Liikanen bien au-delà de la sphère universitaire. Plus précisément, plusieurs mouvances d'extrême droite ont estimés que le mythe de Loforðlønd venait de trouver sa "véritable signification" et avec elle "la destinée tanskienne".

Selon Liikanen, ses propos "sortent la recherche de son contexte" et amènent à "dénaturer ses travaux". L'historien a précisé dans une interview donné à Tanske Fréttastofa que "mes travaux n'ont pas pour vocation d'alimenter le nationalisme. Ils ne doivent servir qu'à mieux comprendre l'histoire d'une période importante pour l'exploration, la colonisation et à terme le développement de nos grandes villes sur l'exploitation de populations colonisées pour servir un mythe bâti de toutes pièces."

Aucun élu du Front Tanskien n'a publiquement commenté l'affaire mais plusieurs ont reconnu avoir lu "avec intérêt l'ouvrage de monsieur Liikanen", l'un d'eux précisant à Playkirja que "par son travail, Aslak Liikanen éclaire davantage l'histoire incroyable de notre pays", loin du message porté par l'historien.
CTESI
Centre Tanskien d'Etudes Stratégiques et Internationales

La fin d'une parenthèse de paix : Comment l'invasion loduarienne de l'Okaristan contraint Tanska à repenser son modèle


Février 2012 - Matilda Nilsson


La période de paix et de stabilité politique de la Manche Blanche, partiellement garantie par le Pharois, n'est plus. Si depuis des années un climat d'apaisement c'était installé dans cette quasi-mer fermée que bordent les régions centrales et la province d'Halvø, le choc provoqué par l'invasion loduarienne de l'Okaristan-Kolcovo et l'occupation de l'oblast de Zlagingrad affecte particulièrement la visions stratégique tanskienne mais aussi sa manière de voir la région. A terme, c'est aussi une partie de sa diplomatie internationale et de son identité qui pourrait être affectée.

Le retour de la guerre, qui était toutefois présente en d'autres endroits de l'Eurysie et en particulier dans le cadre de conflits internes (Tcharnovie, Valkoïnenland par exemple), bouleverse les repères tandis que la compétition dans laquelle la Loduarie s'est inscrite, d'elle-même, avec l'Organisation des Nations Démocratiques pourrait désormais trouver des relais en dehors même de la Manche Blanche.

Alors que l'accent avait été mis sur un développement économique conséquent, notamment dans le domaine des semi-conducteurs, une modernisation de l'appareil de production agricole et une série de législations favorables à l'environnement ou à la protection des travailleurs, on observe depuis quelques mois un important virage de la politique intérieure tanskienne qui place la défense au cœur des préoccupations et, progressivement, des dépenses de l'Etat. Alors que l'Organisation des Nations Démocratique doit assurer un socle de défense cohérent et des garanties de sécurité, les récentes évolutions de la Force de Défense nationale laissent suggérer que l'accent a été mis sur la dotation de capacités propres autrefois étrangères aux forces tanskiennes, à commencer par une importante armée terrestre.


La remise en cause de la stabilité en Manche Blanche

Le premier choc qu'a provoqué la Loduarie fut sans nul doute le bombardement de populations civiles à l'été 2012 permis par la violation de multiples espaces aériens eurysiens. Si l'espace tanskien en lui-même n'a pas été violé, l'espace Velsnien le fut par exemple - et entraîne aussi un important armement de la République depuis ce moment - et les aéronefs loduariens sont passés à proximité directes des côtes, et de la capitale. Au demeurant coopérants avec les autorités tanskiennes, les Loduariens ont acceptés de se poser sur la base de Kalfafell avant de se voir autoriser leur retour en Loduarie avant d'apprendre la raison de leur action.

Le second choc, plus fort encore, fut la rupture, autorisée par le Pharois et ses dépendances de Kotois et de Canta, de l'accord tacite sur l'absence de flotte étrangère en Manche Blanche. Décidant d'intervenir en Okaristan contre les rebelles démocratiques soutenus par une coalition hétéroclite d'Etats centreurysiens, la Loduarie Communiste a pu dépêcher sur place un groupe aéronaval ainsi qu'un groupe amphibie qui lui ont permis, non sans pertes, de mener une campagne aérienne à l'ouest et une invasion sans résistance à l'est du pays.

Alors que le modèle tansien se basait jusqu'alors sur l'idée d'une forme de stabilité et de sécurité assurée en Manche Blanche permettant le développement d'une diplomatie tournée vers d'autres régions du monde et pouvant se dédier davantage à l'humanitaire, les récentes évolutions ont amenées à une remise en cause de cette idée. Cette perception s'est caractérisée par la décision, à l'automne, du lancement d'une consultation sur le futur de la politique étrangère en Manche Blanche. Décidée par le ministre des Affaires étrangères et des Droits humains, Mar Loftsson, cette consultation n'a pas encore abouti à des résultats. On sait néanmoins que l'un des principaux point de blocage et de crispation entre diplomates, chercheurs et membres du Congrès Fédéral réside dans la relation à entretenir avec le Pharois. Tout en lui reconnaissant des possibles tendances à la démocratie et aux droits humains, les critiques se font vive quant à son action au Prodnov, perçu comme une invasion déguisée, et son caractère laxiste face aux crimes et actions loduariennes. Alors que la réunification - probable face au récent effondrement des forces de la RLP partiellement abandonné par ses soutiens de l'ONC - du Prodnov laissait autrefois envisager un modèle potentiellement libéral et démocratique, l'avenir semble aujourd'hui tourné vers un régime autoritaire et ne portant de social que le nom. C'est du moins ce que laissent entendre plusieurs députés fédéraux et diplomates opposés à un renforcement des relations avec le Pharois.

La certitude de pouvoir se reposer sur ce système de stabilité en Manche Blanche a été balayé. La guerre du Kolcovo agit comme le révélateur des tensions qui agitent la Manche Blanche et une partie de l'Eurysie conduisant à un recul évident de la démocratie et des droits humains. Alors que l'espoir augmentait avec l'intervention de l'OND au Valkoïnenland amenant une assistance humanitaire nécessaire à la population de Kønstantinopolis - oubliant au passage l'état de léthargie de certaines puissances locales face au drame humain qui s'y jouait -, l'invasion Loduarienne rabat les cartes.

« L'interprétation, particulièrement complaisante de la stabilité en Manche Blanche par les Tanskais devenait un blocage cognitif qui les empêchait de voir et de s'adapter aux changements qui advenaient. L'invasion loduarienne, aussi désastreuse qu'elle soit, y a sans doute mis fin ».
(Mar Loftsson, 23 octobre 2012)

Non seulement l'illusion de paix s'est effacée, mais la stabilité de certains pays s'est aussi amoindrie à l'image de Velsna. De surcroît, Norja est désormais contrainte de considérer davantage ce qu'il se passe en Manche Blanche et à y accroitre ses efforts diplomatiques mais aussi sécuritaires. Ce qu'avait permit de révéler l'intervention au Valkoïnenland mais que l'on admettait qu'à demi-mot, à savoir les importantes limites matérielles des forces de défenses tanskiennes, devient ainsi un problème de premier plan.


