04/08/2013
08:52:00
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[SOMMET] Le Pavillon des Ponts

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LE PAVILLON DES PONTS

Sommet du Nazum du Sud-Est

Mars 2013 - Temple Hakuji (Sokcho)

Sommet du Nazum du Sud-Est


Sous le regard scrutateur de la scène internationale, Sokcho, la capitale lumineuse du Fujiwa, se prépare à devenir l’épicentre d’une rencontre sans précédent. Les acteurs du Nazum du sud-est, animés par un désir commun de solidarité et de prospérité, convergent vers cette métropole pour forger une alliance inédite, promesse d'un avenir régional plus solide. Ce sommet, bien plus qu'une simple entente économique, aspire à redéfinir les contours géopolitiques de la région, brouillant astucieusement les lignes entre coopération commerciale et ambitions stratégiques plus profondes. Dans les coulisses du pouvoir à Sokcho, une effervescence contenue trahit l'importance de l'enjeu. La ville, méticuleusement préparée, se pare de ses plus beaux atours, mélange harmonieux de modernité et d'héritage historique. Les rues s’illuminent, prêtes à accueillir dignitaires et délégations dans un ballet diplomatique soigneusement chorégraphié. La presse et les forums en ligne bourdonnent de questions sur la pertinence et la timing de cette initiative audacieuse, en pleine période pré-électorale au Fujiwa. Les discussions entre nations pourraient s'étirer, mais une assurance inébranlable semble émaner des sphères du pouvoir, laissant présager une stratégie habilement dissimulée aux yeux du public.

Sokcho, barricadée avec tact, se tient prête à accueillir les représentants nazumis étrangers dans la plus grande sécurité. L'aéroport international, véritable porte d'entrée sur la métropole, attend l'arrivée des invités avec une anticipation palpable. Un cortège minutieusement organisé est prêt à guider les participants à travers la ville, depuis la descente des avions jusqu'aux lieux de la conférence. Chaque fonctionnaire fujiwan, dans ses salutations empreintes de respect, est un ambassadeur de la culture et de l'hospitalité fujiwane.

Les participants sont convoyés par un cortège diplomatique au lieu du rendez-vous. Parmi les choix des organisateurs, le temple Hakuji se distingue, un édifice historique emblématique de la capitale. Vieux de plusieurs siècles, ce temple est un joyau de l'architecture traditionnelle fujiwane, avec ses toits courbés majestueux, ses sculptures en bois minutieuses, et ses jardins paisibles. Rénové et doté de technologies modestes, il offre un cadre à la fois solennel et apaisant, propice à la réflexion et au dialogue. Tout a été aménagé méticuleusement pour une rencontre sans accrocs. Les représentants et diplomates invités découvriront la salle de conférence principale, transformée pour l'occasion, où la beauté de l'ancien se marie avec le confort du moderne. Elle est équipée de systèmes audiovisuels récents et de dispositifs de traduction simultanée. Les jardins du temple offriront un espace calme pour les discussions informelles ou la réflexion personnelle. La direction des lieux a également aménagé des accès spéciaux pour faciliter l'arrivée et le départ des délégations, tout en garantissant leur sécurité. Le choix du Temple Hakuji comme lieu du sommet symbolise le respect des traditions et de l'histoire du Fujiwa. Il représente un pont entre le passé et l'avenir, reflétant l'esprit de cette réunion importante.

Pour représenter le Fujiwa dans ce projet, un fonctionnaire désigné par le Bureau du Premier Ministre, en accord avec le ministère des Affaires Étrangères, aura la charge de représenter le pays et d'engager le dialogue avec les parties prenantes sur la vision fujiwane pour le Nazum du Sud-Est. Il s'agit de Gaku Minamino, un ancien ambassadeur du corps diplomatique fujiwan au Jashuria et actuellement responsable de la section des affaires juridiques et des traités. Réputé pour son stoïcisme, son pragmatisme et son attention aux détails, il est tout indiqué pour remplir cette mission de représentation. Dans la salle de conférence, où il s'est installé, une table ronde est équipée de tout le nécessaire, avec des sièges bien disposés pour accueillir les conseillers de chaque représentant. La parole est libre pour chacun, car la confiance règne dans cette salle, et l'organisation est consciente du respect mutuel que chacun témoigne aux autres présents. Les représentants de la Troisième République du Jashuria, la Republik Sosialis Negara Strana, la République Démocratique du Wanmiri et l'exclave de Heon-Kuang sont donc attendus avec impatience.

