24/06/2013
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La forteresse de Sankt Josef

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Festung Hohensalzburg Salzburg

Autre-fois décrit comme le centre de la réaction Kaulthe, la forteresse de Sankt Josef est maintenant le cœur battant d'une toute autre administration. Il y grouille tout un ensemble d'enquêteurs, de juges, de fonctionnaires, étrangers comme Mähreniens. On y décide de l'avenir de deux millions d'âme, dans un empressement tout révolutionnaire.

Pas de paix sans justice.








Six de denier

Concernant la problématique économique, et les moyens d'y répondre,

Capitaine-inquisitrice.

Conformément à vos instructions, nous avons entamé une réflexion sur les conditions nécessaires à l’établissement en Mährenie d’un État de droit moderne et démocratique, dans un souci de réalisation pratique et d’action concrète rapide. Cette réflexion s’est d’abord organisée au sein du collège des Haut-Enquêteurs puis avec la cellule logistique et économique de la force militaire déployée pour sécuriser le Duché. Nous avons pour se faire pu baser notre réflexion sur les documents déjà à disposition de l’administration ducale, et sur un inventaire réalisé avec l’aide de cette dernière. En effet, en ce qui concerne notre mission la Mährenie présente autant de complications que d’éléments facilitateurs : il faut comprendre que la situation politique du duché et intrinsèquement liée sa situation économique, et que tout l’ordre social découle de ces deux aspects. L’économie fonctionnant encore selon un régime de propriété féodal au sein duquel évolue une aristocratie échappant à l’impôt et gérant de façon autonome leurs terres, il est relativement compliqué d’obtenir rapidement une liste précise des biens, richesses et outils de production présents sur le territoire. Cependant, ce régime de propriété féodal fait la part belle à ce que nous appellerons des « supers-propriétaires », parmi lesquels l’Ordre Rosique et leurs alliés. Ce qui présente un avantage évident : l’Ordre n’est plus, ses biens sont techniquement à notre disposition, et il est en fait plus facile de moderniser cette économie en nous attaquant à l’aristocratie qu’il ne l’aurait été de le faire face à un régime de propriété capitaliste incluant des intérêts étrangers et des myriades de dispositifs écrans et indirects. Nous savons qui cibler, et la déshérence provoquée par la guerre civile et l’invasion nous ouvre de nombreuses opportunités. Pour le moment, les supers-propriétaires ont peur. Certains sont sonnés par la défaite de leurs protecteurs, d’autres craignent qu’au moindre mouvement nous ne leur tombions dessus. Ils n’agiront pas dans l’immédiat, et c’est donc à nous de le faire.

J’ai personnellement ordonné que soit réalisé un Códice de bienes y propiedades. À notre grande surprise, le bas et moyen fonctionnariat s’est montré extrêmement professionnel dans la réalisation de cette tâche. Il semblerait qu’une partie importante de la population soit moins fidèle à l’idéologie réactionnaire qu’à son confort de vie immédiat, or ce dernier s’est trouvé extrêmement menacé par la situation de guerre civile, d’instabilité et, même avant ça, par la simple réalité socio-économique d’un duché aussi arriéré. Le fonctionnariat, donc, a reconnu notre droit à gouverner, ou au moins à lui donner des ordres, et s’est attelé aux tâches que nous lui avons donnés avec diligence et efficacité. Il va de soi que nous avons déjà établis des réseaux de surveillance et de mouchard pour nous assurer que cette diligence ne soit pas feinte, et que ce professionnalisme ne cache pas de l’espionnage, du sabotage ou, ce serait le pire, de la peur. Notre but, j’y reviendrai, doit être de gagner les cœurs et les esprits par des actes concrets permettant à la population de rapidement évaluer l’efficacité de nos méthodes et les gains immédiats que leur permettront nos objectifs.

Le Códice a démontré ce que nous pressentions déjà. La Mährenie est un duché sous-développé par rapport à ses perspectives économiques optimales, mais riche. Cette situation s’explique par la conjonction économique déjà exposée en amont. Le système féodal, extrêmement hiérarchisé, ne permets pas le développement d’opportunités communales et populaires, et impose l’aspiration systématique de toute richesse formée vers une consommation de luxe dont le seul rôle est un rôle social, limité par ailleurs aux aristocrates. Tout l’appareil économique de la région est soumis à leurs demandes et sert avant tout à les enrichir. Comme dans un système capitaliste terminal, la Mährenie s’en retrouve comme colonisée par son élite. Les routes et infrastructures – éducatives, sanitaires – servent principalement à assurer le bon fonctionnement de la machine économique, qui elle-même voit ses bénéfices aspirés par l’aristocratie. Les investissements dans le territoire et la population ne servent que ce but, et ne suivent pas une logique planificatrice cohérente, faute de coordination entre les familles nobles. Celles-là développent individuellement leurs outils de production en s’adaptant par nécessité aux développements de ceux de leurs voisins. Il n’y a pas réellement de communication, ce qui se traduit par un tissu économique désorganisé et instable, à l’image de celui d’un pays capitaliste standard, mais suivant un fonctionnement moins technocratique et régis par des règles plus culturelles. Avec un produit intérieur brut estimé à 41 176 470 588,24 Devlib-kah pour une population d’un peu moins de deux millions d’habitants (1 905 931 d’après les dernières estimations en date, réalisées pour le Códice), la Mährenie est un territoire riche. C’est un territoire qui, en termes de pure production économique, est en mesure de rapidement se moderniser et de rapidement répondre aux besoins de sa population. Comme dit, c’est aussi un territoire à l’économie désorganisée, et ne profitant qu’à un petit nombre. Enfin, cette situation économique déjà désavantageuse souffre du contexte régional. En effet, jusqu’à récemment l’économie de la Mährenie s’incluait dans l’ensemble Kaulthique, générant une forme artificielle de stabilité tout à fait naturelle et saine au sein d’un même pays, via l’interaction entre les acteurs économiques ducales et confédéraux. Ce lien économique a été grandement endommagé au début de la guerre civile, a empiré avec la dissolution de l’OTK et s’est pour ainsi dire proprement effondré avec l’élimination des Rosiques, qui entretenaient encore quelques liens occultes avec des acteurs confédéraux conservateurs. En d’autres termes l’économie de Mährenie est une économique dont l’excédent de production n’a pas de débouchées formelles, qui n’importe pas ou peu et dont la production locale était jusqu’à récemment grevée par une industrie militaire hypertrophiée, suivant une logique de guerre.

