09/07/2013
11:17:15
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Première rencontre entre la Maronhi et Sylva au Bourg des Mahoganys

Après plusieurs correspondances visant à établir le dialogue entre la Maronhi et Sylva, une rencontre est planifiée pour le 5 août dans le Duché. La Grand Man de Maronhi fut conviée au Bourg des Mahoganys, capitale des sylvois. C'est un accueil en grande trombe qui est réservé à cette invitée de marque à la sortie de l'avion : tapis rouge, couloir de gardes en tenue de parade, orchestre jouant l'hymne maronhienne "Faisons de notre mieux". L'orchestre se débrouillait plutôt bien par ailleurs, sans égaler les meilleurs musiciens de Maronhi, il faisait preuve d'une bonne adaptation et témoignait d'un entraînement rigoureux avant la rencontre.
En tenue cérémonielle, la Duchesse Alexandra accueillit avec grâce Awara Koyouri, s'inclinant avec respect.

-Bonjour à vous, Grand Man de Maronhi, je vous souhaite la bienvenue dans le Duché. C'est un plaisir de vous rencontrer, avec vous fais un bon voyage ?

L'air était étouffant. C'était l'hiver dans l'hémisphère sud, ce qui signifiait que dans les tropiques il faisait chaud ET humide. En effet, la journée était ponctuée de pluies, qui transformaient le bitume du tarmac en sauna sous le soleil de Sylva. Ne souhaitant pas s'attarder dans ces conditions, et puisque de toute façon les lieux n'y étaient pas destinés, Alexandra invita son invitée à la suivre dans une limousine. L'intérieur était climatisé, mais à une température raisonnable pour ne pas provoquer un choc thermique, et aussi parce que la Duchesse était si frileuse qu'elle pouvait avoir froid juste après avoir cuit au soleil.
Le trajet jusqu'au palais se fit sans encombre, escorté par quelques voitures et motos. L'hôte en profitait pour tenir la discussion et faire la présentation des avenues visitées et bâtiments observés dehors. En parlant de bâtiments, le voyage s'acheva au Palais de la Duchesse, édifice admirable de pierre et de bois. C'était un enchevêtrement de colonnes et voûtes de marbre dans lesquelles s'enlaçaient des charpentes de bois massifs. Étrange mélange typiquement sylvois.

L'aménagement intérieur était lui aussi d'un style sylvois assez bipolaire. Il y avait clairement un héritage traditionnelle dans l'ébénisterie, les tapisseries sur les murs, ou sur les fresques murales, mais le tout était élégamment marié dans un ameublement moderne : panneaux et lattes de bois ou encore des miroirs habillaient certains pans de mur, des rubans de LED serpentaient les couloirs pour fournir un éclairage tamisé, et des œuvres d'art modernes abstraite (que ce soit des cultures ou des peintures) ornaient les coins. Ces œuvres d'art, par ailleurs, attiraient l'attention. Elles étaient colorées, avec du caractère. S'il n'y avait de sens dans ce qui était représenté, ça l'était avec force. Les sculptures mêlaient spirales et pointes avec violence, et les peintures fusionnaient délicats brossages et brutaux coups de pinceaux.

La délégation déboucha dans un grand salon, s'installant sur de confortables fauteuils autour d'une table. Une grande baie vitrée donnait sur le fleuve, et des plantes habillaient la pièce. L'air était frais et pourtant il n'y avait pas de climatisation, seulement un toit bien isolé et une aération bien pensée pour maintenir frais l'intérieur sans dépenser d'énergie.
Les majordomes mirent à disposition quelques boissons (non alcoolisées) allant de l'eau aux jus de fruits en passant par des thés. La Duchesse prit un verre de citron-annanas-orange et pris la parole.

