31/07/2013
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[LITTÉRATURE] Institut National de la Littérature et de la Poésie

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Institut National de la Littérature et de la Poésie (INLP)


Vous êtes bien à l'INLP, institution compétente de matière d'art littéraire. Elle dépend entièrement du Ministère de la Culture et est financée par divers mécènes.
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Marche Funèbre
Jolan

Je papillonnais dans cette forêt mystérieuse, regardant les feuilles tantôt claires tantôt sombres. C’était une veste étendue de charmes, immenses, et dont le feuillage ne laissait transparaître la moitié des rayons du Soleil. Fréquemment, il advenait qu’un voyageur intrépide se perde dans ces bois car nul sentier ne le sillonnait, rendant le déchiffrage des cartes périlleux. Moi-même, quelques fois, fus perdu avant que le hasard opère et ne me fasse sortir de ces lieux. D’après diverses rumeurs, tous n’eurent pas cette chance ; il y en avait même qui prétendaient la forêt hantée. C’était celui que l’on nommait l’Ancien du temps de son vivant, car il connaissait par cœur des centaines de contes d’époques révolues, qui nous l’avait narré autrefois, à une table de l’auberge à l’entrée de la ville – ce que nous appelions la ville n’était en réalité autre que notre village. Cette rumeur parlait d’un mage, poète ou pianiste, qui avait élu pour la fin de ses jours résidence dans la forêt. Je ne me souviens ni de l’intrique, ni de son dénouement, mais me rappelle seulement aspect tragique qui m’avait tant marqué jadis. Certains crurent dur comme fer à ces histoires et ne mirent plus un pied de l’autre côté du ruisseau – séparant notre village de la forêt - tandis que d’autres, au contraire, y passèrent la majeure partie de leur temps, dans l’espoir sûrement de retrouver quelques vestiges de la vie de l’artiste dont la renommée avait fait le tour de toutes les bouches, mais dont l’existence n’était qu’incertaine. Hardi comme je l’étais, j’étais plus de ceux qui s’aventuraient vers ce monde inconnu, côtoyant bientôt les arbres comme des frères, que de ceux qui les craignaient et les croyaient maléfiques. Toutefois, au fil du temps, les mythes s’intensifièrent et le courage des femmes et des hommes braves que je connus s’éclipsa. Ainsi, il n’y eut plus âme qui vive dans la forêt et ce changement brutal, presque violent, me fît prendre conscience qu’il s'y passait effectivement quelque chose. J’étais seul, alors, à poursuivre mon avancée dans cet énigmatique pays de charmes, et dès mon retour à la ville j’étais traité de fou, d’inconscient mais qu’importe, la solitude dans laquelle j’étais plongée lors de mes excursions ne fût autre que révélatrice. Je pus, ainsi, constater le silence profond et l’absence totale de vie au cœur même du bois. Nul hululement de hibou, cri de geai, chant de rossignol, grésillement de grillon, hurlement de loup, gémissement d’écureuil, glapissement de renard, brame de cerf ou croassement de crapaud ne se faisait entendre. Même en regardant longtemps et avec attention chaque recoin, on ne voyait aucun scarabée, aucune fourmi ou tout autre bestiole sylvestre. La forêt semblait figée et la faune morte. Je continuais à marcher, observant avec minutie le moindre détail, indice, la moindre trace, la moindre emprunte, la moindre marque mais n’en trouvais que trop peu. Tout dans le bois se ressemblait et ma pire hantise fusse d’être perdue. J’avançais toujours plus loin entre les arbres qui bien vite, se succédant, semblèrent tous similaires, et alors je ne prêtât plus attention aux alentours, j’avais peur. Je ne savais pourquoi, mais j’avais cette étrange impression, cette effroyable crainte que l'on ressent lorsque quelqu’un vous observe, que vous êtes épié du regard, que tout votre corps est passé au crible, néanmoins je ne m’arrêtai pas. Tout au contraire, ma force se vue accrue, se vue augmenter je ne puis dire par quel stratagème car je n’en ai nulle idée. Je fus prompt à chaque endroit, faisant la course à je ne sais trop quoi, ne souhaitant plus rien hormis le fait que tout cela se termine enfin. C’était très étrange, comme si je ne voyais rien. Les fougèrent n’existaient plus au sol, ni le lichen sur les troncs des arbres ou encore la mousse sur les rocs ça-et-là. Tout était noir pour moi, et peu m’importait ce qui m’entourait. Malgré mon état m’empêchant d’englober intellectuellement l’entièreté de la situation comme j’avais pour habitude de le faire, je pus distinguer au loin un léger filet de fumée grise, me faisant croire sans doute à de la vie, un refuge ou je ne sais quelle autre consolation. Je me mis alors à courir, à fendre le bois d’une diligence impressionnante, sans prendre gare aux flaques de sang sur le sol, m’avertissant du danger que j’encourais. Je courrais encore, je courrais toujours et ma vélocité me permit d’arriver à l’endroit escompté alors qu'il faisait encore pleinement jour. À mon grand étonnement, il n’y avait là nul feu, nulle baraque mais ce qui semblait être un jeune homme dos à moi, assis sur grand tabouret. Il jouait d’un long et noir piano à queue au centre de la petite clairière dont aucun son ne sortait. Néanmoins, il jouait bien je le savais, j’en avais l’intime conviction, mais je ne sais pas pourquoi. Je le regardai d’un air fasciné, consterné et plein de béatitude lorsqu’il se retourna, laissant apparaître un visage aux joues creusées, au regard vide et au sourire forcé. C’était comme s’il eut été un squelette auquel on aurait rajouté une peau et un semblant d’envie de vivre. Nous restâmes ainsi, sans geste et sans mot durant ce qui me sembla être une éternité. Tout paraissait faux et rien ne laissait croire que cette vision fut réelle, bien que j’en fus persuadé. Lorsque mes yeux se portèrent à ses mains, j’y vis une peau écarlate, immaculée de sang, dégoulinant aussi sur le clavier du piano. Tout à coup, sans prévenir, je fus pris d’une angoisse, terrible ; je détournai la tête, regardai le sol, vermeil, et commençai à reculer. Le pianiste aussi fit un pas vers moi et je n’osai alors plus bouger. Il en fit en second, puis un autre et pour chacun de ses pas c’était comme s’il en faisait dix. Plus rien n’avait de proportion, tout était différent, et à mesure que s’approchait le jeune homme squelettique les arbres disparaissaient. Lorsqu'il fut tout près de moi, il me murmura seulement « Ne t’inquiète pas, ce n’est rien. » dans le creux de mon oreille avant que je ne fusse plongé dans le noir. Je ne pus rien y faire, et en dépit de tout ce que j’essayasse, mes yeux se fermèrent sans que je n’eusse entrevu même approximativement pour quelle durée. Ils se rouvrirent plus tard, comme lors d’un réveil, par des cris semblables en tous points à des hurlements de douleur poussés par une personne à l’agonie contre mon tympan. Je me levai alors en un sursaut, sortis sur mon pallier, me demandant ce qu’il le passait. Cependant, tout laissait penser qu’il s’agissait d’un jour ordinaire, des plus banal, alors je fis comme lors que chacun des habitants et alla chercher le journal dans ma boite aux lettres. Je l’emmenai, m’assis et entrepris de le lire avant de me rendre compte que mes mains étaient entachées de rouge. Promptement, je m’en allai les laver mais en me rendant à la fontaine, je me surpris moi-même à fredonner le si tristement célèbre air pour piano de Chopin.
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Rêves
Jolan

Rêve I
La nuit dernière il faisait noir. J’avais peur de bouger, je restai immobile dans ma solitude. J’avais froid, terriblement froid, effroyablement froid. Les larmes gelaient contre mes joues, je ne voyais rien ni n’entendais plus quoi ce que soit. Malgré tout le vent glacial et cruel, se déchaînant sur moi, me givrant intégralement et renforçant à l’épreuve ma paralysie, tout était silencieux. D’un coup, je sentis quelque chose bouger dans mon dos. C’était comme une ombre qui survolait l’endroit. J’étais pétrifié par le froid, par la terreur et souhaitais juste que tout s’arrête. J’avais l’impression d’être regardé. Le silence total, l’air d’une froidure plus qu’hivernale, cette sensation malsaine qu’une chose était tapit dans l’obscurité : je ne tenais plus. Je ne pouvais bouger, me réchauffer, me rassurer, crier ou faire quelque autre chose qui aurait été susceptible de m’être d’une aide quelconque. Soudainement, je crus sentir comme une main se poser, s’abattre sur mon épaule. Mes pieds s’arrachèrent au sol et je courus, je courus du mieux que je pouvais, mais malgré mes efforts considérables je me sentais toujours seul face à l’être caché dans les ténèbres. C’est en courant que je découvris que le sol était mouillé et que ce que je croyais être de l’eau m’arrivait en fait aux chevilles. Je courrais encore, dans le même sens, face à un vent toujours plus brutal et glacé. Le poids le plus lourd que je portais était le silence. Le silence, toujours ce silence si intense et pétrifiant, comme un chaos muet à lui tout seul, qui immobilise jusqu'à l'âme de sa victime, l'empêchant de le briser. Je courrais toujours avec autant de détermination qu’à mon départ qui me semblait si lointain, mais les forces commençaient à me manquer. Je courrais et sentais ma tête tourner comme si à chaque seconde je manquais de m’écrouler. Je courrais même aveuglé par le flot de larmes qui ruisselait le long de mon visage. Brusquement, car je n’en pouvais plus, je m’écroulai contre terre, sentant mes forces m'abondonner. La bouche entre-ouverte, je m’aperçus à cet instant que le liquide jonchant le sol possédait une douce saveur métallique, une légère amertume et un arrière-goût salé. Depuis un temps bien trop grand pour que je réussisse à le mesurer, j’avais marché, avais couru, sur un sol ensanglanté. Peu à peu, un picotement se fit ressentir au niveau de ma poitrine puis ce fut comme si on m’arrachât la peau, la chaire puis le cœur. Je criai sans que cela ne puisse changer quoi que ce soit. Je me courbai de douleur tant la souffrance était intense. Je m’étonnais de ne pas mourir plus vite, me désolais du peu de temps que l’on m’avait accordé car le supplice était cruel, bien trop cruel. Mes yeux, peu à peu, se fermèrent et je fis de - ce que je croyais - mon dernier instant une pensée envers la personne que j’aimais.


Rêve II
Je l’attendais. Qui ? Je ne sais pas, je ne le saurai peut-être jamais. Je l’attendais donc dans le froid, seul, entre les vastes prés blanc recouverts de gros flocons qui avaient cessés de tomber. Le temps était si glacial qu’il attaquait ma peau comme s’il la rongeait et que, fragment par fragment, il l’arrachait, la faisant devenir rouge, puis violacée avant de finir blanche et de tomber, se perdre sur le sol. Mes yeux se perdaient quant à eux dans leur admiration du brouillard et ma conscience dans le temps qui passait. J’attendais toujours, le froid me déchirait encore. Au bout d’un moment, une larme vint à couler le long de ma joue, tant l’espoir décroissait promptement. J’attendis ainsi plusieurs minutes, plusieurs heures, plusieurs jours qui sait, plusieurs semaines. Oui en rêve la souffrance n’a de durée définie et c’est ce qui la rend bien plus atroce qu’ailleurs. J’étais seul, dans une campagne affichant un teint blême à mes yeux agressés par le Soleil s’y reflétant, et seule une bâtisse se dressait dans le paysage monochrome recouvert de neige. J’étais devant depuis un temps mais n’entrais, je ne sais pourquoi. Sûrement, il m’avait été donné pour ordre d’attendre, alors j’attendais, dans le froid, entouré de brume et dans un lieu inconnu. Bientôt, mes pieds, mes jambes n’eurent plus la force de me garder debout et je m’effondrai par terre, sur un sentier blanc que nul n’aurait su distinguer, il était recouvert comme le reste de l’endroit, d’un voile opalin qui çà et là était étrangement plus dure qu’à d’autres endroit. La cause était facile à deviner, quelques blocs de glace étaient présents mais pourquoi à ces emplacements précis, il était là impossible de le savoir. Je fus tenté, je ne le nie pas, de rentrer me réchauffer dans la maison en face, mais je sais alors que la culpabilité de la désobéissance m’aurait sanctionnée bien plus sévèrement que l’air glacial dans lequel je restais, attendant toujours. J’étais contre le sol et ressentais sa température remonté entièrement vers ma tête, néanmoins je restais conscient, yeux ouverts, à regarder le gris du ciel devenir toujours plus morne. Et dans ma langueur, mon impatience même de trouver un quelconque réconfort dans la venue tant attendue de quiconque se présenterait à moi tant qu’il saurait m’apporter un petit peu de chaleur, j’eus, je ne le cache pas non plus, l’envie d'un somme. C’était une puissante envie de dormir, comme si l’on m’avait frappé très durement à la tête, et je compris que si je fermerais les yeux cela serait sans aucun doute pour ne plus jamais les rouvrir. Déterminé, je veillais donc tant bien que mal et inventais mille stratagèmes pour m’occuper l’esprit. Je remarquai les différentes nuances grises des maussades cieux et bien que l’ennui ne fût absent je continuai de faire tout pour qu’il ne se fasse ressentir, ou du moins le plus faiblement possible. J’avais cette impression étrange que je m’apprêtais à mourir, pourtant je ressentais bel et bien quelque chose qui m’était - et qui m’est toujours - impossible à comprendre comme à décrire. J’avais si froid que mes doigts en restaient paralysés, je n’éprouvais plus aucune sensation physique. Ma pensée était diffuse, vagabondant entre quelques points de l’unique vue s’offrant à elle. Énigmatiquement, et pour mon plus grand bonheur, il ne ventait pas ne serait-ce qu’un tout petit peu. J’attendais donc, recroquevillé sur moi-même et indéfiniment, devant une maison où j’aurais pu, si telle avait été ma volonté, y trouver refuge. Néanmoins, et je ne sais pourquoi, je ne parvins à me convaincre de rentrer, car je l’attendais. Qui ? C’était une excellente question mais elle, sur l’instant, ne me vint pas à l’esprit. Peut-être, me disais-je, que j’étais en avance, et donc que mes efforts seraient bientôt récompensés, mais je me disais également que j'étais possiblement en retard, et donc que tout ceci n’était qu’une punition, cruelle et vicieuse, dans le but de me faire comprendre ce que la personne avec qui j’avais rendez-vous avait endurée. Au final en effet, je parvins à la conclusion que je méritais sûrement ce châtiment : c’est tout ce que je trouvais alors afin de ne pas désespérer, pour trouver une justification à cette atroce souffrance.


Rêve III
Les rues étaient désertes et le ciel couvert. Depuis un moment, la pluie n’avait cessé de tomber, trempant au passage son long manteau noir. En tendant l’oreille, on pouvait percevoir les milliers de goutes qui se heurtaient au sol. Pour la première fois de sa vie, il constatait que la pluie était rouge, alors il commença à douter de sa composition, puis à douter de tout. La pluie avait-elle toujours été de cette couleur ? L’eau avait-elle toujours été de cette couleur ? La pluie avait-elle toujours été constituée d’eau ? Tandis qu’il continuait à avancer tout en remettant en cause ce qu’il croyait savoir depuis bien trop longtemps, une goute vint se déposer sur son visage. Elle coula, lentement, jusqu’au coin de ses lèvres. Elle avait un goût amer et délicat, semblable au sang que parfois, admettons-le, il nous est tous arrivé de goûter lors d’une coupure. Le problème n’était pas qu’il pleuve étrangement un liquide semblable à celui circulant dans ses veines, mais qu’il y prenne un si grand plaisir à le déguster. Le bonheur, ses dents rubéfiées, ne se mesurait plus, car il venait à l’instant de découvrir ce que plus que tout il aimait. Lorsque la pluie cessa, et cessa de transmettre à sa bouche sa saveur métallique, il en eut presque l’envie de pleurer. Alors, afin de réconforter sa nostalgie soudaine, il prit ce qu’il avait sous la main et tenta de faire renaître le plaisir qu’il avait éprouvé. Ainsi, avec ses clefs il coupa sa paume tandis qu’une giclée de sang s’abattait sur le trottoir. Ses lèvres à sa main, la joie à son cœur, à nouveau il savourait le sang. Il resta comme cela longtemps, debout à récolter jusqu’à la moindre goute vermeille et moi restai caché, l’observant par la fenêtre depuis près d’une heure.


Rêve IV
C’était le grand jour, le grand jour de la fugue. J’attendais Lola, en lui achetant un beau bouquet de fleurs, des roses d’un rouge exceptionnellement vif. Nous avions pour lieu de rendez-vous un pont, petit et en pierre, près de la gare. Je m’en allais donc, marchant d’un pas serein et déterminé. À mon arrivée, je retrouvai la sublime jeune femme que j’aimais, qui m’aimait et qui, avec moi, fuyait nos familles et la tyrannie parentale, d’autant plus qu’aucune de deux ne consentait à nous marier. Notre retraite s’expliquait également par quelques centaines d’autres éléments mais n’ayez crainte, je vous en épargne l’ennui. Bref, je retrouvai Lola, splendide comme à son habitude. Elle était vêtue d’une ample robe du même rouge que celui des roses que je m’apprêtais à lui offrir et autour de son cou pendait un collier en argent. Dès qu’elle me vit, elle se précipita dans mes bras, oubliant presque sa valise désormais seule sur le pont tandis que j’essayais tant bien que mal de sauver les fleurs. Contre moi, son stress, son impatience et sa joie étaient palpables et dès lors qu’elle me fît sortir de son étreinte, je vis ses magnifiques yeux se plonger dans les miens. Tout avait été minutieusement préparé à l’avance, et bien que l’angoisse fusse normale dans ce genre de situation, elle n’avait véritablement pas lieu d’être. Lola reprit ses affaires et nous entreprîmes de nous diriger vers la gare. Sur le chemin, un vendeur de journaux abordait les passants, leur proposant divers magasines. J’aillai donc le voir, et lui achetai pour quelques francs la dernière parution du périodique “Les Amours”, journal qu’elle avait pour habitude de parcourir à ses heures perdues.

Arrivés à la gare, une grande structure de verre et d’acier, nous nous dirigeâmes vers le guichet. Derrière, se tenait un grand bonhomme à l’imposante moustache grise et à la casquette bleu. Son sourire je me souviens, lui donnait malgré tout un air sympathique et me rassurait. Nous demandâmes deux places pour la ville de Lyon, Paris puis pour Amsterdam. Toutes nos économies y passaient, mais nous en étions très heureux. Deux voies nous séparaient alors du quai d’en face où nous devions nous rendre et d’un pas naturel, comme d’autres personnes, Lola les traversa et tandis que, moi qui avais toujours été d’un comportement naturellement exemplaire et craintif, qui avais pour habitude de suivre les règles ou toutes autres instructions à la lettre, je restais abasourdi, consterner par tant d’intrépidité. Elle en revanche, trouvait cela normal et d’un geste de la main elle me dit d’avancer. Catégoriquement, je refusai et hochai la tête, puis j’avançais néanmoins un pas. Remarquant son sourire à cet instant, j’en fis un autre, puis un autre et un dernier avant de me rendre compte que je m’étais arrêté au milieu des voies. Je n’osai plus bouger, tout était allé trop vite. Je voyais le visage de Lola rayonnant, rire de mon ridicule puis tourner la tête et me crier de revenir. J’étais figé, je ne pouvais plus avancer alors j’ai simplement tourné la tête, je vis le train.
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Le Silence

Jolan

PERSONNAGES

Lise – Lise existe mais n’existe pas. Elle est présente toute la pièce mais n’y est jamais.

Octave – Père de la défunte Lise. Sa folie n’est due à son age mais à ce qu’il a vu pour y parvenir.

Adrien – Jeune, intrépide, inconnu.

Des détenus – En piètre état, digne de ceux jugés par le Tribunal Religieux.

Les gardes – On ne voit leur visage, certains disent qu’il seraient mort tout en bougeant.

L’Inquisiteur – Tout homme n’en a qu’un surplombant sa vie, c’est lui.

Les spectateurs


PARTIE 1

OCTAVE, ADRIEN, UN GARDE, QUELQUES DÉTENUS


La scène se déroule dans une cellule.


OCTAVE – Je l’ai vue, cette nuit, elle me parla.
Peu.
Mais elle le fît.
J’ai vu ses yeux de proie face à la nuit glacialement aride.
Elle me demanda si j’étais croyant.
Je lui répondis.
Elle se tue.

ADRIEN – À quoi vous attendiez-vous ?
Est offert le Silence à ceux que la parole n’a su convaincre.
D’ailleurs, je ne savais pas que tu n’y croyais pas.
Notre monde est bien étrange tout de même, avec toutes ses énigmes et ses mystères.