Dans l’état actuel des choses, nous estimons que l’inflation sera de 18 % pour la seule année 2008 – 2009. Une inflation que la population acceptait du fait de la situation de guerre, permettant de créer un narratif déresponsabilisant l’aristocratie et le gouvernement régional, mais qui a pris fin avec notre arrivée.

Notre première recommandation et de communiquer très clairement à la population civile les raisons de cette situation économique, en mettant l’accent sur la responsabilité des grands propriétaires, de leur manque de bon sens et de leur gestion hors-sol des problèmes économiques. Une campagne de communication jouant sur l’augmentation des prix des biens de première nécessité, comparés à l’opulence relative dans laquelle continuent d’exister les hyper-propriétaires serait par exemple très efficace. Dans le même temps, nous recommandons – à vrai dire j’ai déjà pris cette initiative, mais je vous soumets la demande de la maintenir – de faire surveiller l’ensemble des aristocrates et grands propriétaires, et de bloquer l’ensemble de leurs actifs, biens financiers, etc. Dans un premier temps, pour éviter la panique, il suffira de leur dire qu’ils peuvent bien entendu disposer de leurs biens et de leur argent comme ils le souhaitent, mais uniquement au sein de la Mährenie, pour participer à l’effort de restauration de l’économie. Ces mesures seraient, bien entendu, temporaires. Et puisqu’ils conserveraient leur train de vie et leurs biens, dans la limite fixée, ils ne paniqueront pas. Nous pourrons ensuite organiser la saisie en bonne et due forme de tous les moyens de production de la région, et de toutes les richesses mal-acquises. Car nous auront besoin de ces bijoux, produits de luxe, grandes maisons, œuvres d’art familiales, chevaux de race, armes anciennes. Nous aurons besoin de chaque tête de bétail, chaque manufacture de pulpe de bois, chaque scierie. Nous aurons besoin de chaque champ. Je me dois d’insister lourdement sur ce point : une rationalisation rapide de l’économie doit avoir lieu. Et le moyen le plus sûr d’y arriver est d’organiser dans les plus brefs délais des investissements massifs dans la région. Puisqu’il est hors de propos de demander de l’Aide à l’Union – nous savons que les implications politiques seraient trop élevées, quand-bien même nos camarades accepteraient de nous aider – il nous faut générer notre propre richesse dans les plus brefs délais.

Selon les estimations du groupe de réflexion, une somme de presque 32 352 941 100 Devlib-kah sera nécessaire pour achever cette réorganisation économique. Si on prend en compte l’inflation le prix réel de cet investissement devrait plutôt monter dans les 38 176 470 600 Devlib-kah.

Soit un investissement équivalent au PIB annuel du pays. Vous comprendrez donc que des mesures d’urgence soit nécessaires. Fort heureusement les premiers 4 411 764 700 Devlib-kah obtenus lors de la prise de Saint-Joseph ont permis de prendre les mesures que nous avions recommandés, dont les effets désirables sont d’ores-et-déjà à l’œuvre. Nous avons pu éviter une fuite des actifs, maintenir le salaire du personnel spécialisé, éviter une rupture d’approvisionnement dans les secteurs clefs et payer la restauration des infrastructures abîmées lors de l’opération d’inquisition, ainsi que celles sabotées par nos ennemis.

Je vous ferais bientôt parvenir la comptabilité exacte de nos besoins. Selon nos premières analyses, les opportunités économiques régionales ont déjà été globalement déblayées par les efforts désordonnés des hyper-propriétaires, ce qui signifie qu’il ne sera pas nécessaire de respécialiser l’économie, mais plutôt de la rationaliser, de l’organiser selon des principes plus fonctionnels et de modifier les circuits par lesquels les fonds transite, de façon à organiser à ce que les bénéfices profitent à la politique que nous souhaitons mettre en place. Cette politique, conformément aux buts exprimés dans la Circulaire Perpétuelle, doivent être de concevoir un système politique, économique et légal apte à accueillir la civilisation. En d’autres termes, la transition vers un système de propriété communale et d’État providence.

Les grands secteurs économiques existant au sein de la région sont :

L’agriculture, organisée autour de grandes exploitations propriétés de l’aristocratie ou de l’ancien ordre Rosique au nord de la région, répartis à part à peu près égales entre les cultures et l’élevage, une part non-négligeable de ce dernier est plutôt situé sur les collines adjacentes à la plaine du Subrödia, notamment via un important réseau de bergers. Les céréales cultivées sont presque exclusivement dédiées à la consommation du marché intérieur. Soit pour nourrir les bêtes d’élevage, soit pour nourrir la population. Il existe aussi plusieurs usines de transformation alimentaire, et une industrie du vêtement tricoté et de la chaussure profitant de la production de laine et de cuire de la région.