-Il y a plusieurs points que je souhaiterais aborder durant cette réunion, à savoir l'ouverture d'échanges économiques, académiques, culturelles, et la facilitation de la circulation de nos citoyens entre nos deux nations.
Pour commencer avec les échanges académiques et la libre circulation, je souhaiterais savoir si la Maronhi accueille des étudiants et travailleurs étrangers. Le Duché de Sylva souhaite se constituer une main d'œuvre qualifiée et multiplie les partenariats dans ce sens. Il est bénéfique de confronter les ingénieurs à différentes façons de faire pour enrichir leur savoir-faire. C'est tout naturellement que cette demande serait réciproque. Le Duché de Sylva est tout à fait d'accord pour accueillir des travailleurs et académiciens, et encourager ses enseignants à voyager à l'étranger aussi.

Elle ne tournait pas autour du pot, elle n'appréciait franchement pas ça et cela ne faisait pas partie de ses habitudes.

À bord de l'aéroplane, sur un oreiller placé au milieu de la cabine recouverte de tatamis, Awara Kouyouri, Gran Man de Maronhi, méditait. Les rythmes subtils de sa respiration étaient en harmonie avec l'atmosphère feutrée de la cabine. Ses yeux mi-clos étaient dirigés vers ses mains, posées à plat l'une sur l'autre, plongés dans une introspection profonde. Le vol était un périple à travers la majesté du grand bois. À travers les hublots, Awara put, après cette séance méditative, observer d'un œil reposé la nature exubérante sous l'appareil. La canopée s'étendait à perte de vue, formant un océan vert luxuriant qui se perdait à l'horizon. La forêt semblait vivante, une entité mystique qui révélait la splendeur de la nature dans toute sa puissance. De tout le vol, elle ne mangea que quelques makis frits à l'acoupa ainsi qu'un maracuja coupé en deux, apportés dans un plateau en bois d'acajou ; et qu'elle réussit à dévorer sans faire couler le moindre jus, ce qui s'avérait un exploit pour beaucoup, d'une habitude naturelle pour certains. Le son des moteurs de l'avion se mêlait à la mélodie intérieure d'Awara, une symphonie silencieuse de pensées apaisées où chaque pensée était libre et flottante mais où son corps et son esprit réagissaient avec plus de naturel et de fluidité qu'à n'importe quel autre moment. Les préparatifs pour la rencontre diplomatique étaient bien présents dans son esprit, mais sa méditation lui permettait de rester sereine et centrée.

Lorsque l'avion atterrit enfin sur le sol de Sylva, l'accueil extravagant qui l'attendait était un contraste frappant avec la tranquillité de sa méditation. Le tapis rouge déroulé, le couloir de gardes en parade, et l'orchestre jouant l'hymne maronhien, bien qu'attendus car tels en étaient les protocoles pour le monde occidentalisé, semblaient presque irréels. Lorsque la duchesse s'inclina, elle en fit de même en exagérant la courbure, la soumission n'étant point honteuse en son pays ; une démonstration d'attaque sur son propre ego étant même fortement respecté.

« Enchanté Madame la duchesse. Les salutations vous reviennent avec la gratitude de l'humble voyageur. Votre hospitalité et vos mots de bienvenue réchauffent le cœur. Je remercie encore les cieux pour ce voyage qui m'a conduit jusqu'à vous, et qui fut, d'un calme bien trop rare sur la surface. »

La chaleur humide de Sylva, similaire à celle de Maronhi, enveloppait l'atmosphère, et les gouttes de pluie transformaient le tarmac en un miroir brumeux. Elle fut escortée dans une limousine climatisée, et le trajet jusqu'au palais fut l'occasion d'observer le paysage sylvois.

