21/02/2015
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[Icemlet - Althalj] Une Solution Gondolaise - Page 2

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La qari Sofines Berek écouta attentivement le choix des mots. Les traductions allaient bon train et il y avait une volonté claire de faire en sorte que les messages véhiculés restaient authentiques, sans aucunes déformations de biais culturels ou de langages.


Le M.L.L. partit à l'assaut à son tour.
Patiente Anihilé-Sangwa n'était pas venue et Sofines soupira intérieurement sans rien n'en laisser paraître aux invités et représentants.
La parole d'une femme telle que Patiente aurait assurément eu un poids important dans ce monde de généraux et d'hommes de pouvoir, car l'alternance et la complémentarité des modes de pensées, des méthodes et mécanismes d'influence, permettaient à des discussions d'une telle importance de souffler, mais aussi prendre un recul essentiel à la compréhension et l'empathie générale.
Mohammed Gadiel joua la carte ethnique d'une certaine manière.

L'heure était encore à l'écoute.

Et le Colonel Mwamba Etoto se prit les pieds légèrement dans le tapis de l'indépendance déroulé prestement devant ses bottes lustrée. Sofines voulut se humecter les lèvres et se ravisa, car ce signe pouvait être interprété différemment. Un point intéressant fut soulevé néanmoins et Yahnick Sangaré confirma de même qu'il fallait aborder le sujet.

Continuons d'écouter, des observateurs souhaitaient émettre un avis ou une observation. L'Empire du Nord, proche géographiquement de la région Pitsi, sembla soutenir le dialogue, précisant que l'Empire du Nord aidait grandement les populations Gondolaises réfugiées, passant ses frontières en Afarée.
Et... l'assaut du M.L.L. fit mouche et l'Empire du Nord rentra dans le jeu de la possibilité d'une dislocation démocratique du Gondo.

L'air sembla se charger électriquement d'un coup après la dernière phrase du représentant Impériale.
Sofines sonda rapidement les visages. Certains ne souriaient pas, mais les yeux approuvaient grandement. D'autres masquaient un rictus certains. Sofines regarda sans s'y attarder le visage de l'Empereur...

Jean-Claude Mbihan intervient immédiatement. Le couperet tomba, mais une lumière se fit au fond du tunnel... "concession"... "réforme"... les mots et formules étaient claires...

Sofines sauta sur l'occasion.




Les différents partis se sont prononcés dans un premier temps et ont précisé dans une certaine mesure leurs attentes.

Nous disposons de plusieurs trajectoires permettant d'aborder plus amplement les discussions à suivre.

Il semble y avoir unanimité sur le sujet de la nécessité d'une démocratie perçue comme réelle et entière et je salue le courage de la mention de compromis, d'avancer vers l'acceptation d'une solution écartant les velléités armées.

La "confiance" a été rompue et il est nécessaire de trouver un terrain d'entente quant à l'exigence de la modalité démocratique.
Nous comprenons que le souhait d'une scission, un divorce est un réflexe lorsque les uns ne se retrouvent plus en les autres et que les différents sont tels qu'ils oblitèrent toute réconciliation.
Mais ce réflexe est le recours après toutes possibilités, opportunités de réforme, de re-convergence et je souhaite souligner que, et j'ose le supposer, les peuples du Gondo doivent, en ce moment même, s'attendre à une solution Gondolaise, pour l'ensemble du Gondo en même temps que pour soi et les communautés respectives, ou du moins à une négociation menant à la réconciliation avant la terrible séparation.


Les mots, qui suivirent, pesèrent un peu plus, sans pour autant véhiculer un ton emprunt de maternalisme, d'autorité ou de condescendance. Le rôle d'arbitrage suivait un objectif de permettre une compréhension optimale des solutions à portée de main.



Si toutes les résolutions étaient ainsi faites de divorces, avant l'essentielle communication, discussion et négociation bi ou multilatérale, la modalité démocratique attendue par l'ensemble des parties, ici présentes, ne serait qu'un miroir aux alouettes.

Je vous enjoins de réfléchir à la possibilité de la solution Gondolaise commune et non individualiste, afin de satisfaire vos attentes d'une structure républicaine et démocratique juste et réelle.

Monsieur le Ministre Mbihan,
Je me tourne une fois de plus vers vous, sans volonté d'accabler, j'espère que vous en conviendrez.

Pouvez-vous repréciser à toutes et tous, le rôle et prérogatives de la Djéroua et les mécanismes de sa place dans la structure républicaine et démocratique, s'il vous plaît ?
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"Les revendications des différentes ethnies du Gondo ne sont pas obligatoirement soumises à un impératif de séparation," fit remarquer le représentant des brigades internationales. Il toussota, acquiesçant à l'adresse des représentants gondolais avant de reprendre. "Mes excuses, jusque là il aurait été déplacé d'intervenir mais nous adressons ici un sujet sur lequel les brigadiers que je représente peuvent peut-être ajouter des éléments utiles.

