Posté le : 22 oct. 2025 à 21:36:20
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Lundi 20 novembre 2017
Le travail, la question hasparnaise du moment
Lana, uneko Hasparneko auzia
Fondé dans la seconde moitié du 19e siècle par du socialisme issu des mouvances chrétiennes (ou modérées) par l’intermédiaire de lois de protection des femmes et des enfants, il faudra attendre plus d’un siècle pour qu’il prenne son envol. Retour sur l’histoire du droit du travail hasparnais et sur la future réforme, ses soutiens et ses oppositions plus ou moins franches.
Histoire du droit social hasparnais
La question d’accorder aux travailleurs des droits qui sortent du cadre ordinaire des contractants n’a pas reçu une réponse unanime en fonction des siècles. Celle-ci a été maintes fois modifiée au cours des décennies.
Aux fondations de la République, du milieu du 18e siècle à la fin de celui-ci, il n’existait pas réellement de contrat de travail. L’essentiel du travail réalisé était à titre individuel. Les arrivants d’Eurysie et de partout dans le monde s’employaient davantage à acheter des esclaves qu’à s’attacher les services d’une main d’œuvre plus qualifiée et de facto plus chère. Le travail des esclaves n’était pas encadré légalement. Cependant, une loi de 1775 vient édicter les droits (peu nombreux) et les obligations de l’homme réduit en esclavage mais aussi son marché et plus généralement les relations entre esclave et citoyen.
Très rare, le travail subordonné de citoyens libres n’était régi qu’oralement ou par des contrats de droit privé dont le juge n'a eu que très peu connaissance. Un arrêt de 1788 va néanmoins tenter d'apporter des réponses : Le contrat liant un employé à son employeur oblige l’employé à une prestation de travail et oblige l’employeur à la contreprestation convenue. Il n’est pas nécessairement écrit, il peut être rompu à tout moment et pour toute raison. La protection est donc minimale, surtout lorsque l’on sait que la contreprestation pouvait ne pas être versée lorsque le travail était considéré comme « mal fait ». De plus, rien n’empêchait l’employeur de diminuer librement la contreprestation en fonction de ses désirs, c’est ce que précise un arrêt rendu au début du 19e siècle. L’accord entre l’employeur et l’employé était donc un accord ponctuel à la tache seulement, le plus souvent à la journée.
La situation perdurera ainsi pendant de nombreuses années. L’arrivée massive de nouveaux citoyens ainsi que le développement de manufactures va augmenter la part du salariat dans la réalisation du travail. Il reste néanmoins peu réglementé et sujet à de très nombreux abus dans que la loi ne protège suffisamment la partie faible du contrat. Le Sénat s’intéresse à ce problème en 1835 sous l’égide du Parti progressiste et du Président Jean Villadier. Il va instituer un contrat individuel de prestation de travail foulant du pied la vielle jurisprudence de la Cour Suprême. Il autorise tout individu à y souscrire mais place l’employé sous la subordination juridique de son employeur sans lui accorder de compensation. Pour l’essentiel, ce contrat suit les mêmes règles que les contrats classiques, dont la Cour Suprême esquisse les contours arrêts par arrêts.
L’abolition de l’esclavage en 1864 par l’initiative combinée des socialistes-chrétiens et des progressistes est le résultat d’une dizaine d’année de jurisprudence favorable aux droits des esclaves noirs et natifs, bien qu’elle en acceptait toujours le principe. Les anciens esclaves sont donc libres de conclure un contrat de prestation de travail eux aussi, considérés comme des « personnes ». Ils ne seront cependant pas soumis aux mêmes droits.
En 1867, le contrat de travail va débuter sa lente (très lente) mue pour devenir un contrat exorbitant du droit commun : D’une part, le contrat de travail doit maintenant être formalisé dans un passeport professionnel permettant d’identifier le travailleur et son statut vis-à-vis du travail. Ce dernier, corrélativement à l’industrialisation, devient de plus en plus dur physiquement, tandis que les conditions sociales se tendent : Le salaire se « misérabilise » et le travail ne permet que de vivre. Le législateur répond donc en limitant le travail des enfants l’année suivante aux tâches les moins dangereuses et pour une durée ne pouvant être supérieure à 12 heures par jours. L’imprécision de cette loi et l’absence de contrôle ou de remontée dans les tribunaux ne donne que peu d’effectivité à cette mesure. Des condamnations à de très fortes amendes ont cependant lieu surtout dans la partie vasque de la République.