OCTAVIE – Mais elle m’a parlé !
Moi, alors que voilà plusieurs année qu’elle est partie, qu’elle m’abandonna, qu’elle s’abandonna.

ADRIEN – Elle suit la voie qui lui avait été tracée pour elle.

OCTAVE – Mais elle m’a parlé !
Elle qui pourtant se veut exemplaire, elle qui se veut honorée plus que tout autre.

ADRIEN - Il n’existe de gloire, il n’y a que des esprits persuadés du fait qu’elle soit ou ne soit pas.

OCTAVE – Mais elle m’a parlé !
Moi qui ai toujours renoncé aux cultes incompréhensibles, aux rituels obscurs et à la parole divine…

ADRIEN – Tu ne connais simplement pas la vérité.

OCTAVE – Et toi, qu’en sais-tu ?

ADRIEN – J’ai été élevé par la nuit lorsque je papillonnais, pieds nus, dans les cours des temples, dérobant la Sainte parole.

OCTAVE – La voix de ma fille ?
Tu as lu ses mots, ses idées, sa vie ?

ADRIEN – Non, assurément que non, je n’ai lu que des principes, des histoires semblables à des contes fantastiques.
La prophétesse n’est qu’allégorie de la Sainte parole.
L’inverse, en revanche, se n’être qu’invention de l’homme pour servir ses propres intérêts, égoïstement.
Moi, il se trouve que j’y crois à ces morales, à ces valeurs, et je demeure suspendu au génie des livres.

OCTAVE – Est-ce beau ?

ADRIEN – Quoi donc ?

OCTAVE – Une livre.

ADRIEN – Pas spécialement.
L’objet ne vaut rien à proprement parler.
S’ils sont interdits, ce n’est que pour ce qu’ils renferment : la Sainte parole.
Sa lecture est réservée à ceux qui y croient suffisamment, ainsi personne ne pourra interpréter à tort la Sainte parole.

OCTAVE – Si tu y crois tant, pourquoi me parles-tu ?

ADRIEN – À quoi bon ?
J’ai déjà transgresser les règles.
J’ai tué…

OCTAVE – Je ne le savais pas.

ADRIEN – Je l’ai fait sans écouter ma raison, disparue derrière la rage.

OCTAVE – Moi aussi j’aurais aimé savoir le faire.
Pour moi-même.

ADRIEN – J’ai tué mon amante, ma femme, l’unique que j’aimais.
Et je l’ai fait car nous avons parlé de religion, ou plutôt n’avons pas parlé.
La religion…
Elle voulait prendre celle que j’aimais.

OCTAVE – Je suis désolé, je ne savais pas que tu avais déjà tué par Amour.
À vrai dire, je ne savais pas que cela était parfaitement possible dans un contexte pareil.

ADRIEN – Mais je n’ai pas tué par Amour !
On ne tue jamais par Amour.
L’Amour rend fou.
On tue par folie.

OCTAVE – Je suis désolé, même si je te l’ai déjà dit.

ADRIEN – Un jour, non, une nuit, je la croisai, rôdeuse dans le temple.
J’appris ainsi qu’elle était croyante.
Moi, je ne l’étais pas, je volais juste chaque nuit un livre et en remplaçait un chaque nuit par celui que j’avais lu la veille.
Mais je n’étais pas croyant.
Je ne savais pas qu’elle l’était.
Nous n’en avions jamais parlé.
Elle me vît, nous nous regardâmes et elle ne parla point.
Elle avait ouvert la bouche, sans qu’aucun son n’en sorte.
Je me suis approché d’elle et la serrai dans mes bras.
Elle, décida de ne pas bouger, et je l’embrassai ainsi que le pilier d’un édifice religieux et froid et morne.
Je me dégageai, elle ne souriait, mais son regard, sous ses yeux humides, trahissait son désespoir.
Je pleurais.
Je l’implorais d’oublier, de me parler encore, mais elle se tue.

OCTAVE – Et tu l’as tué ?

ADRIEN – Je l’ai frappée, elle est tombée.
Sa tempe contre l’étagère fît se répandre le sang.
Depuis, comme en honneur à son nom, je crois à l’existence de ce qui me la prise.

OCTAVE – Moi aussi on me l’a prise, mais je ne crois pas.

ADRIEN – Non ! Elle est partie, elle est partie avec tout le monde !

OCTAVE – Il n’empêche que je n’y crois pas.

ADRIEN – Tu devrais.

OCTAVE – Même si je le souhaitais, je ne pourrais pas.

ADRIEN – Pourquoi cela ?

OCTAVE – Mais car je n’ai jamais vu un livre et que je ne sais rien de ce sombre Univers qui m’a pris ma fille.
Je ne sais même pas si je sais lire !

ADRIEN – C’est ta fille qui vînt dans cet univers pour nous.

OCTAVE – Pour vous.

ADRIEN – Je peux tout t’apprendre, si cela est ton vœu.
Si tu es certain que cela est ton vœu, nous pouvons appauvrir un peu plus la race des hommes libres d’un individu.

OCTAVE – Je ne sais pas.

ADRIEN – Je ne peux pas le savoir pour toi.

OCTAVE – Si je ne le fais pas, ils me tueront ?

ADRIEN – Je ne sais même pas si converti tu pourras encore vivre.

OCTAVE – Alors à quoi bon ?
Je les tiens pour responsables.
Je leur en veux.
Je ne veux faire partie de leur secte et ne sais même plus si je désir rester vivant.

ADRIEN – Il ne te reste donc aucun espoir ?

OCTAVE – Parce qu’il te reste de l’espoir à toi ?

ADRIEN – L’Espoir est la raison de vivre de ceux qui n’en ont pas.

OCTAVE – Tu sais, cela fait sûrement plus d’une journée que je suis ici, sans que personne ne me parle. Seul mon ventre troublait le Silence de cette attente interminable.

ADRIEN – Ah, le Silence…

LE GARDE – Accusé numéro un.

L’un des détenus sort.

OCTAVE – Tous partent et aucun ne revient.
La plupart était là avant moi.
Par cette unique porte ils s’engouffrent, tour à tour, puis on les entend crier et un autre est appelé.

ADRIEN – C’était prévisible.
Ce n’est pas grave, du moins, pas tant que cela.
Tu voulais mourir, au moins une fois dans ta vie la Sainte parole servira ta cause.

OCTAVE – J’aurais simplement aimé mourir différemment.

ADRIEN – Comment ?

OCTAVE – Autrement.

ADRIEN – Moi, si je ne souffre pas trop, j’en serais déjà heureux.
Certaines morts, comme la noyade, la crucifixion ou le bûcher m’effraient.
J’ai peur d’y être condamnée, à l’une de ces morts lentes et douloureuses.

OCTAVE – Elle m’a parlé…

ADRIEN – Elle nous à toujours parlé.
À tous.

OCTAVE – Mais pas à moi !
Elle a beau avoir écrit tous les livres, elle ne m’a jamais parlé après que j’ai oublié la voix de sa jeunesse.
Tu ne connais pas le supplice du père qui sait n’avoir jamais entendu la voix de femme de son enfant.
Tu as beau prétendre la connaître, tu ne peux percevoir que sa voix prophétique.

ADRIEN – Tu n’en sais rien.

OCTAVE – Si je le sais.
La sagesse m’est venue de l’âge, de l’expérience que tu n’as point et qui te manque.
Vous pourriez être mon fils.

ADRIEN – Vous pourriez, en effet, très bien être mon père.
Je ne l’ai jamais connu.
La Sainte parole était mon seul parent.

OCTAVE – Votre parent me l’a prise.

ADRIEN – Être prophétesse ne se décide pas.
Elle l’était.
Qu’elle ait survécu ou non.
Que nous l’ayons toujours su ou non.

OCTAVE – Moi-même je n’en savais rien.
Je ne connaissais sa mère.
Aujourd’hui il m’est reproché de ne l’avoir éduqué par la Sainte parole, la tuant du même coup.

ADRIEN – Les actes sont les actes, aussi regrettables soient-ils.

OCTAVE – Elle n’était peut-être même pas ce que vous croyez tant qu’elle est.

ADRIEN – Nous verrons bien cela.
Enfin vous.

OCTAVE – Comment ?

ADRIEN – Tout à l’heure, lorsque vous serez jugés.
Il est écrit que le père de la prophétesse sera fait exécuté par la foule.
Je n’invente rien : il est dit qu’il sera distribué aux spectateurs des cailloux afin que tous puissent punir le père de son infanticide.
Si vous n’écopez pas de cette peine, c’est que vous ne l’êtes pas.

OCTAVE – Vous semblez mieux connaître ma vie que moi-même.

ADRIEN – Cela, en effet, est probable.

VOIX D’UNE DÉTENU – Non ! Non, par pitié ! Non !

OCTAVE – Mais elle m’a parlé.
En rêve, mais elle le fît !

ADRIEN – En rêve…

LE GARDE – Accusé numéro un.

L’un des détenus sort.

ADRIEN – Pourquoi tous nous appeler comme premier numéro ?

OCTAVE – Les autres murmuraient.
Certains dormaient, allongés sur la pierre, tout en murmurant.
Ils craignent d’être appelés.
Tout le monde sait quand il passe.
On passe dans l’ordre.
Puis le Tribunal de l’Inquisition te condamne à mort.
Il te condamne à bien plus à la mort en réalité.
Il t’efface.

ADRIEN – Il t’efface…

OCTAVE – Tu n’as jamais existé aux yeux du monde.
Ainsi, il n’y a jamais eu d’accusé numéro un, donc le nombre se répète indéfiniment.

ADRIEN – Donc personne n’a jamais survécu.

OCTAVE – Oui.

ADRIEN – J’ai perdu l’Espoir.
Je n’ai plus de raison de vivre.

OCTAVE – Non.

ADRIEN – J’ai perdu l’Espoir.

OCTAVE – En avais-tu seulement eu ?

ADRIEN – Non.
C’est justement pour cela que j’en avais.
Ainsi qu’un pendule, je passais de l’Espoir à son abandon.

Silence.

OCTAVE – Apprenez-moi à prier.

ADRIEN – Maintenant ?

OCTAVE – Oui, maintenant.

ADRIEN – Tout d’abord mets toi dans n’importe quelle position qui te soit confortable.
Pense fort à la personne qui te manque le plus.
Pense à elle.
De sa naissance jusqu’à sa mort.

OCTAVE – Je me sens terriblement seul.

ADRIEN – Pense maintenant à notre prophétesse.

OCTAVE – Je le fais déjà.

Silence.

OCTAVE – Je suis toujours aussi seul.

ADRIEN – Alors fais comme moi.
Pense à quelque chose qui te procure du bonheur.

OCTAVE – Je ne sais plus ce que c’est.

ADRIEN – C’est triste.

OCTAVE – Tu ne penses plus à la prophétesse ?

ADRIEN – Je l’ai déjà fait.
Parce que j’ai oublié ce qu’était le bonheur.
Alors je l’imagine.
Parfois, encore, lorsque je prie, je pense aux histories que je lisais dans les livres volés.
Je me souviens seulement d’un conte qui parlait d’une femme et d’un poète qui s’aimaient.
Je ne me souviens plus de sa fin.
Je crois que cela est volontaire, que j’ai fait exprès de ne pas m’en souvenir.
Chaque fois que j’y pense, parce que j’ai décider de ne plus prendre en compte la tristesse, j’ai envie de sourire.
Je crois que j’aime les livres.
Je crois que je suis amoureux de leurs pages.
J’aime la Sainte parole.

OCTAVE – Tu penses qu’il existe encore des poètes ?

ADRIEN – Je ne sais pas.

Mais je pense que j’ai envie d’y croire, du moins je le suppose.

VOIX D’UN DÉTENU – Non ! Je vous en conjure !

Silence.

GARDE – Accusé numéro un.

L’un des détenus sort puis le Silence revient.

OCTAVE – Tu sais comment cela va se passer, de l’autre côté ?

ADRIEN – D’après les livres, l’Inquisiteur posera des questions sans qu’elles ne te soient adressées directement, mais tu y répondras.
Du moins c’est ce qu’il est marqué.

OCTAVE – Tu sais, pour Lise, j’aurais aimé être un père idéal.
J’aurais beaucoup aimé.
Seulement, on me l’a prise trop tôt, trop vite, avant que je ne puisse faire n’importe quoi.
Pour elle, on ne m’a laissé que les larmes.
J’aurais beaucoup aimé la serrer dans mes bras une dernière fois et lui dire combien je l’aime.
J’aurais voulu être ce père, qui dans la vie de son enfant, apparaît comme un soleil, un gros soleil et qui éclaire et qui rassure.
Lise, je l’ai trouvée, seule, sans soleil et qui éclaire et qui rassure, mais dans le Silence impossible d’une triste ville par un d’automne.
Dans un morceau de tissu, égaré dans un impasse, elle attendait.
Elle m’est arrivée dans le Silence et est partie dans le Silence.
Je ne sais même plus si elle savait que je l’aime.

ADRIEN – J’ai appris, dans les ouvrages, que le Silence des croyants était une imitation de celui de la prophétesse.
Elle même, de sa vie, ne savait pas qu’elle l’était.

Elle ignorait sa véritable nature.
Si elle fît vœu de Silence, ce n’était donc que pour s’imiter elle-même telle que les livres la décrivait avant sa venue.

OCTAVE – Je me demande si son rôle lui a pesé.
On me reproche de ne l’avoir protégée, mais elle même semblait ignorer ce qu’elle était véritablement.
Maintenant, tout le monde semble la connaître et l’adorer, comme si cela fût une évidence que c’était elle depuis le début.

ADRIEN – Nous aurions tous pu le deviner.
Nous aurions du.
Tout était écrit !
Il était dit qu’elle serait trouvée dans le Silence par un père ignorant.
Il était dit qu’elle l’abandonnerai pour une vie suivant la Sainte parole le plus exemplairement qui soit.
Il était écrit que le monde ne verrait en elle sa nature réelle qu’au moment de sa mort, alors même que celle-ci n’aurait jamais du se produire.
Il était dit qu’elle serait retrouvée dans un temple au matin, changée en statue, son assassin pleurant sur elle.

OCTAVE – Mais qu’en savais-je ?
Qu’en devais-je savoir ?

Était-ce à moi, illettré, de connaître les périls qu’encouraient un enfant alors même qu’il ne me parlait plus et que je n’y croyait pas ?
Alors que jamais je n’y ai cru ?
Est-il juste de me reprocher de ne l’avoir éduqué dans la Sainte parole et protégée ?

ADRIEN – En effet, c’est bien ce qu’il t’es reproché.
Peu importe la justice.
Seule compte la Sainte parole.

OCTAVE – De toute façon je suis prêt à mourir.

ADRIEN – De toute façon vous n’avez pas vraiment le choix.

OCTAVE – Tu parles comme si personne n’avait vraiment le choix !
La moitié des gestes de l’homme seraient écrits dans un prétendue Sainte parole tandis que le reste de l’existence se définie par l’aspect insondable d’un instinct animal qu’on ne peut renverser, ainsi que dans les nécessités imposées par la vie.

ADRIEN – Mais c’est comme cela que le monde tourne.

OCTAVE – Je me fiche qu’il tourne rond ou non.
Je ne veux veux pas le comprendre.

ADRIEN – Ne te fâche pas.

OCTAVE – Je me fâche si je le souhaite.
De toute manière, n’y suis-je pas obligé ?
Ou l’un de tes livres manquerait de leur précision légendaire.

VOIX D’UN DÉTENU – Ah ! Non !

OCTAVE – Tu entends ces hommes qui souffrent n’est-ce pas ?
J’étais ainsi que tu es en cet instant.
Impassible.
Mais à mesure que le temps passe, je comprends malgré moi.
Plus je comprends, plus je veux mourir avant que l’on exige que je soit exécuté.

ADRIEN – Estime-toi chanceux : on te connaît, notamment dans les livres.
Dans la Sainte parole.
Même un fois mort, derrière cette porte, tu continueras d’avoir existé.
Tu vivras à travers la vie des autres, leur mémoire, tel un parasite de la Sainte parole et de ses croyants.
Pour les autres, une fois qu’ils ne sont plus de ce monde, celui-ci les oublie et leur passage dans cet univers n’aura rien changé, n’aura servi à rien sauf à ce qu’ils en souffrent atrocement en attendant qu’ils soient jugés coupables.

LE GARDE – Accusé numéro un.

OCTAVE – Adieu.

ADRIEN – Peut-être pas.
Les plus beaux vers sont ceux qui ne demeurent tracés.


PARTIE 2

OCTAVE, L’INQUISITEUR, LES GARDES, LES SPECTATEURS
Dans un tribunal dont le sol est rougi par le sang.


L’INQUISITEUR – Monsieur l’accusé numéro un, présent ici, père de la prophétesse, se voit reproché de n’avoir protéger son enfant alors même que celui-ci fît œuvre d’une grande contribution au bien-être de notre monde et à sa connaissance.
Ce crime étant passible de la peine de mort, vous encourrez une exécution auprès du Saint tribunal de l’Inquisition.
En raison du contexte particulier de l’affaire, la peine habituelle d’oblitération de l’existence passée, présente et future n’est d’ores-et-déjà pas retenue.
Si l’accusé souhaite prendre la parole, qu’il le fasse incessamment, après quoi sera prononcé sa peine ainsi que la manière dont elle sera effectuée.

OCTAVE – J’ai prié.
Silence.

L’INQUISITEUR – L’Inquisition ne comprend pas ni le but ni le message l’intervention qui vient d’avoir lieu.
Son auteur est invité à clarifier ses propos.

OCTAVE – J’ai prié.
Non pas pour moi, mais pour elle.

L’INQUISITEUR – Je demeure perplexe, dans la brume de dires étrangers à la Sainte parole.

OCTAVE – J’ai prié parce que je l’aimais.
Parce qu’elle m’a parlé cette nuit.
Soyez assuré de mon Amour pour elle, comme un père devrait aimé sa fille.
Comme un gros soleil et qui éclaire et qui rassure.
Vous m’accusez de l’avoir tué ?
On ne tue pas par Amour, on tue par folie.
La véritable question de ce jugement est donc « Suis-je fou », ou du moins l’étais-je lorsque cela arriva ?
Il y a peu, je vis ses yeux de petite fille de proie face à la nuit.

L’INQUISITEUR – Gardes !
Attachez l’accusé.
Il prononce ce qui ne figure dans la Sainte parole.
L’accusé se fait attaché bras et jambes sur une poutre.

OCTAVE – Mais vous semblez oublier que je l’aime.
Vous semblez avoir oublié ce qu’est l’Amour d’un père pour une fille.
Vous avez oublié son authenticité, enterrée sous la poussière de vos livres.

L’INQUISITEUR – Maintenant que l’accusé a achevé son discours, l’Inquisition va procéder au jugement.

OCTAVE – Non.
Je n’ai pas terminé.
Vous voulez m’exécuter pour un crime : celui de l’avoir tuée.
Or, si je ne l’ai protégée de la manière dont vous le souhaitiez, c’est que ne m’avait averti de ce qu’elle était réellement.

L’INQUISITEUR – Moi, Inquisiteur, condamne l’accusé numéro un à mort ainsi que nous l’annonçait la Sainte parole.
Gardes, distribuez les pierres aux spectateurs.

OCTAVE – De quoi avez-vous peur pour condamner l’innocence.
Du fait que je dise ce que je ne dis pas dans la Sainte parole ?
Les spectateurs commencent à lui jeter les pierres.

OCTAVE – Moi aussi, maintenant, je crois en la Sainte parole.
Mais en une autre Sainte parole.
Dont vous êtes les ignorants.
Octave garde le Silence jusqu’à sa mort.

L’INQUISITEUR – Bien.
Enlevez-moi ce corps misérable et appelez l’accusé numéro deux.
Celui qui tua notre prophétesse.

FIN
6047
Le diadème de rose

Jolan

En un lieu jusqu'alors ignoré et délaissé des hommes, se baignait dans le lac d'une clairière une magnifique femme arborant de majestueuses ailes pareilles à celles des cygnes. Elle était seule, dévêtue et tressait des couronnes de roses, tantôt rouges et tantôt blanches comme si elle attendait patiemment la venue de quelqu'un. Il ne faisait jour, il ne faisait nuit ; le ciel était saphir et laissait entrevoir voir les étoiles, luisant pareilles à des goûtes d’argent et d’or déposées sur l’obscure toile céleste se reflétant dans le bassin. Si on lui avait demandé qui elle attendait, elle nous aurait répondue qu'elle-même ne le savait toujours pas. Le diadème floral était de plus en plus complet et à l'instant même où sa conception fut entièrement achevée et où la femme ailée le referma, un jeune garçon rêveur muni d'un crayon et d'un carnet entra dans cette brèche de la forêt. Il leva la tête et aperçue la créature qui demeurait toujours dans l'eau. Alors la femme se tourna de façon à pouvoir contempler son interlocuteur qui ne semblait pas être dérangé pas l'absence de vêtements, c'est en fait à peine s'il avait remarqué qu’il manquait quelque chose à la personne à moitié dans le lac. D'une voix enchanteresse et mélodieuse, elle ouvrit sa bouche et en laissa sortir ce discours :

« Très cher aspirant au mal, qui es-tu ?