En termes de pistes pouvant permettre l'entrée de devises via l'exportation il faut compter, concernant le tissu économique préexistant, la production d'eau-de-vie, l'exploitation minière, le traitement du diamant, la création de machines-outils spécialisées dans les deux activités suscitées, la création de machines de forge et de pressage, la conception de moteurs électriques, l’exploitation de la soie, d'instruments, de camions, et une jeune industrie de la microélectronique et du logiciel. Il existe aussi des usines de produit chimiques, que nous recommandons de fermer. Si elle est aussi vétuste que le reste de l’industrie locale, elle représente un risque sanitaire et environnemental considérable. Les ouvriers et ingénieurs spécialisés pourraient se voir proposés des emplois plus avantageux dans l’expansion prévue. Enfin, il faut noter une industrie très vivace de la coupe de bois, avec plusieurs scieries, usines de traitement de bois (pulpe de bois, papier) et des ateliers de création de meuble. Nos analyses démontrent qu’il serait simple de rationaliser ce secteur en rassemblant l’ensemble des sites de production au sein d’une même administration gérée par les travailleurs et travaillant de concert. Nous pensons aussi souhaitable d’étendre la production de meubles, jouant par exemple sur une éventuelle image de marque via la qualité de la production locale, qui est indéniable et a des racines ancestrales.

Le tissu économique régional, comme vous l’aurez constaté, semble pouvoir fonctionner en relative autarcie : la plupart des sites de transformation de matière transforment des matières qui sont extraites ou cultivées au sein même du duché, ce qui joue à notre avantage. Certaines pièces nécessaires à la conception de camions ou de micro-électroniques sont importées, mais nous recommandons de ne pas les abandonner pour autant : d’une part il est essentiel de pouvoir maintenir par nos propres moyens la capacité de fret de la Mährenie, concernant les camions, de l’autre, concernant la micro-électronique, c’est un domaine prestigieux attirant du personnel d’un haut niveau de formation. En fait, nous avons découvert avec surprise que les écoles supérieures de Saint-Joseph formaient des ingénieurs informaticiens tout à fait capables. Nous recommandons de favoriser l’expansion de ce domaine d’activité, nous arrivons à une époque où les programmateurs seront aussi essentiels à l’économique que l’étaient les ouvriers de hier, c’est un pari sur l’avenir qui est dors-et-déjà rentable.

Concernant maintenant, nos pistes pour étendre et diversifier l’activité économique. Il ne s’agit pas de nos recommendations sur la méthode de restructuration, mais bien de pistes de réflexion pour la création de nouveaux pans de l’économie régionale. Premièrement, le tourisme. Pour le moment c’est une perspective lointaine et compliquée à organiser du fait de la situation de guerre et du malaise que génère encore notre présence, mais la Mährenie est dotée de paysages exceptionnels et de hauts sommets propices à l’installation de centres de sport d’hivers accessibles aux clients de bas, moyens et hauts revenus. Le tourisme est, comme nous le savons, un excellent moyen de faire entrer des devises étrangères sur le sol national. Second point, visant le même objectif, l’édification d’une structure financière et fiscale favorable aux entreprises étrangères. L’économie communalisée fonctionnant selon une logique quasi autarcique, il est possible de profiter du système financier international, plus précisément de jouer sur l’instabilité bien connue de l’Eurysie, en faisant de la Mährenie une zone tampon aisément accessible par avion et capable d’entretenir un puissant secret bancaire et des tarifs favorables. D’une part cela rassurera les puissances capitalistes en leur donnant la sensation que nous comptons jouer le jeu du capitalisme, de l’autre c’est un bon moyen d’obtenir des fonds sans avoir à exporter de la production. Ce service de location, en quelque sorte, est peut-être notre opportunité la plus immédiate pour obtenir rapidement les fonds nécessaires à la réorganisation économique régionale.


Documents attachés :

Analyse exacte des biens et propriétés du Duché.
Analyse protectionnelle de l’inflation selon les réformes prévues.
Proposition sur les méthodes de communalisation de l’économie.
Rapport synthétique sur l'histoire des grandes familles de la région.








6443
Rapport du 14 juin 2008 concernant les enquêtes sur la situation sociale des Mähreniens,

Enquêteurs : Sigismond Necahual et Imai Eru
Secteur d’enquête : Principautés du Laschborn (Est mährenien)
Méthode : Interrogation directe et volontaire de 300 habitants du Laschborn


Capitaine-Inquisitrice,

Après l’interrogation de 300 Laschbornais, l’agent Necahual et moi-même avont découvert des informations sur la présence d’un pouvoir secret qui dominait une bonne partie de la région en parallèle à l’Ordre des Rosiques. Les habitants interrogés ont eu tendance à surnommer ce pouvoir « le Prince de Mährenie », mais rien ne prouve que ce pouvoir soit incarné par une seule personne.

Pour resituer le contexte, nous devons nous pencher sur la période d’avant-guerre. L’Ordre des Rosiques est encore publiquement de confession catholique impériale, et ne contrôle qu’une partie de la Mährenie. Le reste est contrôlé par des seigneurs locaux, à l’ouest par les deux Princes du Walschar, à l’Est par le Prince de Laschborn. Cependant il existe aussi, au Sud-Ouest, la République d’Ustarine, une petite république dirigée par la même famille depuis plus de 70 ans, famille qui, toutefois, a toujours eu l’approbation des habitants par le vote, selon le rapport des nos collègues à Ustarine. Les quatre états, très féodaux, ont tous été annexés par l’Ordre des Rosiques lorsque celui-ci a intégré l’OTSK. Ces états ne présentaient pas de réelle résistance, faute de moyens.

Maintenant, concernant le Laschborn. Le Prince de Laschborn, Reinhart von Westerburg, fait partie d’une très riche famille aristocrate d’origine walserreichienne, famille cependant très peu présente en Laschborn et qui vit très majoritairement – voire totalement, selon certains laschbornais – au Walserreich. La famille est propriétaire de plusieurs entreprises walserreichiennes, dont elle s’occupe bien plus que de son territoire féodal. Quand mon collègue et moi sommes arrivés en Laschborn, après l’avoir étudié sur dossiers, nous pensions donc que le pouvoir était presque absent, et que les habitants montagnards vivaient plutôt en petite communautés sans réelles lois mais avec de petits pouvoir municipaux.