Le Gondo, donc, n'a pas à être dissous pour apporter satisfaction aux différents mouvements ethniques. La vérité c'est que si la République reste telle qu'elle est actuellement cette solution sera envisagée par des pans de la population, oui. Mais si elle est réformée pour donner plus d'autonomies aux populations civiles... N'oublions pas que ces frontières sont celle d'une ancienne colonie qui ne respectait par les frontières traditionnelles, qui existe encore dans l'histoire, dans la culture, dans le passif.

Donc si le Gondo peut devenir une communauté nationale forte et unie, il doit le faire en se basant sur des modèles de pays aux caractéristiques similaires aux siennes. Son modèle ultra-présidentiel se rapproche d’États culturellement homogènes - et à la démocratie généralement déficiente, qui plus est. Donc c'est intenable. D'ailleurs ça ne tient pas.

Beaucoup des camarades que l'on accueille au sein des brigades ne sont pas issus des ethnies majoritaires. Certains nous rejoignent parce qu'ils croient au socialisme, d'accord. Mais beaucoup nous rejoignent aussi parce qu'on représente une solution à leurs problèmes, des plus immédiats aux plus existentiels : l'Armée Démocratique a organisée ses écoles, la redistribution des terres, travaille pour instaurer de la représentation salariale et des conditions de vie plus justes, pour former les chômeurs et développer de nouvelles économies. Surtout, nous travaillons à ce que chacun puisse participer à la vie publique de sa communauté. C'est ça qui nous attire des gens qui se moquent bien de savoir si leur camarade est du même village, de la même ethnie. Des gens qui veulent pouvoir manger à leur faim, promettre un avenir à leur enfant, s'assurer que leurs terres ne soient pas spoliées par une administration lointaine sur laquelle ils n'ont aucun pouvoir. Des gens qui ne veulent pas la révolution mais ne voit pas d'autre solution pour obtenir de bonnes conditions, parce que la République ne leur en offre pas.

Il faut un nouveau système qui répond à leurs problèmes et qui les laisse participer, et participer plus qu'en élisant le prochain type qui trônera au sommet de la montagne de corruption, sauf votre respect monsieur le ministre, je parle ici du point de vu des camarades gondolais.

C'est un constat que toutes les oppositions reconnaissent plus ou moins. Et pas besoin de faire de fausses pudeurs, ces oppositions occupent des morceaux entiers du territoire : la République est un État qui s'approche dangereusement de la faillite si ce n'est pour le soutien de ses anciens colons clovaniens. Maintenant il faut faire son constat d'échec et établir de vraies propositions, une vraie solution. Parce que c'est ça et tout ces braves gens qui ont le courage de prendre les armes pour obtenir ce dont leur communauté à besoin continueront à le faire, faute d'alternative.
"
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Note : avant de lire ce passage sur la Djéroua et les biais qui y seront présentés, le lecteur est invité à se faire un avis neutre en prenant connaissance de la partie sur la Djéroua de cet article (section politique et institutions - institutions politiques - pouvoir législatif - Djéroua)

La Qari pouvait se justifier autant qu'elle le voulait, Jean-Claude Mbihan ne parvenait pas à ne pas se sentir pris à parti dans cette rencontre où toutes les attaques semblaient dirigées contre lui, entre l'interrogatoire de Sofines Berek et les interventions passives-agressives, teintées de faux respect, des rebelles comme des observateurs. Mais derrière sa personne, il savait, c'était l'ombre du Président qui planait et qui était visée avant tout. Il en était passablement agacé, et un coup d’œil vers ses collaborateurs vint lui confirmé que le camp républicain se sentait mal à l'aise, comme acculé. Son sourire d’acquiescement à la Présidente Berek tenait beaucoup plus de la grimace. Il était en effet peu à l’aise avec la question posée. Déjà parce qu’il avait une formation financière et commerciale, pas politique, parce qu’il était un ancien chef d’entreprise et fils d’une riche famille de propriétaires : on réussit comme on peut, au Gondo. Il avait quand même l’expérience politique suffisante pour répondre à des questions simples, mais à son parcours léger en sciences politiques s’ajoutait la nature de la question. Il était très dur de justifier l’existence la Djéroua, et ceux qui se prêtaient à cet exercice difficile avaient toujours l’art de la langue de bois. Même la Constitution ne savait pas expliquer ce que cette « Très-Haute Chambre » foutait là. Juridiquement parlant en tout cas. La vraie raison était connue de tous : au cours de la succession chaotiques des régimes gondolais, il fallait bien contenter toute l’élite du pays ; la Djéroua était en fait l’incarnation de toutes les ères passées, de leurs errements, de leurs crimes.
Certainement, Mbihan n’allait pas dire ça. Au fond de lui, il s’en doutait : d’autres s’en chargeraient bien à sa place.