La reconsidération des relations avec l'Organisation des Nations Démocratiques : vers davantage d'intégration

Il y a un véritable virage favorable à l'OND depuis les événements de l'été 2012 notait récemment le secrétaire général aux affaires onédiennes - non sans satisfaction de voir son rang et son capital accrut dans la petite bulle de la gestion de la politique étrangère tanskienne. Celui que l'on surnomme le troisième bras de la diplomatie, derrière le ministre et la Première ministre, a vu son cabinet s'accroître de plusieurs pointures du Parti Fédéral au cours des derniers mois tandis que la confiance accordée par Jaka Lakkas s'est accru.

Si il voyage régulièrement entre Manticore, Bandahran et Norja, Amil Sjafnarsson n'est pas représentant tanskien auprès du Conseil Général ou du Conseil Militaire, il en est le coordinateur. Au fur et à mesures que s'accroissent les tensions en Eurysie, à l'instar de la crise frontalière teylo-loduarienne provoqué par l'assassinat de deux citoyens teylais et de leur instrumentalisation par les autorités loduariennes, le gouvernement accroit son investissement dans l'organisation, et tend vers davantage d'intégration. Elle se fait toutefois aux marges géographiques de la République. Alors qu'aucune unité alliée n'est déployée en territoire tanskien ou que Tanska ne déploit aucun élément permanent auprès de partenaires en Eurysie, dans l'Isthme d'Afarée ou en Aleucie, la République a lancé l'année dernière son premier déploiement permanent à l'étranger. L'escadrille de chasse 1/23 "Särna", certes limitée à seulement 3 aéronefs et une quarantaine de personnel devient ainsi la première unité directement basée à l'étranger, à l'YCMB Ynys Morfa de Caratrad en Paltoterra.

L'investissement militaire, au-delà de s'inscrire dans la réassurance des garanties de sécurité envers des alliés, vise aussi à démontrer aux pays partenaires que Tanska est un allié crédible sur lequel on peut compter. Si le Royaume de Teyla s'est soustrait à la possibilité de mener des exercices conjoints sur son sol au plus fort de la crise avec la Loduarie, Tanska avait elle prévu d'y mobiliser potentiellement 2 000 hommes et plusieurs dizaines de blindés en guise de soutien, mais aussi dans le cadre d'un geste diplomatique fort.

Cette évolution de la relation de proximité avec l'OND vient aussi avec l'accroissement d'un certain nombre de relations bilatérales à l'image des Accords de Norja signés avec Caratrad, de la coopération spatiale en développement avec Faravan, de la coordination dans l'assistance au Kolcovo avec Sylva et l'Empire du Nord ou du renforcement bilatéral avec Teyla qui pourrait potentiellement aboutir à davantage de contrats économiques et commerciaux.


Tanska doit être en mesure d'assurer la sécurité de son territoire et celui de ses alliés

Le mot d'ordre est clair. Lancé par la ministre de la Défense Kristine Svane au forum de défense de Kalfafell en décembre, il marque sans doute le principal changement dans la posture internationale tanskienne : la réarticulation progressive de son modèle de sécurité. Si Tanska avait presque fini par se convaincre de n'être entouré que de pays potentiellement partenaires, ou du moins de voisins stables la soustrayant à des menaces majeures, cette conviction s'est évaporée.

Alors qu'elle avait orientée le modèle d'armée vers de l'action humanitaire et de la protection des Droits humains à l'instar des actions à Port-Hafen, en Tcharnovie, au Wanmiri et évidemment au Valkoïnenland, cette conviction évaporée oblige à se repenser. Pour assurer sa sécurité, mais toutefois sans contrevenir à la politique humanitaire que la ministre estime être un « impératif duquel Tanska ne se détournera jamais » et qui a été renforcé par le Code Humanitaire et la Facilité Tanskienne pour la Paix, Norja est amené à prendre des décisions fondamentales.

  • Rattrapage : La récente constitution du 104th Expeditionnary Cavalry Regiment, officiellement destinée à servir en cas d'intervention humanitaire ne doit en rien cacher certaines de ses véritables capacités : le combat terrestre de haute intensité. De même que la constitution de la 47e brigade mécanisée et le futur renforcement (par un second bataillon motorisé) de la 56e brigade motorisée, la formation du 104th ECRG traduit en réalité un rattrapage nécessaire en matière de force terrestre. Longtemps déconsidérée au profit de la FADN, la Force de Défense Territoriale fait aujourd'hui l'objet de très importantes dépenses. Consciente de ses fragilités d'alors à mener un combat sur son propre sol, jugé jusqu'ici impensable mais désormais alimenté par l'impérialisme loduarien, Tanska se reconstitue progressivement une armée de terre plus imposante.

  • Il convient néanmoins ici de ne pas oublier un point important, qui a aussi été souligné par l'Etat-Major Général. Contrairement à Teyla, Tanska ne dispose pas d'une frontière terrestre avec la Loduarie et n'est donc pas, directement, sujette à une invasion sauf si celle-ci venait par la mer à l'instar de l'Okaristan. La question de la nature même de cette force terrestre et de sa trajectoire capacitaire reste donc encore à préciser alors que la seconde tranche du contrat de fourniture auprès de l'Alguarena devrait prochainement être financée.

  • Réassurance : La nature géographique de la Fédération oblige à réassurer davantage la capacité à maintenir le lien avec les territoires ultra-marins. En réalité, derrière ce discours officiel là encore peu convaincant - les territoires ultra-marins n'étant pas menacé directement actuellement -, c'est aussi la réassurance envers les alliés qui est visée. Le renforcement de la FADN par la construction d'un porte-avions, d'un porte-hélicoptères, d'une classe de patrouilleurs de haute-mer et la probable future commande de frégates de premiers rangs viserait ainsi à réassurer les Alliés sur les capacités tanskiennes à pouvoir venir les soutenir en temps et en heure. Moins militairement mais plus politiquement, c'est aussi une réponse à apporter à l'invasion Loduarienne. Le passage d'un groupe aéronaval au large de l'ouest eurysien pourrait là aussi envoyer un message.



Alors que le dictateur Loduarien annonce avoir abandonner son bref et désormais ancien partenaire du Communaterra face aux actions entreprises par les Kah-Tanais, peu enclins à voir l'impérialisme loduarien se présenter aux portes du Paltoterra ; alors que la Loduarie annonce désormais lutter contre une "campagne de désinformation" du Duché de Sylva qui lui permettra sans doute de justifier une répression accrue de ses populations civiles, il semble désormais clair que Tanska a baissé le voile du mythe socialiste Loduarien. La nature dicatoriale du régime, ses nombreuses actions impérialistes et ses multiples crimes sont autant de facteurs qui entraînent un changement de modèle dans la politique tanskienne.