[HRP : C'est la première fois que j'organise un sommet, donc je ne suis pas très sûr de la manière de procéder, notamment concernant le rythme à adopter. Si vous avez des conseils ou des remarques à me faire, n'hésitez pas à me contacter sur Discord :)]
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Lorsque le nom du représentant nommé par l'Assemblée communale générale de Heon-Kuang fut connu, le commissaire Shao Kai Yuha ne put s’empêcher de sourire. Si officiellement il était trop occupé pour se présenter personnellement à Sokcho, il s’était surtout arrangé pour en être absent. Heon-Kuang devait y siéger en entité territoriale indépendante – ce qu’elle était, mais ce que la présence d’un commissaire rattaché à la confédération aurait pu rendre difficilement compréhensible pour des étrangers peu au fait du fonctionnement institutionnel de cette dernière.

Pour autant, il ne s’attendait pas à ce que la citoyenne Melenko soit nommée à sa place. Sasha était un bon élément, elle l’avait prouvé à maintes reprises durant son passage au Comité sur l’Attractivité de l’Intercommunale. Mais lâcher un jaguar sur les étrangers ? La petite faction des réformistes radicaux faisait trembler la moitié de la ville, peut-être que les déployer pour un sommet international était un peu to much.

D’un autre côté c’était Sacha (et d’autres) qui avait permis la création d’un conseil consultatif corporatiste. Elle avait poussé de nombreuses entreprises à revenir à Heong-Kuang et à y investir massivement. Le modèle mixte de la cité, entre socialisme assumé et économe de service ultra-mondialisé, s’était assuré quelques nouvelles décennies de succès selon un modèle qui intriguait certes l’Union mais répondait, après tout, parfaitement aux recommandations du livret stratégique du précédent comité de Volonté Publique. L’Estimable. « Parasiter l’oligarchie capitaliste », et quoi de mieux pour se faire que d’y participer pour en détourner des sommes. C’était la loi du marché. La course au plus attrayant. La commune, si exclave qu’elle fut, avait fait en sorte de l’être.

C’était peut-être aussi pour ça, qu’elle venait. Il existait sans doute des figures, dans le monde politique et économique, qui n’appréciaient pas la situation. Des gens qui, plutôt que de profiter des largesses des Cent jardins du vieux royaume, préféraient l’assécher, mettre un terme à ce qu’ils considéraient peut-être comme une forme de concurrence déloyale. C’était vrai, après tout. S’il y avait peu d’avantages évidents au statut de cité-État, Heon-Kuang avait déployé des sommets d’ingéniosité pour tous les mobiliser.

Il y aurait beaucoup à dire, à n’en pas douter.

La citoyenne Meshenko vint seule en Fujiwa. Seule avec son escadre de diplomates, assistants et aides divers, certes, mais sans la supervision de qui que ce soit du parlement général ou communal. Elle s’alluma brièvement une cigarette entre l’aéroport et la voiture devant l’amener au Temple Hakuji ce qui – et elle le savait – ne manquerait pas de faire gloser dans son pays natal, réputé pour son hygiénisme. La première chose qu’on voyait en apercevant Meshenko, c’était d’abord son imposante tignasse rousse. Des cheveux épais et bouclés qui entouraient son visage et tombaient de part en part de son cou. Puis on rencontrait ses traits un peu durs, son air vaguement ennuyé, et son sens certain du style. Ce dernier point était un classique de la diplomatie kah-tanaise, qui mettait un point d'honneur à se présenter comme une nation "cool", à la pointe. De réputation, la citoyenne Meshenko était une de ces fonctionnaires invisibles de la cité, naviguant avec méthode dans son système politique complexe et architecte d’excellentes relations avec les milieux d’affaire internationaux. Sa présence ici envoyait un message aux marchés, et elle savait d’avance que s’il lui venait l’idée de se saisir d’un PDA pour regarder les cours de la bourse à l’est Nazis, ceux-là enregistreraient une légère hausse, notamment dans les secteurs liés à Heon-Kuang. Elle était comme l’étendard d’un libéralisme décomplexé. La promesse pour ses "clients" d’une réunion non-seulement utile, mais lucrative. Une ironie qui ne lui échappait pas.
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Parvati Mathai

Parvati Mathai, Quatrième ambassadrice du Jashuria

La Quatrième Ambassadrice de la Troisième République du Jashuria, fraichement nommée à ce poste, vivait son baptême du feu. Madame Parvati Mathai était arrivée à Sokcho peu après l’arrivée de la délégation kah-tanaise, avec son aéropage de diplomates, d’assistants et de communicants. Son investiture au poste de Quatrième Ambassadrice était placée sous les auspices du renouveau des relations diplomatiques nazumis et le Hall des Ambassadeurs n’avait pas lésiné sur les moyens pour faire en sorte que sa nomination se fasse peu avant l’évènement de l’année : le sommet du Nazum du Sud-est organisé par l’Etat du Fujiwa.