Il choisit de passer sur l'intervention du volontaire international, et de revenir à la question malgré tout.

« Merci pour cette intervention monsieur le "brigadier". La "montagne de corruption" est un gouvernement légitime et démocratique, qui œuvre depuis de nombreuses années à construire une autoroute entre le Nord et le Sud pour réduire le sentiment d'éloignement, construction que vous avez interrompus avec votre guerre. Allez, je serais bon prince et je prendrait ce qu'il y a d'intéressant dans votre déclaration : le malaise démocratique. Je le dis, le gouvernement n'est absolument pas fermé à une nouvelle réforme constitutionnelle. Bon, revenons à nos moutons. Vous vouliez, madame la Présidente, que je vous explique le rôle de la Djéroua. Soit. Mesdames, messieurs , la Djéroua est la plus haute chambre de notre parlement. Elle doit son nom à l’assemblée des anciens du Royaume Kwandaoui qui régnait sur le Gondo il y a quelques temps. Elle rassemble des membres nommés à vie dont la charge se transmet à la descendance. Ce genre de pratique est pour nous, et je crois pour le peuple gondolais, une attache importante à nos traditions. D'autant que son pouvoir n'est pas très grand : elle ne peut pas légiférer, ni amender la loi, mais seulement approuver ou rejeter les propositions de l'Assemblée Nationale. Néanmoins, ce sont les djérouites qui ont conçu notre Constitution, ils sont donc un rouage centrale de notre démocratie, à la fois tournée vers le progrès et solidement ancrée dans ses traditions, pour que le Gondo s'élève tout en restant le Gondo, et afin de contenter tout le peuple, de la campagne comme des villes. Car je voudrais rappeler une chose : les personnes qui soutiennent vos factions sont, vous les savez, des gens déshérités des campagnes. Dans les villes, une large majorité silencieuse nous soutient ! »

Le Général Sangaré demanda la parole pour répondre au ministre et porter secours à son camarade des brigades internationales. Il avait soigneusement noté toutes les attaques de Mbihan sur une petite feuille blanche à l'aide d'un crayon de bois.

« Monsieur le ministre, il y a plusieurs choses contestables dans vos propos. Je vais y répondre point par point. D'abord, l'autoroute : il est de notoriété publique que les travaux étaient à l'arrêt depuis bien longtemps, et du fait de quoi ? Du fait de la corruption, monsieur ! De la corruption qui existe au moins dans les échelons les plus bas de l'administration et contre laquelle vous ne faites rien ! Ensuite, vous dites que la Djéroua a peu de pouvoirs législatif. C'est faux ! Elle a le pouvoir le plus important : celui de paralyser le Parlement tout-entier. Sans compter que ce même Parlement comporte aussi une chambre présidentielle ! » - Sanagré parlait avec ferveur, passion, dégageant momentanément cette énergie des grands orateurs, bondissant presque de son siège. L'auditoire était suspendu à ses lèvres, malgré l'aspect rasoir du sujet qu'il abordait. Cette séquence engagée terminée, il reprit son air calme de négociateur. - « Alors, puisque ce malaise démocratique existe, vous l'avez reconnus, il faudra beaucoup plus qu'une simple réforme constitutionnelle. Beaucoup plus. Car le peuple, et c'est là mon dernier point, ne vous est pas silencieusement acquis. Il n'a pas de vie démocratique à sa portée, c'est tout. Et une vie démocratique, l'AD en propose une. Mais rassurez-vous madame Berek, je ne rejette pas la "Solution Gondolaise". Je suis d'accord, il serait préférable que nous trouvions un terrain d'entente pour réformer ce pays. »

Ces derniers propos firent froncer quelques paires de sourcils dans les rangs des commun(al)istes. Sangaré avait-il dit quelque chose qui dérogeait de la ligne discutée préalablement ? Ou jouait-il un rôle ?
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Après avoir longuement écouté les platitudes des parties présentes, dont la teneur avait légèrement été embrouillée par la noueuse logorrhée du général de brigade, l'Empereur Pétroléon V tint à prendre la parole en désespoir de cause. Il était manifeste que sous la bannière d'une discussion internationale, les représentants réunis en ces lieux n'étaient que les tristes acteurs d'un dialogue de sourds. Cependant, il était peut-être nécessaire d'éclaircir quelques points afin de dissiper les sombres accusations portées à l'égard de la Clovanie et de son allié gondolais. Qui ne dit mot consent, tel était le coûteux adage qui poussait l'Empereur a se justifier éternellement auprès de ceux dont il n'espérait pas plus qu'un simple regard d'assentiment.