À l'arrivée au Palais de la Duchesse, les contrastes architecturaux frappèrent Awara. Les colonnes majestueuses en marbre et les charpentes en bois massif semblaient raconter une histoire millénaire, tandis que les éléments modernes ajoutaient une touche d'audace à cette élégance classique. Les bâtiments étaient d'une pâleur surprenante pour l'enfant d'une culture où l'éloge de l'ombre était la norme. Pour un Maronhien lambda, le beau, un peu partout mais très distinctement en architecture ne consistait pas en une substance en soi, mais rien qu’un dessin d’ombres, qu’un jeu de clair-obscur produit par la juxtaposition de substances diverses. De même qu’une pierre phosphorescente qui, placée dans l’obscurité émet un rayonnement, perd, exposée au plein jour, toute sa fascination de joyau précieux, de même le beau perd, aux yeux des Maronhiens, son existence si l’on supprime les effets d’ombre. Voilà le risque que se laissait à penser la Gran Man à propos de l'utilisation du marbre. À l'intérieur du palais, la fusion de l'ancien et du contemporain était encore plus marquée. Les œuvres d'art abstraites évoquaient à la Maronhienne des représentations religieuses, spirituelles, voire mystiques, sans parvenir à mettre le doigt sur la signification ou la représentation cachée. Cela ne ressemblait à rien qu'elle connaissait véritablement, ni à un mystique art d'estampe bouddhique, ni à quelques représentations d'esprits ou de dieux des arts autochtones-maronhos. Awara avait quitté les profondeurs de sa méditation pour embrasser cette nouvelle réalité, celle d'un pays qui lui semblait à la fois commun et étranger, comme une réalité alternative du plateau maronhien. Elle était prête à jouer son rôle. Avec sa maigre délégation, elle s'installa dans le grand salon et prit un verre de jus de wassaï à la demande du personnel sylvois. Elle observait la climatisation en songeant aux présents travaux d'installation de systèmes de climatisation adiabatique sur les places urbaines de Maronhi.

« La Maronhi demeure un pavillon de savoir pour ceux dont il est le dessein. Notre tradition éducative est riche, et nous pouvons aisément ouvrir nos portes aux étudiants, ingénieurs ou autres qui souhaitent contribuer à notre communauté académique et professionnelle si les relations avec leurs terres d'origine le permettent. Je tiens à vous assurer, Madame la duchesse, de l'entière coopération de la Maronhi dans ces domaines. Nous sommes ouverts à l'idée d'établir des partenariats académiques et professionnels pour faciliter ces échanges. Il est dans notre intérêt pour la stabilité du continent de voir le Duché émerger économiquement parlant. »
Tout en restant parfaitement à l'écoute de son interlocutrice, Alexandra se servie dans un petit bol de melons, pastèques, raisins et ananas, faisant signe à Awara qu'elle était libre de faire de même.

-Cette attention à l'éducation est louable et vous honore, d'autant plus qu'elle se couple à votre ouverture au monde. Ces échanges pourraient se faire de diverses façons, les plus évidents étant des projets activement définis tel que des échanges et voyages scolaires, contrat d'alternance, et ouverture des académies. Il y aurait en plus des mesures plus passives, comme la simple ouverture de nos frontières aux travailleurs qualifiés pour acquérir davantage d'influence.
Il y a pas mal de secteurs académiques sur lesquels Sylva accorde de gros efforts, notamment l'ingénierie et plus particulièrement l'aéronautique. Le secteur des énergies perçoit également des développements croissant, nécessitant la formation d'une jeunesse éprouvée dans le domaine. Et tous les domaines relatifs aux océans, que ce soit l'aspect géologique, écologique, énergétique, des projets scientifiques et académiques vont dans le sens de son étude.

Elle goba un morceau de pastèque et poursuivit.

-Nous pourrons formaliser ces détails ultérieurement, et passez à la suite des sujets si vous n'avez pas d'interrogations. La question suivante est celle des échanges économiques, Sylva a de grandes ambitions pour le continent de Paltoterra en termes de collaboration industrielle et économique. Et c'est dans ce cadre que de nombreux échanges ont été initié, dont avec votre nation.
Au-delà des matières premières plus ou moins abondantes que nous sommes disposés à exporter ou importer, nous sommes surtout intéressés par les produits transformés, de haute technologie notamment. Un secteur qui nous intéresse particulièrement est celui de l'outillage industriel et de toute l'industrie lourde que nous souhaitons développer.
Nous serions ravis d'établir des échanges à ces niveaux là. Par ailleurs, la Maronhi dispose-t-elle aussi de besoins particuliers à combler ?
Awara écouta attentivement la Duchesse Alexandra. Son intérêt pour l'industrie et la technologie étaient des points d'alignement évidents avec les objectifs de la Maronhi. Elle hocha doucement la tête en signe d'approbation.