La nomination de Parvati Mathai était comme d’habitude, éminemment politique et s’inscrivait dans la droite lignée de la ligne tenue par la diplomatie extérieure jashurienne depuis des années : créer des liens durables avec ses voisins et les nations étrangères partageant leur amour du commerce et de la prospérité. Madame Mathai était issue d’une famille ordinaire d’Azur. Représentante parfaite du système d’ascension sociale jashurien, elle était passée par le cursus honorum du Hall des Ambassadeurs après plusieurs années à travailler comme directrice générale d’une firme jashurienne spécialisée dans les relations publiques. Passionnée par les relations internationales et d’une nature joviale et sociable, sa nomination au poste de Quatrième Ambassadrice avait permis de rajouter une nouvelle corde à la lyre bien fournie de l’arsenal diplomatique jashurien.

Son prédécesseur étant parti à la retraite, la passation s’était déroulée selon le protocole en vigueur et selon la plus parfaite tradition jashurienne. Monsieur Amar Panja avait occupé le poste de Quatrième Ambassadeur pendant plus de 20 ans et avait formé nombre de ceux qui prenaient aujourd’hui la relève de la vieille garde diplomatique jashurienne. L’homme avait été un véritable mentor pour elle et lui avait appris à naviguer avec patience dans les arcanes du pouvoir jashurien. Il se tenait encore aujourd’hui à ses côtés, en tant que simple invité du cortège diplomatique, dans son complet vert d’eau des plus seyants, malgré son petit embonpoint.

Vêtue d’un sari bleu brodé de fils d’or et de perles, la Quatrième Ambassadrice avait, comme tout le monde, prit le chemin du Pavillon des Ponts dès son arrivée sur le tarmac de l’aéroport de la capitale du Fujiwa. Sa mission diplomatique était claire et avait été révisée en amont avec la Première, la Seconde et la Troisième, dans une réunion privée suite à de multiples discussions avec le Cercle Intérieur : cette coopération internationale était une PRIORITE et devait se réaliser. Cela faisait des années que la Troisième République du Jashuria travaillait à rendre le sud-est du Nazum stable et … coopératif. Un véritable tour de force quand on savait qu’il y avait à peine 20 ans, le sud-est était sur le point de retomber dans l’anarchie la plus totale. Les Jashuriens avaient eu la chance de pouvoir compter sur la hauteur de vue de ses voisins les plus puissants et respectables : le Fujiwa, le Wanmiri, le Negara Strana et bien entendu, l’Exclave du Grand Kah basée à Heon-Kuang. Malgré les retards causés par la diplomatie listonienne calamiteuse et la récente victoire militaire conjointe au Mokhaï, le sud-est du Nazum était désormais un espace sécurisé, stable et prospère, qui ne demandait qu’à devenir un nouveau phare de civilisation dans le monde contemporain.

La récente victoire de la coalition nazumie au Mokhai contre la Loduarie communiste et les loyalistes d’Aoki Saburo avait redonné un coup de fouet aux relations entre ces différents pays. Les relations avec le Grand Kah s’étaient réchauffées et l’ensemble des participants était désormais auréolé du prestige de la victoire contre le communisme eurysien. Le communisme, peut-être ! Mais un communisme nazumi, bien tempéré et loin des atrocités commises par les Eurysiens – quand bien même le communisme nazumi n’avait pas laissé un excellent souvenir au Jashuria il y a un siècle. Toujours est-il que les Jashuriens étaient ravis de constater que la coopération militaire, même improvisée, avait payé et que les Loduariens étaient repartis la queue entre les jambes. La défaite militaire loduarienne avait suffisamment galvanisé les Jashuriens pour que les relations diplomatiques prennent le chemin d’une coopération approfondie avec ses voisins. Dans les salons du pouvoir, on murmurait que de nombreux projets étaient en train d’être étudiés par des cabinets d’étude, notamment des projets d’infrastructures communes.

La voiture de l’ambassadrice arriva au Pavillon des Ponts sous le regard impatient des caméras. Une foule compacte de journalistes nazumis s’étaient pressés à cet évènement d’ampleur. Joyau de l’architecture fujiwane et nazumie, le temple qui accueillait la rencontre internationale avait été parfaitement récuré et nettoyé, avant d’être vidé de ses touristes. Il émanait de ce bâtiment une impression de sérénité retrouvée, maintenant que les crépitements des flashes des touristes avaient été remplacés par les pas feutrés des diplomates.