Néanmoins, il semble primordiale pour la République de conserver ce qui fait sa force : sa démocratie et son attachement aux droits humains. la voie qui semble être prise ne doit en aucun cas amener à un détournement des natures même du fondement de Tanska. En ce sens, les consultations menées par le ministre Loftsson, le récent renforcement du rôle de la Commission de Défense fédéral dans l'approbation ou la désapprobation de contrats d'armements et les nombreuses interventions de membre du gouvernement visant à insérer la politique étrangère et la défense dans le débat public à l'approche des élections sont encourageants. Le renforcement de la consultation des Parlements et du Congrès Fédéral est la prochaine étape.
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L'annonce fut passée en catimini par quelques communiqués sans provoquer grand bruit. L'Etat Major de la Force Aérienne avait grandement réalloué le dispositif aérien fédéral. Alors que l'escadrille de chasse 1/25 "Visby" finissait de recevoir ses derniers V-16E Block 30, elle venait de créer de toute pièce la 2/25 "Visby" qui recevait des V-16D Block 30 en provenance de l'escadrille de chasse 1/22 "Akrak" qui récupérait des appareils de l'escadrille 1/24 "Blue Tigers". En bref, L'Etat-Major divisait par deux, pour quelques semaines, la dotation de ses escadrilles hors d'Eurysie pour ramener les appareils les plus modernes dans les régions centrales. La justification était simple : le climat géopolitique très perturbé de la Manche Blanche justifiait un renforcement de la présence aérienne tanskienne dans la région afin d'assurer son dispositif. Dans le même ordre, le groupe expérimental 1/31 du Centre Aérospatial d'Akrak était lui aussi exceptionnellement déployé "pour exercice" à Kalfafell.

L'ensemble des navires en Manche Blanche achevaient leurs patrouilles et leurs dernières révisions de fortune, de même que l'on rappelait indiquait aux entreprises qui possédaient des employés parmi leurs réservistes de prévoir des calendriers et emploi du temps dans lesquels les réservistes étaient absents, par mesure de précaution. Aucun militaire d'active n'était rappelé en caserne, tous avaient cependant interdiction de quitter leur région pour les semaines à venir. L'Etat compenserait les pertes.

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Halvø dans une froid matinée d'hiver s'était enveloppée d'une brume matinale quand un son brusque vint couper le réveil de nombreux habitants. Dans la baie du port, sous le couvert des hauteurs des Fjörds plongeant abruptement dans l'eau, un immense navire venait de faire son entrée. Là, depuis la veille déjà, un autre navire était à quai, immense lui aussi. Devant la baie qui formait un cercle presque fermé donnant sur la Manche Blanche, plusieurs autres navires patrouillaient. L'on avait pas vu aussi grande activité depuis longtemps. En ville, le commerce allait bon train. Les cafés, hôtels et bars tournaient à plein régimes, remplis de milliers de tanskiens, en majorité des hommes, du jour au matin et cela grandissait de jour en jour. D'abord quelques centaines, ils avaient doublés puis triplés, quadruplés en nombre. Partout, des uniformes et un unique écusson bien connu pour certains.

Sur le port, à marchandise, au nord de la ville, de l'autre côté d'un crète pour le séparer de l'agglomération, une partie du parking à conteneur avait été vidé de ses marchandises. A la place, des véhicules par centaines s'étaient amassés. A une demi-lune de l'arrivée des grands bâtiments dans la baie principale, un autre navire était venu s'amarrer lui aussi, mais à côté du parking à véhicule. Tandis que les hommes et les femmes en uniforme déambulaient librement dans la capitale provinciale pour leurs quartiers, le balais du chargement débuta à bord des imposants navires. De temps en temps, des hélicoptères survolaient la baie ou une partie de la ville.

Il régnait une curieuse ambiance de calme alors que tout indiquait la tempête. Les hommes et les femmes buvaient et l'on chargeait d'autres véhicules, des palettes. On remplissait les boulangeries à bord, des tonnes et des tonnes d'aliments frais, parfois congelés, du matériel médical à profusion. La proximité avec les industries pharmaceutiques tanskiennes avaient leur intérêt pour cette fois.

Et puis un matin, un appel résonna dans toute la ville. 4 sirènes, séparées par 3 secondes chacune. Le silence. les hommes et femmes se regardent, finissent leur café, reposent leur soldes qu'ils ne pourront finir, retournent dans leur chambre d'hôtel, pour certains chez eux. Dans la fin de matinée, un étrange cortège se déroule dans le calme. Dans le métro, dans les bus ou tout simplement à pieds, ces milliers d'hommes et de femmes se dirigent, dans un silence presque religieux, en direction du port et des navires, leur paquetage avec eux. Souvent, les passants sourient, font un petit signe de tête. Là un enfant fait coucou de sa main, ignorant à qui il dit au revoir sur commande d'un de ses parents. A une inconnue à la tenue bien étrange, vêtue de nuances de verts et de grandes bottes noires, un béret blanc sur la tête, comme il en a vu des dizaines dans la journée. A chacun et chacune qui passe devant le parc où il joue, à deux rues du port, il fait coucou, ses parents n'ont plus besoin de le lui dire. Chaque fois, les soldats qui passent répondent d'un sourire, d'un geste de main, d'un au revoir réchauffant. L'enfant ne sait rien de la raison de leur départ, eux l'apprendront une fois à bord.

Embarquement de centaines de véhicules à bord du TMAS Sigurd Baalsrud
1754
1er février 2014, République Fédérale de Tanska, province Fédérale de Kyli, village de Ny-Skörve

Les premières lumières de l’étoile annonçaient l’aube. Il était l’heure. Le paysage inhospitalier de ce village désertique blanchissait à vu d’œil. Des mineurs sortaient, ils se savaient attendus. Pas de forêt ni de montagne à passer. Tout était sans vie, excepté ce maigre oasis perdu dans le désert kylien dont ils ne pouvaient demeurer loin bien longtemps.

Ils marchaient fixés dans leur pensées, le regard ne pouvant quitter l'Oasis, seuls les quelques sons de la mine brisaient le terrible silence. Le jour et la nuit étaient un peu similaire ici. Toutes les jours, leur soleil passait puis disparaissait pour la nuit. Demain n'est rythmé que par l’aube habituelle, là bas dans le désert.

Mais en ce levé, comme ils s’amusaient à l’appeler, ils descendaient vers le centre. Plusieurs personnes prirent au passage des plantes qui poussaient sous quelques serres nécessaires. Il fallait bien remplacer un bouquet de houx vert par quelque chose. Il y avait là-bas, au centre du village, à quelques mètres de l'unique église, une tombe à mettre six pieds sous terre.

Celle d’un soldat, que presque personne ne connut. C’était le père d’un mineur. Il était mort au combat. Son éternelle demeure était libre de sa présence. Il était « mort pour la Fédération ». Loin, quelque part, pour quelques raisons.

Tout cela était bien étranger aux villageois de Ny-Skörve. Mine géante perdue dans le désert. Le millier d’humains qui l’habitait ne voyait presque jamais d’autres tanskiens. Les tréfonds du désert de la Fédération étaient ainsi. Des mines, parfois des oasis, loin des routes, loin des grandes villes, loin des hommes.