Nous ne nous sommes jamais autant trompés. C’était effectivement le cas il y a 20 ans, mais, depuis, le « Prince de Mährenie » et ses lois semblent régner sur tout le Laschborn. Et, à en croire les habitants, pas seulement.

Pour expliquer ce qu’est (ou en tout cas ce que parait être le Prince de Mährenie), il faut savoir que c’est une notion presque unanime, puisque 286 interrogés nous en ont parlé, sans qu’on le leur demande. Au quotidien, le « Prince » se manifeste avant tout via les quelques éléments numériques présents dans la région. Les habitants parlent d’une entité qui les surveillent, leur envoie des sms anonymes, des e-mails, qui coupe leurs appels en cours avec d’autres personnes dès que les utilisateurs mentionnent la religion, que les propos soient explicites ou non.

Ainsi, tout le réseau numérique du Laschborn semble faire l’objet d’une censure permanente de la part du « Prince », qui agit toujours anonymement, et, lorsqu’un pseudo est nécessaire, jamais avec le même. Certains habitants parlent de menaces de la part du « Prince », notamment de la diffamation. 2 interrogés affirment avoir été l’objet de menaces appliquées par le « Prince », l’un des deux étant aujourd’hui un prisonnier, l’autre étant un patient dans un hôpital psychiatrique ayant de forts troubles de la personnalité. Les 2 interrogés nous ont confirmé être dans leur situation actuelle depuis que le « Prince » les a menacés.

Le phénomène est d’une ampleur impressionnante, le Laschborn étant peuplé par plusieurs milliers de personnes, qui vivent la même chose au quotidien. Si les Laschbornais sont majoritairement croyants, très peu sont pratiquants, justement par peur de représailles du « Prince ». L’athéisme, selon les interrogés, est en augmentation constante malgré l’invasion rosique du territoire. Le « Prince » est la source d’une peur constante de la religion et des cultes. Et c’est pour cela que moi et le lieutenant Necahual pensons qu’il est impossible que le « Prince » ne soit qu’une seule personne.

Mais est-ce que le phénomène a lieu exclusivement sur les réseaux numériques ? Selon les interrogés, non. Les églises locales sont souvent désertes, les prêtres se font très souvent moines rosiques pour fuir le territoire et être protégés par l’Ordre. Aujourd’hui, l’Ordre n’existe plus, mais il semble que certaines de ses branches subsistent (en tous cas en Laschborn) pour accueillir les ecclésiastiques désireux de pratiquer leur religion en restant protégés du « Prince ».

Dans les faits, le phénomène n’a jamais été physique, le « Prince » n’a jamais envoyé personne violenter les personnes le provoquant, et n’a jamais fait de dégâts matériels. Il joue exclusivement sur le harcèlement, la diffamation ou le hacking des machines. En 2004, il aurait, selon une vingtaine d’interrogés, gelé toute la production agricole d’une corporative dont deux de ses membres auraient été les organisateurs de messes secrètes.

Selon l’ensemble des 286 interrogés nous ayant parlé du « Prince », celui-ci ne sévirait pas qu’en Laschborn, mais dans toute la Mährenie. Certains d’entre eux nous ont expliqué que le silence absolu sur le sujet par les autres Mähreniens non-laschbornais serait lié à une très forte répression de la part des dirigeants locaux, à qui le « Prince » aurait demandé de maintenir un silence sur son « règne » pour éviter que la Confédération kaulthique ou d’autres Etats n’interviennent sur le territoire pour évincer la menace du « Prince ». Les Laschbornais n’ayant plus vraiment de réel dirigeant – excepté le « Prince » –, le silence a eu du mal à être maintenu, le « Prince » ne pouvant pas – ou difficilement – identifier les Laschbornais ayant brisé le silence. Cependant, l’information n’a jamais vraiment dépassé les frontières de la Mährenie. Certains interrogés disent qu’on ne les prend pas au sérieux en dehors de la Mährenie, ou que l’on minimise la situation à un simple hackeur.

Dans les faits, les conséquences sont désastreuses. La lutte pour l’athéisme de la part du prince a entraîné une réaction de la part de l’Eglise, et surtout des Rosiques. Tandis que l’athéisme augmente, les croyants sont de plus en plus fanatiques, la menace du « Prince » fait monter un réel zèle chez eux. Si les plus modérés restent en campagne et se contente seulement de ne plus prier publiquement ou parler religion en présence d’une machine numérique, les plus zélotes vont à Sankt-Josef pour intégrer un ordre monastique et consacrer leur vie à leur dieu, nuit et jour, jouissant de la protection de l’Ordre. La peur des machines se développe partout dans la région, à tel point que de nombreux agriculteurs sont revenus aux modes de production préindustriels.

Capitaine-Inquisitrice, nous ne connaissons ni les motivations, ni la nature du « Prince de Mährenie », et il semble être un enjeu majeur si nous voulons moderniser la région. Ainsi, je vous demande la permission d’entamer une enquête exclusivement consacrée à ce sujet, accompagné par le lieutenant Necahual.

Nous vainquerons, nos ennemis périrons, la Liberté fleurira de leurs tombes.

Lieutenant Imai Eru

Documents attachés :

Rapport du sondage sur la situation sociale des Laschbornais
13013








Deux de Coupe.