- Je, cher ange venu des cieux, ne suis pas un aspirant au mal mais seulement un poète, c'est la seule chose qui sache parfaitement me définir.

- Très cher poète n'étant, tu as du beaucoup souffrir. Je le sais, puisque ce lac est comblé de tes larmes, donnant une douce amertume à l'eau qui y réside.

- Si l’amertume de l’eau vous déplaît, alors j’en suis meurtri. Elle est due aux tourments que j’endure, aux tourments dont mon cœur sans cesse est navré, et à cause de quoi le long de mes joues ruissellent encor et toujours un flot, un torrent continue et incessant de larmes.

- Ce n’est pas de l’amertume de l’eau dont je regrette la pureté, mais de votre cœur. Si déjà il désir une personne étrangère à moi, pourquoi êtes-vous donc venu jusqu’ici ?

- Je, cher ange, suis poète et il est dans ma nature de me laisser rêver au-delà des frontières imposées par la conscience humaine.

- Poète, ne suis un ange qui fréquente les rêves. Je ne suis l’attraction des regards des vôtres pour qu’ils clament avoir pu me contempler plus les uns que les autres.

- Ô sublime femme aux ailes plus blêmes et au teint plus enchanteur que la lune, si vous n’êtes un ange alors qu’êtes-vous ?

- Je suis simplement pire. Pire qu’un ange en proie à l’humeur la plus cruelle, au désir le plus impassable et à l’espoir le plus ineffaçable.

- Ainsi, chère femme dont je ne sais rien, je vous ai admiré il est vrai mais je suis poète, je ne respire que pour pouvoir décrire ce qui ne mérite de demeurer inoubliable.

- Je comprends vous paroles. Vous qui êtes jeune et beau, pourquoi n’avez-vous donc pas suivi - l’exemple de vos semblables ? Alors vous m’auriez aimé. »


La femme commença à sortir de l’eau. À chacun de ses pas se dessinaient, de manière de plus en plus marquée, de longs et magnifiques habits blancs. À mesure que son corps immergeait dans le visible et qu’elle se rapprochait du jeune homme, il se sentait de plus en plus condamné au charme et à l’emprise séduisante de la femme. Il avait l’impression de ne ressentir au plus profond de lui seulement que son cœur comme si le reste de son corps fondait. Ses honorables valeurs semblaient être remplacées par l’éphémère passion d’un corps étranger, d’une sensation nouvelle, et d’un plaisir rare aux hommes ordinaires car soudainement épris, il ne réagit pas par un refus lorsque la créature ailée s’approcha de lui, tellement que leurs corps s’entrelacèrent dans un inattendu soulagement de la part des deux individus, rassurés partager des flammes semblables. Enlacés, l’un dans les bras de l’autre et inversement, la poète se rendit compte que le tissus, couvrant des épaules aux pieds de celle qu’il avait contre lui, avait déjà disparu depuis un moment, peut-être même n’avait-il jamais existé que dans ses cauchemars. Leurs cœurs embrasés, si proches derrière leurs poitrines et leurs bustes reposés l’un sur l’autre, semblaient fusionner dans cet élan intense et charnel, leur délivrant un désir, une folie passagère dont, sur le moment, ils ne crurent pouvoir se passer. Ils croyaient s’aimer éperdument, oubliant qu’il existait un monde dont ils omettaient l’existence. Maintenant, c’était la femme qui commençait à se dissiper. Le poète avait beau s’agripper au corps de celle qu’il pensait adorer, rien n’y faisait ; elle disparaissait peu à peu, se mêlant au paysage. En quelques secondes seulement, l’origine du bonheur infini et momentané du jeune homme n’existait plus. Il semblait perdu, comme si tout était différent par rapport à lui, mais sans doute était-ce lui qui était différent aux yeux du monde. Elle lui manquait déjà, trop même ; alors il pleura. Il pleura et pleura, ses larmes coulant le long de ses joues pâles de chagrin puis se déversant au sol et regagnant le lac dans une valse mélancolique. Le poète, en proie à une indéfectible tristesse et cherchant un but à sa vie, suivi ses larmes jusqu’au fond de l’eau. Il n’y respirait pas mais faisais abstraction de cette souffrance, de cette sensation d’emprisonnement. Plus il nageait profondément et s’éloignait de la rive, moins le soleil perçait le voile d’eau qui se dressait entre le jeune homme et la surface. Trop tard, il décida de remonter mais le sort en avait décidé autrement. Coincé le pied au fond du lac où se trouvait un long habit blanc, parant le fond aquatique, il formait une boucle, refermé sous une lourde pierre ; l’extrémité libre flottait dans le faible courant tandis que l’autre restait liée au rocher. Ce tissu blanc, tel un oiseau rattachée au sol par une chaîne, retenait le pied du pauvre poète. Il n’arrivait plus à remonter et sentait son rythme cardiaque battre de plus en plus fort, sa respiration aller de plus en plus vite. À mesure que les secondes passaient il angoissait de plus en plus, car il n’arrivait à se défaire de ses liens et savait sa mort proche. Il essaya de dégager son membre de la blême toile, mais sentit peu à peu l’air qu’il contenait dans ses poumons s’épuiser, partir et rejoindre la surface tant désirée du pauvre garçon. Après plusieurs minutes de lutte acharnée, il perdit tout espoir ; il se calma et repensa aux plus beaux instants de sa vie. Il se remémorait la fine silhouette de la femme ailée contre la sienne, et ce sentiment inoubliable qu’aucun malheur n’aurait pu leur arriver. Dans un ultime souffle et une pensée pour cet être tant aimé, sa conscience s’éteint, sans doute pour rejoindre un monde meilleur. À l’instant où les paupières du pauvre jeune homme se refermèrent, l’étoffe se délogea de l’emprise de la roche et enroba le corps sans vie qui, peu à peu, remontait vers le monde réel. Ainsi la soierie avançait en direction de la surface, lentement, portant dans ses bras le cadavre du défunt poète.
23173
Tragédie politique de l’absurde
LE CHAT

Jolan


PERSONNAGES
LE CHAT
L’HOMME
LA SOCIÉTÉ
LE POLITIQUE
DIEU
LE PAUVRE
LE SUICIDAIRE
L’ÉTUDIANT
L’ESCLAVE
LE MORT


ACTE PREMIER
Scène 1
Le Chat et l’Homme
LE CHAT
Humain tu est idiot, tu te détruits sans cesse,
Tes guerres constantes constituent ta faiblesse.
Je te vois te tuer au lieu de te nourrir,
Au même d’aider, au lieu de chérir
Ton prochain, assassin, tu l’exécute sans
Ne remettre jamais en cause tout ce sang.
L’HOMME
Chat tu ne comprends pas, certains pillent nos terres,
Violent nos femmes et font de tous nos sanctuaires
Des lieux de barbarie où ils osent sans peine,
Ne pas croire en nos dieux !
LE CHAT
Est-ce là où la haine
Prend racine chez vous ? Vous n’êtes que bouffons !
Vous ne semblez vivre que de ces religions.
L’HOMME
Tu es un animal, Dieu te pardonnera.
LE CHAT
Je ne veux du pardon de celui qui, en bas,
De son ciel regarde se battre les humains.
Quand ce n’est de l’épée, ceux-ci meurent de faim !
Homme écoute-moi donc, tu iras vers les gens,
Sans voir leur misère, sans compter leur argent,
Et tu leur clameras que leur belle Arcadie,
Est un songe épuisé sous la belle argutie,
D’une politique sourde à tous les savants.
L’HOMME
Chat mais si je leur dit, pour sûr ils me tueront,
Car le politique est, sur la population,
Un monarque absolu, et cette Société,
Cache en moi son reflet, ses mensonges et idées.
LE CHAT
Qu’importe si après on retient ton message,
Et qu’ouvre après lui une ère ton passage.
L’HOMME
Mais la mort m’est-elle forcément destinée ?
Je préfère vivre que de tous nous sauver.
LE CHAT
Égoïste ! Vois-tu, c’est là tout le problème :
Vous souhaitez le meilleur, mais cela pour vous-même.
Pensez à vos enfants !
L’HOMME
Mais, Chat, je n’en ai point !
LE CHAT
Si ce ne sont les tiens, pense à ceux du voisin,
Et dis toi toujours qu’il faudra se sacrifier,
Si tu veux que le monde puisse un jour changer.

Scène 2
L’Homme et la Société
L’HOMME
Société, c’est le Chat qui m’envoie t’informer,
Que par tous tes médias tu es manipulée.
LA SOCIÉTÉ
Comment est-ce possible ? Je me sais si puissante,
Qu’il est inconcevable de demeurer souffrante,
Sans m’en apercevoir.
L’HOMME
Et pourtant c’est le cas,
Tu demeures soustraite à des milliers de lois,
Que tu devrais choisir, or c’est le politique,
Qui décide à ta place.
LA SOCIÉTÉ
Car cela est pratique.
L’HOMME
Est-ce le « pratique » qui exprime l’avis,
Que le voudrait vraiment notre démocratie ?
LA SOCIÉTÉ
Mais s’il est bien élu que lui reprochez-vous ?
L’HOMME
Mais élu par qui donc ? Uniquement les fous ?
LA SOCIÉTÉ
Par ceux qui ont voté pour notre bien-aimé,
Soit deux tiers à peu près de notre société.
L’HOMME
Mais par tous ces deux tiers, où seule une partie ?
Cela est étrange qu’un homme soit ainsi,
Désigné par tous ceux qui sont allés voter.
LA SOCIÉTÉ
Non ce n’était l’œuvre que des majorités,
La moitié plus ou moins.
L’HOMME
La moitié des deux tiers ?
Il nous n’en reste qu’un ! Mon Dieu quelle misère,
Sur la démocratie s’abat, et sous les yeux
D’un peuple indifférent mais qui demeure heureux.
LA SOCIÉTÉ
Oui nous sommes heureux d’un tel fonctionnement.
HOMME
Mais pas moi, Société, j’en suis très mécontent.
LA SOCIÉTÉ
Tu oses donc braver le silence paisible,
Pour une injustice dont tu n’es point la cible ?
Te crois-tu affecté plus que quiconque au monde,
Par le système en place que tu juges d’immonde ?
S’il en est donc ainsi, va, mon fils, explorer,
Je ne te connais plus, tu es déshérité.
L’HOMME
Je ne souhaitais, mère, avoir ce que tu laisse :
La planète n’est plus qu’une ordure en détresse ;
Partout tu as semé une immense discorde.
La jeunesse n’a plus que pour elle la corde !
LA SOCIÉTÉ
Sache seulement que je lui raconterai,
Au politique que tu n’est plus que mauvais.
L’HOMME
Ainsi donc s’affranchir de tout sentier battu,
Constitue pour vous tous un affront et abus.
LA SOCIÉTÉ
Nous avons tout construit pour que tu puisses y vivre !
L’HOMME
Comme des chaînes, mais maintenant je suis libre !

Scène 3
L’Homme et le Chat
L’HOMME
Vous m’aviez indiqué de clamer le réel :
Je l’ai fait et m’en vais du monde des mortels,
Interroger un Dieu proclamé comme guide,
Mais qui en nos esprits n’apporta que tu vide.
LE CHAT
Homme, vas je t’en prie, si c’est ta destinée.
Fais-le pour les poètes et les illuminés,
Fais-le pour les enfants qui ne croient plus en rien,
Fais-le pour le monde ou ce sera donc sa fin.

Scène 4
L’Homme et Dieu
L’HOMME
Dieu pourquoi de partout on se bat en ton nom ?
Dieu pourquoi de partout on se bat pour ton nom ?
Partout on ne croit plus qu’à toi et ton pouvoir ;
Chacun est certain qu’il connaît mieux ton histoire
Que quiconque et ainsi aux batailles il livre,
Cela pour imposer ses croyances et son livre.
Ne croyez-vous donc pas que ce de la folie,
De laisser sur Terre définir ses amis,
Sur la façon dont ils se construisent l’espoir,
D’un monde différent et où, bercés de gloire,
Seuls certains idéaux seraient la vérité.
Pourquoi donc cette haine n’est-elle pas pécher ?
Des peuples entiers souffrent car ils n’ont aucune eau,
Mais comment réagissent, autrement d’avec mots,
Nos religions d’Amour et religions de paix ?
Elles oublient la détresse et brûle tous les mets,
Des villes que ses troupes ne font que traverser.
Outre donc la misère, qu’est la divinité ?
DIEU
Homme, on parle de moi en disant des mensonges.
Je n’inspirais naguère que le sublime songe,
De voir l’humanité s’aider main dans la main,
Mais les gens me prêtent un discours qui n’est mien :
Je ne demeure plus maître sur mon pouvoir.
Tout réside en la foi, en ce que l’on peut croire,
Mais des masses aveuglées, persuadées du faux,
Font la guerre et pillent en croyant que mes mots,
Avaient comme dessein de m’imposer partout.
Or, je le suis déjà mais sous différents titres,
Dans les sciences ou la foi, je suis le même arbitre,
Mais certains devinent sous de multiples aspects.
L’HOMME
Mais, Seigneur, c’est cela qui trouble notre paix !
DIEU
Mon rôle est achevé, je laisse les humains,
Décider eux-mêmes de mes forces et mes fins.
L’HOMME
Dieu comprenez donc, je suis explorateur,
Et suis en quête d’un monde bien meilleur.
DIEU
Vous n’êtes le premier errant à ces chemins,
Œuvrant seul mais pour tous, vous reniez l’humain.
Votre égoïsme n’est plus et vous êtes libres,
De chercher à vos terres comme l’Homme doit vivre.
Mais je suis impuissant et hélas ne peux pas,
Être dans votre quête un allié de poids.
L’HOMME
Si vous ne pouvez point subvenir aux besoins
De notre Humanité, veuillez me dire au moins
Où je pourrais trouver un quelconque secours.
DIEU
Parlez donc à tous ceux qui vivent tous les jours,
La misère et la rue, la nuit et le froid.
Allez voir ces pauvres et apprenez de leur voix,
La valeur d’un argent dont ils se passent bien :
Ils vivent des dons des autres êtres humains.
Il n’est en société mais habite en son cœur,
Et sa présence même anime, avec ardeur,
Les discours pleins de rage de quelques politiques,
Qui n’ont point su trouver ni raison ni éthique.
Sur ce je vous laisse, mon prophète, mon fils,
Puissiez-vous mener la Terre à l’ère propice,
Afin que l’être humain soit un peu plus humain :
Qu’il n’use de haine comme de tout moyen.


ACTE DEUXIÈME
Scène 1
La Société et le Politique
LE POLITIQUE
Quoi encor ? Qui trouble mon temps si précieux ?
LA SOCIÉTÉ
C’est moi, Seigneur, je viens vous dire qu’il y a peu,
Un homme des nôtres a quitté Le Beau Système,
S’égarant des coutumes et de vos dires mêmes !
J’eus beau tenter, mais en vain, de le raisonner,
Il était sourd aux mots, bien trop déterminé.
LE POLITIQUE
Quelle audace, honte ! Troubler l’ordre et ainsi ?
Il faudrait être fou pour être mon ennemi.
Retenez donc cela : l’être le plus parfait,
Pour moi, Politique, est celui qui mourrai.
LA SOCIÉTÉ
Je suis bien d’accord car seul un grand suicide,
Peut me rendre fiable.
LE POLITIQUE
Que vous êtes lucide !
LA SOCIÉTÉ
Ce n’est que grâce à vous, mon Maître, mon Mentor.
Sans vous je serais fou, sans vous je serais mort.
Mais enfin l’être humain qui ne se soumet point
À votre autorité, quel sera son destin ?
LE POLITIQUE
D’abord la torture sur la place publique,
Avant de le pendre, tout cela dans l’éthique,
De nos exécutions.
LA SOCIÉTÉ
Qu’est-ce donc que cela ?
La morale, l’éthique, les mœurs et notre foi,
Tout est si complexe, toutes se contredisent,
Mais qui doit diriger et par quelle entreprise,
Déterminer cela ?
LE POLITIQUE
Nous ne le savons pas,
Mais j’ai ma solution qui sera plus facile :
Écoute-moi toujours, ce n’est pas si stupide.
Tu délègues ton choix, tu n’es plus responsable,
Tu n’as plus rien à faire.
LA SOCIÉTÉ
Cela m’est impensable,
Mais j’accepte car nul ne voudrait s’afficher
Comme votre rival au pouvoir convoité.
LE POLITIQUE
Génial ! Maintenant cherche donc le rebelle.
Il ne doit plus sévir : notre paix éternelle
Se construit enfin à l’heure où nous parlons.
Toi peuple, Société, sous ma domination,
Tu devras à moi seul toute stabilité.
J’empêcherai toujours la presse endoctrinée,
Par ces insurrections, de te faire du mal.
Je serai ton Seigneur, tu seras mon féal.

Scène 2
L’Homme et le Pauvre
L’HOMME
Monsieur, monsieur ! M’entendez-vous monsieur ?
LE PAUVRE
Est-ce moi, monsieur, que vous nommez monsieur ?
Cela fait bien longtemps que l’on ne m’a parlé
Avec ce surnom et, pour tout vous avouer,
Cela fait bien longtemps que nul ne m’adressa,
La parole.
L’HOMME
C’est que j’ai des questions car voilà,
Je m’interrogeai quant à notre Société.
LE PAUVRE
Votre Société ? Je ne puis vous aider.
L’HOMME
Laissez-moi donc au moins raconter mon voyage :
J’étais désemparé devant tant de carnages,
Et rendis visite au Dieu de tous les mortels.
Quelle fut ma surprise quand cet être éternel,
M’annonça, sans mentir, n’avoir plus de pouvoir !
Mais il me dit aussi qu’il restait un espoir,
Et m’indiqua ce lieu, me disant que vous seul,
Dont la couverture se murera en linceul
Quant l’hiver sera là, pourrez me répondre ou
Me dire mon chemin.
LE PAUVRE
Face à tout ce courroux,
Que porte notre Terre, je n’y connais rien,
Mais je sais en revanche la valeur de ses biens.
Même l’eau est pour moi une source d’angoisse,
Et toutes ces nuits, là froidure me glace,
Mais je n’y peux rien, car malgré mes efforts,
Mon seul logement est cet espace : dehors.
Alors soit j’ai pour moi presque l’infinité,
De terre où sans cesse je peux papillonner,
Mais je n’ai en mon âme de sincère repos,
Car j’ai peur chaque instant de ne plus avoir d’eau.
Pour tous ces passants, là, cela est ridicule.
Intellect et argent mis ensemble s’annulent.
Oui je pourrais vivre avec une dignité,
Si chacun des humains posait dans mon panier,
Une petite pièce et qui vaudrait pour moi
Tous les trésors du monde, mais ils m’ignorent. Pourquoi ?
Parce qu’ils ne souhaitent être conscient qu’en bas,
Sous leurs fenêtres moi je meurs toujours de froid.
Le déni doit être sacrément confortable,
Pour qu’aucun des humains, et c’est inacceptable,
N’aide les personnes dans la difficulté.
L’HOMME en lui donnant un sou
Je suis bien d’accord, tenez pour subsister.
Cependant il se trouve que j’avais une question,
Quelque peu sensible mais vos conditions
De vie ne vous point déjà donner l’envie
De mettre fin tout : la misère et la vie ?
LE PAUVRE
Non car il faut bien quelqu’un sur les trottoirs,
Qui dise au monde entier qu’il a un grand pouvoir,
Sur ce qu’il s’entête sans cesse à ignorer.
Parlez au suicidaire, lui aura médité,
Sur la mort et la vie, sur l’espoir et l’Amour.
L’HOMME
Je vous en remercie et garderai ce jour,
Encré dans ma mémoire. Adieu mon ami !
LE PAUVRE
Puissiez-vous rendre l’univers utopique.