« Vos initiatives dans l'ingénierie et l'aéronautique, ainsi que dans le secteur des énergies, sont tout à fait en phase avec nos besoins et nos domaines d'expertise. La Maronhi a développé, au fil des années, une solide industrie dans ces secteurs, et nous serions ravis d'explorer des partenariats dans le domaine de la recherche et du développement, de la formation, et de l'échange périodique de talents. Quant auxdits échanges économiques, nous sommes également intéressés par le développement de collaborations dans l'industrie lourde et l'outillage industriel. Nos besoins principaux résident dans les technologies de pointe, la robotique industrielle, l'automatisation, et les équipements de production de haute qualité. Nous possédons une solide base de recherche et de développement, mais nous cherchons toujours à accéder aux dernières innovations. Autrement, aucune question en particulier ; nous pourrons en effet y revenir. »

Awara prit une gorgée de son jus de wassaï avant de continuer.

« La Maronhi est également un important producteur de minéraux et de métaux rares ; une expertise qui pourrait intéresser votre nation pour ses projets industriels, les terres du Duché étant probablement tout aussi riches que celles de la République, et les opportunités abondantes. En ce qui concerne les besoins spécifiques, nous recherchons des partenaires pour moderniser notre infrastructure portuaire, mais aussi le secteur de la recherche marine, ce qui pourrait également profiter à vos projets liés aux océans. Pour le moment, la biologie et l'archéologie marines dominent largement nos secteurs de la recherche sur les océans, mais nous avons bien sûr vocation à diversifier nos intérêts. Je reste ouverte à la discussion pour déterminer comment nous pouvons mutuellement bénéficier de ces échanges. »

Elle conclut son propos en jetant un regard vers la fenêtre sur des acajous mahoganys de Sylva, si caractéristique de la ville.

« En ce qui concerne la circulation des ressortissants de nos nations respectives entre celles-ci, la Maronhi est favorable à la facilitation raisonnable de ladite circulation, tout en comprenant l'importance de maintenir la sécurité et la stabilité, notamment ethnico-culturelle. Nous pouvons explorer des visas de travail ainsi que des programmes d'échange pour les étudiants et les professionnels. Nous sommes ouverts à la discussion sur les détails et les exigences spécifiques pour garantir que ces arrangements fonctionnent de manière efficace et équilibrée pour les deux parties. »
Alexandra afficha un sourire franc, manifestement contente de la vitesse à laquelle les deux dirigeantes s'entendaient.

-C'est parfait. Je ferais transmettre tous le nécessaire à l'autorisation de ces collaborations. Le Duché s'investira personnellement à en encourager plusieurs. De façon à procéder progressivement et éviter toute précipitation, nous pourrons commencer par des collaborations de relativement moindres envergures. Et j'insiste sur le relativement, puisque je sais par exemple que le Secteur Aéronautique Sylvois se fera une joie de collaborer pour la conception et production d'un nouveau turbomoteur. S'il ne s'agit qu'une d'une petite partie dans la conception d'un avion, celà reste un projet d'ampleur.

Elle pris un autre raisin.

-Il en est de même pour l'outillage industriel. Les industries sylvoises vont se précipiter sur cette opportunité de décupler leur production tant sur les aspects quantitatifs que qualitatifs. Et même si nous tenons à conserver un certain scrupule sur la vitesse de cette collaboration le temps que nos échanges soient bien rôdés, beaucoup de secteurs sensibles chercheront à compléter leurs parcs machines. Hors nous devons veiller à bien nous "calibrer" au préalable, apprendre nos intérêts, les faire concorder et avancer dans la même direction.
Le Duché est en effet conscient des différentes méthodes de travail à petite et grande échelles en fonction des nations, et des objectifs priorisés, tant d'occasions de divergences lors de coopérations. C'est avec cette contrainte en tête que nous tenons, respectueusement, à avancer prudemment malgré notre enthousiasme non dissimulé à rapidement établir des projets communs d'envergure.
Concernant la suite des points évoqués, le Duché déploie aussi des efforts dans l'établissement d'une industrie navale de pointe. Nous mettrons probablement du temps à réellement égaler celles de la Maronhi, et ne pourrons peut-être pas vous permettre de réellement moderniser votre secteur. Par contre, il y a fort à parier qu'à défaut de les développer, nous pouvons les compléter. Celà fait suite à mon propos sur les différences industrielles entre les nations, et les processus par nécessairement supérieurs mais complémentaires qui permettent de pallier certains points. Il serait là aussi très intéressant de voir ce que donnerait la collaboration d'ingénieurs navals entre Sylva et la Maronhi.