La délégation jashurienne s’avança sur le parvis et salua avec déférence les délégations présentes. Comme le voulait la tradition, des cadeaux avaient été apportés dans des coffrets en bois d’ébène finement ouvragés. Il était de bon ton d’offrir des cadeaux lorsque l’on était invité dans un pays étranger. Des cadeaux, oui, mais ni trop pompeux, ni trop modestes. La qualité d’une délégation était jugée au soin que ses diplomates prenaient dans le choix des cadeaux, une coutume que même l’Empire Xin respectait à la lettre. Le Jashuria ne dérogeait pas à la règle : le sens des convenances était inscrit dans son ADN.

Les présentations et les salutations faites, madame Mathai fut conduite dans la salle de conférence où allait se tenir ce sommet stratégique pour l’avenir du Nazum. Flanqué de son assistant et de son mentor, Parvati Mathai se conforma au protocole en vigueur, un sourire radieux aux lèvres et de bons mots à portée de mains pour assurer ses homologues de ses meilleurs vœux quant à la réussite de ce sommet diplomatique. Et pour ceux qui la questionnaient sur les choses les plus triviales … oui, elle avait fait bon voyage. Il fallait savoir de temps en temps sacrifier un peu de temps aux mondanités et aux platitudes les plus fades.
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Wakiman Firmansyah

En l'espace de deux ans à peine, le Negara Strana avait réanimé l'essentiel de ses relations avec ses voisins, plus ou moins direct, du Nazum. Alors que le processus avait été aisé voir agréable en ce qui concerne le Jashuria, Heon-Kuang et le Wanmiri, la tâche avait été davantage méticuleuse et progressive lorsqu'il avait fallu converser à nouveau avec le Fujiwa, héritier de l'Empire Aichi, colonisateur du Negara Strana. Si ardue fut-elle, cette mission peut tout de même être considéré comme une réussite. Malgré quelques controverses nationales, mes deux pays ont pu s'accorder sur plusieurs sujets et engager diverses coopérations. Pour effectuer ces manoeuvres, la Première Commissaire du Peuple Kawaya Haryanto, accompagné de sa fidèle Commissaire aux Affaires Etrangères Siska Widiastuti, s'était entourée d'analyste et expert en relation international. Parmi eux, Wakiman Firmansyah eut un rôle décisif.

Directeur du Centre de Recherche des Relations Internationales de l'Université Nationale du Peuple à Kotarakyat, le professeur W. Firmansyah est expert en relations internationales, notamment en ce qui concerne le Fujiwa. Remarquable et fin analyste, il fut souvent sollicité dans différentes missions diplomatiques, et ceux, tout au long de sa carrière. Sous conseil avisé du Président de la République lui-même, il fut choisi par la Première Commissaire du Peuple pour assisté le rapprochement entre les deux Nations ennemis. Ainsi, lorsque le Fujiwa émetta l'idée d'une organisation internationale composée de plusieurs puissances nazumis, il fut évident que Wakiman Firmansyah représenterait le Negara Strana.

Contrairement à beaucoup de stranéen, l'homme demeurait relativement froid et gardait un sérieux imperturbable. Son étonnante barbe, ses cheveux gris et ses fidèles lunettes de soleil lui donnait davantage un air distant qui contrastait avec le sourire accueillant de personnages comme Kawaya Haryanto. Malgré tout, ces caractéristiques inconvéniante au Negara Strana plaisent généralement aux ambassadeurs des différentes autres nations, bien plus sobre que les stranéens jovials. Le seul point qu'il pouvait lui être reproché est son facheux penchant libéral. A travers de plusieurs déclarations, le professeur Firmansyah avait affirmé admirer le modèle économique libérale qui apporterait plus au Negara Strana. Néanmoins, Haryanto et Widiastuti plaçait en lui toute leur confiance: peu importe ses opinions, Wakiman Firmansyah exécute ce qu'on lui demande, et avec brio. Ce serait mentir d'accuser l'homme comme capable de trahison au socialisme ou autre, alors que celui-ci a toujours su défendre les intérêts stranéens avec conviction.

