22/06/2013
01:25:09
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Un nouveau récit

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D'un cortège funéraire à révolutionnaire, il n'y a qu'un pas.

Un enfant court dans les rues étroites et sinueuses des quartiers pauvres de Gharma. Il court, accélère, semblant être attiré par quelque chose. Plus il avance, plus le bruit indescriptible d'une foule qui se fait entendre remplit la rue. Il est comme attiré par la source du bruit. Plus le tumulte devient intense, plus le monde prend forme.

À la sortie d'une rue étroite débouchant sur un boulevard, l'enfant est stoppé net, par un mur de jambes. Une foule immense, une masse continue d'individus circule sur le boulevard, une masse difforme se déplaçant difficilement dans la capitale, Gharma. Au cœur de cette foule, le cercueil du président, Aboul Abbas.

La funeste nouvelle a traversé le pays comme un air chaud et lourd. Car tout le monde le sait, l'absence pose la question du remplacement, mais qui ? Cela fait des années que le peuple sarranid vit modestement. Un vent de changement se fait sentir dans la capitale. La foule rêve d'égalité et de liberté. Un homme dans cette foule partage ce rêve et veut en faire une réalité. Il se fraye un chemin au sein de cette masse difforme, cherchant à se démarquer, attirant son attention. Il réussit à arriver au cœur de l'amas, près du cercueil du président. Il cherche du regard un promontoire, une tribune où il pourra parler à la population. Son regard se fixe près d'une colonne, il le sent, c'est là qu'il doit être. Avec vigueur et constance, il se fraye un chemin vers la colonne située en avant du cortège funéraire. Une fois à son pied, il se jette dans un élan révolutionnaire, poussé par l'air chaud qui se dégage de la masse populaire. Une fois sur la base de la colonne, face au fleuve humain qui avance dans un tumulte indescriptible, il remplit ses poumons d'air et parle d'une voix forte et posée à tous ces visages, dont aucun ne se démarque. Il parle et dit :

« Citoyens sarranids, frères et sœurs de la République,

Aujourd'hui, je me tiens devant vous en tant qu’Homme dévoué à la cause du peuple, inspiré par les idéaux de justice, d'égalité et d’unité. Nous sommes témoins d'une époque cruciale, une époque où notre peuple doit se libérer des chaînes de l'oppression et s'élever vers de nouveaux horizons de dignité et de prospérité.

L'histoire nous enseigne que les peuples qui aspirent à la liberté doivent parfois se dresser contre l'injustice et l'exploitation. Nous sommes à un tournant décisif, prêts à écrire le prochain chapitre de notre destin en tant que nation fière et indépendante. Nous ne devons plus tolérer l'asservissement de notre peuple, ni accepter la domination qui entrave notre développement.

Mes frères et sœurs, notre révolution n'est pas simplement contre un régime oppressif, mais elle est pour l'avènement d'une ère nouvelle, où chaque citoyen, qu'il soit paysan, ouvrier, intellectuel ou soldat, jouira des fruits de notre travail national. Nous rejetons la division entre classes et croyances, car nous sommes tous unis par notre amour pour cette terre sacrée.

Notre combat n'est pas contre un peuple, mais contre les forces de l'injustice et de l'exploitation qui ont persisté trop longtemps. Nous aspirons à établir une société où chaque citoyen a une voix, une société où les richesses nationales sont utilisées pour le bien de tous, non pour l'enrichissement de quelques-uns.

Je vous appelle à l'unité, à la solidarité et à la persévérance. Le chemin vers la liberté peut être difficile, mais notre détermination et notre foi dans la justesse de notre cause illumineront notre chemin. Nous sommes les héritiers d'une grande civilisation, et il est de notre devoir de restaurer la grandeur de notre nation.

Ensemble, main dans la main, nous forgerons un avenir où nous brillerons comme un phare de justice et de progrès. Que notre révolution soit le catalyseur qui guidera notre nation vers une ère nouvelle, où la dignité humaine sera la pierre angulaire de notre société. Où la masse sera guidée.