On enterra l’homme. Quelques mineurs trop pressés ne restèrent pas pour l’attendre dans une minute en silence. Le silence, il régnait à chaque instant ici, tant que l’on n’était pas à la mine. D’autres pensaient autrement. Il était mort au combat. La Fédération était en guerre ? Personne ne les avaient prévenus, eux.
29801
I


« Je suis un trop vieil Aleucien pour ne pas rêver parfois, moi aussi, d'indépendance aleucienne, d'une indépendance Järvienne, d'Etats-Unis d'Aleucie ou de toute autre rêve que chacun d'entre nous a pu porter un jour, mais je voudrais éviter à ces gens, ces pauvres gens, le sang, les larmes et la guerre. Leur éviter un Lorenzo d'Akrak, une Communaterra d'Etelämanner, une Translavie d'Aleucie, tous méritent mieux que cela. Or, ces notes là, ces termes et idéaux que mon âme a enfui depuis bien longtemps en dépit des volontés de mon coeur je les ai reconnu chez lui sans peine. Voilà pourquoi je voulais à tout prix le rencontrer, rencontrer Isrino bien qu'il ne relevait pas, techniquement - on est bureaucrate tanskien ou on ne l'est pas - de ma circonscription. Dans la région d'Aleucie où j'agit, dans les dernières forêts reculées de la province, il reste encore quelques tribus intactes de toute forme de corruption idéalisée. J'en suis responsable et je le serai jusqu'à la fin, c'est dans le fond pour cela que je sers l'Etat Fédéral. Non pas pour une forme d'amour inavouée pour la Fédération, bien que je dois admettre y voir moins de désavantage qu'en bien d'autres gouvernement de ce monde mais pour leur éviter la contamination. IL y a, dans ces quelques terres vierges de toute trace, des populations à préserver de la contamination. Et la première d'entre elle à éviter est celle des idées qu'Isrino veut leur transmettre. Il y a encore, là-bas, des gens qui vivent dans les branches d'arbres centenaires. La province n'est pas bien grande mais vous serrez surpris de voir quels mystères elle cache encore à vous autres, eurysiens. Alors oui, je sers l'administration, parce qu'une partie de celle-ci, investie d'une mission qu'elle s'imagine être civilisationnelle, éducatrice, bénie de quelques esprits divins ou d'autres justifications corrompues par les erreurs passées, se sent prête à défendre les parcelles délaissées de la colonisation. »
Alors que je parlais il rallumait une autre cigarette. Le cendrier se remplissait à vu d'oeil au fur et à mesure que je me vidais. Il me regardait sans me juger ni me dévisager. Il ne prenait aucune note et la feuille devant lui restait vierge. Cela me perturbait. Il cendrait de temps à autre, sans que cela ne soit régulier. Il m'écoutait simplement parler depuis plusieurs dizaines de minutes que mon récit se poursuivait. Il ne posait que très peu de questions c'était davantage des regards, souvent interrogateurs, curieux plus qu'agresseur. En dépit de la situation d'autorité dont il disposait sur moi, il avait sût, en bien peu de mots, instaurer une forme d'intimité qui m'amenait à parler sans arrière pensée, et peu à peu le voile se dévoilait davantage. Il savait parfaitement ce qu'il faisait.
« Voilà quelques unes de ces choses que j'avais en tête et que je comptais exprimer à Isrino. Lui expliquer que ça n'était qu'illusoire, qu'il se devait d'arrêter une lutte non pas de libération mais de corruption bien que tous deux nous percevions le même idéal. Je ne voulais pas le laisser approcher des arbres sous ma juridiction. Je l'aurais fait condamner, arrêter, expulser, exécuter si il le fallait. Je l'admirais en dépit de tout, pour autant il devait comprendre, il devait s'arrêter. Mais pour cela il me fallait accéder à lui. Il est un individu difficile à trouver, je ne vous apprends rien. Il y a néanmoins quelques avantages à parler quelques locutions que seuls une poignée d'hommes et de femmes parlent encore. Alors j'ai envoyé quelques lettres, j'ai rencontré quelques anciens, j'ai bu des potions inconnues avec des sorciers reculés qui, et je le pense sincèrement, sont de véritables magiciens capables de ramener des morts à la vie, de faire pleuvoir dans le plus sec des déserts. J'ai pris des semaines sur mon temps libre, je n'ai pas pris beaucoup de repos, dormi moins encore. Il y avait, vous savez, une forme d'épée de damoclès au dessus de ma tête. Je dirais même deux. La première, naturellement, était de l'empêcher d'atteindre ces villages, de saccager des cultures et d'alarmer davantage l'administration centrale. La seconde, mais vous n'étiez pas la plus menaçante à mes yeux, relevait de la discrétion que je me devais d'avoir vis-à-vis de vous. J'ai échoué, j'ai lamentablement échoué et de part et d'autres ces épées m'ont transpercées et risquent à présent de plonger des zones entières dans le brouillard flou de la lutte. Je m'arrêtait quelques instants, sa bouche s'ouvrit faiblement puis se referma, il attendait à nouveau, je repris. Mes premiers contacts je les ai eu avec Lwalo. L'acquiescement à peine distinguable de sa tête me fit comprendre l'étendue de mon échec. Je le respecte profondément. Il est l'un de ces sorciers dont je viens de parler. Un homme trop âgé pour son propre bien, il ne s'est jamais arrêté de fumer tout en ayant tout de même stoppé l'alcool pour sa santé m'a-t-il dit. Il est des coins insoupçonnés de notre pays où même l'administration et les normes sanitaires peuvent avoir des influences voyez-vous. Je l'ai naturellement vu non loin de chez lui. Un vieil administrateur comme moi étant connu, je ne feignis même pas le besoin de venir escorter d'une quelconque personne et à ma grande surprise lui non plus. Il m'attendait dans une de ses rares clairières que l'on finit par connaitre avec le temps et les années. La mémoire faillit régulièrement, pas pour ces choses là. Un matin brumeux de décembre au milieu de ces hautes herbes, rares illuminées du Soleil sous ce qui est habituellement un ciel de canopée, il était au milieu fumant quelques herbes dont je ne sais toujours pas retenir ni le nom ni les effets. Alors qu'il crachait régulièrement, avec la seule dent qui lui restait, ce que ces poumons ou bien son âme ne pouvait accepter il me parla un peu d'Isrino. Lui il ne l'avait pas connu personnellement. Il n'avait même jamais échangé avec. Des membres de sa tribu si. Deux d'ente eux, feignants des travaux obligatoires en ville en avait même profité pour rejoindre son combat, c'était la les premières traces de la corruption dans ma circonscription que je craignait. Lwalo tout autant que moi. Il ne parlait pas notre langue. Je ne sais même pas si il la comprenait mais tout portait à croire, jusque dans son regard, qu'il ne la connaissait pas ou du moins il mimait l'ignorance à la perfection. Je ne vais pas, je le craint, pouvoir vous décrire la teneur précise de notre discussion, certains termes ne saurait être traduit en tanskien avec la même hauteur que dans leur langue. Alors que j'allais m'attacher à résumé le contenu de cette rencontre, il m'interrompit :
— Je n'en ai pas le besoin. Lwalo a une importance honorable pour vous qu'il n'a pas pour moi pas plus que pour cette Administration. Il ne lui sera naturellement rien fait, comme c'est le cas depuis bien longtemps. Reprenez.
Je n'avais qu'à jeter un regard à son expression pour comprendre qu'il ne portait aucun jugement sur ce vieux sage. Non, il tenait la à la perfection le rôle qui était le sien et me confinait au mien avec une certaine forme de bienveillance qui à bien des égards pouvait frôler la sympathie. Naturellement, son cadrage intériorisé depuis des années contenait tout débordement de cette nature. La relation, parfaitement inégale au demeurant, oscillait comme un pendule de la sincérité à l'enquête, du proche au fonctionnaire. Il écrivit le nom du vieil homme sur la feuille qu'il tenait à sa gauche, puis raya soigneusement, d'un trait net, ce qu'il venait d'écrire. Je repris.
« Je vais tenter de dissiper toute forme de malentendu. »