Arrivé en avion, le diplomate et le corps diplomatique stranéen étaient les quatrièmes à arriver sur la piste fujiwanne. Firmansyah fut accueilli avec le grand respect traditionnel fujiwan. Ayant lui même une grand mère fujiwanne, le stranéen se sentait quelque part chez lui et était, en tout cas, bien plus à l'aise avec les coutumes locales que celles de sa propre nation. La conférence était prévu au Temple Hakuji, un lieu fort en symbole. En effet, ce temple, l'un des plus majestueux de la capitale, était le symbole même de la puissance, de la culture et de l'histoire fujiwanne. Dans le cortège l'accompagnant au lieu de rendez-vous, W. Firmansyah pu observer le paysage urbain de Sokcho, quelque peu semblable à celui de Pradipta qui s'en était grandement inspiré. Arrivé au Temple Hakuji, l'esprit du lieu semblait être plus vivant que jamais, et changé à la fois. Aussi ancien que ce lieu pouvait être, l'importance de ce sommet semblait modernisé et métamorphoser le temple-même. Il était évident que le Fujiwa voulait frapper fort pour cet évènement qui risque, effectivement, de faire du bruit.
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Une rafale souffla sur le tarmac de l’aéroport de Sivagundi, sifflant lorsqu’elle rencontrait des obstacles, comme si elle leur reprochait de gêner sa progression. Elle soulevait les feuilles, les papiers et autres déchets, les emportant au loin. Une autre s'immisça dans le manteau noir d’un des deux hommes qui attendaient au pied de la rampe d’embarquement, le faisant frissonner. “Brrr...” fit-il en refermant sa veste.

“Il va falloir qu’elles se dépêchent, sinon je vais mourir de froid. dit-il à son collègue. Heureusement qu’il ne pleut pas, sinon ce serait vraiment infernal.
- Tu ne crois pas si bien dire... Mais en attendant encore un peu plus, on risque de rater notre créneau. Putain de saison des pluies... Et il fallait qu’ils collent le sommet à ce moment-là de l’année ?
- Sinon, quand ? Ils n’ont pas tort, c’est l’opportunité du siècle pour nous.
- Ouais… Il n’empêche qu’on se gèle par ici.”


Soudain, deux femmes sortirent de l’aérogare, se dirigeant vers les hommes qui les attendaient. Eddonna Tymeri, Première Ambassadrice du Wanmiri, et Aaliya Marwah, Directrice Diplomatique déléguée à la Coopération Régionale. La petite nouvelle.
Eddonna se fit la réflexion que l’aéroport avait bien changé depuis son dernier vol, pour le Negara Strana. On avait rénové certaines pistes, bétonné de nouvelles, bref, on se modernisait. Et à vitesse grand V. Tout changeait à un rythme effréné, pour rattraper le retard immense que le pays avait pris. Et là, on avait l’occasion d’obtenir de l’aide.

Mais ceci n’était pas son combat. Elle avait à faire ailleurs. Ce serait à Aaliya de s’en charger, de mener cette bataille, dans un baptême du feu épique. Eddonna ne s’en faisait pas. Elle connaissait la petite, elle l’avait formée elle-même. Et ce qu’elle envoyait au sommet du Nazum du Sud-Est, à Sokcho, loin d’être la frêle jeune fille que l’on voyait au premier abord, était en réalité un tigre affamé et sans pitié. Comme elle, et même plus. Plus dangereuse, plus déterminée, plus terrible. Elle était un tigre qui se battrait pour les intérêts wanmiriens. Pour qu’ils l’aient, cette aide dont ils avaient besoin.

Les deux femmes se saluèrent traditionnellement, la main désignant d’abord leur front puis l’autre dans un geste qui signifiait “mes pensées vont à toi”, puis elles se séparèrent. Eddonna rentra se réchauffer dans le bâtiment, tandis qu’Aaliya monta dans l’appareil. Celui-ci ne tarda pas à décoller, afin d’éviter, justement, de rater le créneau où la pluie s’était arrêtée.

Le trajet se passa sans difficulté, et l’avion atterrit tranquillement quelques heures plus tard sur le tarmac de l’aéroport de Sokcho. Là, un cortège diplomatique les fit monter dans une voiture, avant de les emmener vers le lieu de la rencontre. Les journalistes se pressaient contre les vitres, cherchant à tout prix à avoir des images. La délégation wanmirienne était la dernière à arriver, et tous ceux qui n’avaient pu observer les premières se jetaient sur eux afin de garder une trace de cet instant mémorable. Aaliya se faisait la réflexion que, sur ce point, le Wanmiri était bien plus calme. “Qu’ils sont bruyants… Tout ça pour quelques photos agrémentées d’un texte préparé à l’avance… Heureusement que nous n’avons qu’un seul journal, ça apaise le jeu.”