Elle afficha un grand sourire enthousiaste en poursuivant.

-C'est naturellement que je vais maintenant aborder, et avec fierté, la question de l'exploration sous-marine. Nous avons observé dernièrement de grands projets d'exploration spatiale ou polaire, mais nous sommes en Sylva si je ne me trompe les premiers à avoir initié l'exploration sous-marine. S'il était question de simplement prospecter les gisements d'hydrocarbure sous les fonds marins, il s'agit maintenant d'un dispositif très complet sur tous les plans, qu'ils soient géologiques et écologiques. Ce serait un honneur pour nous d'échanger ce savoir faire avec nous, que ce soit au niveau des sondes tractées ou sous-marins scientifiques, que des instruments eux même, méthodes d'observations, et résultats.
Enfin concernant la libre circulation, c'est encore une joie de voir concorder nos opinions. Toujours avec les précautions de procéder pas à pas, nous pourrons débuter avec un dispositif assez formalisé et procédurier, incluant des visa et autres formulaires. Si à terme la chose se déroule bien, nous pourrons alléger ces procédures vers un dispositif plus accessible et libre.
La Gran Man prit note des domaines spécifiques dans lesquels une coopération était envisagée, notamment l'aéronautique, l'outillage industriel, l'industrie navale et l'exploration sous-marine.

« Vos propositions sont extrêmement encourageantes, Madame la duchesse. Nous sommes également enthousiastes à l'idée de collaborer avec le Duché de Sylva dans ces domaines. Il est sage de procéder progressivement pour garantir la réussite de ces projets et nous nous engageons à travailler en étroite collaboration avec vos équipes pour assurer une mise en œuvre efficace et bénéfique pour nos deux nations. »

Awara prit une nouvelle gorgée de jus de wassaï et poursuivit.

« En ce qui concerne l'exploration sous-marine, nous sommes particulièrement intéressés par cette initiative. Comme énoncé plus tôt, nous nous penchons dernièrement sur l'exploration de nos fonds marins, principalement pour les domaines que sont l'archéologie navale et la biologie marine. Nous envisageons également de passer à la prospection de ceux-ci pour d'éventuels gisements d'hydrocarbure. Ainsi, tirer profit des avancées et de l'expérience de Sylva dans ce domaine de recherche et inversement tout en complétant nos industries nous serait mutuellement bénéfique. Nous sommes ouverts à la collaboration pour l'échange de connaissances, de technologies et de méthodes d'exploration. »

Elle sourit en réponse à l'enthousiasme de la Duchesse.

« Il est encore trop tôt pour dire jusqu'à où ira l'allégement des procédures. Vous devez savoir quel fardeau immense il est déjà de devoir composer avec des activités illégales sur un territoire aussi vierge, notamment quand celles-ci sont en partie le fruit de ressortissants étrangers utilisant volontiers les opportunités permises par la nature dudit territoire. Cependant, nous sommes impatients de voir ces accords se concrétiser et de renforcer nos liens économiques, académiques et culturels. »
-Tout à fait, nos avis convergent à ce niveau. Ces ambitions nécessitent du temps pour s'atteindre efficacement sans bousculer nos sociétés.
Maintenant il y a un autre point que j'aimerais envisager, qui tient à cœur au Duché. C'est un projet que nous envisageons pour le moyen et long terme après avoir pris les dispositions requises à son établissement, vous allez comprendre pourquoi. Nous ambitionnons ni plus ni moins que de constituer un axe logistique d'envergure faisant une boucle dans l'ensemble des nations de Paltoterra, sous la forme de réseaux de chemins de fer, gazoducs et oléoducs. Cela permettrait une intensification des échanges et la mise en place de projets industriels collaboratifs à grande échelle. C'était pour tout vous dire la première raison de cette rencontre, à savoir établir un premier contact et initier les premiers pas pour des rapprochements.