Les conservateurs, sous l’égide du Président Antoine Ducaud, deviendront les promoteurs d’un travail plus humain : Bien qu’ils laissent subsister le passeport de travail, ils limitent le travail des femmes de la même manière que pour les enfants. De plus, ils vont permettre la mise en place de « corporations » par l’effet de la loi afin de créer des réglementations spécifiques dans leur branche d’activité. Ces groupements d’employeurs édictent des normes avec les syndicats représentatifs d’employés dans le respect de ce que propose la loi. Elles sont néanmoins fragilisées moins de dix ans après leur création car les libéraux de l’Union Hasparnaise, portés par Andrei Garaikoetxea. En 1919, le Parti traditionnel hasparnais octroie un jour de repos obligatoire le dimanche. En 1933, le passeport est abandonné et le contrat de prestation de travail devient obligatoirement écrit. Doivent y figurer le salaire, les amendes possibles, les horaires de travail ainsi que les modalités de versement.
En 1948, le Sénat à majorité socialiste vote la semaine à 60 heures au maximum pour les employés masculins de 14 à 70 ans pouvant être répartis librement sur la semaine à condition que la journée ne dépasse pas 12 heures de travail consécutives. Les femmes, les enfants et les vieillards blancs sont limités à 50 heures par semaine. Le chômage des jours fériés est également devenu une obligation légale, bien que l’interdiction de travailler sur ces dates spécifiques étaient déjà acquises dans la plupart des corporations.
En 1966, le contrat de travail est créé à destination des travailleurs blancs : Il reprend les canons du contrat précédent en y rajoutant des protections supplémentaires pour les salariés. Ce contrat peut être rompu unilatéralement par le salarié ou par l’employeur. Lorsque la rupture émane de cette seconde partie au contrat, il doit nécessairement être motivé par un motif légitime, à charge de la Cour Suprême de considérer les motifs légitimes. Celle-ci avait une interprétation très large de ce qui pouvait être « légitime ». A titre d’exemple, elle autorise les licenciements de femmes enceintes, de salariés atteints de maladie curables ou non, des vieillards…
Les employés noirs ou natifs ne sont pas très protégés. Toujours soumis au contrat de prestation, ils ne sont pas protégés du licenciement. Des études statistiques démontrent qu’ils sont davantage soumis aux sanctions pécuniaires que les autres groupes ethniques et qu’ils sont davantage soumis aux travaux dangereux. La situation change cependant sous la présidence de Valens Murueta, libéral, alors que le Sénat était commandé par une majorité socio-communiste. Le Sénat vote la loi de non-discrimination des minorités ethniques en 1974, mettant ainsi fin à la ségrégation dans le droit. Il va également largement améliorer les conditions de travail des salariés en accordant une deuxième semaine de congés payés au prix d’une mobilisation massive des ouvriers. Sous la présidence de Victor Bonnet, un salaire minimum va être mis en place, le travail des mineurs de 12 ans aboli, celui des mineurs de plus de 12 ans limité à 40 heures par semaines tandis que les hommes et les femmes employées sont limitées à 45 heures. Pour les travailleurs devenus majoritairement salariés de manufactures ou d'usines, cette période est une période d'importants acquis sociaux, une idylle...
L'idylle rouge portée par le gouvernent du Parti Populaire va cependant tourner au cauchemar après sa dislocation et la chute du gouvernement de Victor Bonnet. Le Gouvernement provisoire et les majorités libérales qui se succèdent ne reviennent partiellement sur les avantages acquis en rendant la deuxième semaine facultative. Les employeurs, par la négociation, pouvaient tout à fait rejeter cette seconde semaine au profit d’autres contreparties comme une augmentation du salaire ou une indemnité ponctuelle. Depuis la fin des années 1980, peu de progrès sociaux notables ont été proposés au niveau de la loi. Les corporations facultatives servent davantage de groupe de pression et les syndicats sont le plus souvent muselés et sans réelle marge de manœuvre.