Ils descendirent une fois arrivés au temple. L’endroit était magnifique, il fallait se l’avouer. Des toits courbés typiquement nazumis, un bois ancien et finement ouvragé et, au loin, on pouvait apercevoir des jardins parfaitement entretenus. Toutes les conditions étaient réunies pour que les échanges se fassent dans de bonnes conditions. L’endroit, tout récemment vidé de ses touristes et aménagé en conséquence pour cette rencontre, respirait le calme et la sérénité. D’autant que, maintenant qu’ils étaient à l’intérieur, les flashs des appareils photos et le bruit de la foule ne pouvaient plus l’atteindre.

Les autres délégations les attendaient. Mlle. Marwah salua les représentants des autres nations avant de leur offrir les cadeaux que l’on avait préparés à leur intention. Oh, rien de grandiose, non, de petits présents, mais des présents tout de même. Et c’était cela qui comptait : souvent, les gens se fichaient de ce qu’ils recevaient, du moment qu’ils recevaient. Enfin, l’on avait tout de même fait un effort, et les cadeaux étaient de qualité. Il n’aura pas fallu paraître pingre et être mal vu dès le début.

Une fois que chacun eut rencontré et salué chaque autre personne, Gaku Minamino, représentant fujiwan, conduisit mademoiselle Marwah, ainsi que les autres émissaires dans la pièce où se déroulerait le sommet. Un sommet important, un sommet qui pouvait changer à jamais l’aspect du Nazum du Sud-Est.

Une table, ronde nota Aaliya, afin de tous les mettre sur un pied d’égalité, trônait au centre de la salle. Elle y prit place, attendant que quelqu’un prenne la parole. L’ambiance était calme, détendue, la confiance régnait. On y croyait, à ce sommet, et cela se voyait sur les visages, sur les lèvres, dans les paroles échangées et les vœux de réussite pour cette réunion diplomatique. Décidément, le Fujiwa avait fait le nécessaire pour que tout se passe au mieux. Il ne restait plus qu’à le faire alors, ce sommet.
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Dans la salle de conférence, transformée pour l'occasion, le temple Hakuji se drapait d'une certaine sérénité. Les organisateurs, après avoir effectué les dernières vérifications, s'éclipsaient pour laisser place à une ambiance feutrée, propice à la diplomatie. Les portes massives se refermaient doucement, emprisonnant un silence solennel. Au centre de l'attention, Madame Hisano Maita, une figure respectée des affaires étrangères, prenait place. Sa sélection par le Premier Ministre, Toru Sera, pour présider ce sommet n'était pas anodine. Sa présence incarnait l'engagement du Fujiwa envers une fin de mandat réussie.

« Mes plus grandes salutations aux nations nazumies du sud-est. Permettez-moi d'introduire ce sommet en vous disant que le Fujiwa est ravi d'accueillir un tel projet au sein de ses frontières. Si vous êtes ici, c'est avant tout parce que nos racines communes et notre désir d'un Nazum en paix sont les valeurs fondamentales que nous chérissons tous. Je serai ici celle qui animera les débats. Enfin, plutôt celle à qui vous pouvez vous adresser si vous avez des recommandations ou des suggestions concernant l'organisation stricte de cette conférence. Je veux m'assurer que chacun puisse avoir la parole, mais normalement, je ne devrais pas avoir à intervenir, compte tenu du respect mutuel que nous prônons chacun autour de cette table. Pour commencer, je vais laisser Monsieur Minamino, représentant du Fujiwa, vous parler de la vision de notre pays sur cette potentielle organisation. » dit-elle avec une voix posée et claire.

La salle, remplie de dignitaires attentifs, se tourna vers Minamino. Debout, il ajusta légèrement son micro et commença son discours. Le représentant fujiwan se consacra donc à sa tâche en présentant les objectifs et les raisons de l’État du Fujiwa de vouloir rassembler le Nazum du Sud-Est autour d’une structure commune. S’ensuivirent plusieurs heures de débats passionnants sur la situation au Nazum et les différentes perspectives des États représentés autour de cette table. Les échanges furent pragmatiques, raisonnés et respectueux. Aucun représentant ne manifesta de l’animosité ou ne tenta de dominer la discussion; chacun avait le temps de parole qu’il souhaitait, et ainsi la présidente du sommet n’appliqua que très peu de contraintes pendant les discussions. On avait même plutôt l’impression d’assister à un repas amical, tant le cadre apaisant du temple offrait une sérénité complète à cette table ronde.