Concernant la question de la population et de la culture,

Capitaine-inquisitrice,

Citoyenne, dans ma précédente note à votre intention vous vous souviendrez peut-être qu’il avait été expliqué en quoi l’aspect social de la question Mährenienne était intrinsèquement lié à l’aspect économique, en ça qu’ici plus qu’ailleurs on ne sépare les deux que pour éviter à la population la réalisation qu’on les exploite pleinement et totalement. Fort de l’analyse permise par la réalisation du Códice de bienes y propiedades, nous avons aussi été en mesure de nous offrir la devise qui nous manquait le plus : le temps. Ce qui nous permettra de moins agir dans la précipitation et de nous préparer en connaissance de cause à des décisions qui passeront, sans doute, difficilement auprès d’une partie de la population toute entièrement dévouée au système politique même qui l’écrasait et la maintenait dans la misère de l’exploitation. En bref, il convient de dire qu’en ce qui concerne ce duché, la question de l’éducation politique de la population reste encore à traiter, ce qui veut dire que nous risquons de rencontrer à chaque étape du processus de démocratisation une opposition moins basée sur des principes logiques et d’intérêts véritables que sur des principes "culturels" ou "traditionnels". La liquidation économique de la classe aristocratique ne suffira pas, à elle seule, à déraciner des siècles d’aliénation. Cependant elle nous libère les mains et nous offre les moyens de démontrer clairement au peuple où se trouve son intérêt, pour que de peuple il devienne citoyen. Si vous me permettez une allusion elpide, nous allons devoir les attraper par le col et les tirer hors de la caverne.

Ici, je ne vais pas perdre de temps à exposer ce que nous savons déjà tous du fonctionnement du duché, et qui a déjà été longuement explicité dans la démarche précédente liée à son fonctionnement économique. Il est aussi inutile de répéter ce qui se trouvait dans le Livre Blanc qui nous a été distribué en prévision de la prise en charge de la province : nous savons que le système local fonctionne sous une forme de capitalisme archaïque, avec ce que cela sous-entend de société de classe, d’organisation cellulaire de la société et de rigidité dans les rapports sociaux et les possibilités d’évolution des individus d’une classe à une autre. Nous savons qu’une structure aussi rigide peut présenter autant de complications qu’il n’y a d’étape pour la démembrer, et nous savons aussi que la population civile, habituée traditionnellement à cette position d’enfants que lui impose l’aristocratie, pourrait réagir soit extrêmement positivement, soit extrêmement négativement à toute évolution dans un sens ou dans l’autre. Cette réaction, qui doit être comprise dans son sens politique d’opposition systématique au changement s’organisant autour d’acteurs et propos populistes partant généralement d’une base réelle pour créer un narratif faux, est logique puisque l’évolution que nous allons proposer à la région est par essence de nature révolutionnaire.

La première étape, donc, consiste à contrôler tout ce qui pourrait servir de support à une réaction et à nous arranger pour que cette dernière prenne une forme constructive et utile. En cela les premières décisions de la Circulaire perpétuelle, ayant traits à l’interdiction de certaines idéologies et de leur apologie est un bon début. La conception d’un réseau de mouchard est aussi utile, bien qu’insuffisante. Nous préconisons de nous entourer des leaders locaux, de celles et ceux qui ont déjà voix au chapitre ou qui souhaiteraient se faire entendre et/ou représenter leur communauté. Certes, à ce stade ces individus ne jouissent pas d’une légitimité démocratique quelle qu’elle soit, et ne représentent que des pans extrêmement minoritaires de la population : la basse, moyenne et haute bourgeoisie (quasi inexistante et remplacée par l’aristocratie), les nobles éduqués et proches des idées humanistes et/ou modernisatrices, les leaders religieux n’ayant pas été purgés, etc. Ces individus sont ce que l’on appelle en sociologie révolutionnaire, la classe dominante, toujours prompte à protéger son pouvoir, et n’ayant d’autre idéologie, à vrai dire, que cette dite protection du pouvoir. Si nous leur faisons miroiter la possibilité de protéger certains de leurs acquis, ils accepteront de travailler avec nous, ce qui nous permettra de pleinement profiter de leur légitimité, sans nous contraindre à les écouter ou, plus précisément, à nous embarrasser de leur présence plus que de raison. Il s’agit de faire entrer le loup dans la bergerie. En effet, en appelant ces individus à se constituer en un genre de conseil assistant les travaux de notre administration, nous créons dans les esprits un précédent : celui d’une chambre politique assistant le pouvoir dans sa prise de décision. Précédent dont la structure administrative pourra être ensuite employée, purgée de la bourgeoisie et remplie de prolétaires formés, capables cette fois de ne pas être qu’un outil de communication, mais de s’ériger en vraie force de proposition. Un tel système pourrait à terme permettre la création d’institutions syndicalistes ou corporatistes composant un bon compromis avec la vision communale devant à terme être atteinte, et dans des temps extrêmement rapides.

De manière plus générale, le contrôle du narratif doit aussi s’organiser grâce à des alliés de confiance. Soit parce que nous savons exactement ce qu’ils veulent - comme pour la petite bourgeoisie et autre population dont l’insignifiance, sur le plan économique, permet la conservation, et dont l’ambition permet l’utilisation (boutiquiers, propriétaires de petite envergure, riches paysans, totalement soumis au tissu macroéconomique et pleinement satisfaits de contrôler leur participation micro-économique), soit parce qu’ils sont des alliés sincères de la cause.

Ceux-là existent en Mährenie. Une fois encore les faits font mentir les idées reçues, et il est évident que ce duché, malgré un gouvernement fanatique, reste un creusé d’idées sociales et d’ambitions humanistes. D’autant plus renforcées que la chute et l’annihilation finale de l’Ordre Rosique a désorganisé toutes les organisations conservatrices, et que la propagande proférée par l’Ordre avant notre arrivait avait participé à plonger ses plus fervents partisans dans un état d’exaltation que nous avons brisés dans une merveilleuse dissonance cognitive en remportant cette guerre. En d’autres termes, la gauche exulte, la droite ramasse les morceaux brisés de sa psychologie, et reprend son souffle. Mais difficilement.

Je ne veux pas paraître triomphaliste mais, au moins sur ce plan, il faut avouer que la situation est exceptionnellement avantageuse. Il est rare d’occuper un territoire dont la population potentiellement adverse a été plongée dans une position de pur et simple désespoir. Il n’y a aucun espoir pour les pro-rosiques. C’est en tout cas ce qu’ils pensent. Nous devons nous assurer qu’ils restent dans cet état d’esprit jusqu’à ce que leur esprit fasse la transition vers un mode de pensé plus adéquat, par l’éducation populaire ou la simple adaptation au nouveau paradigme que nous organisons. La population vaincue est une population inoffensive lorsqu’elle ne croit pas à sa propre force. A contrario, les forces populaires oppressées par les rosiques se sont déjà exprimée en notre faveur, et les forces plus modérées, elles, attendent encore de voir ce que nous ferons du pouvoir dont nous avons hérités.