"Il Nous apparaît impératif de prendre la défense de notre cher allié Monsieur Mbihan, lequel semble être attaqué de toutes parts par des hommes dont la légitimité manque, sinon de reconnaissance, du moins du mérite normalement exigé pour l'exercice du pouvoir et de la diplomatie. La plupart des personnes qui ont pris la parole ne sont ici qu'en vertu de l'élection tribale opérée par les instincts guerriers de leurs subordonnés - ce que l'on désigne généralement sous le nom de loi du plus fort - ou par l'entremise d'une puissance étrangère soudainement éprise d'une passion d'ingérence.
Nous mentionnions ici le brigadier qui a confusément pris à parti la République Démocratique Libre, dans un discours aussi opaque que les motivations de ses troupes. Il Nous a toutefois semblé déceler quelques offensives à l'endroit du gouvernement que Nous représentons quant à l'horizon de nos volontés en terre gondolaise - volontés pourtant totalement transparentes pour celui qui prendrait la peine de poser un pied au Gondo ou d'ouvrir sa raison naturelle à Nos discours. Premièrement, la Clovanie n'a jamais colonisé le Gondo par le passé, ni aucun pays d'Afarée. Ce bref rappel historique peut relever d'une évidence abyssale pour ceux qui se sont réunis en ces lieux en connaissance de la situation dont ils se prétendent les défenseurs, et Nous avouons ressentir une lourde gêne à l'idée de devoir rappeler ce fait élémentaire dans un tel cadre. Un simple détour dans un livre d'histoire vous aurait épargné cet aride voyage. Toutes choses égales par ailleurs, les volontaires internationaux n'ont rien à faire au Gondo, et leur présence relève au mieux d'une ingérence déplacée, au pire des sombres velléités coloniales dont ils ne cessent de nous accuser. Nous rappelons que la Clovanie et la République gondolaise sont deux États alliés, et que la Clovanie peut justifier sa présence en Afarée par le consentement exprès du Président Flavier-Bolwou, ainsi que de toute son administration, sans mentionner le consentement du peuple lui-même qui a vu ses conditions d'existence largement améliorées depuis le début de l'Opération Chrysope.
Que les choses soient claires : Nous sommes favorable à une "solution gondolaise", comme votre fastidieux idiome aime à désigner ce que Nous avons entamé avant tout le monde - peut-être que l'invention de cette curieuse formule vous insuffle le sentiment d'avoir fondé quelque chose, ou d'oublier que les mots ne respirent que le néant lorsqu'ils ne sont pas suivis d'actes. La Clovanie est le premier pays à avoir voulu prêter main forte à l'État gondolais, et les forces qui se sont rajoutées à la situation n'ont eu pour but que de perturber Nos volontés de paix, comme toute vertu est irrémédiablement suspendue à son versant négatif. Croyez-vous que Nous n'avons pas examiné les revendications des ethno-séparatistes Likras, Kwandaoui, ou Pitsis ? Croyez-vous que Nous ne sommes pas familier du bréviaire communiste prêché par le Grand Inquisiteur Sangaré ? Nous savons ce que veulent ces hordes barbares, et leur accorder l'objet de leurs désirs serait accepter la défaite du bon sens et de la paix internationale. Accorder un territoire aux ethno-séparatistes reviendrait à instituer des États fondés sur le simple critère de la race et gouvernés de manière autocratique par des chefs primaires, dans un climat politique instable, sujet à toutes les formes de coup d'État et d'ingérence étrangère.
Le Gondo doit s'unir, il s'agit pour lui du seul moyen d'exister dans la concorde et la stabilité. Un régime fédéral ne peut que rebuter un Empereur bercé par la conviction qu'un royaume totalement unifié constitue le seul mode viable de gouvernement, mais Nous pourrions accepter ce compromis. Or, les parties adverses seront toujours opposées à la subordination de leurs territoires par la République. La seule force qui les motive est leur puissant désir de pouvoir. Par conséquent, ils ne pourront ni accepter de voir leur puissance soumise à celle du Président, ni consentir à la possibilité qu'ils soient destitués à la fin d'un mandat ou en cas de mauvaise politique, ni tendre volontairement à l'unité du Gondo.
Enfin, Nous comprenons pleinement que le vecteur culturel puisse être le motif d'une nouvelle esquisse des frontières gondolaises. Seule la culture peut unir un peuple et lui insuffler un esprit de fraternité. Mais, encore une fois, les ethno-séparatistes se basent sur leur ethnie pour justifier leurs expansions territoriales, dans un territoire si petit que le métissage local ne peut être l'affaire que d'une ou deux générations. Faudra-t-il alors fonder de nouveaux États pour les métisses likra-kwandaouis, ou pour les pitsi-likras ? Chacun sait que seuls l'union politique et le contrat social peuvent assurer à l'État une pérennité séculaire.
Quant aux communistes, ils prouvent par leurs violentes conquêtes territoriales qu'ils ne veulent pas du tout s'astreindre à un espace donné pour y fonder leur État, mais bien accroître toujours plus leur zone de pouvoir, et à terme convertir tout le Gondo à leur idéologie totalitaire."