Que Dieu bénisse notre peuple ! 
»

La foule s'agglutine autour de la colonne où se dresse l'homme acclamé, et la masse scande le mot « révolutions ». Le cortège funéraire est stoppé. L'air ardent autour de la foule s'embrase d'un élan révolutionnaire, la chaleur du soleil écrasant tout dans ce pays chaud semble être propulsée vers le haut, renvoyée au ciel par l'énergie dégagée par la foule.

L'homme du discours, du haut de son promontoire et fortifié par les acclamations, il décide de diriger cette chaleur révolutionnaire. Il martèle d'aller en direction du palais du gouvernement. Ainsi, le cortège funéraire se transforme en une masse révolutionnaire et se dirige dans une cohue inimaginable pour bousculer et bouleverser la tête, ainsi que l'histoire de son pays.
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Les cibles peuvent changer dans le viseur.

palais
palais du gouvernement

La foule avance, portée par le besoin de changement. Rien ne semble pouvoir l'arrêter jusqu'à son objectif, le palais du gouvernement. Sur place, les ministres au pouvoir ont appelé l'armée au secours. Des soldats mal équipés s'alignent et se préparent à faire barrage sous les ordres paniqués des ministres. La foule avance comme une inondation dans les rues, s'emparant du moindre espace libre. La ville entière est dehors, c'est une marée humaine nourrie par un flot incessant d'individus qui descend des immeubles. Cette marée va tenter d'emporter le pouvoir sur son passage.

Lorsque le grouillement arrive devant le palais, il ralentit puis freine car face à lui, une rangée de bouches à feu. Les hommes portés jusque-là par la révolution sont alors frappés par la réalité. Une réalité où l'État a le monopole de la violence. Certains commencent à imaginer le pire, à envisager si le feu qui peut être craché par ces fusils atteint la foule. Mais l'avant du cortège est poussé par l'arrière. La confrontation semble donc inévitable.

En face, les soldats imaginent le pire eux aussi. Ils sont tiraillés entre l'ordre qui leur est hurlé derrière et l'élan humain en face. Coincés entre les deux feux, certains se disent que n'importe qui peut être dans cette foule, surtout des proches. Certains tremblent mais personne ne cède et tous restent en place.

La foule se rapproche, la masse est poussée au contact du barrage. Ceux qui sont devant ne savent pas s'ils doivent fuir ou affronter, s'ils doivent convaincre ou frapper. La tension est palpable mais aucun des deux côtés ne doute de l'imminence du contact.

Et lorsque la masse arrive au contact du barrage formé par les soldats, le bruit devient plus fort et lourd. La foule crie à la révolution, au changement, et en face, les dirigeants hurlent au rétablissement de l'ordre face au chaos. Car c'est bien le chaos qui règne dans l'esprit des soldats.

Soudain, sous le déluge de cris, les soldats se retournent. Les canons font volte-face, le rapport de force s'inverse en quelques secondes, d'un simple geste. Les ministres, la bouche béante et le regard vide, n'osent plus rien dire. Seul le vide du silence remplit leur bouche et la peur leurs yeux. Brusquement, le premier coup part et embrase les canons. Une salve, un nuage de poudre, et le silence, voilà ce qui règne pendant quelques secondes qui semblent ne pas finir.

Le nuage de poudre, en se dissipant, laisse place à une scène tragique. Des corps reposent sur des taches rouges, le tout ponctué d'impacts de balles dans le décor. Le silence devient soudain plus assourdissant que le chaos.