Selon moi, nous ne pouvons pas imposer à la population du duché un changement de mentalité concernant la plupart des questions sociales et religieuses ayant aboutis aux massacres que l’on connaît. Mais nous pouvons cependant créer un traumatisme suffisant pour qu’on ne l’y reprenne plus. Ce pourquoi je propose de créer des programmes d’exposition : des musés entièrement dédiés aux crimes rosiques. Des films que l’on montrera à la population, montrant en détail la carbonisation des corps sur le bûché et les témoignages des proches, des reportages nombreux sur l’indécence du niveau de vie des hauts membres de l’Ordre. Montrer tout ce qui peut les décrédibiliser; Ceux qui avaient des maîtresses, ceux qui étaient en fait bi ou homosexuels, ceux qui se droguaient. Nous devons démontrer que l’Idéologie réactionnaire est une falsification, et imposer à la population de réaliser, très clairement, d’être confrontée à un degré personnel, au niveau absolu de violence et de démence que provoque cette idéologie.

Ce programme d’éducation populaire pourrait se faire en parallèle un second programme, cette fois non-pas centré sur la création d’un traumatisme national, mais sur la création d’un environnement social plus sain. Des programmes, reportages et cours (non-obligatoires mais pouvant être rémunérés, par exemple), visant à exposer la culture d’autres nations, les théories scientifiques remises en cause par le dévotisme, l’aspect naturel et "normal" des minorités sexuelles, religieuses etc.

Enfin, une propagande intensive devant faire la liaison entre ces deux programmes, et fonctionnant sur le narratif suivant : toute l’idéologie conservatrice défendue par le duché et l’Aristocratie était un mensonge hypocrite qui servait à manipuler la population et à la maintenir dans un important degré de pauvreté, mettant systématiquement en valeur les crimes, la violence, les sacrifices inutiles d’un côté, le luxe, l’exploitation de l’autre, et accompagnant les réformes économiques rapides déjà exposée dans une précédente note. En termes brefs il s’agit de faire assimiler à la population que sa situation économique s’améliore parce que le système dans lequel elle vivait avant notre arrivée s’est effondré, et de démontrer par ailleurs comme le système précédent ne créerait en somme rien d’autre que de la pauvreté et de la violence cruelle.

Pour ce faire nous pensions aussi remettre l’accent sur les enseignements primaires de la religion catholique. Aime ton prochain, partage ce qui est à toi, ainsi de suite. Il est bien connu que les premiers chrétiens refusaient la propriété personnelle et vivaient en petites communautés d’égaux. Si nous éclairons les principes religieux à la lumière de ce qu’ils sont réellement, en expurgeant les éléments les plus archaïques, nous pourrions pousser, sans heurter, la population à adopter des vues socialisantes. Après tout l’humanisme - dont est en parti issu le Kah - a des valeurs occidentales, donc des valeurs assez chrétiennes.

Accessoirement nous ne devons pas nous contenter de casser la population pour l’élever vers des standards humains. Nous devons aussi nous appuyer sur celles et ceux qui sont déjà nos alliés. Ils sont nombreux. Je tiens par exemple à rappeler le cas de Emilia Reisenmann, qui bien que conservant des idées relativement conservatrices sur un certain nombre de sujets, reste une communaliste importante issue de la région. Malgré le gouvernement et le système féodal, il existe en Mährenie une pensée socialisante. Discrète, secrète et, jusqu’à assez récemment brûlée sur des bûchés. Bien entendu le martyr n’était pas réservé aux potentiels socialistes/communalistes/libéraux, mais aussi à un certain nombre d’innocents brûlés, lapidés, torturés ou plus simplement emprisonnés à tort. Il y a aussi toutes les minorités religieuses – juifs, catholiques pontificaux, protestants – et les minorités sexuelles, présente dans des chiffres normaux dans la région, mais particulièrement discrètes du fait de violence déployée contre elles.

Il est à noter que ces minorités sexuelles – et les mouvements plus généralement féministes qui existaient déjà, bien que totalement absent de la scène médiatique et servant principalement de discrets réseaux d’entre-aide entre femmes battues/violées – peuvent nous être d’une précieuse aide. Leur haut degré de solidarité et d’organisation les rends potentiellement capables de rapidement utiliser les médias comme une tribune particulièrement efficace, si nous leurs en donnons les moyens. Globalement, les femmes savent qu’elles sont considérées comme inférieures à l’homme, et se rallieront en partie à nous si nous leur donnons rapidement des droits élémentaires et les moyens de vivre une existence libre.

Avec ça il faut aussi noter toute la classe laborieuse, qui se moque traditionnellement de la politique mais commencera à s’y intéresser si nous lui donnons les moyens d’en tirer un bénéfice concret (établissement de la démocratie en entreprise, autorisation rapide et sans détour des syndicats) et une vie moins dure.