Ayant ainsi parlé, Son Excellence Impériale Pétroléon V se replaça en position d'écoute, s'imaginant non sans tort qu'il avait tout dit et qu'il n'aurait plus besoin de faire voir la clarté de la situation aux esprits embrumés à qui il s'adressait.
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Mohammed Gadiel, du MLL, s'amusait de voir monter cette violence, et de lire l'exaspération sur le visage de la Présidente Berek. Il sentait qu'un rien pouvait faire capoter définitivement cette réunion. Allait-il être ce rien ? Non, non. En jouant finement, il y avait sûrement moyen d'en tirer quelque chose. Sciemment ou non, le brigadier communaliste avait ramené le clivage insoluble des camps qui ne voulaient pas faire de concessions. L'Empereur avait suivi la veine, revenant sur le lest lâché à demi-mot de Mbihan, et se prenant même à parler au nom d'un pays qui n'était pas sien ("Nous pourrions accepter ce compromis"). Le MLL avait tout intérêt à rééquilibrer la discussion sur son centre précédent, c'est-à-dire où Mbihan était acculé, sous pression, et acceptait de revenir sur des choses qu'il aurait défendu bec et ongles quelques heures auparavant.

« Je crois que tous ces débats qui visent à charger les autres de tous les vices possibles ont montré leur limite : c'est ça qui pousse à la guerre. Or nous sommes ici pour une sortie de crise. Donc soit nous discutons de solutions, soit nous discutons d'un cessez-le-feu qui serait suivi d'un processus de paix, je sais pas... Ou enfin, dernière option : nous retournons nous tirer dessus. Moi ça me va : je l'ai dit, le MLL a les moyens militaires de l'emporter sur le terrain. Monsieur Mbihan a répondu à vos questions, madame la Présidente, il a aussi dit être prêt à des concessions... Alors, madame, ou allons-nous à présent ? Que faisons-nous ? »
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Sofines Berek écoutait attentivement, mais regardait surtout les sourires masqués sur les visages de ces représentants dont les agendas différaient... grandement.
Tout le monde, presque, avait exprimé sa position.
Une solution se dessinait à travers les directions exprimées en introduction et par la suite derrière les piques, le passif agressif ou un franc parler.
Sofines ne laissa rien paraître de sa crispation lorsque l'Empereur insulta les Tamurt n Althalj, devant la Qari Ijja Shenna même qui resta de marbre, impassible dans une situation qu'elle connaissait que trop bien. La seule présence de la Qari elle même au sein de cette assemblée n'était nullement pour faire de l'ombre à la qari Sofines Berek, mais en balancier face à la posture diplomatique et à la stature d'un dirigeant d'une nation puissante d'Eurysie, sur le sol Althaljir et sous cette immense tente de la Khaïma.

Un servant, tout habillé de blanc, reservit du thé à la Qari lorsque l'Empereur se gargarisa de son action légitime en Afarée. Le servant, toujours aux côtés de la Qari, la connaissait que trop bien et de par son action, révéla indirectement l'inconfort de la situation. La Qari lui fit un signe de la main en remerciement, le visage impassible.

Sofines se mordit la langue pour ne pas grincer des dents et paraître destabilisée.



Une solution facile n'existe pas. S'accorder, mettre en place un consensus, un plan commun ne se règle pas en quelques heures de discussions. Ce processus, entrepris des suites d'une accélération des désaccords et des violences internes au Gondo, peut néanmoins donner une direction, un axe de convergence vers la paix, vers une stabilité Gondolaise essentielle.

Le terme de légitimité est souvent employé et je tiens à préciser que la seule présence des invités Gondolais, de ce jour, laisse à penser à une acceptation tacite de la division Gondolaise et une discussion entre représentants, quelles que soient leurs désignations respectives, par la force, par la force des choses, par la force d'un régime républicain, par la force d'une volonté démocratique.