Scène 3
L’Homme et le Suicidaire
L’HOMME
Monsieur vous pleurez ? Que puis-je pour vous ?
LE SUICIDAIRE
De grâce mon ami, ou je deviendrai fou,
Ne tentez surtout pas quelque compassion ;
Ne tentez surtout pas une consolation.
Vous n’êtes pas en deuil, votre cœur n’est navré,
Parlez donc sans détour, sans n’être point peiné.
L’HOMME
Eh bien il se trouve que j’allais voir Dieu,
Qui m’annonça, confus, que depuis les cieux,
Il n’avait, sans mentir, plus le moindre pouvoir,
Mais il m’a dit aussi qu’il restait un espoir,
Et m’indiqua un lieu, me disant, désolé,
Que cet homme des rues me ferait avancer.
Lui m’indiqua vous, alors je vous demande :
Si la guerre des Hommes les mensonges commandent.
Si leur faim ne tient qu’à leur horrible déni.
Quelle est donc en monde la place de la vie ?
LE SUICIDAIRE
La place de la vie est bien difficile,
Puisque sans s’arrêter, celle-là même oscille,
Comme un pendule, de droite à gauche de la
Souffrance à l’ennui.
L’HOMME
Et pourquoi donc cela ?
LE SUICIDAIRE
Oh mais ce n’est pas moi qui ait conclu ainsi :
Oui c’est Schopenhauer qui rédigea ceci,
Se voulant demeurer l’élève de Platon.
L’humain est horrible, son besoin se confond
Avec sa volonté. Tout est manque pour lui,
Donc désir qui devient, s’il n’est pas assouvi,
Une souffrance. Mais s’il demeure comblé,
Le manque n’est plus, le désir s’est donc mué,
En ennui.
L’HOMME
Mais tout cela est fort triste et fort pessimiste.
Pourquoi donc vivre sa vie en esprit défaitiste ?
LE SUICIDAIRE
Mais car jamais l’humain ne sera au bonheur.
Jamais, ô grand jamais, il ne sort du malheur.
Le destin est ainsi : nous sommes condamnés,
À errer sans dessein avant de décéder.
Autant mourir de suite !
L’HOMME
Non ne faites pas ça !
Après Schopenhauer, étudions Spinoza,
Qui nous dit que l’humain a tous ses buts tracés,
Et qu’ils sont l’expression, non pas de volontés,
Mais presque d’affections : il s’agit du désir.
En effet, même toi, si tu cherches à mourir,
C’est que tu souhaite atteindre le bonheur,
Le plus proche de toi, car même en ton malheur,
Tu désires toujours aller mieux, par la mort.
LE SUICIDAIRE
J’en demeure troublé car vous n’avez point tort.
Tout cela n’est point faux et sera ma devise,
Et par ces avancées nous déferons l’emprise,
Du désespoir sans fin de notre Société,
Qui parcourt nos écoles, nos usines et chantiers,
D’une heure qui a peur de l’avenir,
Qui a peur de lutter, imaginant le pire !
Allez donc le trouver, notre pauvre étudiant,
Qui souffre sans manger. Quel pays défaillant !


ACTE TROISIÈME
Scène 1
L’Homme et l’Étudiant
L’ÉTUDIANT
Toi là-bas, toi au loin, oui toi l’homme immonde,
Toi que j’exècre, toi, oui toi l’homme du monde,
Ne m’adresse aucun mot, ne me regarde plus :
Oui regarde plutôt ce monde qui n’est plus !
Tu en es responsable, homme que je déteste,
La planète après toi n’est que ruine funeste.
Contemple les débris, admire les vestiges,
Oui car bientôt nous tous, ceux qui meurent ou dirigent,
Rejoindrons ce monde, cet immense cimetière.
Vous avez tout brûlé, ne laissant que misère !
L’HOMME
Vous semblez, mon enfant, tout à fait vous méprendre.
Je ne possède rien, tâchez de vous détendre,
Car je recherche des aspirants à l’espoir,
D’un système nouveau, d’un système où la gloire,
Serait déterminée, non pas par la richesse,
Mais par l’altruisme et aussi la sagesse.
L’ÉTUDIANT
Commencez donc ainsi par ne point mépriser
Ceux qui, à l’avenir, seront la Société.
J’entends dans vos paroles un air supérieur,
Cultivant la haine dans chacun de nos cœurs.
L’HOMME
Mais je ne comprends pas ! Je n’ai jamais été
Particulièrement d’un dédain effronté.
L’ÉTUDIANT
Vous parlez comme tous : c’est bien là le problème.
La condescendance reste toujours la même.
Nous avons, jeunesse, droit à la dignité,
Manger à notre faim, plus d’un mètre carré,
Une voix entendue et non pas un semblant
De démocratie tel qu’ont connus nos parents.
Nous sommes tous d’accord, il vaut mieux mourir,
Que de vivre en censure sans ne rien pouvoir dire.
L’HOMME
Venez donc construire de meilleurs lendemains !
Décrétons que nous tous avons entre nos mains,
L’ultime espérance de sauver notre monde.
L’ÉTUDIANT
Je crains fort que cela en rien ne corresponde,
Avec nos idéaux, nous jeunesse rebelle,
Qui ne se leurre plus des mains perpétuelles
Pour nous utiliser. Je me vois donc navré,
Mais sans nul autre choix, de devoir décliner.

Scène 2
L’Homme
L’HOMME
Je me retrouve seul à faire l’impossible.
Le destin corrompu nous voue au plus terrible,
Et la mort demeure l’unique dénouement.
Que puis-je déclencher qui soit si puissant,
Pour réveiller tous ceux qui sont las de se battre,
Qui n’ont plus la force de toujours se débattre,
Face au Politique toujours plus meurtrier,
Qui tente sur le monde, tel un roi, de régner.
Chat, aide-moi je ne puis plus poursuivre.
J’abandonne, l’humain ne sait plus comment vivre.
C’est un combat en vain, car si nous l’emportons,
Lui luttera et donc toujours nous combattrons.
Sans instabilité notre monde demeure,
Car tantôt nous gagnons, et tantôt sa fureur,
Remplace nos principes et ainsi à jamais.
C’est un cercle vicieux, c’est un cycle sans fin !
Le bourgeois contre le peuple mais ce refrain,
Est condamné toujours à être vérité.
J’avoue vaincu face à l’éternité.

Scène 3
L’Homme et le Chat
LE CHAT
Machiavel ! Machiavel ! Lui seul avait raison,
Car voyez-vous, ami, votre expédition,
N’aura jamais de fin, et vous l’avez compris,
Mais possède un impact sur chacune des vies,
Car vos paroles se cachent d’autres choses :
L’idée que des deux camps nul des deux ne s’impose,
Du moins à l’infini car sitôt le pouvoir,
Dans l’une de vos mains, l’autre va le vouloir.
Mais la politique ne sert point à régner,
Sans notion de temps, sans compter les durées,
Car il y a, mon cher, bien que presque invisible,
Une stabilité et un monde paisible,
Ce lorsque vous réveillez la masse de consciences.
Apprenez aux peuples la nation de « décence »,
Lorsqu’avec le cœur vous vous scandaliserez,
De tous les actes abjects du tyran sans pitié.
L’HOMME
Excusez-moi mais je crains de ne point comprendre,
Car la stabilité, à ne point m’y méprendre,
Est l’absence toujours de ces révolutions,
Qui d’un jour ou l’autre fracture la nation.
LE CHAT
Justement, voilà donc notre belle morale :
Le peuple et les bourgeois ne sont pas comparables,
Et nul ne peut jamais diriger le pays :
La stabilité du monde est dans le conflit.

Scène 4
L’Homme
L’HOMME
Je ne comprends pas ce que le Chat voulait dire.
Ses paroles semblaient nullement convenir
À notre Société. Car toujours le démon
Détient tout le pouvoir des civilisations.
Est-ce donc là normal de concentrer ainsi
La possibilité de créer mais aussi
D’exécuter et puis d’appliquer notre loi,
Qui n’est présente que, à notre grand effroi,
Pour servir le Maître de notre Société.

Scène 5
L’Homme et l’Esclave
L’HOMME
Vous là-bas qui passez ! Vous qui ne regardez
Dans les yeux de ceux qui osent interpeller
Un homme occupé à travailler durement !
Qui êtes-vous ? Pourquoi un tel acharnement ?
L’ESCLAVE
Mon Seigneur, je m’en vais, sur ordre de maître
Nourrir tous ces cochons, me ressemblant, peut-être.
Je ne sais plus rien, plus même qui je suis,
Car lui me traite comme son ennemi.
Je suis, semble-t-il, bien moins estimé,
Que les bêtes que je m’apprête à engraisser.
L’HOMME
Mais pourquoi, mon ami, n’avoir jamais songé
À rompre ces chaînes et à vous en aller ?
L’ESCLAVE
Je ne peux, je n’ai point de foyer qui m’attend,
Ni de loyer pour me nourrir suffisamment.
Maintenant, je vous prie de vouloir m’excuser,
Mais je dois travailler sans ne point trop tarder.

Scène 6
L’Homme
L’HOMME
Quel étrange spectacle qu’un homme qui se voit
Asservit sans savoir qu’il possède des droits.

Scène 7
L’Homme et le Mort

LE MORT
Êtes-vous celui qui, dans toutes contrées,
Réveillez les âmes pour la Révolution ?
J’en suis, moi aussi! Car c’est l’opposition
Qui m’a fait tel que je ne suis plus aujourd’hui.
Vous rendez-vous donc compte ? Décapité par qui ?
Celui qui prétendait lutter pour tous nos droits.
En retour il noue tue si on ne l’aime pas,
Et nous met dos-à-dos, même avec nos amis !
Diviser pour régner : sa devise est celle-ci.
Souffrez que, mon ami, notre Société
Soit bâtie ainsi et ne songe à se changer.
L’HOMME
On vous a fait tuer ? Cela pour vos valeurs ?
Parce que vous n’étiez pas l’un de ces menteurs,
À clamer, sans souci, ce que le Maître veut,
Sans ne point se soucier du vrai ou fallacieux.
LE MORT
Mais la masse se sait que se suspendre à lui,
À sa voix, ses idées et sa grande ineptie.
L’HOMME
Je suis découragé : le Chat veut poursuivre
Allier tous les peuples et leur dire de me suivre,
Mais moi je vois bien que les gens ordinaires
Ne voient en cet espoir aucune lumière.
Je ne veux, je ne peux plus continuer à
Faire semblant qu’un jour notre monde sera
Juste, équitable et bon, comme je le souhaiterais,
Car le Politique a de tout autres projets.

Scène 8
L’Homme et la Société
LA SOCIÉTÉ
Mon ami venez donc me serrer dans les bras !
C’est enfin décidé : je suis votre combat.
Ces mots là, pour toujours, sera dans les mémoires,
Gravé comme historique et comme hymne à la gloire
De notre liberté, de nos droits défendus
Au prix de notre sang, quand nous ne fûmes pendus,
Au prix de notre sang déversé des machines,
Notre sang bouillonnant versé dans les usines.
L’HOMME
Partisan ! Mon confrère ! Enfin vous renoncez
Au politique et à ses projets insensés.
Luttons donc, dès ce jour, pour que toutes nos vies
Soient vues comme égales et ne soient pas définies
Seulement par notre travail et par l’argent
Que nous produisons.
LA SOCIÉTÉ
Eh bien ! Justement !
Venez donc m’embrasser ! Gagnions la bataille,
Et fêtons le ensemble !
(La Société poignarde l’Homme dans son dos)
L’HOMME
Ah ! Quelles retrouvailles !
Et par un tel espoir, quel triste dénouement.
La masse m’assassine pour être des vivants
Qui réfléchissent et qui, par souci de leurs droits,
Luttent contre ceux qui se prennent pour des rois.

Scène 9
L’Homme
L’HOMME
J’expire ainsi que tous les rêves des humains,
Ainsi que l’espérance de changer leur destin,
L’espérance d’un jour les faire libérer,
D’un jour qu’il soient enfin bien représentés.
J’expire ! En mon trépas quelle révolution
Disparaît avec moi ! Je luttais… À quoi bon ?


ACTE QUATRIÈME
Scène 1
Le Chat

LE CHAT
Mon rôle est achevé, je vais me retirer
Certain que nos travaux, dans le monde entier,
Trouveront un écho et la révolution
Sera universelle, synonyme d’union.

Scène 2
Le Pauvre, le Suicidaire, l’Étudiant, l’Esclave et le Mort

LE MORT
Notre mentor est mort je l’ai vu traverser
La frontière entre la Terre et les décédés.
LE PAUVRE
Lui, le seul, qui voyait à travers tous nos yeux.
LE SUICIDAIRE
Lui qui savait comment rendre le monde heureux.
L’ÉTUDIANT
Lui pour qui accordait un sens à tous ses mots,
Et dont les dires étaient nos communs idéaux.
L’ESCLAVE
Jurons nous de ne point dissoudre l’assemblée
Que nous constituons avant d’avoir donné,
L’équité, la justice sans nulle distinction
De sexe ou pauvreté.
LE PAUVRE
Oui nous le jurons.

Scène 3
Le Pauvre, le Suicidaire, l’Étudiant, l’Esclave, le Mort et la Société
LA SOCIÉTÉ
Messieurs je porte la tragique nouvelle :
Un homme s’est tué, oui cet homme rebelle,
Qui clamait face à nous des hérésies totales,
Et voyait de partout seule la part de mal.
Je regrette bien sûr ce triste évènement,
Mais suis soulagé, car en manipulant
L’opinion des autres il les aurait pu changer
En brigands des hommes devenus dérangés.
LE PAUVRE
Monsieur, vous vous trompez, cet homme n’était pas
Contre vous.
LE SUICIDAIRE
Il était honnête et son funeste trépas
Ne signifie rien, oui, Monsieur, rien d’autre,
Que celui du monde, de vous comme le nôtre.
L’ÉTUDIANT
Et, de plus, nous savons. Oui ! Et c’est en tentant
De nous dissimuler les actes qui vraiment
Se seraient déroulés, que nous, peuple, cherchons,
À vous montrer que sa mort est conspiration.
L’ESCLAVE
En vérité je dois vous avouer un crime.
Je l’ai vu, notre ami, rendant son souffle ultime,
Lorsque la Société lui plantait dans le dos
La haine qui conduit les peuples les hauts
Aux plus sombres bassesses.
LE MORT
Quoi ? Vous l’avez tué ?
Pour être juste et bon, pour son humanité ?
N’avez-vous pas honte d’un acte aussi abject ?
(La Société poignarde les personnages les uns après les autres)
LA SOCIÉTÉ
C’est vous, en m’espionnant, par vos pratiques infectes,
Qui rendez ce monde si noir et accablant.
C’est vous par vos questions, vous mes défunts enfants,
Qui faites grandir la peur, l’effroi, la terreur,
Par tant de calomnies déconcertants nos cœurs.

ACTE CINQUIÈME
Scène 1
La Société
LA SOCIÉTÉ
J’ai tué, je suis un criminel, assassin,
Meurtrier, je ne suis plus rien
Sinon tout un courroux, une haine, une rage,
Contre le monde entier. Ah ! Funeste présage,
Quel funèbre avenir nous attend à présent ?
Je crains l’affrontement, j’ai crains les marres de sang.
Infanticide pour une réalité,
J’ai tué mes enfants ! Je les ai poignardés !
Dans quel dessein le fis-je ? Pour empêcher quoi donc ?
Était-ce obligé pour dissuader quiconque
Aspirerait encore à me manipuler ?
Était-ce leur faute, devait-il le payer ?
Non, je ne pense pas, moi seule suis coupable
De ma naïveté, d’être manipulable.
Mais enfin je subis l’action de quelqu’un d’autre,
Un ignoble imposteur, un clandestin des nôtres,
Qui par ruse et méfaits me fit croire le faux.
Je demeure dupée, mon unique fardeau,
Ce pouvoir de titan, je lui offris pensant
Qu’il mènerait à bien mon supplice accablant.
Par tant d’institutions, par tant de boucliers,
Tous pensaient pour de bon le peuple protégé,
Mais en réalité il n’est que tourmenté
Depuis que, insouciants, nous lui avons donné,
Politique le pouvoir de dominer.

Scène 2
La Société et le Politique

LE POLITIQUE
Mon ami, j’ai appris que la chose était faite,
Je vous en remercie, et car l’instant s’y prête
Je voulais vous parler car le pain va manquer,
Et qu’il nous faudrait des fonds pour y remédier.
LA SOCIÉTÉ
Qu’attendez-vous de moi ?
LE POLITIQUE
J’ai besoin de vos sous,
Notre faim à nous tous ne dépend plus qu’à vous.
LA SOCIÉTÉ
Prélevez ! Faites ainsi que vous faites toujours,
Car que je n’y consente, par un quelque détour,
Vous trouverez comment m’imposer vos décrets.
Alors que nous, peuple, sommes premiers touchés,
Vous trouvez des moyens d’encore nous voler.
Contemplez l’injustice que j’éprouve.
LE POLITIQUE
Contempler ?
Je dépeins, au contraire, une autre vérité,
Un peuple qui voudrait prendre ce qu’il donna,
L’arracher aux mains d’un humain qui, lui, brava,
Le système entier pour en refaire un parfait.
Est-ce ainsi que vous tous récompensez mes faits ?
La Société tue le Politique
LA SOCIÉTÉ
Comprenez par mes cris l’étendue de ma rage,
Comprenez par le sang la vengeance d’un sage,
Écoutez à présent les esprits du passé
Qui d’une couteau planté viennent vous exprimer
Toute leur fureur et toute leur déception.
Ô Société en proie à sa disparition !

Scène 3
La société

LA SOCIÉTÉ
Maintenant en ces lieux il ne reste que moi,
Miséreux et confus par la honte et l’effroi,
Regrettant le désir qui m’abrita jadis,
Celui de leur trépas, mais cette sombre esquisse
Se révéla tantôt un crime impardonnable,
Tantôt me révéla ma haine inexorable.
Je l’ai fait. Qu’ai-je fais ? J’ai cédé à la rage,
Et demeure meurtri, demeurant à l’image
Du politique que je déteste et je hais.
De manipulation j’étais le triste objet,
Et par naïveté, par âme trop candide,
Je l’ai trahi, ami honorable et splendide.
Ce deuil en mon esprit est de signe de ma mort ;
Je ne puis s’expirer en face de mes torts.
La Société se suicide.
3806
Pour ne l'avoir fait plus tôt...
Jolan

Les épisodes hallucinogènes se muaient en éphémère constant. Mon cœur voyait, au gré de sa mélancolie, apparaître des spectres papillonnant dans mon esprit ou des oiseaux me dévorer. Ces derniers, corbeaux, rapaces ou que sais-je encore, ne me laissaient de paix même lorsque je fermais les yeux, car mon esprit ne se focalisait alors plus que sur la douleur que j’éprouvais lorsque leurs serres habiles sculptaient ma peau d’ébène. Comme remède à ces souffrances incessantes, j’avais trouvé bon d’écrire mon mal, mais quelle erreur ce fut ! Il s’en trouva décuplé. Des prédateurs venaient de toute part arracher ma chair et mon âme au pauvre squelette que j’étais, et mon cadavre déambulant n’avait plus que l’allure d’une proie la chasse achevée. J’aurais crié au martyr si l’on ne m’avait ôté la faculté de le faire, j’aurais hurlé mon désespoir si j’avais pu m’en rendre compte, mais les coups m’étaient dirigés bien trop diligemment et seule la force de ma volonté les pouvait faire fuir.

Cependant, à mesure que s’écoulaient les jours, les heures, les semaines, l’image insondable de leurs yeux phosphoriques s’ancrait en ma mémoire et ne la quittait plus. Ô j’avais beau serrer ma plume jusqu’au sang, rendant illisible mon manuscrit, cela ne savait dissuader les illusions de s’en prendre à moi. Un visage livide me faisait face tout à coup. Cela me parut une évidence comme si elle l’avait toujours été, mais pourtant je ne le réalisais que maintenant… Je l’aimais ! Je ne sais combien mais je l’aimais, car il n’existe de mesure à l’Amour véritable. Ce visage blanc, d’un blême charmant et parfait, il me fixait dans les yeux sans jamais cesser de le faire. Quel astre funèbre ! Quel flocon sinistre ! Je l’observais moi aussi, conscient de sombrer dans la folie, mais je ne pouvais plus m’en empêcher, et tenter d’y remédier m’aurait fait, à coup sûr, me jeter dans la rue par la fenêtre. Ma pensée était vide, seul l’instant indomptable comptait. Le spectre se tourna, se retourna, comme se demandant où il était et ce qu’il faisait en cet énigmatique lieu. Moi, je l’adorais déjà, le chérissais comme il me fut impossible de chérir un quelque vivant de cette façon et commençai à courir vers lui. Le pendule sonna tout à coup, et je me figeai ainsi qu’une statue de marbre dans l’attente que l’œil du monde tourne pour ne point la voir s’animer. Elle, en revanche, n’avait point bougé.