Elle fit une courte pause pour boire une gorgée de jus.

J'insiste sur le long terme prévu pour ce projet, il nécessitera une coopération étroite entre nos nations, avec toute l'entente et coordination de nos services. Cela ne devra pas être fait à la hâte et c'est pour cette raison que je vous l'évoque mais que rien n'est encore concrètement prévu. Il s'agit de vous informer de la finalité de nos ambitions mais sans la presser de façon à vous laisser réfléchir pleinement à ce projet. Cela permettra à la Maronhi de pleinement intégrer les conséquences d'un tel projet sur sa société et son économie, ainsi que sur sa politique et place en Paltoterra.
Car il y a aussi l'aspect politique. Le projet a pour vocation se rallier progressivement l'ensemble des nations de Paltoterra, dans un premier temps un trio Sylva, Grand Kah et Maronhi, puis dans un second temps se développer vers le sud en incluant l'Arch, Péronas, et les provinces en Paltoterra de Caratrad et Zelandia. Comment s'entend la Maronhi avec ces nations, en toute honnêteté ? Pourrez vous envisager une collaboration aussi étroite ? Je vous fais part en toute transparence de l'implication, volonté, tenants et aboutissants de cette idée, n'hésitez pas à vous exprimer clairement.

Elle fit enfin silence pour laisser parler son interlocutrice.
Awara écouta attentivement la proposition de la duchesse de Sylva, en hochant légèrement la tête pour exprimer son accord. Après une brève pause, elle répondit en manifestant visuellement un intérêt retenu pour le projet en question.

« Je comprends tout à fait l'importance de ce projet à long terme, et je suis naturellement encouragée par la perspective de coopération et de collaboration étroite entre nos nations. De plus, la Maronhi n'est pas récalcitrante aux initiatives transnationales réfléchies et tempérées, comme en témoigne notre accord avec le Grand Kah sur la question ferroviaire à l'occasion d'une rencontre à Cuetlachquiauhco. Nous sommes pleinement conscients de l'importance de tels projets pour le développement économique et la connectivité régionale, et nous sommes prêts à participer activement à cette initiative logistique d'envergure à l'avenir. »

Awara prit une nouvelle gorgée de jus pour apporter une pause réfléchie à sa réponse, avant de poursuivre. « En ce qui concerne nos relations avec les autres nations du Paltoterra, je dois admettre que nos intérêts pour le Nazum ont récemment laissé peu de place et d'opportunités à exploration des possibilités de coopérations avec le monde occidental paltoterran. Cependant, nous sommes ouverts à de nouvelles opportunités de collaboration, notamment avec l'Arche, le Péronas ou même le Yuhanaca, voire les territoires ultra-marins de Caratrad et de Zelandia. Nous accueillons positivement l'idée de cette initiative. » Sur cette note, Awara se tut, laissant à la duchesse le temps de réagir et de poursuivre la discussion.
Le sourire passant d'enthousiaste à serein, Alexandra poursuivit.

-Bien, tous les facteurs semblent favorables à une coopération bénéfique. Dans ce sens, je propose de commencer avec l'officialisation de l'ouverture aux échanges entre nos nations avec tous les protocoles qui vont avec (douane, mesure protectionniste, sûreté contre la concurrence et autre). De plus nous pourrons entamer avec "juste" l'ouverture de chemins de fer et axes routiers, et laisser dans un second temps l'établissement d'oléoducs et gazoducs une fois nos industries et économies calibrées entre elles. Les trains sauront de toute façon assurer dans une moindre mesure un échange de gaz et pétrole.
De telles mesures sont déjà en cours avec le Grand Kah et permettront déjà la première étape de cet ambitieux projet, avec l'établissement d'un triangle de chemins de fer. Nous pourrons l'étendre à l'avenir au sud de Paltoterra, de façon aussi progressive. Qui sait quel potentiel s'ouvre à notre continent, deviendra il une super économie à l'industrie inégalée grâce à ça ? Je me permet cet orgueilleux espoir mais, je vous rassure, garde les pieds sur Terre quant aux résultats que nous pourront concrètement atteindre sur le court et moyen terme.
Par ailleurs, la Maronhi applique t-elle des mesures protectionnistes particulières ?
« Tout me paraît bon sur ces points. »