Le clivage Gondolais est politique, économique, social, ethnique et historique toutefois, à travers les sous entendus, les invectives ou les certitudes... Sofines passa son regard vers le sourire peut être narquois de Mohammed Gadiel... les peuples Gondolais peuvent recouvrer une union nationale, de convictions, de fierté et de coeur.

La corruption est un mal qui ne peut être endiguée sans une structure politique adaptée.
Le terme "réforme" semble aussi accepté et j'entends que l'arrêt des combats est une priorité commune afin d'épargner les vies de vos concitoyens et nos consoeurs et confrères Gondolais.

La couverture sera tirée de toutes parts, mais la primauté d'une solution nous incombe, représentants ou acteurs de la paix durable et juste pour la nation Gondolaise.
Personne n'est dupe, les discussions doivent se poursuivre, non pour vanter la supériorité de l'opinion ou de la structure en place ou envisagée. Les discussions doivent se poursuivre avec un égard essentiel à l'inclusion autant que puisse se faire des attentes de la régionalité et de la raison.

Je remercie le représentant et ministre de l'Intérieur et des Armées de la RDLG Jean-Claude Mbihan pour sa patience face à des attentes tournées vers une réforme du système et structure politique de la République. Comme signifié précédemment, la RDLG est au centre, littéralement et figurativement, de la solution à ce conflit interne. Il est indéniable que les "efforts" ne sont pas vôtres, seuls, et les représentants ici présents ne peuvent exiger sans consentir à un compromis raisonné et alignée aux intérêts de la nation Gondolaise dans son intégralité.


Sofines fit une pause avant de reprendre.


Il est nécessaire de sonder l'évidence et vous pourrez ainsi parler à votre tour, partis Gondolais uniquement,

Accepteriez-vous une cessation des combats durable dans le cadre suivant ?
  • Les partis Gondolais, ici présents, s'engagent à travailler ensemble diligemment afin de trouver et mettre en place une solution commune orientant vers une paix, stabilité et unité durable des peuples Gondolais.
  • Les partis Gondolais, ici présents, s'engagent vers la voie de la convergence et du compromis raisonné afin de trouver et mettre en place une solution commune orientant vers une paix, stabilité et unité durable des peuples Gondolais.
  • Les partis Gondolais, ici présents, sont responsables de l'engagement de la cessation des combats durable, des forces engagées, régulières et irrégulières respectives à leurs influences et contrôles régionales.
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Il semblait évident pour tous les intervenants que la meilleure stratégie était d'attendre que les autres se soient exprimés pour avoir toutes les cartes en main avant de donner sa réponse à la Qari. Un peu comme on "check" au Poker, et qu'on laisse ses adversaire miser avant soi. Le seul qui souhaitait profiter de ce battement silencieux, mêlé à un jeu de regards ("qui c'est qui parlera en premier ?"), était le colonel Etoto. Saisissant un peu naïvement sa chance de donner le ton dans ces discussions, il laissa filer quelques secondes avant de prendre la parole.

" Messieurs, je... - dames, pardon, je pense que la présence du MILP à cette réunion prouve de sa bonne volonté à travailler avec ses adversaires, heu..., dans l'intérêt du Gondo - enfin je veux dire de tous les gens qui habitent au Gondo. On est venu gentiment, voir les fonctionnaires de Sainte-Loublance qui nous ont massacré par le passé, alors que pourtant on a plus de compte à leur rendre ! Ils sont partis de notre pays. C'est les communistes qui y sont maintenant. Mais les pitsi qui veulent la liberté nous obéissent, bien sûr. À qui d'autre ? Pour ce qui est de votre deuxième question, oui, nous sommes prêts à discuter avec les autres... groupes présents ici, pour la paix, tout ça... Mais à terme, il faut une vraie reconnaissance des pitsi sur leur terres, leur droit à l'autodétermination. C'est le minimum, on peut pas faire un compromis où on l'enlève. "

Il avait proclamé ce dernier mot, "autodétermination", comme un slogan percutant, son visage désormais illuminé de la fierté d'avoir su retomber sur ses pattes. Il en était presque soulagé. Cette intervention l'avait tellement tendu qu'il n'avait même pas fait attention à ses compatriotes et n'avait pas remarqué qu'aucun d'entre eux ne l'écoutait. Aux autres tables, on préparait les réponses qui allaient suivre. Après concertation à voix basse avec le camarade Moke et le colonel Bafetou, Sangaré sembla considérer que l'AD devait se jeter à l'eau.