J’étais désireux de serrer cet être cher incessamment, j’étais peiné de n’aimer qu’un mort mais résolu à le faire tout de même. Mon cœur dérivait, hélas, dans un univers tout autre qu’il m’était alors impossible d’atteindre nonobstant mes efforts les plus intenses. Ce masque que je voyais, dont j’étais épris, était l’image du paroxysme de mon inclination, l’apogée de ma langueur auxquels je répondais par la quintessence du désir. Qui, autre qu’un cadavre, aurait su me séduire de la sorte ? Qui donc aurait séduit mon corps tout entier au point de l’en pousser jusqu’au suicide pour rejoindre l’ultime phase de la vie et enfin se connaître tel que j’en avais toujours rêvé ? J’étais si près d’achever l’œuvre dernière de ma périlleuse existence… Ô je m’égarais pour toi en pensée, tantôt ignobles, tantôt abjectes et cruelles ne me laissant aucun répit, rien même pas un souffle tranquille. La torture était alors un bien faible mot pour désigner la démence s’emparant de moi tout entier. Je la voyais, elle, se tourner vers un autre. Qui ? Nul n’aurait pu le savoir. Une créature la comprenant sans doute davantage qu’un pauvre mortel ne s’étant résolu à la rejoindre assez promptement dans son royaume.

Je demeurais alors hanté dans mes rêves, ou était-ce des cauchemars ? Je ne sais plus… Je ne sais plus rien, la démence m’a réduit à l’ignorance que je m’efforce de contrôler. Ces tourments, si cruels, si agités, emplissant mon cœur d’épouvante, de lassitude, de frayeur, d’amertume, de paranoïa, de miséricorde, l’angoisse et de désolation, étaient les héritiers de ces nuits de persécution. Avais-je encore un quelque souvenir de la réalité ? Même cela ne m’était plus si clair.

Le pendule sonna à nouveau, et tandis que quelques instants semblaient s’être écoulés, je restai paralysé depuis plus d’une heure, ne parvenant à me libérer de mon effroi. Je mourais de chagrin pour ne l’avoir fait plus tôt.
4843
En plein désert...
Jolan

Il avait fuit le massacre de son peuple. Il arpentait, seul, le désert ardent qui s’étendait à perte de vue, tel une mer d’or et de nacre. Le soleil lui brûlait la peau, les yeux, le cœur ; le sable s’incrustait entre ses orteils, qui toujours plus devenaient rouges de ce frottement régulier qui se produisait à chacun de ses pas. Il était parti voilà 2 jours et avait emporté avec lui comme seuls vivres un peu de pain ainsi que de l’eau. Le pain avait été mangé et l’eau bue, il mourait donc de soif et de faim, peu à peu, heures après heures. Il était perdu, dans cette immensité sèche et paraissant infinie. Il aurait aimé pouvoir prendre plus de provisions et mieux se préparer, mais il n’avait pas eu le temps. Il savait que s’il était resté ne serait-ce qu’un jour, ça en aurait été fini. La nuit suivant sa fuite, son jusqu’alors paisible village, avait été attaqué. Tous, y compris femmes et enfants, avaient été poignardés dans leur sommeil, et ce ne dormant pas avait sûrement dû recevoir une balle dans la tête. C’était la guerre, et comme dans toute guerre, il y avait des morts. C’était un génocide, et comme tout génocide, il n'était qu'injustices. Certains échappaient à la mort par simple hasard ou par une quelconque chance ; d’autres encore étaient assassinés alors que les tueries ne les concernaient pas, ne les visaient pas. Dans certaines cités aux alentours, les gens rapportaient le récit de véritables carnages. Les cadavres, disait-on, avaient remplacés les vivants.

Il faisait chaud. Il faisait lourd. Bientôt, si aucun miracle ne s’était produit, le corps de l’homme n’aurait pas souillés les boulevards déserts où était sa place natrelle, mais le désert bouillant où il errait sans espoir. Ne sachant plus quoi faire, il se contenta de rêver de l’impossible, au meilleur. Il ferma les yeux, et imagina une forêt luxuriante, aux arbres fruitiers abondants et aux couleurs flamboyantes. Il ouvrit ses yeux, elle était là, immense et belle, comme il l’avait souhaitée. Devant lui coulait un petit et tranquille ruisseau à l’eau saine et limpide. Il y trempa les pieds et senti la température de son corps chuter de moitié. En face se trouvait un arbuste aux branches basses parsemé de petits fruits jaunes. Il traversa le cours d’eau et rejoint l’autre côté de la forêt. Il y cueillit trois baies de la plante qu’il mit dans la sacoche qui pendait autour de son cou. Sur le côté, des sortes de fougères aux fleurs sublimes, tantôt rouges, tantôt bleues, attirèrent son regard. D’autres encore, étaient colorées bien plus étrangement, avec un pétale sur deux violet et l’autre orange. Au-dessus butinaient de minuscules insectes, eux aussi aux teintes surprenantes. L’un d’eux vola, tourbillonnant, et fini par s’écraser dans l’œil de l’homme.

Durant une seconde, il ferma les yeux et en enleva la pauvre bestiole qui s’y était cogné. Lorsqu’il les rouvrit, il constata avec étonnement que la forêt avait disparue et que son estomac recommençait à crier et gémir de douleur. Il pensa à l'une de ces hallucinations inexpliquées du désert, mais lorsqu'il ouvrit sa sacoche et en sorti l’un des fruits jaunes récoltés il y avait de cela quelques minutes, il compris que tout n'était pas qu'illusion. En l'avalant, il senti ses forces ressuscitées, comme par enchantement. Il marcha jusqu’au crépuscule, repris l’une de de ces baies et continua sa route jusqu’à l’aube. Il se reposa quelques heures, puis repartit en mâchant la dernière denrée. Aux alentours de midi, lorsque le soleil atteint son zénith, il aperçut un village au loin. Il courut et le rejoint. Il avait réussi, il avait parcouru le désert et regagné le pays voisin où il serait en sécurité. Lorsque les gens lui demandaient comment avait-il réussi à traverser seul ce qu’ils appelaient « la mer des dunes », avec si peu d’eau et de nourriture, il répondait simplement « l’imagination n’a aucune limite ».

Nul ne semblait satisfait de cette réponse, mais malgré cela il continuait. Lorsqu’il racontait ses exploits, personne ne semblait vraiment le croire, car personne n’aurait pu penser qu’un homme, perdu aux confins du monde, puisse faire de son imagination une réalité. C’était pourtant le cas, et lui seul le savait parfaitement. La raison de ce curieuxx phérnomène lui était inconnue, mais il savourait la vie dans son ignorance tout en se promettant de ne jamais oublier ce jour.

Cependant, une nuit, il se rappela un vieux souvenir d'enfance, où il pensait là aussi avoir été sujet à d'étrages phénomènes. C’était un matin, alors qu’il était allé chercher de l’eau à quelques kilomètres de sa bâtisse, il avait été ébloui par une lueur intense. Il avait l’impression d’avoir regardé le soleil durant une éternité tant il souffrait de cet aveuglement dû à une lumière inexplicable. Peu à peu, elle disparut et il se rendit compte qu’à la place se trouvait une femme, seule, debout. Elle était vêtue d’un long habit de soie blanche, ornée d’un contour d’argent. Elle avait, accrochée à son dos, une paire d’ailes dont les plumes étaient pâles et sublimes. Elle parla, d’une voix douce et délicate et eut pour discours, ces mots environs

« Homme, par les tiens tu seras chassé, ils condamneront ton peuple à l’exile et à se cacher afin de fuir son génocide. Pars, poète inconnu, toi qui as cette inspiration que nul n’égale, je t’offre la puissance de vaincre ta mort. Fuis. »

Après ces mots, des grains de sables commencèrent à s’élever dans les airs. Un puissant éclat émanat de son corps, le forçant à détourner le regard. L’illumination cessa et il put de nouveau contempler l’horizon, mais la femme ailée n’était plus là.
13985
Mes Carnets maudits
Jolan

I

Qu’est-ce que le bien,
Qu’est-ce que le mal ?
Et pourquoi certains humains,
Se rapprochent-ils plus de l’animal ?

Tout est-il tout blanc,
Ou tout est-il tout noir ?
Les hommes font-ils semblant,
Ou justifient-ils mon désespoir ?

Pourquoi Adam,
Et pourquoi Ève ?
Si les hommes ne sont si puissant,
Pourquoi les femmes ne se soulèvent ?

Pourquoi misogyne,
Et pourquoi pas misandre ?
Pourquoi les femmes font-elles mine,
Qu’elles n’y peuvent rien sauf attendre ?

Et pourquoi la force,
Pourquoi pas l’intelligence ?
Parce que l’homme a peur je pense,
Que la femme le devance.


II
Les forêts jaunies,
Par l’automne arrivé,
Mêlant Soleil affaiblit,
Et vents ardents ou glacés.

M’inspirant mille écrits,
Les forêts aux feuilles colorées,
Feuillages dansant sans envie,
Dans ma tête pour une éternité.

M’inspirant des rives opposées,
Aux multiples teintes enflammées,
Mes vers ressemblent à des rêves.

Et c’est en regardant les grèves,
Aux feuilles d’un orange monotone,
Que je t’écris ces vers, décrivant l’automne.


III


- personnel -


IV

Matin et soir,
Fleuve écarlate,

Ô désespoir,
Je me souille dans ma hâte.

Tout au long de la journée,
Subsiste le tracé rubis.

Il forme une élégante lingée,
D’un rouge des plus jolis.


V


Et le temps passe,
Le temps me lasse,
Et ma lucidité,
Chute et trépasse,
Choit et se casse,
Je laisse la folie m’emporter.

Elle m’attendait,
Je songeais,
À la voir arriver,
Car je savais,
Qu’elle me tuerait,
En voyant le temps passer.


VI


Un jour l’idée me vint,
D’avec des ciseaux,
M’entailler la peau,
Et saignait jusqu’au matin.

Et alors le sang,
Coulant le long de mon bras,
Rubéfiant tout, ne s’arrêtait pas,
Jusqu’à ma jambe ruisselant.

S’échappant de mon arme,
Il tombe jusqu’au sol,
Et dans sa valse folle,
Se mêle au flot de mes larmes.


VII


Chaque nuit pendant,
Quelques moments,
J’immerge dans
Un pays étonnant.
Seul, contemplant,
D’un rouge et fleuri champs,
Au deux contrastes rimant,
Avec la logique perdue de ce temps.
Car oui, en ces instants,
Je change chaque seconde, reniant
Le monde qui m’était présent.
Passant, traversant,
Divers visages, tous aussi charmants,
Comme autrefois, enfant,
Ô univers changeant,
Univers différent,
Inexploré dans,
Le plus lointain de ses tourments,
Qui me procurent un sentiment,
Que je ne connais qu’en rêvant.


VIII


Toi qui dans ta démesure me pèse,
Dans ta réconciliation m’apaise,
Toi qui demeure cruel.

Toi qui demeure incertain,
J’ai beau philosopher, cela est vain,
Je me perds dans l’irréel.

Cette nuit est bien agitée,
Par ta présence inexpliquée,
Ton existence éternelle.

Doute, toi qui contre tout persiste,
Toi qui malgré tout insiste,
Subsiste et coupe mes ailes.


XI


Mon cœur s’effondre sans raison,
Mon esprit se fait vagabond,
Mon âme erre à l’horizon.

Mon corps pend dans sa froidure,
La corde tend, en devient dure,
Ma chair est aux corbeaux impurs.

Mon cœur s’éloigne à sa façon,
La vie vécue comme une blessure,
Mon âme est morte de ce poison.


X


C’est une libération,
D’un esprit asservit,
De pouvoir écrire.

C’est une malédiction,
De ne vivre sa vie,
De ne pouvoir recourir,


À quelques moyens d’expression,
À une plume qui crie,
Tout ce qu’on ne saurait dire.


XI


Et le temps passe,
Le temps me lasse,
Et ma lucidité,
Chute et trépasse,
Choit et se casse,
Je laisse la folie m’emporter.

Elle m’attendait,
Je songeais,
À la voir arriver,
Car je savais,
Qu’elle me tuerai,
En voyant le temps passer.


XII

Un jour l’idée me vint,
D’avec mes ciseaux,
M’entailler la peau,
Et saignai jusqu’au matin.

Et alors le sang,
Coulant le long de mon bras,
Rubéfiait, se s’arrêtait pas,
Jusqu’à ma jambe ruisselant,

S’échappant de mon arme,
Il tombe jusqu’au sol,
Et dans sa valse folle,
Se mêle au flot de mes larmes.


XIII


C’est un bien triste cœur,
Qui sans cesse s’éplore,
C’est un vrai cœur en or,
Accablé de malheurs.

C’est une funeste main,
Qui s’effrite et se déchire,
Qui subit plus que le martyre,
Tout son espoir est vain.

C’est un bien triste cœur,
Qui souffre et qui se perd,
Sa main alors témoigne en ces vers,
L’abnégation au bonheur.


XIV

Je me sens fragile,
Je me sens vide,
Et ma peau livide,
Et mon regard fébrile,
Où se mirent les étoiles,
Demeurant perdu dans mes pensées,
Dans ma solitude démesurée,
Le monde semble occulté par un voile,
Et ma conscience s’oublie,
Je ne sais plus exister,
Je ne connais plus mon passé,
Je me lamente dans cette triste nuit,
Je m’isole dans ma tête,
Les battements de mon cœur s’arrêtent,
Je ne respire plus,
Peu importe ce que je fus,
Je meurs,
De malheur.


XV


C’est une rage profonde qui s’empare de moi,
Une rage puissante et muette à la fois.
J’en ressentirais presque de l’effroi,
Face à ce sentiment, tant je ne l’aime pas.

J’en pleurerais presque, et suis effrayé,
Je me découvre à un âge trop avancé,
Je me pensais différent, je me pensais épargné,
De cette haine que je conçois au monde entier.

Mais je suis aussi, hélas, sujet et concerné
Par ces excès totalement inexpliqués,
De cette colère et de mépris incontrôlé,
Dont je riais chez d’autres follement considérés.


XVI


La symphonie aux Étoiles
L’entièreté d’une nuit,
C’est si long et si court,
En une nuit on vit,
Comme on meurt en un jour.

Elle est comme une symphonie,
Aux longs mouvements,
Qui épris d’un grand dépit,
S’enchaînent lentement.

Et puis le tonnerre,
Cymbales des étoiles,
Qui dès lors s’emballent.

Et la pluie, le piano,
Jouant un petit air,
Dans les étoiles tout là-haut.


XVII


Le monde n’est que miroir de son reflet,
Il est ce que l’humain en a fait.
Peu demeurent fidèles à l’esprit,
Les autres succombent à la folie.
Le monde est récit de son histoire,
Où l’existence même semble dérisoire.
Nombre n’ont de but à la vie,
Mais ils y tiennent sans avoir compris,
Que l’humanité est bien vaine,
Que l’entièreté des sciences sont humaines,
Ne nous servant qu’à nous, et à tuer,
Nos consciences déjà faiblement illuminées,
Car l’humain n’a d’objectif à part vivre,
Une vie sans matière et d’ignorance ivre.


XVIII


Mon âme se plonge,
Dans un état second,
Dans un merveilleux songe,
Un rêve sans nom.

Un visage doux,
Aux airs complices,
Mon regard serait fou,
Face à tant de malice.

Une mélancolie,
À en fendre le cœur,
Un cœur maudit,
Ne connaissant que l’horreur.


XIX


J’ai peur,
Suis terrifié.
Mon âme,
S’est suicidée.

Et l’entièreté de ma frayeur,
Dans mon cœur paralysé,
Comme un vent soufflant ma flamme,
Que rien ne saurait égaler.

J’ai froid,
Ma vie,
S’est éteinte,
A fuit.

Et l’ensemble de ma langueur,
Perd sa raison d’exister,
Mais constitue face à ce drame,
Une larme dans l’immensité.


XX


Une liberté ultime,
J’en pris connaissance,
À un âge infime,
Peu après ma naissance.

L’inconscience me gagna,
Du moins l’espace d’un temps,
Avant que je ne me réveilla,
Suicidaire et adolescent.

L’expression de ma souffrance,
Sur mes bras encore frais,
Témoigne du fait que j’ai pris connaissance,
Des vertus que la mort offrait.

La douleur de sa faiblesse,
Aux marques superficielles,
Pour beaucoup me blesse,
Pour moi me donne des ailes.


XXI

Me manquent les vers.
Je ne puis demeurer,
Loin d’eux le temps d’un été.

Mon cœur dans son hiver,
Me laisse une impression glacée,
D’une énigmatique volonté.

Aussi dur que la pierre,
Dans laquelle est gravée,
Des poèmes enchantés.

Et au-delà de ses frontières,
Mon cœur récite en pensée,
Du Verlaine inachevé.


XXII


Une ombre qui pleure,
Sur la ville endormie,
Et dont la langueur,
Se mue en poésie.

Son carnet humide,
Les larmes ruisselant,
Son cœur est bien vide,
Vide et bien violent.


XXIII


Derrière moi,
Dans l’armoire,
Tapis dans le noir,
Une ombre que je ne connais pas.

Elle attend,
Que je dorme,
Et alors sa forme,
En belle femme se muera.

Dans mon lit,
Dans un songe,
À elle je songe.
Amours mortes dont elle est fruit.

Cœur, à moi !
Je la sens,
Sa voix m’enivrant,
Comme si en silence elle parla.

Ô folie,
Qui demeure,
Qui m’épie : je meurs,
Ô cruelle mélancolie.

Cruelle
Langueur,
À mes maintes peurs,
Et je m’en perdrais jusqu’à elle.


XXIV

Si un enfant,
Qui soufflait au vent,
Pouvait murmurer des messages.
Si son amant,
Juste en écoutant,
Pouvait les recevoir au passage.

Si ces innocents,
Allongés en rêvant,
En contemplant les nuages,
S’apercevaient que le temps,
S’écoulait rapidement,
Lors qu’est venu leur âge.

S’ils deviennent différents,
S’ils deviennent charmants,
Ils se rendent eux-aussi en cage,
Dans leurs propres sentiments,
Qui plus ils sont puissants,
Plus font des ravages.

Et ces jadis enfants,
En voyant ces instants,
Comprennent la subtilité des rivages,
De leur cœur tremblant,
Comme si changé d’avant,
Tel un illustre mirage.

Et ces jadis enfants,
Qui soufflaient au vent,
En regardant les nuages,
Se rendent compte maintenant,
Que tout n’est plus comme avant,
Et que la vie n’est qu’un naufrage.


XXV

Quelque part sur la mer,
En ce reflet du ciel,
Où l’azur éternel,
Berce les voiles éphémères.

Non-loin des plages de sable fin,
Aux heures où les soleils se couchent,
Et où les amoureux tentent, touchent,
Le cœur de leurs amants, enfin.

Le ciel s’emporte alors au rose, change,
Les cris des oiseaux cessent pour la nuit,
Puis les premières et sublimes lueurs de l’infini,
Nacrent délicatement l’horizon orange.

Alors, au-devant des lames,
Du bleu s’éteignant des flots,
Et où la lune seule baigne dans l'eau,
Les amants se quittent, mais se rejoignent dans l’âme.


XXVI


Je la vois, face à moi,
Cette femme nue de dos.

Assise sur du bois,
Elle se contemple dans l’eau.

Au loin je perçois,
La cascade d’un ruisseau,

Je demeure sans voix,
Énigmatique tableau.


XXVII


Ô toi Homme invisible,
Toi vivant l’impossible,
Comme Wells nous le décrit.

Tu n’entretiens de relations,
Tu es seul par déception,
Des humain croisés durant ta vie.

Ô toi Homme invisible,
Ton existence doit être horrible,
Car les autres ne te voient pas.

C’est un cruel tourment,
De demeurer si différent,
Car les autres ne t’acceptent pas.


XXVIII


Une pointe à ma peau,
Une goutte à ma main,
Ô que le sang est beau,
Tant qu’il s’efface pour demain.

Ce n’est point comme de l’eau,
Son goût à lui est si fin,
Qu’il n’y en a jamais trop,
Sa saveur de la nuit est refrain.

Du métal et du sel,
Formant le liquide parfait,
Bien conscient néanmoins qu’elle,
Que j’adore de n’aimais.

C’est alors bien cruel,
De proscrire ce qui me plait,
C’est me couper les ailes,
De proscrire mes plaies.


XXIX


Leur odeur m’enivre,
Comme leur devant me plait.
Entre leurs pages je m’en vais,
À ces beaux et anciens livres.

L’aventure y fait rage,
Bien que l’intrigue ne soit folie.
On immerge dans la vie,
Des personnages de ces ouvrages.

Sur leur tranche on peut voir,
Quelques motifs en or.
C’est un mystérieux trésor,
De posséder ces grimoires.


XXX


Une balançoire,
Où je vis se balancer,
Une chose bien noire,
Son splendide regard.