En ce début de XXIe siècle, le droit du travail est morcelé, le droit légal est à peine présent, le droit corporatif est mouvant et très en deça des attentes des salariés… Le temps de travail pouvant être remonté à 48 heures pour les travailleurs majeurs dans les corporations depuis l’an 2000… L’action du Gouvernement socialiste est donc plus qu’attendue par ses électeurs.
Les pistes de réformes du Gouvernement
Le Gouvernement souhaite rassembler dans un même texte toutes les législations sur le travail, qu’elles traitent de la santé et de la sécurité, du temps de travail ou du salaire. L’affaire ne sera pas aisée et une telle mécanique offre aux oppositions conservatrices et libérales l’opportunité de négocier plusieurs points.
Venu évoquer les contours de la futur réforme que préparait le Parti éco-socialiste, le ministre du Travail Grégoire Isasti a indiqué que cette dernière serait ambitieuse mais devrait être issue de compromis avec les différentes factions politiques qui composent le Sénat, à savoir le Mouvement Républicain représenté par le moribond Armand Duffet, ancien Président, et l’Union conservatrice, en perte de vitesse constante depuis la fin du quinquennat de son leader Antero Etziola, ancien Président également (2007-2012). Si le Gouvernement est prêt à transiger sur le système corporatif de négociation des normes à l’intérieure des branches d’activité, le membre du Gouvernement s’est montré ferme et intransigeant au sujet de la « nécessaire augmentation des salaires ainsi que la non moins nécessaire baisse du temps de travail qu’il soit annuel ou hebdomadaire ». La porte est donc ouverte du côté des conservateurs tandis qu’elle semble se refermer du côté des libéraux qui rejettent majoritairement les revendications sociales d’une nouvelle loi et le système corporatif à l’hasparnaise qu’ils n’ont pas eu l’occasion de revoir durant leurs années au pouvoir. Certains sénateurs républicains ont annoncé qu’ils pourraient voter le texte qu’à la condition que les avancées sociales promises par les socialistes soient incitatives et compensées par des engagements clairs du Gouvernement en faveur des entreprises. Ce qui est demandé en sous-main par l’ancien ministre des Affaires extérieures Jules Rolland, c’est que les entreprises puissent compenser la hausse du coût du travail par des accords de libre-échange avec des états aleuciens ou extra-aleuciens, à l’heure où l’ASEA est sérieusement remise en cause en Hasparne mais également à l’étranger dans le Westalia ou en Akaltie.
Nul ne sait si le Gouvernement réussira à passer ce texte, ni quel sera le prix de celui-ci. Des mois (voire peut-être des années) de tractation seront sans doute nécessaires alors que les ateliers et les usines trépignent d’impatience à l’idée du paradis rouge promis par les vainqueurs des élections présidentielles de juin dernier. Il serait inexact de dire que tous les hasparnais trépignent de la même manière. En effet, les divisions culturelles entre vasques et clovans sont très fortes sur la question sociale. Pour les vasques, terre où l’idéologie socialiste fait ses meilleures performances, on attend énormément de cette loi tandis que du côté clovan, à tendance plutôt libérale, on s’inquiète que la croissance ne puisse pas repartir, incapable de décoller sous le poids de normes sociales trop importantes. Çà et là, on craint également une hausse du chômage et notamment la baisse du taux d’emploi des travailleurs les moins productifs aux deux extrêmes de la vie active, les 15-24 ans ainsi que les 60 ans et plus. L’élection d’Aurélien Vinacci à la tête de la République semble avoir mis la question du travail au premier plan… Un quinquennat ne sera peut-être pas suffisant pour mener à bien toutes les réformes d’ampleur que souhaite le Gouvernement éco-socialistes, comme une réforme de la sécurité sociale ou du système éducatifs, tous deux largement privés.