La foule bouscule la rangée de soldats et la traverse. Elle s'engouffre dans le palais. Les corps sont ramassés dans le silence dû aux morts. Plus rien ne se dresse face à la masse populaire. Au balcon du palais, l'homme qui a dévié le convoi trouve une tribune bien plus confortable et impressionnante que sa vulgaire colonne.
Il le ressent au plus profond de lui, dans ses entrailles, ce moment qui constitue le point culminant de son destin. Il tend les bras comme si le monde s'ouvrait à lui, et avec un élan providentiel, il prononce un discours :

« Citoyens, frères et sœurs de la patrie,

Je suis Nasrin Al-Makroud et aujourd'hui, nous nous rassemblons pour témoigner d'un moment crucial dans l'histoire de notre nation. Nous sommes à l'aube de l'établissement d'un État fort, indépendant et prospère, guidé par notre détermination à forger un avenir meilleur pour chaque fils et fille.

Notre quête d'indépendance et de justice a été longue et difficile, mais nous avons surmonté les épreuves avec une foi inébranlable en notre destinée commune. Nous avons résisté aux forces de l'oppression et aujourd'hui, nous émergeons plus forts, prêts à écrire le prochain chapitre de notre récit national.

En ce jour mémorable, je veux vous assurer que notre vision pour la nation va au-delà de simples frontières géographiques. Nous aspirons à édifier un État moderne, basé sur la justice sociale, l'égalité et le progrès. C'est le moment de transcender les divisions, de laisser derrière nous les vieilles querelles et de nous unir en tant que peuple, car notre force réside dans notre unité.

Notre première tâche sera de construire des institutions solides qui serviront le peuple et non quelques privilégiés. Nous érigerons un État qui garantira les droits de chaque citoyen, indépendamment de son origine sociale, de sa religion ou de son sexe. L'éducation et la santé seront les piliers de notre société, car des esprits éduqués et des corps en bonne santé sont les fondements d'une nation prospère.

Nous devons également exploiter nos ressources nationales de manière équitable, veillant à ce que la richesse de notre nation profite à tous, et non à une élite restreinte. L'industrialisation et le développement économique seront les moteurs de notre croissance, créant des opportunités pour chacun de contribuer à l'essor de notre nation.

Mes chers compatriotes, nous sommes les architectes de notre destinée. Ensemble, nous bâtirons un État qui brillera comme un phare de liberté, de justice et de prospérité dans la région et dans le monde. Nous devons travailler main dans la main pour assurer un avenir radieux à nos enfants et aux générations à venir.

Que Dieu nous bénisse et guide notre chemin vers un avenir glorieux!
 »

La foule enthousiaste, exaltée, enflammée se met à scander le nom d'un inconnu d'hier, "Nasrim Al-Makroud".
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L'aube d'une nouvelle ère.

Le lendemain, après une nuit où tout le monde célébrait l'avènement d'une ère radieuse, à la radio et sur toutes les chaînes de télévision, on pouvait voir l'homme de la révolution, Nasril Al-Makroud. Il y annonce la mise en place d'un conseil de la révolution chargé de doter la nation d'une constitution qui permettra son plein développement. Il annoncera dans les jours suivants les termes de la nouvelle constitution au peuple.
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Une émission télévisée pas comme les autres.

Un soir, sur les écrans de télévision et les stations de radio, la voix de Nasrim Al-Makroud se fit entendre. Dans une mise en scène minimaliste, le drapeau sarranid derrière lui, assis assurément derrière un bureau d'apparence simple, il parle et dit :

« Frères et sœurs de la patrie, moi, Nasrim Al-Makroud, voix de la révolution, viens à vous en ce jour pour partager les fruits du travail du conseil de la révolution.

Nous sommes déterminés et résolus à ouvrir un nouveau chapitre de notre histoire, dans lequel notre peuple connaîtra une ère de prospérité. Nous avons décidé de bâtir la Jamahiriya Sarranide. Ce nouvel État sera présidé à vie par un citoyen le voulant bien et âgé de 18 ans ou plus, tiré au sort pour devenir notre Raïs. Le nouveau Raïs aura et devra avoir tous les moyens à sa disposition pour libérer les masses. Pour protéger l'unité et les intérêts de la nation, l'armée doit être mieux dotée et sa doctrine clairement énoncée, le nouveau gouvernement devra s'y pencher en priorité. Notre pays a connu une longue période d'inégalité où les fossés se sont creusés.