II




« Isrino est un illuminé. Il se veut utile à une cause qu'il ne peut comprendre et que, fut un temps, Lwalo aurait sans doute suivi. Il y a néanmoins un point sur lequel Lwalo et moi sommes tombés d'accord. Si Isrino n'existait pas, un autre aurait pris sa place et nous aurions réagi de la même manière. Il combattait, maladroitement, sans le savoir, une idée qu'il ne peut comprendre et il le faisait comme un Eurysien. C'est cela que Lwalo me décrit. Au fur et à mesure qu'il me parlait c'est comme si, voyez vous, dix générations de chefs de tribus parlait et leur poids l'accablait. Notre discussion ne dura pas longtemps mais l'état duquel il en ressortit était d'une fatigue telle qu'il eu quelques difficultés à se relever. Il n'avait donc jamais parlé personnellement à cet homme mais il connaissait au final bien plus de lui que moi-même, ce qui me surprit. Dans sa jeunesse, Isrino avait étudié à Norja, vous et moi le savons, mais il faisait dès cet instant parti de quelques groupes militants pour la cause d'Etelämanner alors que les mouvements indépendantistes se mourraient à petit feu, élection après élection. Mais en étudiant là-bas, il ne revint pas plus autochtone qu'il n'était parti pour l'Eurysie, il ne retourna plus convaincu de la bonne nature de la cause qu'il se vouait désormais à défendre. Il revint Norjien, il retourna chez lui en Eurysien. Vêtu de tweed et régulièrement flanqué d'une casquette taillé dans les quartiers blancs de la capitale. Ayant perdu la majorité de son accent, de ce qui le faisait, il était là, dans les régions reculées de ces terres, à disserter sur les libertés locales. Lui, l'homme devenu Eurysien. Il pensait comme vous me dit Lwalo. Il pensait comme un Blanc. Oui, c'était devenu un homme de chez nous. Il était nourri de nos idées, de notre manière politique, de notre conception de la liberté, de notre vision de la colonisation, de notre parlé tout autant que de nos gestes. Ne restait de réel, ne restait de lui-même que sa couleur, ses quelques mots qu'il ne parvenait toujours pas à parfaitement prononcer. Il voulait bâtir un pays à notre image, une Aleucie à l'image de l'Eurysie. Alors que moi, administrateur eurysien, j'étais venu ici défendre une population qui m'est étrangère en tout point. Voilà que lui, via les informations récoltées par Lwalo, voulait ramener à ces arbres le matérialisme platonique de Norja, la lourdeur administrative de notre gouvernance, la tristesse de nos rues, la rationalité délirante de notre société. Il méritait d'être arrêté. Il ne pouvait condamner son peuple à la même oppression que celle qu'il jurait de vouloir combattre. Il n'inventait rien, il ne conservait rien non plus. Tout ce qu'il prévoyait de faire, il le faisait avec un miroir de l'Eurysie qui le regardait et n'y voyant que jalousie, que réussite, que la grandeur sublimée de la ville, il se décidait à raser la forêt qui l'avait vu naître. Alors que Lwalo me racontait ça, les gouttes froides de la brume se mêlait à la sueur qui gagnait mes joues et ma barbe. Il le remarqua et raccourci sans doute notre échange la dessus. Isrino ne projetait que la conquête Occidentale de l'Aleucie sous fond d'une indépendance qu'il ne savait concevoir. Il importait nos idées, nos tabous, nos préjugés, notre virus nationaliste, notre corruption du formatage des âmes, il apportait avec lui le poison eurysien, convaincu de se battre pour l'Aleucie. Il était un Blanc. Vous et moi avons longtemps été trop con pour le cerner. Il ne combattait pas Tanska, il se proposait de faire ce que cette administration s'est depuis longtemps refusé à faire, il apportait la conquête finale de ce bout d'Aleucie sur un plateau d'argent. »
Son attitude avait quelque peu évolué alors que je finissais sur ces quelques mots de lui raconter la teneur de la discussion. Il l'avait compris, je n'avais pas su précisément où trouver Isrino à la suite de ma rencontre avec Lwalo. Je pense toujours aujourd'hui que Lwalo savait où se trouvait Isrino. Il ne s'est pas abstenu de me le dire pour le protéger, il l'a fait parce que la n'était pas son rôle. Non, il m'avait juste dit la vérité, ou du moins une autre vérité. Je me suis abstenu de lui révéler cela. J'aurais pu avouer à l'homme qui me regardait, une énième cigarette au bec, dès ce moment-là, que j'avait jusqu'alors fait fausse route. Que je n'avais rien compris ou rien voulu comprendre sur qui était vraiment cet Aleucien tant recherché qu'un vieillard venait de dépeindre autrement et que, quelque part, les notes et instructions qui venaient d'en haut avaient malgré tout finit par me gagner et leur donnait raison. Que l'Administration avait pu me corrompre et me faire admettre une vision sur cet homme qui n'était que le contraire absolu de la réalité nouvelle qui m'avait été enseignée. Savaient-ils réellement qui était Isrino ? En avaient-ils conscience ? Je ne le sais toujours pas et je n'osait pas lui demander. Cela aurait été lui faire une faveur. En me soustrayant à l'envie intestinale de lui demander si ils avaient et si lui personnellement avait eu tort sur son compte, je lui ôtait aussi une faveur. Je lui interdisait la possibilité de me regarder, un petit sourire narquois vainement masqué grandissant sur ses lèvres plates et asséchées, où, sans me parler, il m'aurait avouer qu'il savait depuis le début, qu'il m'avait eu et l'Administration aussi. Je ne pouvais accepter l'hypothèse de perdre une nouvelle manche qu'il aurait remporté laissant paraître un peu de mépris ou d'indulgence face à mon ignorance, moi, administrateur de province face à lui, l'homme des "Centrales". Je gagnais là ma première victoire de ce moment en tête à tête. Elles seraient au totale bien peu nombreuse et je la savourait autant que je le pouvait. Eût-il sut ou non ce que je venais d'apprendre sur Isrino ne m'importait plus, je m'étais convaincu que ça n'était pas le cas. A tort ou à raison, cela n'importait plus désormais. Il me sourit.