Enfin, il faut considérer le fait que toute population, qu’elle le veuille ou non, est sujette à un degré important d’exotisme. Les gens sont, naturellement, attirés autant qu’effrayés par l’étranger. C’est une question de packaging. Je sais ce que vous en pensez et je sais que cela ne vous plaît pas particulièrement, mais je pense que nous devrions laisser les hommes (et les femmes, dans un contexte aussi conservateur c’est à elles d’effectuer le travail) entrer en contact avec la population et servir d’avocats. Les troupes savent parler allemand, pour la plupart. Si elles consomment en bons clients dans les boutiques et bars, si elles aident les gens, si à chaque fois qu’une aide sociale, juridique, qu’une assistance médicale est procurée, elle l’est par un joli minois kah-tanais, à l’accent vaguement exotique, notre peuple finira par jouir d’une meilleure image que celle qu’on souhaite lui accoler. Du reste notre production audiovisuelle a beaucoup plus de moyens que celles qu’on peut trouver en Eurysie. Une politique d’importation de biens culturels kah-tanais pourrait avoir son effet : nos valeurs et nos ambitions transparaissent dans nos films, et la population ne saurait s’opposer à un spectacle impressionnant et bon marché, en témoigne le succès international des Ailes de Kotios, entre-autre chose. Il y a aussi la question de la littérature jeunesse et de la bande dessinées, ou encore des jeux vidéos (l’informatique est relativement peu diffusé dans la région, mais l’un des pilotes m’a proposé d’organiser un cybercafé dans la forteresse, pour les hommes; Je pense que nous devrions accepter, mais le créer en ville, ainsi qu’une salle d’arcade. On n’entre jamais mieux dans la modernité que par le loisir).

Un large chantier nous attends, mais sur le principe je ne vois à priori pas de complications dépassant ce à quoi nous nous attendions.


Documents attachés :

Synthèse des mouvements sociaux et progressistes clandestins existant en Mährenie.
Statistiques mettant en valeur les effets de la discrimination religieuse et sexiste sur l'économie.
Synthèse des violences commises sur la population durant la guerre.
Listes des condamnés à morts ou à la torture et synthèse sur leurs familles et proches.







645
Note à l'enquêteur Imai Eru.
Concernant le "Prince"

Excellent travail, ce rapport est édifiant. Vous et le citoyen Necahual avez mon autorisation pour procéder à votre enquête dans la mesure où vous le jugerez nécessaire. Je vous laisse fixer les objectifs de cette dernière et vous organiser en conséquence. Le collège des Haut-Enquêteurs vous accorde son soutien hiérarchique et matériel pour cette opération, j'informerai le Lieutenant-maître que vous passez sous la supervision du collège.

Si vous rencontrez des difficultés inattendues ou une situation nécessitant plus ample mobilisation de nos moyens, faites-le immédiatement savoir. Je vous fais confiance pour la suite

Godeliève Thiers, Capitaine-inquisitrice.
1768
Rapport du 26 juin 2008 concernant l'enquête sur l'organisation dite "Prince de Mährenie",

Enquêteurs : Sigismond Necahual et Imai Eru
Secteur d’enquête : Principautés du Walschar (Ouest mährenien
Méthode : Surveillance des médias locaux, écoute de rumeurs et interrogations sur la base du volontariat


Capitaine-Inquisitrice,

Suite à nos découvertes au Laschborn, nous avons poursuivi notre enquête sur le "Prince de Mährenie" au Walschar. Nous avons rigoureusement suivi les médias, et écouté les rumeurs dans les bars, les rues ou encore les salons de coiffure - l'agent Necahual a sacrifié ses cheveux pour cette enquête.

Nous avons effectivement noté qu'il existait une certaine censure dans les propos des Mähreniens, qui évitent de parler explicitement de la Religion, même dans la rue.

Il semblerait également que le phénomène de censure des Mähreniens ait aussi lieu à l'étranger : un Mährenien ne serait, selon les rumeurs, pas revenu de Damanie à cause "de Lui". "Lui" est un pronom qui a été fréquemment utilisé par des Mähreniens que nous n'avons pas vu interagir entre eux. "Lui" désigne très probablement le Prince.

Cependant, nous avons aussi interrogés directement 21 Mähreniens dans la rue sur "le Prince", et ils ont tous nié connaitre ce "Prince". Nous avons remarqué des signes de nervosité lorsque cette question a été posée, ce qui pourrait prouver l'existence d'une certaine pression, d'un interdit.

Notez toutefois qu'il reste possible que les interrogés n'aient pas la même appellation pour le "Prince" que leurs semblables du Laschborn. Pourtant, quand nous leur avons demandé quelles pressions ont-il subi dernièrement, aucun n'a mentionné celle d'une organisation ressemblant au "Prince".

Nous allons continuer notre enquête avec les mêmes méthodes, espérant que nous tomberons sur quelqu'un qui ait le courage de nous donner des indices.

Nous vainquerons, nos ennemis périrons, la Liberté fleurira de leurs tombes.

Lieutenant Imai Eru
938
Rapport du 19 mars 2009 concernant l'enquête sur l'organisation dite "Prince de Mährenie",

URGENT


Enquêteurs : Sigismond Necahual
Secteur d’enquête : Principautés du Walschar (Ouest mährenien)
Méthode : Surveillance des médias locaux, écoute de rumeurs et interrogations sur la base du volontariat


Capitaine-Inquisitrice,

La Lieutenant Imai Eru a disparu alors qu'elle enquêtait dans un petit village montagnard du Walschar.

Cela fait suite à un piratage de nos données informatiques concernant l'enquête.

Nous soupçonnons évidemment l'organisation du "Prince de Mährenie", qui nous a prouvé, à plusieurs reprises, maitriser assez aisément les technologies informatiques.

Concernant l'hypothèse d'une attaque rosique, nous n'avons aucun indice qui prouverait une telle attaque pour l'instant.

Capitaine-Inquistrice, nous avons besoin de renforts armés pour continuer cette enquête. A l'heure qu'il est, la Lieutenant est peut-être déjà morte.

Nous vainquerons, nos ennemis périrons, la Liberté fleurira de leurs tombes.

Sergent Sigismond Necahual.
743
Attention, un programme tiers semble prendre contrôle de votre réseau. Attention, un programme tiers semble prendre contrôle de votre réseau. Attention, un pro...

...


042


Salut salut, Kah-tanais

Je suis 042. Je fais parti de la Légion pour la Lumière. Notre dirigeant est le "Prince de Mährenie". Nous avons pu observer que vous le connaissez.