Aujourd'hui, ces fossés seront comblés par des projets nationaux. Le premier de ces projets sera Gharma-jadida. Notre capitale est à ce jour un symbole du triomphe de l'inégalité. Nous devons donner les moyens à la Jamahiriya Sarranide de libérer les masses de cette inégalité. La refonte de notre capitale sera le premier symbole de la nouvelle ère, une base sur laquelle les générations futures pourront se reposer.

Le tirage au sort aura lieu sur la place du palais du gouvernement dans 2 jours. Un enfant présent et de moins de 18 ans sera désigné pour tirer un des candidats au sort.

Que Dieu nous bénisse et guide notre chemin vers un avenir glorieux !
»
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Un spectacle historique!

Sous un soleil cuisant, au sein de la capitale, une foule immense s'est réunie. Une masse populaire sur laquelle s'érigent des drapeaux. Tous sont ici pour le moment historique promis par le tirage au sort. Le nouveau Raïs va être désigné, choisi par la main innocente d'un enfant. Le peuple remet son avenir entre les mains de la providence. Qui sera tiré pour diriger la nation ? Voilà la question que se pose la Jamahiriya Sarranide.

Sur la place, une scène a été montée avec des drapeaux nationaux l'entourant. Le ciel est clair quand le conseil de la révolution monte sur scène. La foule applaudit, les caméras tournent, tous ont conscience de vivre un moment extraordinaire. Ceux qui n'ont pas pu se déplacer sont agglutinés devant la télévision, les yeux écarquillés. Le pays est en suspens, personne ne veut rater ce moment d'histoire.

La délégation monte, Nasrim Al-Makroud se dirige vers le micro. Il respire calmement, marque un temps de pause à la tribune, sans doute pour prendre ses marques. Puis, il lève le regard sur la foule et dit :

« Frères et sœurs de la patrie,

Nous y voici, c’est ici que la nation va choisir son Raïs. Ici où il y a peu de temps, nous avions renversé le vieux régime corrompu. C’est ici que les masses populaires ont pris leur destin en main.

À présent que les masses ont pris leur destin en mains, la nation sarranide doit se mettre en marche vers sa glorieuse prospérité. C’est à présent que nous allons connaître l'Homme qui va guider cette marche. Nous allons commencer par choisir celui qui va tirer au sort le nom du Raïs.

J'appelle Amir Al-Rashid du district 56 de Gharma-jadida.
»

La foule s'agite, chacun regarde autour de lui. Un enfant à peine plus haut que trois pommes se fraye un chemin jusqu'à la scène et brandit une carte d'identité. Des soldats le font monter, puis vérifient sa carte. C'est lui, l'enfant désigné.

« À présent, nous allons voir qui la fortune va mettre à la tête de la nation. »

L'enfant s'avance et Nasrim, avec un sourire bienveillant, lui tend un grand sac. Et lui dit de piocher un papier. Le jeune enfant s'exécute devant une foule figée. Il tire un papier sur lequel est inscrit un numéro, il le lit à voix haute au micro, « 187 ». Un membre du conseil regarde la liste des candidats et à la ligne 187, le nom est « Hussein Al-Saud ». Les yeux du membre du conseil s'écarquillent à la lecture du nom. Il se tourne vers le micro et annonce le nom. La foule acclame alors, mais personne ne sait qui est le Raïs. Nasrim se tourne vers les membres du conseil et un homme sort de la ligne pour se diriger vers le micro. Nasrim dit au micro :

« Dieu a choisi Hussein Al-Saud pour nous guider. Il a choisi un membre du conseil, le voici. »