" Madame la présidente, je vais répondre simplement à vos trois questions. D'abord à la dernière : je réponds de mes hommes. L'AD n'est pas une bouillie de combattants aux aspirations diverse, mais bien une armée organisée qui poursuit un seul but, celui de la vraie démocratie. Il en va de même pour les gondolais que pour les étrangers qui nous ont rejoint, par conviction personnelle, des quatre coins de la Terre. Ensuite, votre première question. L'AD n'aime pas faire couler le sang. L'AD a avant tout une vision politique. J'ai pris les armes par nécessité, et j'ai conduit ce mouvement parce que c'est mon métier, que je sais faire la guerre et la mettre au service de la paix. Mais l'AD, c'est aussi des aides aux populations, une agriculture relancée, la fin du chômage, le retour des écoles dans la brousse, des hôpitaux ou des médecins. L'AD, c'est donc évidemment la volonté de trouver une volonté pacifique à la crise. Nous allons travailler avec le gouvernement s'il le faut. Je m'engage à ce que l'AD fasse des compromis. Mais, malheureusement peut-être pour la tenue de cette réunion, il y a un compromis que nous ferons pas, c'est celui de la IVe République gondolaise, ou de la IIIe, ou du PND, ou de tout autre chose qui émane de cette même vision politique corrompue de Sainte-Loublance. Maintenant, voilà la question qu'il faut se poser : est-ce que le gouvernement de monsieur Mbihan acceptera de laisser la place ?"

Pendant que Sangaré parlait, le colonel Bafetou, son bras-droit, s'était levé en direction de la délégation clovanienne. Il s'adressa à l'Empereur de sorte que personne d'autre que lui ou ses gens ne pouvaient l'entendre.

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Le silence revint, tandis que Bafetou se rasseyait sous le regard suspicieux de Marc Moke. Et à ce moment, les deux parties restantes (MLL et républicains) devaient à nouveau la jouer stratégiquement. Le gouvernement était invectivé. Il devait réagir au plus vite. En même temps, la délégation de RDLG avait pour stratégie de parler en dernier, afin de n'avoir pas à se dédire s'il sentait le compromis impossible. "Mais, se disait Mbihan, si Gadiel parle maintenant, il va m'empêcher de répondre à ce qui à été dit, et je redeviendrais la cible à abattre. Quand tous se seront tournés contre moi, ils pourront me reprocher d'avoir été le seul à vouloir la guerre". Il jeta un œil à la table likra : Gadiel avait fini de consulter ses camarades et s'apprêtait à prendre la parole. Il fallait agir vite. Mbihan toussa bruyamment pour occuper l'espace sonore et lui couper l'herbe sous le pied. Puis il commença à parler.

" Je crois qu'exiger notre départ d'abord et avant tout est contraire à la ligne rouge que nous ne franchirons jamais : abandonner la démocratie. Vous prétendez défendre la vraie, et vous demandez à ceux que le peuple a élu, il y a 6 mois à peine, de quitter le pouvoir ? Étonnant. Édifiant. Si les institution de la IIIe et de la IVe République vous ont déçu, nous sommes prêt à travailler avec vous pour la réformer. Mais à la fin, c'est le peuple qui décide. "

Voyant que le ministre était à sec, et parce que c'était lui qui aurait normalement dû prendre la parole comme ils l'avaient convenu, le Général Terry enchaîna. Mbihan, lui, souffla de fatigue et s'affala dans son siège.

" Je vais répondre plus directement aux questions posées par la Présidente. Déjà, l'ARL est une armée professionnelle, sous son propre contrôle, ça tombe sous le sens. L'Opération Chrysope menée en concertation avec les forces armées clovaniennes se fait avec notre aval, autrement dit elle ne se fera pas sans notre aval. Ensuite, la RDLG est prête à travailler en échange d'une cessation définitive des combats, ce qui signifie pour nous plus de factions armées. Les groupes factieux doivent rendre les armes, nous l'avons déjà dit. Nous consentons en revanche à ce qu'ils ne soient pas dissous et qu'ils prennent part à des négociations, je dirais en tant que formations politiques. Et dans le cadre de ces négociations, la RDLG fera des compromis. "

Suite à ces déclarations, plusieurs sourcils se levèrent, mais la Qari donna la parole au MLL, seul groupe à n'avoir pas encore répondu aux trois questions. Celui-ci se trouvait dans une posture très avantageuse du point de vue des discussions, puisque le gouvernement avait dévoilé sa réponse plus tôt que prévu ; et en même temps désavantageuse du point de vue de son image : en effet, si la réunion venait à capoter suite à son intervention, on imputerait au MLL le choix de la guerre.