III




« Cessez-donc de vous défendre. Vous luttez contre vous-même pour vous convaincre de ce que vous n'êtes pas. Vous avez donné votre vie à l'Aleucie mais vous ne restez qu'un Eurysien. Vous avez servi avec honneur l'Administration à laquelle vous appartenez. Poursuivez je vous prie. Qu'avez vous donc fait après cette rencontre avec Lwola ?
— Je suis parti pour Ny-Norja. J'ai posé quelques jours de congés dès mon retour de la rencontre et j'ai prit le premier vol interprovincial qui m'était dû de l'année. Je voulais y rencontrer un ami, un ancien étudiant qui avait fréquenté l'Université norjienne à la même époque que lui. Je le trouvais aisément dans son travail de fonctionnaire ministériel dans les beaux quartiers de la ville. En 23 années, il n'avait presque pas bougé, ni de poste, ni de bureau. J'ose espérer que sa fiche de paye à tout de même grimpé depuis. Päiviö avait effectivement connu Isrino sur les bancs de la faculté de gouvernance fédérale. Ils ne s'étaient pas particulièrement appréciés. Lui, le Kylien convaincu des bienfaits de la Fédération et l'autre, l'Etelämannais presque sauvage fervent indépendantiste. Et pourtant, tout deux tombaient d'accord sur de nombreux points. Je ne sais plus comment j'ai rencontré Päiviö. Sans doute dans le cadre d'un semestre de formation en province où il vint à Järvi. Ou bien quand j'eu a donner quelques cours à la capitale à propos des territoires reculés et préservés de la Fédération. Ce fut la d'ailleurs la première fois que je rencontrait Isrino, quelque part dans le milieu des années 90. J'avais à cet époque une réputation singulière auprès de nombreux compères. Je venais de faire admettre une directive sur la protection des dernières zones autochtones et cela avait fait grand bruit à la capitale et, provoquant un scandale politique de quelques fédéralistes, avait emporté l'adhésion populaire des provinces et puis l'accord du Congrès Fédéral. Il est de ces réussites administratives dont on se remémore souvent J'avoue que j'en ai eu les larmes aux yeux à de nombreuses reprises. Mon existence n'a pas été particulièrement gâté de nombreuses réussites mais celle-ci explique sans nulle doute une partie de ma présence ici. Ces efforts se traduisaient pas des surnoms plus ou moins affectifs que d'autres collègues Eurysiens me donnaient à Järvi tandis que des natifs ne savaient pas encore comment me juger, moi le "Central" qui venait de les défendre. »
Je ne me rendait pas tout de suite compte que je divaguait mais cela ne semblait pas le perturber. Sa petite sortie, et sans doute la plus longue de notre rencontre avait du lui semblait disproportionné. Il était rentré dans mon je l'espace d'un instant et s'était senti obliger de me recadrer en me rappelant mon rang, Adminsitrateur, et mon origine, Eurysienne. Alors en échange j'avais bien droit moi aussi à lui consommer quelques instants supplémentaires en racontant mes déboires. Je ne sais pas si cela confortait la forme d'intimité batarde qui existait.
« Päiviö m'accueillit à bras ouverts. J'avais eu quelques difficultés à le reconnaître immédiatement dans le café où nous nous étions donné rendez-vous et il me le notifia immédiatement, visiblement surpris sans que cela lui paraisse désagréable. Comme quoi, il avait peut être changé un peu avec toutes ces années. Je le rencontrait lui parce que je le savais doué dans un domaine particulier, le réseau. Il est de ces hommes qui, en dépit des âges, des vents et des marées, savent vous rappeler le passé avec nostalgie et vous inviter à poursuivre l'aventure, qu'elle soit dans une semaine ou une décennie. Il entretenait toujours un nombre ahurissant de relations avec d'anciens étudiants, d'anciens collègues, des rencontres d'un jour sur un café, des amitiés débutées mais pas trop entamées dans quelques camps de vacances. Cela relevait d'un don sans doute. Et malgré tout, malgré son génie inconditionnel pour l'humain et l'opportunité que cela pouvait représenter, il n'avait pas fait le choix de la carrière. A la tumultueuse vie mouvementée de la capitale et de ces enjeux, il avait préféré le calme de sa capitale provinciale qui l'avait vu grandir et pour qui il ne devait accomplir qu'un travail ennuyant qui lui suffisait. Il vivait davantage pour les balades sur les vieilles murailles de la ville et les cafés avec son réseau que pour son travail. Je crois que je n'ai jamais atteint le niveau de bonheur qui était et est toujours le sien. Naturellement, bien qu'il était opposé à l'aventure dans laquelle Isrino s'était aventuré, il avait su maintenir avec lui une forme de relation. Plus particulièrement les deux hommes s'étaient soustraits à leurs invectives politiques au profit d'une forme, non pas d'amitié, mais de respect mutuel dénué de jugement, sur les trajectoires suivis. Päiviö était tout aussi surpris que moi de la voie prise par leur relation mais elle était ainsi. Ils échangeaient, rarement, quelques courriers par une série d'intermédiaires qui s'était allongé au fur et à mesure des années. Il ne l'avoua pas mais il avait sans doute progressivement pris conscience, au travers de l'épistolaire qu'il lisait, de la nature des actions qui lui étaient contées. Il n'avait pour autant jamais décidé de s'arrêter. Peut-être nourrissait-il là une forme de curiosité ? Il vivait par correspondance une aventure que son esprit avait accepté à enfouir il y a bien longtemps au profit des calmes ballades sur les canaux de Ny-Norja. La correspondance passait par Ny-Norja et les bancs de l'université. Une étape surprenante mais qui selon lui s'avérait nécessaire pour effacer tout soupçon. Trop sûre d'elle-même, trop aveuglée par les évidences, il croyait que le Service ne portait pas un œil parfois méfiant, régulièrement attentif, sur ce qui se tramait sur les bancs de l'usine à fonctionnaires. C'est sans doute là la principale erreur de mon vieil ami. »
Comprenant le ton interrogateur de la fin de mon intervention, il sorti une feuille du calpin disposé sur sa droite qu'il n'avait pas ouvert depuis le début. Il ne contenait, en tout et pour tout, qu'une dizaine de pages et symbolisait à lui seul l'étendu de mon échec. Il posa, machinalement, les deux premières pages à côté du calpin sans me laisser entrevoir leur contenu. Il sorti la troisième page, remis les deux premières, ferma le calpin et la posa sous mes yeux. C'était une note administrative simple, estampillée du sceau du Service. Elle venait d'en haut, de très haut. Une simple directive qui ordonnait la suppression de toutes les informations récoltées sur Päiviö et la levée de tout soupçon. Elle ne précisait pas quels étaient ces derniers, pas plus qu'elle ne m'indiquait tout ce qu'ils avaient pu récolter. Mais il venait de me faire comprendre qu'à un moment, sans savoir quand, ils l'avaient observé et que la conclusion de leur enquête avait rétablit, bien qu'il ne sut probablement jamais qu'il était surveillé, ce fonctionnaire dans ses grades et qualité. Il reprit la feuille après ma lecture, se leva pour la première fois et l'inséra dans la broyeuse qui ne contenait volontairement aucun sac laissant les confettis de cette note se répandre sur le sol de la salle dans un bruit qui résonnait. Il attendit, débout, en silence, regardant la note se déchirer puis vint se rasseoir me faisant signe de continuer.