Hussein s'avance d'un pas décidé, la nation l'applaudit. Puis, d'un signe de main, Hussein demande à la foule de s'arrêter. Il prononce alors ces mots :

« Mes chers frères et sœurs,

Aujourd'hui, je me tiens devant vous avec humilité et détermination, honoré par la confiance que Dieu a placée en moi pour guider notre grande nation vers un avenir prospère. Je suis profondément conscient des défis qui nous attendent, mais je suis convaincu que, ensemble, nous pouvons surmonter ces défis et bâtir un avenir meilleur pour chaque fils et fille.
Notre nation a une histoire riche, marquée par la résilience de notre peuple face aux épreuves et par notre capacité à nous élever au-dessus des difficultés. Nous sommes un peuple fier, façonné par les rivières de l'histoire et les montagnes de notre culture. C'est avec cet héritage enraciné que nous abordons le futur, prêts à écrire un nouveau chapitre de notre histoire.

En tant que Raïs, je m'engage à servir le peuple avec détermination et dévouement. Mon objectif premier est de répondre aux aspirations légitimes de chaque citoyen, de promouvoir l’égalité sociale et de renforcer notre unité nationale. Nous sommes une seule et même nation, indissociable.

Notre économie sera le moteur de notre développement. Nous travaillerons ensemble pour stimuler la croissance et assurer une distribution équitable des richesses. L'éducation sera au cœur de nos priorités, car c'est à travers le savoir que nous construisons des générations éclairées et capables de contribuer au progrès de notre société.

Mes frères et sœurs, je vous appelle à l'unité et à la collaboration. Ensemble, nous pouvons surmonter les défis qui se dressent devant nous et bâtir un avenir digne de notre grande nation. Avec foi en notre destin commun, avançons main dans la main vers une ère de prospérité, de dignité et de fierté nationale.

Pour dissiper tout doute quant à ma providence, le sac des noms et la liste des candidats sont accessibles et consultables par tous les citoyens sarranides.

Que Dieu bénisse notre nation et guide nos efforts!
»

Hussein salue la foule qui martèle son nom et agite les drapeaux.
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L'homme qui écoute

À Gharma-jadida, devant le palais du gouvernement, une voiture s’arrête. Un homme en costume noir en descend. Il se dirige à l’intérieur. Cet homme, c’est Omar Hossam, le directeur des renseignements militaires. Il entre et se dirige vers le bureau de Hussein Al-Saud, accompagné du secrétaire du Raïs. Une fois devant la porte, le secrétaire l’annonce puis entre. Hussein lui fait signe de venir s’asseoir et lorsque Omar est assis, il dit :
« Comment vas-tu Omar ? Tu passes encore tes journées à écouter à toutes les portes ?
- Je vais bien et j’écoute ceux qui ont des choses à dire ou qui ne disent pas ce qu’ils ont à dire.
- Bien. Et le général Ali Mansour, a-t-il des choses à dire ?
- Il a de l’expérience et tant que sa place n'est pas menacée, il ne sera pas menaçant.
- Cela tombe bien, je ne compte pas le bouger. »

Hussein regarde ses papiers sur son bureau puis il dit :
« J’aimerais détacher les renseignements militaires pour les mettre au service de la Jamahiriya directement et plus seulement de l’armée. Et avec ça, j’aimerais réformer l’armée. Mais penses-tu qu'Ali s'y opposerait ?
- Je n’ai rien entendu qui pourrait me faire penser qu'Ali refuserait une réforme de l’armée tant que cela n'y porte pas préjudice.
- Bien, je vois. Je te remercie. On se reverra sous peu, je pense.
- À votre service. »

Omar se lève et sort de la pièce. Aziz, le major d’homme, referme derrière lui et Hussein lui dit :
« Ce que j’aime chez Omar, c’est qu'il n’a qu’une passion : son devoir. Le reste, il s'en soucie peu : les plaisirs de la vie, les beaux moments, les grands combats idéologiques. La seule chose qui l’intéresse, c’est son devoir. Bien, reprenons le dossier de la mise en place de mon gouvernement, Aziz. »
À quoi il répondit « Bien, monsieur » en se dirigeant vers une pile de dossiers.
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Des lotos, beaucoup de loto.