" Monsieur le ministre nous demande purement et simplement de disparaître en guise de concession. Je pourrais vous dire que le MLL n'est pas prêt à franchir ce pas, à laisser les armes pour faire de la politique. Mais c'est faux. Nous l'avons déjà fait, nous avons, dès l'origine été un parti politique, sans branche armée. Et où cela nous a-t-il mené ? Le MLL a été interdit, et Mme Anihilé-Sangwa, notre camarade, a été pourchassée en tant qu'opposante politique. Seulement à ce moment nous avons pris les armes, pour défendre notre liberté. Je ne souhaite pas que ma prise de parole mette un terme à ces négociations, mais qu'est-ce qui nous prouve que monsieur Flavier-Bolwou ne recommencera pas ? Que sans armes, il nous écoutera ? En l'état des pourparlers, le MLL ne peut pas répondre par l'affirmative à la deuxième question. Nous sommes sinon disposé à négocier dans le cadre d'une fin définitive des combats, et tous les mouvements fédérés du MLL suivront la directive pour répondre aux deux autres. "

Le MIPL, le gouvernement et l'AD avaient tous, malgré leurs mises en garde, répondu "oui", "oui" et "oui". Le MLL répondait "oui", "non" et "oui". C'était reparti pour un tour.
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Les discussions s'éternisèrent. Un blocage évident fut mis en exergue par la Présidente Berek : les rebelles voulaient comme garantie à une fin des combat la certitude que le PND relâcherait son emprise sur le système électoral, ce que Mbihan n'était pas prêt à accepter. On tenta de mettre en place des compromis, mais rien ne pouvait dépasser cette mésentente originelle : c'était Flavier-Bowou ou la démocratie. On se décida finalement à se quitter, en signant un papier intitulé « Accords d'Icemlet pour une résolution gondolaise de la guerre civile ». Voici ce qu'il contenait :

Accords d'Icemlet
pour une résolution gondolaise de la guerre civile

Les autorités de la République Démocratique Libre du Gondo, le commandement militaire de l'Armée Démocratique du Gondo, le Bureau Fédéral du Mouvement de Libération Likra et l'État-Major du Mouvement Indépendantiste Pitsi - Liberté, se sont rencontrés le 16 septembre 2011 (nan?)sous la médiation des Tarmut n Althalj, et ont convenu ensemble :

  • Que la guerre civile au Gondo n'était pas souhaitable et qu'il fallait prioritairement y mettre un terme

  • Que les combats armés seraient interrompus jusqu'à ce qu'une solution gondolaise au conflit soit trouvée

  • Que les parties prenantes à la conférence tâcheraient de définir ensemble les contours d'une paix gondolaise

  • Que l'exercice du pouvoir par la RDLG s'engagerait à être celui d'un État de Droit

  • Que toutes les personnes présentes à cette conférence et condamnés par la République Démocratique Libre du Gondo obtiendraient la remise temporaire de leur peine, remise devenant intégrale en cas de signature d'un traité de paix définitif
Signature :
J.C.Mbihan
M.Gadiel
Y.Sangaré
M.Etoto

Les responsables de la République Impériale Pétroléonienne (Clovanie), de la République Sérénissime Fortunéenne, de l'Empire Démocratique et Parlementaire du Nord et du Forum de Coopération de l'Afarée du Nord (FCAN) approuvent l'engagement pris par les parties gondolaises.

Et voilà, tout et rien n'était dit. Ce document ne donnait aucun cap aux négociations à venir, ce qui allait finir par poser problème. La clause n°4, en particulier, semblait là pour permettre aux combats de reprendre.

Plusieurs autres réunions eurent lieu, en Althalj et en République Fortunéenne. Mais aucun autre accord ne sortit. Pendant trois ans, les mouvements se tinrent calmes. Les populations bénéficiaient de ce temps de paix bienvenu, et les opinions dans chacun des camps redevenaient optimistes. Togubele fut reconstruite, l'AD institutionnalisa son système, et les troupes clovaniennes fortifièrent leurs positions. Puis soudainement, tout se détériora. L'Histoire seule jugera des causes qui ont poussé tous les camps à mettre fin à la trêve - qui de toute façon n'était pas durable. Nous, nous ne pouvons qu'en constater le résultat.
Le 10 août 2014, le Président Flavier-Bolwou signait un décret révoquant le mandat de César Nwegba, maire d'un village de l'Est "incomplètement" opposé au MLL. Le 11, Mohammed Gadiel dénonçait la verticale du pouvoir présidentielle. Le 13, une bombe explosait devant la préfecture de Loudoumsina-Ké. Dans son message de revendication, le MLL qualifiait les Accords d'Icemlet de "caducs". Il ne fallut qu'une semaine de plus pour que les combats reprennent sur tous les fronts.
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