Les diplomates abordèrent plusieurs problématiques et questionnements qui remirent à plusieurs reprises en cause l'utilité et les objectifs d'une telle réunion. Cependant, au final, une première ébauche faisant consensus émergea dans l'esprit de chacun. Une structure nazumie du sud-est devait découler de ce sommet. Il fut généralement établi que le Jashuria, le Fujiwa, le Negara Strana, le Wanmiri et Heon-Kuang devraient uniformiser leurs échanges et moyens de communication. Ce regroupement de ces cinq puissances émergea avec l'idée qu'il était nécessaire d'avoir une plateforme commune de relations et de communications afin de pouvoir porter une voix commune qui représenterait le Nazum du Sud-Est dans le monde entier. Ainsi, avec une structure d'échange établie, ces nations pourraient collaborer plus aisément sur des projets visant à favoriser la croissance et le développement tant sur les plans économiques que culturels, ainsi que sur la stabilité de la région. Une telle communauté avait la prétention de rassembler près de 355 millions d’individus, un marché conséquent et surtout une puissance culturelle.

L'un des atouts majeurs de cette structure est sa capacité à évoluer avec le temps, évitant ainsi d'être cantonnée à une rigidité excessive. Les membres n'auront pas d'obligations particulières susceptibles de freiner certains aspects de leurs politiques internes. Il ne s'agit pas d'une alliance basée sur des contraintes, mais plutôt d'une collaboration offrant des opportunités avec une liberté quasi totale. La seule exigence pour le bon fonctionnement de cette structure est la bonne volonté de ses membres en matière de diplomatie et de communication. Cette approche flexible permettrait aux nations impliquées de s'adapter aux changements et aux enjeux internationaux tout en préservant leurs intérêts et leur souveraineté. L'objectif est de créer un cadre propice à la coopération, sans pour autant imposer des restrictions contraignantes qui pourraient dissuader la participation ou l'engagement des États membres. En mettant l'accent sur la bonne volonté et la collaboration, cette structure se distingue des alliances traditionnelles, offrant ainsi une nouvelle voie pour la coopération régionale. Elle vise à renforcer les liens entre les pays du Nazum du Sud-Est, tout en respectant leur autonomie et leurs spécificités. C’est en tout cas, les éléments essentiels qui ressortent des débats.

Afin de concrétiser et de rendre visible à tous cette coopération régionale, plusieurs initiatives initiales, bien que modestes, ont été adoptées en raison de leur importance significative. Parmi celles-ci figure la formation de groupes de travail thématiques axés sur des secteurs vitaux tels que le commerce, l'éducation, la technologie, l'environnement et la sécurité. De plus, il a été convenu de développer une plateforme diplomatique numérique. Cette plateforme, sécurisée et spécialement conçue, servira à optimiser la communication et la collaboration entre les ministères des Affaires étrangères des pays impliqués. Elle intégrera des technologies de cryptage avancées pour assurer la confidentialité et la sécurité des échanges. La fonctionnalité de vidéoconférence de la plateforme permettra la tenue de réunions virtuelles régulières, favorisant des échanges rapides sur des sujets urgents ou des sessions de planification approfondies. D'autres outils, tels que des canaux de communication directs et une base de données partagée, seront également mis en place.

Cette coopération dans le sud-est aspire également à la réalisation de projets d'infrastructure d'envergure. Parmi eux, le projet le plus ambitieux, tel que mentionné dans les rumeurs, est le “Ruban Doré” – un vaste réseau ferroviaire destiné à traverser tous les pays membres présents à ce jour. Ce projet colossal représenterait non seulement un exploit technique et logistique, mais aussi un symbole fort de l'unité et de l'interconnexion entre les nations de la région.

Les échanges, chargés d'une multitude d'informations, avaient visiblement pesé sur Minamino, qui se retrouva à prendre un paracétamol pour apaiser le poids de ces discussions intensives. Alors que le sommet touchait à sa fin, les diplomates présents furent invités à s'exprimer librement, à partager leurs réflexions de clôture, ou à aborder tout sujet qu'ils jugeaient pertinent. Un accord de principe devra être signé par chacun pour la conclusion finale.
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Parvati Mathai

Parvati Mathai, Quatrième ambassadrice du Jashuria

Les débats avaient duré suffisamment longtemps pour être productifs et ne pas en rester aux postures de principe. L’ambassadrice pouvait s’estimer heureuse. Pour un galop d’essai, c’était un galop réussi car l’ensemble des participants avait réussi à se mettre d’accord sur un protocole de coopération, malgré leurs différences idéologiques. Il était réjouissant de voir que les nations du Nazum parvenaient à faire ce que l’Eurysie et sa multitude de nations ne parvenait que difficilement à faire. Ces partenaires attablés dans la salle de conférences étaient prêts à faire du Nazum une zone de prospérité, après des dizaines d’années d’isolationnisme et d’individualisme. C’en était presque touchant.