Dans un petit appartement de Gharna-jadida, une famille se réunit dans le salon. La chaleur se fait sentir malgré les pales au plafond qui brassent l'air dans l'espoir d'y trouver un brin de fraîcheur. La famille a les yeux rivés sur la télévision. Puis, l'information du soir laisse place à un discours du Raïs. Tous l'attendent et sur l'écran, le Raïs, entre les drapeaux de la Jamahiriya, prend la parole :

« Mes chers frères et sœurs,
Ce soir, je suis résolu à mettre en marche les masses vers leur destinée. Ainsi, pour que la révolution ne soit pas vaine, les masses populaires seront représentées par des hommes et des femmes tirés au sort, un par chaabiyates (régions). Il devra se porter volontaire et avoir au moins 18 ans. Il y aura donc 60 représentants, parmi eux, je désignerai les wazirs (ministres). Chaque baladiyat (localité) se verra désigner un représentant de la même manière. Les fonctions ne seront pas cumulables, et tout acte de corruption visant à détourner les efforts de libération des masses pour un intérêt personnel sera sévèrement condamné. Ainsi, les tirages au sort auront lieu dans 7 jours, après quoi je formerai notre gouvernement.
Pour entrer au service de la Jamahiriya en tant que rasmi (fonctionnaire), un passage par un concours ouvert à tous sera obligatoire afin que n'importe quel membre de notre nation puisse la servir s'il en a la volonté et les capacités.
Que Dieu bénisse la Jamahiriya et guide nos efforts! »

À l'écran, une vidéo du drapeau sarranid flottant face au vent vient clôturer le discours. Le père de famille dit à ses enfants qu'ils devront passer le concours, que c'est une chance de s'élever socialement, mais les enfants semblent dire oui plus à la figure paternelle qu'aux arguments. Ainsi, le pays est une fois de plus en suspens pour un temps.
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Les nouveaux wazirs

Le balotement des vagues et le clapotis de l’eau sur la coque du bateau berce la paisible remontée du fleuve. À bord de simples personnes qui se sont rendues à Gharna-jadida. Tout ce petit monde part du bruit de la ville pour les champs doux de la campagne. Sur le bateau une radio de laquelle sort une voix de femme qui chante accompagnée d’un piano. Le modeste équipage vogue tranquillement contre courant, certains lisent, d'autres dorment mais tous sentent le temps passer au fil du voyage. Puis tous s’arrêtent et tendent l’oreille. La femme et son piano ont cessé de chanter. Une émission d’information vient prendre leur place. La radio dit alors :

« Après avoir attendu le tirage des représentants le gouvernement de Al-Saud a été révélé, voici les wazirs :
Le wazir de la richesse du sol est Tarek Ali.
La wazir de la propagande est Sama El-Masry.
Le wazir du trésor est Mahmoud Farouk.
Le wazir des affaires intérieures est Amr El-Din.
La wazir de la propagation des connaissances est Samira Attia.
Le wazir de la masse paysanne et de la souveraineté alimentaire est Mustafa Mansour.
La wazir du jugement est Nada Mahfouz.
Le wazir de la furûsiyya (art de la guerre) est Walid Abdel Rahman et le wazir des affaires extérieures est Yassin Khattab.
Le gouvernement se réunira pour le premier conseil du divan de la Jamahiriya dans la semaine. »

Pendant que la voix du commentateur faisait ce qu’elle sait faire de mieux, commenter. Les gens retournent à leur passe-temps. Le bateau remonte le fleuve pendant que la Jamahiriya prenait pleinement vie.
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