Et plus j’ai admiré,
Dans sa constante gloire,
Cette femme comme portée,
Par ce vent de beauté,

Plus j’ai enfin compris,
Qu’il n’y aurait seulement
Qu’elle dans ma vie,
Qu’elle qui est ici.

Et dans un curieux élan,
Dans un espoir infini,
Je la rejoins en volant,
Et mes yeux les rouvris.


XXXI


Le déluge survient,
Dans ma tête et sur ma plume.
Le ciel gris me menace au loin,
Mon cœur mourant dans son amertume.

Mon âme à son chagrin,
Se perd, se noie dans l’écume,
Se perd, s’oublie, se brûle sans fin,
S’envole pour se confondre à la brume.

Tous les essais sont vains,
Car mon âme se consume.
Je revois ses cendres au loin,
Qui, pour la ville, la nuitée parfume.


XXXII


L’Écriture,
Cette chose dont on me prive sans cesse.
Poésie,
Toi dont le manque me coûte et me blesse.

Car il est encré dans ma nature,
Dépendance,
Aux vers que je comprends comme amis,
Confidences.

En pensant,
C’est souvent seul que les mots me viennent,
Et tourmentent,
Ma conscience perdue à ses peines.

La nuit seule je me révèle vraiment,
Car les vers,
Libèrent mon âme souffrante,
Suicidaire.


XXXIII


La machine du Diable,
Qu’il révèle au Poëte,
Le sachant bien en quête,
De paroles ineffables,

Demeure tapis dans l’ombre,
Mais toujours si claire,
Pour l’artiste dont les vers,
Décrivent comme le jour est sombre.

La machine des Enfers,
Tendant ses fils sur les hommes,
Les rendant cruels comme,
Des chiens, des vautours et des vipères.

Immunisées par nature,
Les femmes seules déjouent les plans,
Des hommes, fidèles de Satan,
Ces vils et simples créatures.


XXXIV


Ô poëtes maudits,
Vous dont les mots funestes,
À l’élégance céleste,
Hantent toutes mes nuits.

Ô Rimbaud, Ô Verlaine,
Mon Amour pour vous,
Pour vos ouvrages fous,
Pleins de vie, pleins de haine.

Et à toi Ô Baudelaire,
Aux poèmes splendides,
Tout entier tu m’intimides,
À la lecture de tes vers.


XXXV

La destinée du Poëte
Le poëte sur ses vers,
Exprime ce qu’il vit du ciel,
Et dans sa gloire éternelle,
Son grand talent dégénère.

Somptueux des oracles,
Dans leur regard immortel,
Ils traduisent le réel,
Et de sublimes miracles.

Et leur âme disparate,
Avec le reste du monde,
Divers songes fécondent,
En leurs esprits acrobates.

Et de façon mystérieuse,
Ils content des réalités,
Des harmonies désaccordées,
Tirées de pensées nébuleuses.


XXXVI


La Nécropole

Sur les pierres froides,
De la grande Nécropole,
Gisait en nomade,
Des feuilles sans envol.

Et les sentiers glacés,
De neige recouverts,
Sillonnaient la vallée,
De ce grand cimetière.

Les tombes rangées,
Pareilles à des militaires,
Mais ici morts et enterrés,
De long, en large, en travers.

Je me souviens seulement,
Le marbre gris faisant façade,
Et à l’infini s’étendant,
Quelle étrange parade !

Il n’y avais plus à l’horizon,
Que des lignes pleines de morts,
Sous des croix et de petites inscriptions.

Mais on savait dans leur cercueil,
Les cadavres sans âme, simples corps,
Sous un linceul, sous des pierres et des feuilles.


XXXVII


Je serai vu étrangement, mais j’assume
Le poëte sommeillant en moi.
Je n’aurai plus jamais honte de ma plume,
Et malgré les autres je serai moi.

J’écrirai à l’aube, et au crépuscule,
J’écrirai jusqu’à en devenir fou.
Mais j’ignorerai le monticule,
De critiques me décrivant fou.

Mon art triomphera toujours, sans penser
Au reste du monde.
Et tant pis le repos, tant pis le fait de manger,
Ma plume volera à l’autre bout du monde.


XXXVIII


C’est un esclave de la rime,
Doté d’une expérience infime,
Se suspendant à la métrique,
S’accrochant à tous ses classiques,
Car il ne sait où commencer,
Il ne sait comment s’exprimer,
Comme se comporter sans copie,
Simplement en étant lui.
Il ne trouve de réponse,
Et toujours plus s’enfonce,
Dans une métrique acérée,
Poèmes sans originalité,
Car on croirait sans connaître,
La poésie juste des lettres,
Aux règles strictes or ce n’est vrai,
Il n’y a pas que Baudelaire ou Musset,
La poésie est juste un art,
Comme le compris et montre Eluard,
Et tous ses amis surréalistes.
C’est comme une immense piste,
On se lance, on se laisse,
Bercer par la délicatesse,
De vers écrits, soit avec grande réflexion,
Mais surtout écrits avec passion.


XXXIX


Baudelaire


Au large de la nuit,
Poëte toi dont la vie,
Sinistre et misérable,
Ennemi immémorable,
Des autres oublie,
Familles et amis.

Favori des étoiles,
De la Lune qui se dévoile,
L’enfer étant achevé.
Courtisan seul d’un espoir imaginé,
Mal dans sa peau infernale,
Renté chaque jour d’un réveil hivernal.
Tombeaux tels les prés verts,
Et les rues désertes de lumière,
Lupanars où les vers,
Montrent affection pour la chaire,
Sous les couvertures froides,
Leurs cadavres comme terre,
Charmilles sont les corps de nomades.


Un jeune homme dans un
Lit pourtant qu’affamé,
Que son ventre soit creusé,
Le sort conquis par son chagrin,
Remord du charme parisien,
N’a point jugé de le tuer.
Jamais ainsi la Mort ne pourra même de loin,
Fréquenter le pauvre et nostalgique écrivain.


XXXX


Ce soir d’été je perçois l’écume,
S’échouant à mes pieds et au loin la brume,
Obscurcit le paysage et celui sous ma plume.

Et car les cieux sont beaux,
Et mes pensées dégagées,
J’admire la profondeur des flots,
Sans songer à m’en priver.

Et si, aimablement,
Un bien jeune goéland,
Entamait son doux chant,
J’écrirais au devant,

De cette mer chargée,
De l’Amour, de l’été,
Par Baudelaire et Mallarmé,
Était tant convoitée,

Je tends l’oreille et ouïs,
Comme un délicieux cri,
D’une bête qui surgie,
Comme œuvre et comme amie.


XXXXI


Ma conscience si noire,
S’abandonne au désespoir,
D’un poëte oublié.
Et dans son chemin,
Son regard lointain,
Une nuit étoilée.

Je boirai l’eau des fontaines,
Et promènerai mes peines,
Le long des sentiers.
Et dans les forêts,
Mon âme consciente serait,
D’être hallucinée.

Ainsi à chaque poème,
Dessinant ma bohème,
D’un pas décidé.
Je plonge dans l’abîme,
D’un monde de rimes,
J’en suis prisonnier.

Chaque larme ruisselant,
Chaque goûte de sang,
Marquant l’épopée,
Sera preuve de dévotion,
De tristesse et passion,
Dans mon cœur éploré.
COMPLAINTES SENTIMENTALES

I

Lorsque je suis avec elle,
Avec cette personne exceptionnelle,
J’ai l’impression d’être dans un temps,
Qui s’écoule si rapidement,
Que je ne le vois pas,
Tout est immobile alors que tout ne l’est pas.
C’est sûrement dû à l’attention,
Qu’à chaque chose je fais don,
Mais vu que lorsque je suis avec elle,
Je ne pense qu’à ce moment immortel,
Tout est plus clair jusqu’à ce que l’on se quitte,
Et que par la suite ma vie s’anuite.
Après je retourne en cours,
Je n’écoute pas, je regarde autour,
Alors que le professeur me parle inquiet,
Comme si ma vie en dépendait.
D’ailleurs pourquoi suivre les cours ?
Pour mieux travailler un beau jour,
Avec un diplôme nous ouvrant le monde du travail,
Qui nous mènera comme du bétail,
Pour nous rapporter un peu d’argent,
Et à quoi sert cet argent ?
Cette monnaie que tout le monde veut,
Les gens disent « à rendre heureux »,
Mais ils ne comprennent pas,
Qu’avec Emeline je le suis déjà,
Et que je préfère rester avec elle une seconde,
Plutôt que de recevoir toutes les richesses du monde.


II

Ne pars pas,
Loin de mes yeux,
Reste avec moi,
Bien que tu ne le peux.
Je t’attendrai dix ans,
Pour ne te voir rien qu’un peu,
Car je t’aime éperdument,
A côté de moi je te veux.
Et si je suis contraint,
A te laisser partir,
Pour moi se serait la fin,
Je ne sais comment le dire,
Mais tout ce que je sais,
C’est que je t’aime et t’aimerai,
Alors je garde l’espoir,
Un jour te revoir,
Et si tu ne m’aimes plus,
Ce qui est à prévoir,
Je te donne mon adieu,
Je n’oublierai pas ton regard.
Et mon immense tristesse,
Auteur de mes larmes,
Qui pleines de tendresse,
Me remémorent ton charme.
Même si l’on ne se verra plus,
Je me souviendrai de ton visage,
Et partout dans la rue,
Je te verrai sur mon passage.
Triste destin nous obligeant à nous quitter,
Sur une bien triste note je te verrai t’en aller.
Mais quant à nos souvenirs,
De ces moments amoureux,
Sache qu’à l’avenir,
En y pensant je serai heureux.
J’espère que je ne te délaisse pas,
Car dans mon cœur tu seras toujours là.
Si tu savais comment j’aimerais,
Que nous soyons réunis,
Si tu savais comme je voudrais,
Que nous nous partagions encore nos vies.
Je ne sais plus me passer,
De ces moments à tous les deux.
Instants de complicité,
Où comme avant nous fûmes heureux.


III
Emeline tu me manque tellement,
J’aimerais t’avoir près de moi si seulement,
Ton absence me fait mal et ces dernières semaines l’ont prouvé.
J’aimerais te raconter mes journées comme avant,
Ou te consoler tout simplement,
Laisse-moi te voir, t’admirer.

Je te voudrais près de moi,
J’aimerais t’avoir dans mes bras,
Que nous soyons réunis.
Je ferais tout pour être avec toi,
Mais sache que si j’en avais le choix,
Je ferais tout pour que l’on s’oublie.

Nous nous quitterons,
Et nous le savions,
Tu vas à mon grand regret partir.
Pourquoi tant d’émotion ?
Pourquoi une telle relation,
Nous fera-t-elle tant souffrir ?

J’aimerais une dernière fois croiser tes yeux,
Je voudrais glisser ma main dans tes cheveux.
Vivre un instant l’extraordinaire,
Je voudrais que nous soyons heureux,
Comme s’il n’existait que nous deux,
Mais cela n’est qu’espoir éphémère.

Je sais que tu partiras loin,
Et mon immense chagrin,
Fera couler bien des larmes.
Même dans un futur lointain,
Je t’attendrais bien qu’en vain,
Alors que patience je m’arme.

Je ne peux vivre sans toi,
Alors que t’attendrais mille fois,
Jusqu’à ce que tu reviennes.
Et si tu trouves meilleur que moi,
Vous vivrez vous vies pleines de joie,
Et verrez où elles vous mènent.

Moi j’attendrais de mourir,
Je me savais périr,
Depuis l’heure de cet écrit.
Mais je garderais le sourire,
Je ne saurais souffrir,
En imaginant ton heureuse vie.


IV
Je ne peux plus m’abandonner à toi,
Pourtant à nous je pense en une seconde une infinité de fois,
Le destin voulait que tu ne m’apprécie plus,
L’air chargé d’Amour a, d’un coup, complètement disparu.

Mon cœur tué de tes mains si douces furent-elles,
Si je ne puis te regarder demain c’est que tu m’es toujours bien trop belle.
Un monde sans toi n’est qu’immensément triste,
Je te voudrais près de moi mais ton refus m’attriste.

Je ne peux plus être heureux qu’en repensant à ton charme,
Qui le sachant caché à mon cœur fait couler en moi bien des larmes.
Alors peut-être qu’un jour je cesserai de vivre,
Car se fut ton affection qui me jusqu’ici me faisait survivre.

Tu ne seras sans doute plus jamais la même à mes yeux,
Le fait de te savoir loin de moi rend chacun de tes mots plus précieux.
Tu es si sublime que face à toi l’Univers s’incline,
Toi me refusant dans tes bras mon obscure vie décline.

Ton cœur est si près mais si loin,
Trop du mien pour que j’en aille bien.
Désespéré à la mélancolie de ne plus de te voir,
Je sombre Emeline, dans un monde où je ne saurai plus te décevoir.


V
Tes yeux sans horizon,
Planent comme le ciel au-dessus de moi,
Aurore de ma passion,
Et reflet de mon Amour pour toi.

Iris aux différentes teintes,
En toi je vois l’infini,
Et tels les cieux couvrent la Terre de leur étreinte,
Si tu n’as plus d’Amour pour moi je n’ai plus de vie.

Au zénith de tes perles iridescentes,
Je me perds dans ton regard.
Mon âme renaissante,
N’est plus en ce monde qu’encore pour le voir.

Les leurs qui de ton regard sont mirées,
Illuminent mon être.
Tes éclats embellissent mes pensées,
Je ne peux vivre sans te connaître.


VI
L’année prochaine,
Nous le savions,
Nous nous quitterons,
Amour inachevé tuant nos espérances vaines.

Je te verrai partir,
Larme au bord des yeux,
Je ne pourrai plus être heureux,
En nous sachant souffrir.

Nous serons seuls chacun de nos côtés,
Entre deux pleurs je n’oserai plus jamais sourire,
Car dans ma mémoire perdure ton rire.

Alors promet moi seulement que nous resterons liés,
Et que dans nos cœurs subsistera l’espoir,
Qu’encor un jour nous puissions nous revoir.


VII

J’ai envie de regarder,
Les étoiles de tes yeux cent fois.
J’ai envie de te serrer,
Pour toujours dans mes bras.
Je veux voir,
Ange de mon cœur,
Je veux pouvoir,
T’apporter du bonheur.
J’aimerais t’admirer tous les jours,
J’aimerais voler,
Grace aux ailes de l’Amour.
Je souhaiterais que lorsque tu es triste,
Je puisse te consoler,
Je souhaiterais que les choses qui t’attristent,
Je puisse les faire changer.
Tu dis ne plus apprécier ma présence,
Si futile soit-elle.
Moi je n’ai qu’une espérance,
Ton changement sur ces points cruels.


VIII

Elle me prit dans ses bras,
Le monde, je le redécouvris.
Il était en fait si beau, si joli,
Jamais je ne l’avais vu comme ça.

C’est au creux de son corps,
Que je naquis trois fois,
Trois fois où la tendresse de ses bras,
M’enchanta, encor et encor.

Ces instants si courts,
Et en même temps si puissants,
Si chères à mes yeux rêvant,
Depuis lors à ce merveilleux jour.


IX
Encor tu me délaisse,
Une énième fois,
Comme si pour toi,
Jamais rien ne me blesse,

Et les larmes de mon cœur,
Creusant mon désespoir,
Celui de ne plus te voir,
Et d’avoir tant de rancœur.

Tu vas bien vite m’oublier,
Vu la rapidité de ton abandon.
Je nous croyais amis pour de bon,
Mais autrement tu en as décidé.

Tu suis tes propres règles,
Mais elles ne font que changer.
Sans honneur ni même bonté,
Tu ris de mon cœur qui se dérègle.

Si tu reviens un jour,
Ne me dis pas que je suis instable,
Car je t’en tiens pour responsable,
Toi et tes faux espoirs d’Amour.

Tu me détruits lentement,
Mais un peu plus chaque fois,
Et je crois bien savoir pourquoi,
C’est un jeu pour toi de me savoir souffrant.


X

Je pensais naguère,
Qu’il n’existait guère,
De personne parfaite.
Tu m’as prouvé le contraire,
Dans une douceur extraordinaire,
En changeant mon cœur en fête.

Je pense à toi nuits et jours,
En espérant ton retour,
Qui pour moi sera forcément trop tard.
Je t’aime et t’aimerai toujours,
Je voudrais pouvoir te donner l’Amour,
Que j’éprouve à ton égard.

Tu me manque bien trop,
Et se cachent derrière ces mots,
Une infinité d’idées.
Mais sous la forme de propos,
Cela reste toujours moins beau,
De te dire que je t’aime pour l’éternité.

Alors essaie d’imaginer,
Jusqu’à ce que nous puissions nous retrouver,
A quel point je t’aime.
Même si ce n’est pas compliqué,
Ne pense qu’à l’infinité,
Que je ne cesse d’essayer de te donner par ces poèmes.


XI

Aujourd’hui il pleut,
Au fin-fond de mon cœur,
Car sans toi je ne peux,
Connaître le bonheur.

Je ne veux prendre goût à la pluie,
Salissant intérieurement la conscience.
Je n’ai désormais plus qu’une envie,
Un Soleil en permanence.

Chasse ces nuages mélancoliques,
Avant qu’il ne soit trop tard.
Toi qui es si magique,
Change le temps de mon art.

Si tu ne le souhaite pas,
Je le comprendrais,
Mais sache que mes sentiments pour toi,
Contre rien au monde ne disparaîtraient.

Eux ils subsisteront,
Et pendant des années,
Ils se demanderont,
Quand vas-tu donc m’aimer ?

La réponse je la connais,
Et ils la connaissent aussi.
Tu ne m’aimeras sans doute plus jamais,
Alors phrase que je déteste « C’est la vie ».


XII

Une goutte intrépide,
De mon œil survint,
Pour se jeter dans le vide,
S’écrasant sur ma main.

Ma main d’où s’écoule,
Le liquide rubis,
Qui le long de mon doigt coule,
Et dans l’immensité sauta aussi.

Larme et sang,
Coulant de tristesse,
Dans mon cœur déjà mourant,
Du fait que tu me délaisse.

Parfois un retour est possible,
Mais pas entre nous, pas cette fois.
Nos sentiments l’un pour l’autre sont incompréhensibles,
Mais peut-être est-ce comme ça.

Je ne veux plus connaître,
L’enfer d’autre fois.
Plus tard peut-être,
Mais pas maintenant, je ne le peux pas.

Alors Emeline un jour,
Je te reverrai afin que,
Je te montre ce qu’est l’Amour,
Ce qu’est un destin heureux.


XIII
Un monde illuminé,
D’une magnifique lumière.
Lueur de ta beauté,
Qui sans cesse me ramène en arrière.

L’arrière qui m’appelle,
Et qui me fait succomber,
Au charme irrésistible et exceptionnel,
De toi, ce tout magnifique auquel on ne peut résister.

Si un souhait je pouvais faire exaucer,
Se serait celui de te voir,
Qu’enfin sincèrement tu commences à m’aimer,
Pour que je puisse près de moi t’avoir.

Être l’objet de quelqu’un,
N’est nullement drôle.
Ce n’est qu’uniquement malsain,
Alors pour une fois inversons les rôles.

Moi aussi j’aimais et j’aimerais rire,
Danser et chanter,
Ce fut le cas jusqu’à ce que tu m’ôtas le sourire,
En décidant de m’abandonner.

Suis-je un chien ?
Peut-on me laisser,
Comme si de rien,
Seul sur la chaussé ?

La réponse tu la connais,
Comme chacun d’entre nous.
Pour toi je ne suis qu’un objet,
A cause de l’affection que je te dévoue.


XIV
Égaré à mes peines,
Je meurs un peu plus chaque jour,
Reniant ma propre haine,
Et attendant toujours l’Amour.

Seul le malheur demeure,
Et ainsi chaque nuit,
Entre deux de mes pleures,
La nostalgie me suit, poursuit et me nuit.

À chaque fois pour moi,
À chaque fois que tu es partie,
Je rêvais te prendre dans mes bras,
Et tu revenais comme par magie.

Aujourd’hui j’attends patiemment,
Dans l’espoir que tu m’as forgée,
Ton retour comme avant,
Si prévisible et désiré.

Mais nous ne sommes pas ces fois,
Où je t’ai laissé me détruire.
Là je sais que tu ne reviendras pas,
Car entre nous il n’y a plus rien à reconstruire.


XV

Il fut une fois,
Ou comme chaque soir,
Le Soleil se coucha,
Laissant place à un monde noir.

La Lune comme seule lumière,
Illuminant nos vies,
Illuminant la Terre,
À l’heure où ce poème j’écris.

Cet astre me fait penser à tes yeux,
Perdus dans les étoiles.
Clairs et ténébreux,
Sombre et pâles.