Nous voulons la fin de l'Etat. Nous voulons la Liberté des Mähreniens. Puis des Kaulthes. Si vous n'êtes pas l'Etat, alors nous ne sommes pas vos ennemis.

Kah-tanais, abandonnez la Mährenie. Nous saurons la diriger seuls. Nous le faisons déjà. C'est à nous que les citoyens mähreniens obéissent.

Partez, et nous ne vous ferons aucun mal.

Partez, et nous serons peut-être vos alliés contre l'impérialisme et la dictature.

Partez, et nous vous rendrons votre camarade saine et sauve.

Partez, ou perissez.



Fin de la transmission.

4556
Note à l'enquêteur Sigismond Necahual.
Concernant le "Prince"


Concernant la question des renforts armés : il est évident que l’enlèvement de la citoyenne Imai Eru nous impose une réponse d’un nouveau niveau. Conformément à nos méthodes celle-là sera graduée. Du matériel de brouillage radio et des outils de haute technologie seront envoyés depuis le Grand Kah pour aider la neutralisation du groupe terroriste.

Bien que les risques de fuite technologique soient considérés réels, nous sommes obligés de considérer la situation sous l’angle de l’attaque ou terroriste, ou téléguidée par des services secrets étrangers. À ce titre, les communes centrales et le reste de l’Égide nous soutiennent dans notre démarche et, par conséquent, je suis en mesure de vous soutenir dans la vôtre.

Les activités de recensement continueront sous une forme normale. Pour l'enquête, elle se prolongera par voies physiques et dématérialisées. Si absolument nécessaire, des contrôles et des barrages de police pourront être organisés, cependant l’enlèvement d’une agente seule ne nous impose pas encore une montée en gamme de l’arsenal sécuritaire déployé.

Agissez discrètement et de façon rapide.

Communication de Sigmüür Ivanovna.
Votre nouvelle chargée de la cybersécurité.


Vous n'aurez pas manqué de remarquer le petit coup d'éclat de nos amis de la "Légion pour la Lumière" il y a quelques jours. Et je suis sûre qu'aucun d'entre nous n'a paniqué ou ne s'est senti coupable, c'est un peu le problème.

En théorie ce genre de communication ne mériterait même pas de commentaire, exception faite d'un rappel des règles de sécurité élémentaire, mais il est concomitant à l'enlèvement d'une de nos camarades et je suis à peu près sûre que ce détail ne vous a pas échappé. Bien.

La camarade Protectrice de la Mährenie m'a nommée à la tête de notre section cybersécurité. Ce qui est, pour moi qui suis mährenienne de souche, un grand honneur. Je vais maintenant vous demander d'écouter attentivement et d'appliquer mes instructions sans quoi l'honneur risque rapidement de se transformer en frustration : nous n'avons pas besoin de ça.

Concernant la faille de sécurité, pour commencer. Il est possible qu'une infiltration ait eu lieu en passant par voie satellitaire mais cela ne suffirait pas à déchiffrer le matériel crypté envoyé et reçu depuis l'orbite. L'option la plus probable serait, selon nous, une infiltration à l'ancienne : mail frauduleux, intrusion de matériel USB dans un ordinateur connecté au réseau intranet de l'Ordre, opération pouvant avoir été commise ou accidentellement ou consciemment, ce second point n'est cependant pas de mon ressort et le sergent Tedduem se charge déjà de s'assurer de la fidélité de chaque inquisiteur et auxiliaire déployé dans la région.

Quoi qu’il en soit la gestion de la sécurité informatique est déplorable, et nous allons changer ça. L’ensemble de l’intranet va être à nouveau segmenté en niveaux d’accréditation et de sécurité accessibles par des mots de passes. De nouveaux mots de passe, évidemment. Les ports USB seront verrouillés et uniquement accessibles sur présentation d’une demande motivée à un inquisiteur de rang intermédiaire ou supérieur. Les membres de l’Égide ont interdiction d’emporter du matériel informatique hors des locaux de l’Organisation, et inversement ont interdiction d’amener du matériel informatique étranger à l’Organisation dans ses locaux. Nous allons découpler au maximum les réseaux de l’Inquisition et ceux du gouvernement civil. Enfin, les lignes de communications seront cryptées selon de nouvelles méthodes et les télécommunications sans-fils seront remplacées au maximum par des réseaux filaires ne pouvant, en gros, être hackés au vol.

À partir de maintenant tous les mails entrant et sortant dans le réseau seront accessibles par les agents de mon bureau, qui auront la tâche fastidieuse mais – je le soupçonne – nécessaire de trier ce que les algorithmes ne sont pas encore capables de traiter. Spam, hameçons, liens dangereux etc.

Vous aurez tous droit à un cours de formation supplémentaire sur la cybersécurité et les bonnes pratiques à avoir. Ce cours est obligatoire.

Concernant 042 et ses amis : nous sommes en train de travailler à identifier la faille et, peut-être, l’origine de sa communication. Il y a de forte de chances que ce soit un message filmé en amont et injecté avec un logiciel d’override, classique, alors inutile de vous faire de faux espoirs. Mais à ce petit jeu là nous avons plus de moyens technologiques, matériels et humains, alors j’ai bon espoir qu’on ne les y reprenne plus. Si absolument nécessaire mon bureau organisera une chasse à l’homme. Nous en avons maintenant les moyens.

Ces gens parlent de diriger la Mährenie, d'obéissance des citoyens, appliquent des méthodes synarchistes. Par conséquent ce ne sont pas des alliés idéologiques et leur mouvement est réactionnaire, notre travail consiste justement à déraciner ce genre de menaces. Vous concernant, et concernant mon domaine d'expertise, considérez ce que je dis comme parole d'évangile. C'est bien simple, "Concernant la sécurité informatique, Ivanova est Dieu". Imprimez-le sur un post-it au lieu de vos mots de passe.
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