Elle prit un court instant pour réfléchir au sujet soulevé par la duchesse sur les mesures protectionnistes en Maronhi.

« Sans accord de libre échange, nous pratiquons au besoin des tarifs douaniers sur les produits étrangers en cas de demande faible ou de production intérieure suffisante. Des quotas d'importation fluctuant sont régulièrement utilisés au gré des besoins du commerce intérieur. De plus, des normes strictes et réglementations techniques sont mises en place pour garantir la qualité des produits entrant sur le territoire. Des barrières non tarifaires telles que des exigences en matière d'étiquetage, des certifications spécifiques, etc, sont également appliquées. Les biens culturels peuvent faire l'objet d'exigences particulières ou d'interdiction pure et simple. Enfin, et il parait presque inutile de le mentionner, mais des restrictions sur les investissements étrangers sont évidemment imposées pour empêcher la prise de contrôle des entreprises locales par des investisseurs étrangers n'ayant pas notre aval. »
-Tout cela me semble "commun" si j'ose dire, rien qui ne sorte de l'ordinaire. Sylva applique des mesures semblables, notamment pour éviter que l'économie ne soit bousculée de façon incontrôlée ou que des concurrences déloyales envers nos entreprises nationales ne se mettent en place.

Terminant son verre, elle reprit.

-Bien, il semblerait que nous soyons en accord sur la plupart des plans. Nous pourrons faire rédiger et approuver le traité officiel formalisant la question et les étapes de l'ouverture économique et logistique entre nos nations. J'entamerais en parallèle une rencontre avec le Grand Kah pour aborder la même question et finaliser cette première étape entre nos trois nations.
En attendant, je souhaiterais vous inviter à un dîner d'État si nous n'avons aucun autre point à aborder.

-

Le repas se déroula plus tardivement dans la soirée, avec d'autres nobles éminents du Duché. On y retrouvait aussi bien les comtesses de certaines régions que des membres de leurs familles à des postes importants. Se succédèrent des accras et boudins en entrée, un dombre de lambi en plat de résistance, et du sik a koko en dessert. Le tout était tout naturellement accompagné au choix de ti-punch, planteurs ou jus de fruits divers, voire juste de l'eau fraîche. C'était si le Grand Man le souhaitait l'occasion de discuter avec la noblesse présente, incluant Alexandra Boisderose et ses filles Matilde et Léa, mais également des membres de la famille Despalmier, Sablier, Desmangroves ou Lépini.
Awara, écoutant attentivement les propos de son homologue, esquissa un léger sourire, montrant sa satisfaction face à la convergence de leurs idées. « Je partage votre sentiment. »

Terminant son verre d'un geste mesuré, elle inclina légèrement la tête en signe de respect. « Il semble que nous ayons jeté des bases solides. Je suis tout à fait favorable à la rédaction du traité officiel. Cette formalisation renforcera nos engagements et garantira la transparence nécessaire. »

Quant à l'invitation au dîner d'État, la Gran Man accueillit l'idée avec bienveillance. « Je suis honorée par votre invitation et je l'accepte volontiers. »


Le repas, riche en saveurs paltoterrannes et en mets typiques de la créolité sylvoise, devint comme pouvait l'observer Awara, le théâtre d'échanges informels entre les convives. La Gran Man se laissa guider par la duchesse afin d'être convenablement présentée aux proches du pouvoir sylvois et ainsi s'insérer naturellement dans les conversations.
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