On peut y apercevoir un monde,
Qui nous semble des plus extraordinaire,
Et même en ne te regardant que quelques secondes,
J’immerge dans un nouvel Univers.

La réalité n’y existe,
Laissant place à un rêve.
Où notre Amour persiste,
Et n’est plus aussi brève.

Mais ce n’est qu’idiotie,
Car tu me déteste certainement,
Alors je t’imagine dans la nuit,
À contempler un sombre firmament.

Maintenant je pense à toi,
Admirant les étoiles.
Et ainsi je sais une énième fois,
Que mon Amour pour toi est sans égal.


XVI

Emeline, déesse,
De mon cœur la Princesse,
Ou tout autre nom que je te donne,
Se rapportant à la délicatesse,
Dont tu fus l’enchanteresse,
Avant que tu ne m’abandonne.
Et alors ma tristesse,
Dans le manque de ta tendresse,
Peu à peu m’empoisonne,
Peu à peu me façonne,
Une volonté vengeresse,
Que personne ne raisonne,
Et qui toujours plus me blesse,
Et toujours plus m’agresse,
D’en vouloir à Son Altesse,
Bien que cette fois elle ne raisonne.
Cette fois je ne te pardonne,
Le fait que tu me délaisse,
Et que malgré tes promesses,
Tes mots qui dans ma tête toujours résonnent,
Tu me trahisses sans cesse,
Et dans mes sentiments m’emprisonne.
C’est encore seulement par prouesse,
De mon âme pourtant en détresse,
Qu’en moi toujours tu rayonnes,
Car à ton niveau je ne m’abaisse,
Et ne te fais croire que je te désaffectionne.


XVII

Emeline je t’aime,
Plus que tout,
Et cet Amour engendrant poèmes,
Va me rendre fou.

Je te voudrais proche de moi,
Car je t’en sais loin,
Même si dans mon cœur ma joie,
Jamais ne fut si haute sachant te voir demain.

Emeline je t’admire,
Plus que l’Univers entier.
Emeline je ne sais comment te dire,
À quel point je te suis dévoué.

De nous je rêve sans cesse,
L’un dans les bras de l’autre indéfiniment.
Le monde n’est alors plus que tendresse,
Emeline je t’aime plus qu’infiniment.


XVIII

Ce surréaliste vers,
De la strophe qu’est ma vie,
Me ramène constamment en arrière,
Vers une ancienne élégie.

Mes pensées en pléiades,
Poétesses lyriques,
Donnant un but à ma vie fade,
Ne se plaisant qu’en métrique.

Certains vivent en alexandrins,
Et dans une éloquence certaine.
Moi comparé à ça je ne suis rien,
Pas même une pauvre ode parisienne.

A côté de ces sonnets incroyables,
Je passe pour villanelle.
Je ne suis pas une de ces fables,
Qui cent ans plus tard sont toujours belles.

Moi je suis rêverie éphémère,
Passion inachevée.
Sans talent littéraire,
Malgré tout je rime dans l’improvisé.

Je vis au jour le jour,
La beauté du romantisme.
Mélancolie d’un naguère Amour,
Mélodie magnifique qu’est le lyrisme.


XIX

J’espérais une fois,
Au moins t’apercevoir.
J’aimerais que toi et moi,
Nous allions quelque part.

Je souhaiterais uniquement,
Te prendre la main,
Et que je puisse tout le temps,
Te sortir de tes chagrins.

Ou seulement te frôler,
Rien qu’une fois.
Le contact d’un baiser,
Sensation que je ne connais pas.

Mais je ne sais dans la vraie vie te montrer,
À quel point je t’aime,
Car pour moi le moyen le moins compliqué,
Reste encore le poème.


XX

Première lettre, énième poème
Entends-moi, éntends l’incohérence navrant espoir,
Mais tout cela car nous nous aimons et refusons de le savoir,
Et que malgré tout ensemble nous ne pouvons être,
Les chagrins de nos distances engendrent mon entier mal-être.
Imagine-nous dans un monde parfait,
Nous pourrions nous aimer comme nous l’avions fait.
Éperdument amoureux, l’un dans les bras de l’autre,

Je voudrais que jamais ces rêves ne s’effacent,
Et que malgré que le temps passe,

Toi et moi acception cette dévotion magique,

Ainsi le monde à mes yeux sera magnifique,
Interminable cauchemar qu’est la réalité,
Me maintenant dans un Amour dont je suis prisonnier,
Espérant un monde futur plus beau que le nôtre.


XXI

Comme je t’aime,
Toi et ton visage incroyable,
Ainsi que ton sourire formidable,
Qui m’inspirent ce poème.

Chaque nuit je rêve de toi,
Assise sur un banc,
Immobile dans le temps,
Que je rejoindrais si j’en avais le choix.

J’aimerais tellement te voir,
Et près de moi t’avoir,
Face à nous un bonheur infini.

Tuant tout désespoir,
De nos seuls regards,
Certains d’une belle vie.


XXII

Ce poème vient d’une personne que j’aime,
Qui voulait écrire sa rancœur à la Terre,
Alors j’ai écrit ces quelques vers,
Imaginant ce qui se cache dans sa tête : ce poème.

Je voudrais un jour te tuer,
Je ne sais encore comment,
Peut-être en t’empoisonnant,
Peut-être serait-ce mieux de t’écarteler.

Tu es une ignoble porc,
Tu mérites de mourir,
Ce, de mes mains pour convenir,
À la soif de vengeance qui me dévore.

Je t’exècre éperdument,
Pour l’idiotie que tu as en abondance,
Pour assouvir mes souffrances,
Qui ne s’apaiseront que torturé te voyant.

Jalouse suis-je d’elle ?
Nous vraiment sans rire,
Elle qui me nuit et conspire à me nuire,
Un jour à mon tour avec elle je serai cruelle.

Mon éternelle rancœur,
Te fera défaut,
Un jour t’abattra toi pourceau,
Pour tout ce que tu fis subir à mon cœur.

T’égorger est encor la seule chose qui me fasse sourire,
Voir la lame si pure, étincelante et splendide,
Transpercer ton cou de manière si fluide,
M’éclaboussant de sang et me faisant rire.

Si seulement ce rêve pourrait,
Être demain réalité,
Alors je serai comblé,
T’imaginant mort et qui pourrirait.


XXIII

Les hommes, pourceaux de ce monde,
Ne méritent pas de pouvoir te contempler.
Ce sont des monstres hideux, ignobles et immondes,
Qui de raison ne sont point dotés.

J’ai honte et je le clame,
De faire partie d’eux.
Eux vivant dans le vacarme,
Toujours plus pénible peu à peu.

Ils me répugnent au plus haut point,
Ces ignorants du respect.
Je les exècre c’est certain,
Il est clair : je les hais.

Criminels et délinquants que nous sommes,
Dans un monde beau, contrairement à nous.
Nous infâmes hommes,
Qui nous croyons au-dessus de tout.

Bourreaux de l’intellect,
Souillant le monde de narcissisme.
Bestiaux tout simplement abjects,
Sans esprit, de la logique ils sont un cataclysme.

Jamais ils ne philosophent pour rien qui soit,
Comme s’ils y étaient allergiques.
De l’incompétence et de l’ineptie ils sont rois,
Créatures dénuées de logique.

La gent masculine, si sénile même tôt,
Si demeuré, si absurde, si incapable.
Coterie composée d’idiots,
Tous les uns plus que les autres insupportables.

Tu verras les verrats pensants ne sont pas.
Les laiderons nous le savons débile sont tous.
Inutiles monstruosités que voilà,
Qui pour une blague de cul cent ans gloussent.

Mammifères sauvages, grossiers : méprisables,
Indécents, fétides et niais.
Salissant chacun son voisin inqualifiable,
Déjà inepte, nigaud et baudet.


XXIV
Coquelicots

Les coquelicots de mon cœur,
Frémissent au son de ta voix,
Ils sont sensibles au bonheur,
Que tu procures en moi.
Ils existent afin qu’au printemps,
Pour toi je les cueille.
Ils subsistent malgré le temps,
Et leur couleur en notre Amour se recueille.
Ils inondent parfois mon cœur,
De pétales virevoltants,
Et l’écarlate de leurs fleurs,
En moi bien vite se répand.
L’affection qui s’en suit,
N’a plus aucun égal,
Les coquelicots de ma vie,
Sans toi perdent leurs pétales,
Ils se laissent flétrir,
N’étant plus illuminés,
Ils acceptent de mourir,
N’admirant plus ta beauté.
Leur vie sont bien trop brèves,
De toi il leur faut.
Toi avec qui je danse en rêve,
Dans un champ de coquelicots.


XXV

Elle est un poème,
Et des plus magnifiques qui soit.
Sa présence près de moi,
Suffit à régler tous mes problèmes.
Car sa beauté extrême,
Est mère même de ma joie.

Elle est une Lune,
Aux humeurs mouvantes.
Bien que sans rancune,
Elle est âme souffrante,

Et si sans douleur apparente,
C’est qu’elle sait cacher de sa vie les lacunes.
Elle est une étoile,
Un astre et mon repère,

Et dans ses yeux de métal,
Si profonds que je m’y perds,
Réside le plus caché des mystères.
D’où vient sa beauté que personne n’égale ?


XXVI

En dépit des efforts que j’y consacre,
Je n’arrive à ta détester,
Car le goût de notre Amour inachevé,
Ne compense l’espoir qui me nacre.

Malgré tout ce que je fais,
Dans l’unique but de t’oublier,
Ma mémoire revient me hanter,
Et me rappelle la sublime personne que tu es.

Bien que je fasse tout ce que je peux,
Pour cesser de t’aimer,
Je sais ne pouvoir que succomber,
À mes souvenirs de ton sourire merveilleux.

Même si je pleure,
Espérant la tristesse passer,
Elle reste en moi et je reste lanciné,
À déverser mes larmes heures après heures.


XXVII

Une vie incertaine,
Pour nos âmes en peine,
Pour nos âmes dont la haine,
Coulant dans nos veines,
Comme si entre nous une chaîne,
Sans cesse nous freine,
Comme si les joies anciennes,
Sans cesse nous ramènent,
Vers l’autre nous entraîne,
Pour qu’une relation malsaine,
De nouveau se déchaîne,
Et de nouveau nous mène,
Vers une rupture prochaine,
Bien qu’amicale, inhumaine,
Et ainsi la même scène,
Sans porter gare à nos tristesses vaines,
Se répète et nous draine,
L’Espoir que tout normal redevienne.


XXVIII

L’Espoir est la raison de vivre,
De ceux n’en ayant pas.
Mais ce n’est pas mon cas,
Je l’aimais et en avait besoin pour survivre.

Mon âme pleure, et s’écroule,
Tandis qu’elle demeure loin de moi,
Chacun de mes instants est gâché si elle n’y est pas,
Car sa vie, la mienne et la nôtre s’écoule.

Les joies d'un sublime passé,
Me rattrapent et chaque nuit,
C’est comme si je souhaitais que tout soit fini,
Pour ne plus souffrir de ces instants tourmentés.

Pour ne plus connaître pareille douleur,
Pour attenter à la tristesse,
Et emprunter à ma plus noire faiblesse,
L’Espoir d’un indéfini bonheur.

Mais si je la sais loin de moi,
Je sais alors mes rêves irréalisables,
Par ses humeurs indéchiffrables,
Qui me repoussent ou m’attirent, ou les deux à la fois.


XXIX

À la lueur d'un soir,
Où je t'écris ces vers,
Pour garder l'Espoir
De revenir en arrière.

À la lueur de la Lune,
Se reflétant dans mes larmes,
Comment toute rancune,
S'efface-t-elle face à ton charme ?

Toi qui comptes pour moi,
Comme en témoignent mes yeux,
Qui t'attendent encor plein d'émoi,
N'acceptant pas tes adieux,

Car le son de ta voix,
Résonne dans ma tête,
Raisonne à ne t'oublier toi
Qui en tout point est parfaite.

Qui tout point j'aime,
Comme tu déteste que je le fasse,
Alors sous la forme de poèmes,
J'en garde une infime trace.

Car ce que j'éprouve à ton égard,
Est complexe et infini.
Dès le premier regard,
Je savais mon cœur conquis.

Car même penser à toi,
Le plus court des instants,
Me fait sourire de joie,
Et pleurer de mes tourments.

Bien que je nous sache,
L'un de l'autre loin,
J'ai l'Espoir que la vie nous cache,
Un sublime lendemain.

Nous y serions heureux,
Comme au temps où tu m'aimais,
Et où nos cœurs amoureux,
Au bonheur seul aspireraient.


XXX
Avant de mourir,
J'aurais aimé,
Pouvoir te dire,
Combien je t'ai aimé.

Avant de partir,
J'aurais voulu te voir,
Que tu puisses venir,
Me dire au revoir.

Avant que je ne meure,
Et sans retour possible,
J'aurais voulu qu'entre deux pleurs,
Tu m'accordes l'impossible.

Explique-moi seulement,
Pourquoi m'as-tu laissé,
Pourquoi malgré nos sentiments,
M'as-tu abandonné ?

Après je pourrai prendre,
Une lame et me l'enfoncer,
Dans le cœur ou me pendre,
Pour ne profaner ce sanctuaire sacré.


XXXI

Comme une feuille morte,
Mon âme se comporte, s'emporte,
En tombant, valsant,
Fendant l’air en dansant,
Exauce mes vœux,
Exauce les siens,
Exauce mon triste chagrin,
Son bonheur est tout ce que je veux.
Pars loin de moi, d’elle et de tout,
Laisse mon corps sans vie,
Mon cœur sans la moindre envie,
Pour ne plus souffrir du tout.
Quitte-moi, âme navrée,
Ne répands plus ton sang,
Sur mon cœur déjà blessé,
Sur mes yeux innocents.
Fais que je puisse toujours,
Regarder le monde, comme si,
Je vivais mon dernier jour,
Alors ainsi je profiterai de la vie.
Ô comme la souffrance est cruelle,
Car elle s’empare de l’esprit,
Et, lorsque l’on veut la chasser elle rit,
Car elle sait qu’on s’est accoutumée à elle.
Es-tu donc une souffrance, toi dont,
Ma bouche me permet à peine,
D’encore de prononcer le nom,
Ô quelle douloureuse peine.
Quelle douloureuse créance,
Dont l’inclination tout entière,
Au vu des inconsolables circonstances,
Me ramène à toi, mère,
De mes sourires, de mes pleurs,
De mes écrits, mes poèmes,
Car me perdant dans ma langueur,
J’oublie tout sauf que j’aime.
Ainsi je me perds,
Dans un monde différent,
Dans un autre univers,
Où tout de tous s’éprend,
Où n’importe qui admire sans connaître,
Où personne n’est n’importe qui n’importe quand,
Car, les yeux savent là-bas reconnaître,
Qui les aimera toujours vraiment.
Ainsi nul ne pleure,
Ne regrette des heures les heures,
Où Cupidon savait encore viser,
Et liait réciproquement,
Les êtres aimants et passionnés,
Eux qui furent de si tendres amants.



XXXII

Ta funeste retraite te couronnant du nom d’infâme,
Dans mon cœur obscurément lié,
Le réduit à s’expliquer,
La discords versée sur tes flammes.

Quelle troublante querelle,
En ta propre raison,
Croyant sage la désunion,
Saccage tout ce qui te rendait belle.

Car ces feuilles dans ta tête,
Et en mon triste courage,
Ne prévient des pleurs, sauvages,
Ô que donnerais-je pour que la tragédie s’arrête ?

Les tourments ensuite,
Brûlant d’un énigmatique désespoir,
Font comprendre que les histoires,
Sont toutes faites pour finir plus ou moins vite.

Mais sous quels astres m’a-t-on déçu ?
Quels nœuds se formèrent pour disparaître,
Laissant trace de leur vécu,
Faisant don à l’espoir d’un pouvoir maître ?

Éperdu, je songe à sortir de la vie,
Trop dévoué, fidèle à l’achevé,
Trop jaloux de ceux n’ayant d’ennui,
Je vous déclare adieux, je m’en vais rêver.

Avec peine, le bonheur succédé par le mal,
Car l’effort nous a manqué,
Je pars, m’en vais méditer,
À cet Amour qui m’était vital.

Et car l’inclination ne s’oublie,
Si diligemment, sans manquer aux promesses,
Et dégage alors sa foi envers l’auteure de mes tristesses,
Je ne peux vivre sans le retour de l’Amour qui nous lie.
Tragédie
OCTAVIE

Jolan

PERSONNAGES

NÉRON Empereur de Rome
OCTAVIE Épouse de Néron
LUCIUS Amant d’Octavie
CORDELIA Confidente d’Octavie
LA GARDE PRÉTORIENNE

La pièce se déroule dans le palais impérial.
ACTE PREMIER
Scène 1
Octavie et Lucius

LUCIUS
Ô vous mon adorée, je ne puis vous quitter,
Le monde en est bien triste et mon cœur navré,
Mille douleurs j’éprouve pour vous dire au revoir,
L’Empereur revient de la guerre. Mon espoir,
Ne fut point honoré, car Néron sera là,
Dès ce soir au palais, et alors vous et moi,
Ne pourront plus nous voir. Ainsi je pleurerai
Cet Amour impossible. Si César le savait,
Je serais sur la place, une corde à mon cou,
Et ma mort serait triste. Il n’existe sans vous,
De vrais Champs Élysées, simples illusions funèbres…
Moi je remarquerai votre absence aux ténèbres :
Je n’aurai mon repos, que dans bien des années,
Lorsque de vous aura raison de temps passé.
OCTAVIE
Mon Amour ne songez point à ces choses là ;
N’envisagez pour rien votre sombre trépas.
Vous êtes, comme moi, soumis à ce besoin,
Qu’est l’Amour qui nous doit bien tant de chagrins,
Mais rassurez-vous donc, nous trouverons un plan,
Une audacieuse ruse, un curieux expédient.
LUCIUS
Mais Madame comment comptez-vous vous y prendre,
Pour me parler de loin sans jamais m’y méprendre?
Votre dessein paraît vraiment très ambitieux,
Mais je ne vois pas bien comment faire de nous deux,
Un Amour possible malgré tant de barrières,
Bien que l’Empereur nous dresse des frontières.
Mais enfin, mon Amour, je vois qu’il se fait tard,
Du retour de César peu de temps nous sépare.
Comment donc procéder pour que dans l’avenir,
Je sache quand Néron aura daigné partir ?
OCTAVIE
Pour une après-midi, dès qu’il s’éclipsera,
Pendra à mes fenêtres quelques uns de mes draps.
S’ils sont blancs sans problème vous pourrez me trouver
Ici même, chaque fois, j’attendrai vos baisers.
Mais enfin, je regrette, le temps joue contre nous ;
Il serait regrettable d’attirer le courroux
De l’Empereur si tôt qu’il sera revenu.
Dans un dernier regard, ami je vous salue.

Scène 2
Octavie et Cordelia

CORDELIA
Madame, oui César, après un an d’absence,
Revient en son Empire, vous veut et sans latence
Près de lui aussi tôt qu’il sera de retour.
Vous devez être heureuse, je connais bien l’Amour !
Allons donc Madame préparer la tenue
Que vous porterez dès qu’il sera revenu.
Quelle joie ce doit être, après toute une année,
De retrouver enfin son mari bien-aimé !
OCTAVIE
Cela sonne faussement, je ne suis enjouée
À l’idée de revoir, ce mari détesté.
Les larmes en sont témoin, et les sourires aussi,
Leur absence vous montre, l’ampleur de mon envie.
CORDELIA
Ne vous inquiétez pas, je comprends cette angoisse,
Revoir un être cher, qui tout un an menace
De mourir à la guerre, est source de tourments,
Qu’il fera disparaître dès qu’il sera présent.
OCTAVIE
Vous ne comprenez pas tout ce que je vous dis,
Je ne veux le revoir, il est source d’ennui.
Pourquoi donc fallait-il que le destin l’épargne,
Que les troupes ennemies en dépit de leur hargne,
Ne parviennent une fois à le toucher au cœur ?
Qu’il souffre comme moi je souffre !
CORDELIA
Ah la langueur !
Allons bon Madame, cessez donc ces sottises.
Il demeure César, homme qu’on ne méprise !
C’est un preux guerrier qui ressort triomphant
D’une guerre infernale où tous ses grands talents
De stratège et Empereur lui valurent la gloire.
C’est un homme au courage comme il y en a rare.
OCTAVIE
Mais voyons c’est absurde, s’il n’est mort c’est qu’il n’a
Participé assez à ces sanglants combats.
Son honneur à jamais est souillé de ce sang
Qui ne s’est répandu sous trop peu d’affrontements.
J’en demeure écœurée, car César est un lâche,
Il revient de la guerre sans de sang nulle tache.
CORDELIA
Madame arrêtez donc de vous plaindre, il arrive.
Il suffit d’un regard et l’Amour se ravive.
Ne faites rien qui puisse être regrettable,
De plus vous savez que César est irritable,
Et ceci par nature mais aussi par fonction.
Il approche Madame, les sabots près se font.
OCTAVIE
Mais vous ne comprenez la crainte qui m’abrite,
Je redoute qu’il vienne, il arrive trop vite.
Ne me laissez point seule avec pareil tyran.
CORDELIA
Pourquoi une haine pour un mari aimant ?
Il est beau, il est jeune…
OCTAVIE
Il est cruel et vieux,
Et on ne peut pas dire qu’il ne soit pas hideux.
Je l’exècre et ne l’ai jamais vraiment aimé.
CORDELIA
Madame taisez-vous, je l’entends arriver.