Il fut accordé à chaque délégation de conclure sur les évènements de cette journée avant le grand bain avec les journalistes. Déjà, les diplomates jashuriens accompagnant l’ambassadrice s’affairaient à retranscrire dans un langage policé et sous la forme de bullet points les éléments évoqués et actés dans cette conférence. Cela servirait de trame pour les communiqués de presse qui ne manqueraient pas d’être diffusés sur toutes les ondes.

« Estimés représentants, nous voici au terme de cette conférence. La Troisième République du Jashuria tient tout d’abord à saluer le Fujiwa pour l’organisation de sommet ainsi que l’ensemble des participants, qui ont accepté de se plier à l’exercice qui s’est avéré des plus productifs. La coopération internationale qui s’esquisse au travers de ces débats est des plus enthousiasmantes à plus d’un titre. Tout d’abord, son aspect non contraignant est une première au Nazum. En mettant l’accent sur la bonne volonté et l’envie de coopération, les Accords de Sokcho s’assurent que la souveraineté nationale et l’indépendance diplomatique de chaque participant soit respecté. Cette approche visera essentiellement à éviter les écueils que nous percevons dans les grandes organisations régionales, qui en tentant d’harmoniser, perdent souvent ce qui fait notre force : notre union, dans la diversité. »

Bon … c’était assez convenu, mais au moins, cela résumait bien le propos : une structure de coopération internationale non contraignante visant à fluidifier les relations et les coopérations entre des pays limitrophes au Nazum. L’ambassadrice reprit son discours :

« La Troisième République du Jashuria attend beaucoup de ce partenariat interétatique. Les discussions concertées entre les différents acteurs de ce sommet ont fait émerger un véritable besoin de dialogue et d’approfondissement de nos relations culturelles et commerciales. Les différences idéologiques ne sauraient être un frein à la prospérité commune et la Troisième République du Jashuria s’associe parfaitement à l’idée que c’est par le dialogue et la concertation que nous parviendrons à hisser le Nazum au titre de terre d’harmonie et de prospérité. C’est dans cette optique le projet du Ruban Doré va être réactivé avec les partenaires ici assemblés. Les négociations pour la mise en place de ce projet de transport ferroviaire haute vitesse entre le Wanmiri, le Fujiwa, le Negara Strana, l’Exclave kah-tanaise et le Jashuria vont débuter dans les semaines suivantes. Nous attendons de grandes choses de ces ateliers de programmation. Je vous remercie. »

Le micro se coupa et l’ambassadrice reprit place dans le parterre des délégations. A ses côté, l'ancien ambassadeur regardait d'un air ravi le résultat de ces négociations. Enfin, le Jashuria allait pouvoir préserver sa prospérité pour les années à venir. Maintenant que la Listonie n'était plus un problème et que les routes commerciales extérieures étaient sécurisées, le pays allait pouvoir se concentrer sur sa politique régionale et mettre les bouchées doubles pour conserver la primauté de son influence culturelle dans la région.
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Le sommet venait de se terminer. Après la dernière intervention et conclusion du Jashuria, les dignitaires présents dans la salle se sont livrés aux salutations d'adieu. Le temple commençait à peine à se remettre de ces accords historiques, prélude d'un quasi-renouveau du Nazum du Sud-Est. C'était un grand pas en avant pour le Fujiwa, qui s'était positionné aux yeux des opinions publiques de la région comme une force diplomatique sage, parvenant à établir une communication unifiée pour entreprendre de grands projets à l'avenir. Il restait du chemin à parcourir pour concrétiser tout ce qui avait été dit aujourd'hui, mais l'approbation officielle de chaque membre autour de cette table était positive et témoignait de l'engagement de tous. Le Nazum du Sud-Est s'affirmait désormais comme un lieu sanctifié de paix et de collaboration, intériorisé par tous.

Madame Hisano Maita, la maîtresse de cérémonie, incitait donc chacun à se lever afin de tenir ensemble une brève conférence de presse devant les journalistes nazumis et internationaux, et également de poser pour une photo de famille mémorable qui allait faire le tour de la scène diplomatique. En résumé, les Accords de Sokcho venaient de marquer une grande réussite. Au Fujiwa, cette réussite accordait davantage de crédibilité à l'exécutif et démontrait son engagement en faveur d'un Sud-Est uni. Dans les jours qui suivaient, les éditoriaux et les analyses abondaient, soulignant la portée des Accords de Sokcho. Certains y voyaient un modèle de coopération régionale, d'autres un stratagème diplomatique habile de la part du Fujiwa.
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