IV




Je poursuivit mon récit quelques minutes en lui racontant en détail, comprenant bien que sur le cas Päivien il m'était inutile de soustraire quelque parole que ce soit, le contenu de notre discussion. Je devais le voir à deux reprises en trois jours de séjour à Ny-Norja. Il m'indiqua à la fin, non sans peine et quelques formes de pressions indirectes lui faisant comprendre la folie de actions d'Isrino et les risques qu'il encourrait, le nom d'un étudiant de la faculté qui était membre de l'un de ces groupes activistes pour les droits autochtones. Le nom qu'il me donna était inhabituel. Il ne s'agissait ni du plus grand de ces comités qui dépassent rarement la douzaine d'individus ni du plus actif. Non, c'était un petit comité d'une poignée de jeunes étudiants aussi idiots qu'idéalistes, le "Comité des Étudiants Etznabistes d'Etelämanner". Plus communément appelé "Le comité Etznab" m'apprit-il. Je le saluait chaleureusement après nos discussions et prit rapidement un nouveau vol vers la capitale cette fois-ci. Celui-ci, non payé par l'Administration me couta cher et me valut un appel matrimonial d'une rigueur rare qui frôla l'incident diplomatique. Aujourd'hui encore, je ne sais comment j'ai pu le régler tant certaines crises paraissent simples en comparaison.
« Iker me trouva avant que j'eu le temps de venir à lui. Pensant me faire une chandelle, Päiviö avait cru bon de le prévenir que je voulais le voir ce qui provoqua nombre de soupçons chez lui mais qui finalement se réveilla payant. Arrivant à la faculté peu avant sa fermeture et alors que les vacances de Noël approchaient, Iker vint vers mi tout seul, au milieu d'une ruelle parallèle particulièrement haute. Sur un balcon faiblement éclairé, un homme indistinguable nous observait. Il marchait rapidement en ma direction alors que je me dirigeait vers l'Université à sa recherche, ayant rencontré auparavant quelques étudiants qui m'indiquèrent où le trouver. L'information était allé plus vite que je ne le pensais et il vint à moi, inquiet. Il ne me salua pas et s'arrêta simplement me demandant la raison de ma venue. Il le savait. Je lui avouait directement que je venais à propos d'Isrino mais que je ne travaillais pas pour le Service ni ne venait au nom de l'Administration. J'étais la en ma personne propre, parce que je le connaissait et qu'il fallait que cela cesse. Au fond, je m'attendais ici à rencontrer un jeune étudiant animé de ces valeurs, de ces idées, perdu dans une capitale qui le déteste tout autant qu'il la déteste. Au lieu de quoi, je me trouvais devant un jeune homme un peu vulgaire mais fortement instruit, quadrilingue, à la barbe néanmoins légère mais mal taillée lui donnant un faux air de laisser-aller qu'il cultivait sans aucun doute. Cela faisait parti du personnage qu'il s'était construit. Mais ses yeux trahissaient sa pensée, ils crevaient d'indignation dans les orbites. Il se sentait souillé d'étudier sur une terre qu'il répudiait et dont il voulait se séparer. Je le qualifiait initialement de militant, j'avais une toute autre personne. Je m'attendais à une réaction immature d'énervement et d'hostilité à mon égard, j'avais tort. Il prenait part, sur une base hebdomadaire, à des discussions et tables rondes de l'Université sur la Fédération. Il s'exprimait librement sur sa pensée, sur son indépendantisme sans trop se mouiller sur son activisme. Il parlementait avec son ennemi et à travers ça Isrino aussi. Je faillis éclater de rire mais il manquait naturellement d'humour, il était déjà un peu fonctionnaire. Il avait progressivement en lui adopté la même chose que son idole. Il se voulait indépendantiste il ne devenait qu'Aleucien corrompu, pervertis par les idées de la faculté qu'il fréquentait il en adoptait lui aussi us et coutumes. Perdant mon filtre et mes moyens, je lui dit en quelques mots ce que je pensais de lui. Il sourit et me répondit. "C'est pour ça qu'ils vont ont envoyé ? Vous vous êtes fatigué pour un homme qui pense à l'indépendance soit disant comme un Eurysien ? Que voulez vous au juste, notre liberté ou celle que vous vous êtes conçus comme devant être la notre ?" Je perdit mes moyens. »
En racontant cela, je sentit monter en moi un ressenti envers moi-même. J'avais su, sur le moment, que j'étais en tort. Je m'étais fait à l'idée des populations autochtones d'Etelämanner une forme d'Eden sacré inviolable que je ne pouvais concevoir autrement. En cela, Lwalo et moi étions similaires. Nous n'en restions pas moins fondamentalement opposé. Il ne soutenait pas cette cause parce qu'il était d'une autre génération et que cela le dépassait. Je ne la soutenais pas car je m'étais investi d'une mission dont je n'avais pas pris la peine de consulter les principaux intéressés. Iker reprit.
« Isrino va trop loin. Nous en sommes conscient. Il promeut une forme de lutte qui dépasse l'entendement, mais il nous est utile. Il veut, dans le fond, la même chose que moi mais nous savons tout deux que cela n'est pas atteignable. Nous savons tout deux que la majorité des nôtres ne veulent pas de ce que nous proposons. Ils en rêvent, mais ils n'en veulent pas car l'inconnu serait trop grand. De plus, nous ne sommes plus que minoritaires maintenant. Alors oui nous voulons nous faire entendre. Nous voulons avoir une voix ici comme là-bas, au Congrès comme au Parlement. Nous voulons être entendus. Non pas par des gens comme toi, mais par nous-même. » Il s'exprimait avec satisfaction.
Notre courte rencontre s'acheva sur ses mots. Il me fit signe de rentrer dans l'immeuble. Hasard des choses, j'étais passé par la bonne rue. L'homme au balcon retourna dans son appartement.



V




Finissant tout juste de raconter cela, je me fit sortir de mon récit par un nouveau bruit de briquet, une nouvelle cigarette. Sentant que la dernière partie approchait, le doute me gagna peu à peu sur le but de cet entretien. Je parlais depuis de longue minute face à un homme qui ne prenait pas de note, qui m'écoutait parler et ne posait pas de question. Il sorti alors un ordinateur du sac posé contre un coin de table duquel il avait sorti le cendrier, les cigarettes et son calpin à notre arrivée. Il m'invita cordialement à attendre. Il l'alluma puis le tourna vers moi, il en sortait une vidéo de camera issu d'un appartement que je reconnu immédiatement. C'était celui de l'immeuble. En haut à droite de l'écran, un petit compteur débuta. Il lança la vidéo. 0...1...2...
« Entrez.
— Isrino je te présente ton vieil ami.
— Je ne m'attendait pas à te voir en plein Norja, lui dis-je tout aussi surpris dans la vidéo que je l'étais en regardant cet ordinateur, le sourire désormais marqué de mon interlocuteur derrière cet écran.
— Je sais je prend des risques inconsidérés mais la fin est proche. Mais je crois que tu as déjà bien entendu le discours de ce jeune homme, en regardant Irek, je ne crois pas avoir grand chose à t'apprendre. Je sais que le Service me suit, ils savent probablement déjà où je suis et je compte bien me rendre. Ils n'ont guère apprécié que je tire sur l'un des députés au café ce matin. »
A travers la vidéo on pouvait là encore voit mon regard incrédule, ma surprise. Je ne m'en étais pas rendu compte mais sur cet écran d'ordinateur je me voyais presque vaciller à la nouvelle. Isrino n'avait jusqu'alors que saccagé quelques permanences fédérales, détruit des stands et commis deux douzaines d'actes de destruction urbains contre des symboles fédéraux à Järvi et les villes alentours. Il avait aussi entamé une importante campagne dans les zones reculées, fait coller des centaines d'affiches de son mouvement indépendantiste dont je ne sais toujours pas le nombre réel de participants. Les destructions, principalement par incendie, avaient d'abord été jugées isolées, espacées de plusieurs mois au début puis rapprochées et avaient alarmées les autorités fédérales. L'apparition des affiches dans les villages reculés puis les campagnes sur les réseaux sociaux tanskiens appelant à la liberté des populations autochtones, relayées en partie par des internautes ikamien avait amené le Service à croire à une opération de l'étranger. Puis plus tôt dans l'année, Isrino s'était révélé dans la presse papier régionale, partageant ses idées et avouant ses actions. Alors la machine infernale s'était mise en marche. En partie sous couvert des mauvaises relations avec la Loduarie et de l'intervention en Translavie, une partie des services d'écoutes dédiés au régime communiste avait été discrètement dédié vers Etelämanner. C'était alors le début de l'été et je commençait moi aussi à recevoir des notes et à comprendre ce qui se jouait. Alors ma quête de défense de ma circonscription prit un autre tour que je vous ai désormais raconté. Mais jamais, le cap de la violence humaine avait été franchi. 127...128...129...
« Tu ne savais pas ? Sampsa Rantala est arrivé à l'hôpital ce matin après qu'il se soit fait tiré dessus à deux reprises dans un café de la banlieue. C'est moi qui ai tiré, disait-il sans émotion singulière. Je sais ce que j'encoure mais je me savais déjà condamné. Non pas par la justice, mais par des gens comme toi et tous les autres Järviens qui ne peuvent pas comprendre. Jamais je n'ai pu gagner la cause populaire par mes actions. C'est une cause perdue. Alors j'ai envoyé tout ce que je savais sur Rantala à la presse ce matin. J'ai envoyé ses relations avec des groupes militants indépendantistes qu'il finançait lui-même indirectement pour justifier ses campagnes politiques opposés aux droits des minorités, j'ai partagé les fichiers audios des discussions que j'ai eu avec lui où il nous insultait, nous humiliait nous et les nôtres, j'ai aussi transmis ses dossiers de corruption permettant la destruction de deux villages autochtones avant les lois de protection au profit de grands industriels. J'aurais pu faire tout cela et m'arrêter là. Sa carrière aurait été interrompue, il aurait été naturellement poursuivi, condamné et emprisonné par la justice tanskienne. Mais cela ne me suffisait pas, ça ne me suffisait plus. Il devait payer. »
Il ne me parlait plus à moi mais il s'adressait sans doute à lui même dans une tentative de se convaincre. Dans sa voix qu'il m'étais permit de réécouter, je pouvais entendre sa haine qui ressortait. Lui, l'ancien étudiant que j'avais pu connaitre au fil des ans n'était plus qu'une âme perdue, esseulé dans une quête qu'il savait désormais perdue. Ses paroles traduisait le rejet complet de Tanska mais aussi des siens. Il ne se battait plus pour eux, il se battait pour lui-seul. 401...402...403...
« Jamais il ne m'a écouté. Il n'a toujours fait que vomir sur mon peuple. Et que faisions nous ? Rien. Absolument rien. As-tu vu des manifestations contre ce député dans les rues de Järvi ? Aucune. Nous sommes trop las, trop gras, rassasié par cet Etat fédéral qui a su nous endormir. Minoritaire sur notre propre sol, nous n'osons même plus combattre alors je me devais d'agir. Et tant pis si je n'étais pas suivi, tant pis si j'étais pour cela le seul être dévoué à cette cause. »
Il crachait presque. Il parlait sur tous les êtres qui peuplent cette province mais avant sur lui. Je ne m'étais pas seulement trompé sur sa personne, je ne l'avais jamais vraiment compris. Le député fédéral n'était qu'un élément parmi d'autre, mais il avait servit de catalyseur. Il justifiait sa violence tout autant que son échec. Il marquait un grand coup pour une cause qui ne pouvait pas vaincre. Pour la première fois en 54 ans, on avait tiré sur un élu fédéral. Avait-il seulement conscience de ce qu'il venait de faire ? Il semblait encore atteint de la jouissance de l'homme qui connait l'inacceptable, l'inavouable. La sérénité avec laquelle il avait annoncé la chose disparaissait peu à peu. Un sentiment le gagnait néanmoins, celui de l'inachevé qui n'entamait pas pour autant l'état second dans lequel il se plongeait pleinement. Les tirs n'avaient pas atteint son cœur mais il l'avait atteint au torse. Son pronostic vital était engagé et j'avais face à moi un homme qui exaltait de l'inconnu qui s'offrait à lui, de la vie ou de la mort qu'il avait eu entre les mains. Irek était aussi malaisé que moi à mes côtés. Lui non plus ne savais pas et la panique gagnait le jeune étudiant. Lui aussi avait participé à des destructions de permanence, il devait l'avouer à la police par la suite. Mais jamais, il n'avait souhaité cela. Sa lutte n'était pas révolutionnaire. En Etelämanner, la révolution était morte avec la guérilla il y a bien des décennies, ensevelis sous quelques crimes encore inavoués de la République. 869...870...871...
Alors que le décompte se poursuivait, je me rappelait de la suite de la scène. Je ne regardait plus l'écran. Prit d'une panique qui le gagnait, Irek appela la police sans qu'Isrino ne bouge. Moi, je me tâchait juste de comprendre son geste. Perdu, je maintenais la discussion car je voyais disparaître en cet homme l'humanité au fur et à mesure que les secondes passaient. Il ne parlait bientôt plus de Sampsa Rantala mais s'abandonnait à lui-même.
« Toute ma vie j'ai crevé de peur. Peur de vivre, peur de mourir, peur de la maladie, peur de la solitude. Je n'ai plus peur désormais. »
Le décompte de l'écran se poursuivait. Il se leva, laissant la vidéo tourner, la police allait arriver, ils étaient en réalité déjà en route avant l'appel.
« Tu ne comprends sans doute toujours pas la raison de ta venue ici mon cher Kjel. Tu n'avais rien de particulier à nous apprendre. Je suis néanmoins ravi de l'amitié et de l'honnêteté dont tu nous a fait part. Isrino va être condamné à la perpétuité incompressible pour le meurtre de Sampsa Rantala ainsi que ces actes. Quant à toi, tu peux partir libre de tout soupçon. Rien ne sera fait contre toi mais je tenais à te faire savoir que tes autochtones resteront protégés. Nous avons toujours à apprendre sur les financements de ces groupes. Quelques Etats étrangers dont un en particulier nous intrigue. Nous verrons ce que nous pouvons y faire. La cause indépendantiste elle, vient de mourir avec Rantala. Nous avons gagné Kjel, nous avons gagné. »
Je l'écoutait, médusé. La vidéo approchait de la fin, arrêtant Isrino, Kel et moi-même, les policiers investissaient l'appartement. 997...Un agent se rapprocha du mur 998...prit une chaise 999... puis éteint la petite caméra derrière l'horloge trônant au milieu de la salle 1000.
Je sortait, regardant Philip Røckartson debout au milieu de la pièce, les mains dans les poches. Il souriait. Drôle de journée, mauvaise journée.

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