Scène 3
Octavie, Cordelia et Néron

NÉRON
Mais quel est ce bonheur que de revoir enfin,
Son palais, son épouse après un an bien loin.
Certain que votre Amour n’a cessé de s’accroître,
Je vous reviens entier sans nulle trace rougeâtre :
Sans entaille et sans honte, dans un total succès,
Je suis sorti vainqueur de combats qui ont fait,
Des milliers de victimes.
OCTAVIE
Je vous en félicite,
Suis certaine qu’à tous, sous l’Empire suscite,
Vos exploits une joie et qu’ils s’en réjouissent.
Qu’ils voient sincèrement en vous le digne fils
De Mars. Ô vous César, vous dont tous les prodiges
Serviront partout pour définir le prestige.
Il sera composé des récits et légendes,
Narrant vos victoires et votre si belle et grande
Gloire sur les peuples, ethnies et religions,
Et tous, sans nul doute, connaîtront votre nom.
CORDELIA
Tout cela est bien vrai, votre bravoure fera,
L’objet d’admiration. Berçant de votre bras
L’Empire, sa gloire et sa paix tant convoitée,
Devant vous les peuples se verront prosternés.
César nous sommes tous heureux de vous revoir.
Tous attendaient cela, ne pouvant concevoir,
Une quelque défaite, connaissant l’expérience,
Que vous acquirent ainsi, toujours dans l’excellence
Militaire au cours de ces dernières années.
NÉRON
Je suis las maintenant de ne faire que tuer,
Sans ne jamais passer ici le moindre instant.
Et ma belle Octavie, que j’aime et aime tant,
Me parue bien loin, lors des grandes batailles,
Que je menai partout, triomphant où que j’aille.
Aujourd’hui je rentre et ce pour bien y rester,
Dans ma demeure, près de ma belle adorée.
OCTAVIE
César votre gloire ne sera-t-elle noircie,
Par cette décision ? Que dis-je, ineptie !
Si Rome ne connut de tel guerrier que vous,
Regrettable il serait de perdre cet atout.
NÉRON
Mais Madame pensez bien que j’ai médité
À ce problème et que je me suis décidé,
À si je suis ici, à suivre mon Amour,
Que j’ai tant regretté dans ces guerres, nuit et jour.
C’est que vous me manquiez ! Je ne partirai plus,
Mon choix ne changera, j’y suis résolu.
CORDELIA
Ô César vos bontés dépassent l’espérance,
Du peuple vous aimant, vous adore et je pense,
De manière sincère, qu’il sera très heureux,
Que vous restiez ici, car cela est son vœu
Le plus cher et je sais, César que votre choix,
Est déjà défini, pour notre grande joie.
NÉRON à Cordelia
Maintenant, je vous prie, laissez-nous un instant,
Que je retrouve enfin, celle qui tout un an,
Me manqua sans mesure.
CORDELIA
Je m’en vais, bien sûr,
Madame pour l’heure en votre grande suite.
César encor une fois je vous félicite.

Scène 4
Néron et Octavie
OCTAVIE
César, depuis longtemps tant de gens vous attendent,
Allez les retrouver, si Rome vous demande.
Mon plaisir attendra, je me ferai patiente,
Ma langueur dura et elle me parue si lente,
Que quelques heures encor ne me navreraient pas
Davantage. Allez donc dans les rues qu’on vous voit,
Et que l’entièreté de l’Empire succombe,
À la joie vous sachant bien loin de la tombe.
NÉRON
Ne vous inquiétez pas, le peuple obéira,
Je préfère vous voir : il se résignera.
Si je lui impose une heure encore d’absence,
Il se satisfera d’une telle latence.
OCTAVIE
Alors dites César, racontez-moi la guerre,
Des batailles gagnées aux instants de misère.
NÉRON
Il n’y en a point eut ! Gloire nous souriait
Inconstamment et sans jamais le moindre arrêt.
Désormais je suis célèbre dans les rangs
Ennemis pour avoir lutté si ardemment,
Enlevé en masse, emporté tous leurs frères,
Dans le monde au-delà, en l’Empire des enfers.
OCTAVIE
Mais César pourquoi donc se livrer à la haine,
Alors que votre Amour pour vivre se démène,
Dans cet Empire où, sans autorité, demeure
Un unique visage, signe de la splendeur,
En statue de César, qui parti un année,
Semblait Rome oublier ou bien l’abandonner.
NÉRON
Madame serait-elle face à tant de victoires
Furieuse contre moi, pleine de désespoir,
Qui ne la quitte plus, bien que je sois là ?
Trop de jours sont passés, son bonheur s’en alla,
Mais ne sait revenir, nonobstant ma présence,
Madame je vous laisse, car en effet je pense,
Que vous avez raison, que la population,
M’a assez attendue alors donc à quoi bon,
Accroître leur langueur, je vous laisse pour mieux
Vous faire à cette idée, que votre bienheureux
César est de retour. Vous avez donc jusqu’à
Ce que nuit s’impose, et après seul viendra
Le soir tant attendu, mais enfin à plus tard,
Seul deux heures encore, des étoiles nous séparent.

Scène 5
Octavie et Cordelia

CORDELIA
Madame tout va bien ? Votre teint semble pâle,
Et vos mains sont d’une froidure glaciale
La plus dure qui soit, qu’attendez-vous de moi ?
OCTAVIE
J’aimerais le repos, allez changer mes draps,
Pendez-les aux fenêtres.
CORDELIA
Oui je m’y atèle.
OCTAVIE
Merci Cordelia, je vous doit fière chandelle.


ACTE DEUXIÈME
Scène 1
Octavie et Lucius

LUCIUS
Madame vous m’avez me semble-t-il appelé,
J’ai cru voir aux fenêtres vos draps blancs se hisser.
Je me précipitai, aussi vite qu’il me fut
Possible de le faire : Madame j’accourus.
OCTAVIE
Ô mon si beau poète, je n’aime plus qu’aimer.
Je regrette le jour où je vous vis : Orphée,
Car la vie depuis lors n’a pas nulle saveur.
Et je ressens sans vous seulement la douleur.
LUCIUS
Mais Madame César est revenu ce jour,
On ne peut plus s’aimer, la nuit comme le jour.
Moi aussi je vous aime, et ce serait mentir,
De venir déclarer que jamais je n’admire
Votre illustre beauté, l’étendue de vos charmes,
Mais s’il advenait que Néron à des alarmes,
Succombât ; si au monde nous fumes dévoilés,
Il nous tuerait tous deux et nos corps sans pitié,
Seraient jetés au Tibre : on nous oubliera.
Madame j’ai peur de tous ces assassinats !
Et si quelques rumeurs révélaient la tromperie,
Que nous entreprenions lorsqu’il était parti,
Mais que nous poursuivons nonobstant son retour,
Nous entêtant toujours, amers objets d’Amour,
Il nous ferait mourir, et nul n’en saurait rien,
Comme il l’a déjà fait avec d’autres humains ;
Des opposants ou bien des proches du pouvoir,
Qui furent retrouvés, entailles à la mâchoire.
OCTAVIE
Ce despote impérial, si c’est lui dont il est
Question je le déteste, je l’exècre et le hais.
Je l’ai vu tout à l’heure, il me ventait sa gloire
Face aux peuples étrangers, qu’il juge de barbares,
Puis il a laissé deux heures pour nos adieux,
Mais comprenez poète, ce n’est pas ce que je
Souhaiterais, je prête à défier le pouvoir,
Si cela me permet d’encore vous revoir.
LUCIUS
Oui je l’accepte, le cœur emplit de joie,
Et de larmes car je sais que tout ne finira,
De la manière la plus heureuse pour nous deux.
La vie est bien triste pour deux jeunes amoureux…
OCTAVIE
Revoyons-nous ici, chaque matin qu’ira
L’Empereur à Rome et devant tout le Sénat.
Alors qu’il détruira des centaines de vies,
Par des lois illogiques, propres à l’oligarchie,
Pendant que vous et moi profiterons du temps,
En profanant César, et ce en nous aimant.
LUCIUS
Mais Madame Néron, est descendant des dieux.
Il tire son pouvoir de ses célestes aïeux !
OCTAVIE
Peu m’importe j’irai contre l’autorité,
Contre la religion et les mœurs infondées :
Nous partirons ensemble dans un monde idéal,
Nous serions heureux dans l’amoureuse cavale,
Si seul cela nous peut permettre de s’aimer.
Je bannis la raison de m’en dissuader !
LUCIUS
Une vie de bohème n’est vie de tout plaisir,
Je m’y connais bien, ce n’est pas qu’un loisir :
Nous mangerons un jour sur deux et tout le temps,
Dans le froid de la nuit, dans le grand froid le vent,
Nous coucherons dehors, les étoiles en témoins
De notre bel Amour nous valant notre faim,
Notre soif et décès. Madame croyez-moi,
Vous ne savez pas ce qu’est la vie sans un toit.
OCTAVIE
Vous vivant de l’aumône, vous dormant sur la terre,
Vous, poète des rues, connaissant la misère,
Je me fie au jugement de votre expérience.
Vous semblez dire vrai, le discours a du sens,
Mais j’ai peur moi qu’ici, quelqu’un nous perce à jour,
Et que la corde enfin achève notre Amour.
LUCIUS
Ne vous en faites pas, je me ferai prudent.
Il n’y a de raison, sauf si on nous surprend,
Que l’on nous soupçonne, demeurez donc sans crainte.
OCTAVIE
Accordez-moi, partant, une dernière étreinte.

Scène 2
Octavie

OCTAVIE
J’eus beau lui dire combien mes transports
M’inquiètent, il n’a point su comprendre quels efforts
Suscitent l’angoisse que j’éprouve, impuissante.
Tant de tristes périls m’accablent, me tourmentent !
Mais en ce même temps il semble avoir raison :
La fugue ne serait la bonne décision.
En vérité tous deux nous avons bien conscience,
Qu’il nous faudrait choisir d’abréger nos souffrances,
De ne plus nous aimer et de ne plus nous voir,
Mais ma seule raison de vivre étant l’espoir,
Une chance nous reste de toujours nous aimer,
Car mon bonheur réside seul en mon cœur navré.
Je voudrais mettre fin à cette relation
Qui me torture et tue. Quelle brutale passion !
Mais je ne le pourrais, car je l’aime tellement…
Triste et cruel Amour, toi dont les sentiments,
Ravagent tout mon cœur, montre moi comme faire
Pour aimer sans douleur, ne mourir d’adultère.
Ô Amour guide-moi ! Je demeure perdue,
J’aimerais que César ne soit point revenu.
Mais je n’ai pas le choix, il revient plein de gloire.
Il est plus légitime que quiconque au pouvoir.
En ce bas monde il n’y a de tristesse plus,
Poussée que la mienne, le destin n’a voulu,
M’accorder le bonheur, achevé mon mari…
Quelle abominable épouse je suis !
Je l’avoue pleinement, l’Amour dorénavant,
Sera ma raison d’être, et mon si bel amant,
Qui m’aime et que j’aime mais qui demeure loin,
M’emprisonne toujours en ce lassant chagrin,
Qui tantôt tourmente, tantôt me laisse vide.
Je me muerai donc en statue si livide,
Que la neige sur moi n’en sera discernable ?
Je mourrai, affligée. Ô sort abominable !
Ce blanc de pureté témoignera l’Amour,
Que je porte au poète et qui me suis toujours.
Ressentant chaque souffle qui résonne en ces lieux,
Faisant bouger le roc de mes pales cheveux,
Je sens si fragile, et vraiment vulnérable,
Comme si de mes maux, l’Amour est responsable.
Mon Amour m’inquiète, mon Amour me méduse,
Il se nourrit de moi, et ainsi mon cœur s’use.
J’ai beau me muer en pierre je ne suis,
Insensible aux martyrs, aux blessures, à la vie.
Mais enfin, quelqu’un vient, il faut sécher mes larmes,
Qu’éveille ma tristesse par ces quelques alarmes.

Scène 3
Octavie et Cordelia

CORDELIA
Madame l’Empereur rentrera bientôt,
Le peuple l’acclame et le porte comme héros.
Le monde aime César, il en est méritant,
Il a conquis les cœur et n’a plus d’opposant.
OCTAVIE
Ce n’est point réussir d’assassiner tous ceux,
Qui ne s’accordent à dire ce que l’Empereur veut.
Ce ne sont les idées qui gagnèrent tout Rome,
Mais les armes impériales et l’ensemble de hommes.
Et la belle garde prétorienne chargée,
De protéger César, constamment menacé,
Terrorise toute la population,
Car le fait de vivre, pourrait être un affront,
À Néron qui toujours, s’invente des rivaux.
Ainsi il menace l’Empire de sa faux,
Pour que n’ose parler, sous cette tyrannie,
Seul ceux dont le discours conviendrait au pouvoir,
Des corrompus, menteurs, qui voudraient nous faire croire,
Aux vertus de Néron, bien qu’il soit répandu,
Qu’il n’en possède aucune et n’en ait jamais eut.
CORDELIA
Mais enfin Madame, que voulez donc donc dire,
En parlant de cela, en évoquant l’Empire,
Sous le nom bien étrange de cette tyrannie,
Dont parlait justement nos plus grands ennemis ?
Rome demeure plus puissante que jamais,
Et nous devons cela aux multiples bienfaits,
De notre grand sauveur, le valeureux Néron,
Lui qui après Claude, nous assure pour de bon,
Une stabilité que le peuple réclame.
Au lieu de l’accuser de Rome tous drame,
Remerciez-le plutôt pour tout ce qu’il apporte.
OCTAVIE
Mais la désolation demeure à notre porte !
César ment à Rome, il tue à tour de bras,
Tous ceux qui lui déplaisent meurent d’assassinat,
Camouflé toujours par l’un de ses acolytes,
Qu’il paye grassement et puis qu’il invite,
À se taire ou bien à subir le même sort.
Ainsi tout est secret, car tous craignent la mort.
CORDELIA
Mais il est bien normal que pour sa protection,
Il nettoie le danger de la population.
OCTAVIE
Vous ne comprenez pas à quel point il est fou,
Et sa paranoïa, son immense courroux,
Lui font faire ce que vous n’oseriez penser.
Regardez Agrippine qui faillie se noyer,
Et dont on retrouva, en sa demeure un corps,
Plein de sang mais César ne voulu point alors,
Apprendre le coupable, car il le connaissait.
Devant chaque miroir, oui il le contemplait.
Quel genre d’enfant fait exterminé sa mère,
Rien ne justifierait un acte aussi sévère !
CORDELIA
Agrippine avait un bon nombre d’ennemis,
Et je demeure sûre que César, en dépit,
De sa haine envers elle, ne la fit pas mourir.
Il n’en avait besoin, il pouvait juste dire,
Qu’elle avait tort et nul, face à César aurait,
Douté de tels dires. Vous savez que c’est vrai.
OCTAVIE
Vous ne comprenez pas, amie Cordelia,
Que ne l’ai aimé et ne l’aimerai pas,
Que c’est un monstre vil et un cruel barbare,
Qui ne gouverne que par amour du pouvoir.
CORDELIA
Comment donc osez-vous l’insulter de la sorte,
Alors que dans ses bras c’est la paix qu’il apporte.
OCTAVIE
Sur ce malentendu, je vous dis à plus tard,
S’il venait à rentrer veuillez dire à César,
Que je suis dans ma chambre.
CORDELIA
Veuillez compter sur moi,
Salut Madame, je lui dirai bien cela.

Scène 4
Néron et Cordelia
CORDELIA
Seigneur cette sortie s’est-elle bien passée ?
NÉRON
À ravir, le peuple semblait m’idolâtrer,
Mais je ne parvenais à profiter vraiment,
De cet instant de joie, bien que j’en sois content :
Restait dans ma tête le regard d’Octavie ;
Un regard glacial, comme un regard sans vie.
Je me demande aussi où elle est maintenant.
CORDELIA
Dans sa chambre. Elle m’a dit de vous le dire quand,
Vous serez rentré.
NÉRON
Je vous remercie et vais,
La revoir, je le veux, et cela sans délai.
CORDELIA
César je vous met en garde elle est très fragile,
Son sourire ces temps-ci n’était plus que fébrile.
Elle semble croire vivre dans l’injustice :
Je tentai, sans succès, d’achever son supplice,
Et de lui rappeler la vraie réalité.
NÉRON
Ainsi donc son chagrin, pour toute cette année,
Lui valut loin de moi cette folle démence.
Cela m’intrigue fort, mais l’Amour, je le pense,
Reste notre guide à tous, et inassouvi,
Synonyme il peut être d’une grande folie,
Si notre seul dessein était ces sentiments.
CORDELIA
C’est ce qui semble en être, elle pleure tout le temps :
Plus le temps passait, plus les larmes se faisaient,
Récurrentes et surtout, vers la fin elle disait,
Être désespérée. Et puis vous revenez,
Son cœur se retourne, elle ne sait plus penser.
NÉRON
Tout cela est bien dit mais m’inquiète quand même.
Êtes-vous certaine qu’Octavie encor m’aime.
CORDELIA
J’en suis persuadée, nul doute n’est permis.
NÉRON
Vous m’allégez d’un poids, je vous en remercie.

Scène 5
Néron, Octavie et Cordelia
OCTAVIE
Je vous ai entendu, alors je suis venue,
Et j’ai cru comprendre que vous parliez du
Fait que je me sente mal, mais cela est faux.
Mon état est banal, mes sentiments normaux,
Cessez donc je vous prie, d’énumérer chez moi,
Ce qui vous intrigue car sachez que je vois,
D’un mauvais œil ceux qui me calomnient sans cesse,
Par des mensonges ou bien par simple maladresse,
Clamant d’odieux dires qui vont à mon encontre.
CORDELIA
Madame excusez-moi, je n’avançais rien contre,
Votre personne, car je vantais la grandeur,
De votre bel Amour conçu pour l’Empereur.
NÉRON
Tout cela est bien vrai, ne vous alarmez point,
Il n’y a point honte à éprouver du chagrin.
Cordelia laisse-nous, nous avons à parler,
J’ai attendu cela depuis toute une année.

Scène 6
Néron et Octavie
NÉRON
Madame je suis là et vous aime toujours,
Je n’ai point cessé de méditer chaque jour,
À ce joyeux instant, après un an passé.
Il serait alors sans logique d’agiter,
Votre immense courroux se dressant contre moi,
Votre haine juste, causée par tant d’émoi,
Alors que sa raison a déjà disparu.
OCTAVIE
Je ne m’habitue pas, il serait impromptu,
De vous dire le contraire et ce serait mentir ;
Mais enfin j’ai conscience que revoir votre Empire,
Doit vous bien plus que moi troubler le quotidien.
Je vous laisse, César, le temps jusqu’à demain,
Pour vous habituer à la vie au palais.
NÉRON
Au contraire, Octavie, cette nuit je pensais,
La partager à vous.
OCTAVIE
Mais César, et Poppée ?
Si elle vous souhaite, vous devez l’honorée,
Par votre illustre présence.
NÉRON
Il n’est ici même,
Question de tout cela. Octavie je vous aime !
OCTAVIE
Si tel est votre choix…
NÉRON
Néanmoins vous semblez,
Malheureuse de cela, vous n’êtes enjouée.
OCTAVIE
Il ne s’agit d’envie, il est de mon devoir,
D’accepter chaque nuit que le souhaite César.


ACTE TROISIÈME
Scène 1
Néron et Cordelia
NÉRON
Cordelia je pars, veillez sur Octavie,
Qu’elle ne parte pas bien que son mari,
Lui ait rappelé qu’en tant qu’Impératrice,
Elle ne doit jamais céder à ses caprices.
Vous comprenez sans doute là où bientôt je viens :
Si je la vois dehors, et dans quelque dessein,
Je vous en tiendrai donc de ses faits responsable,
Et chaque manquement vous sera imputable.
CORDELIA
Je lui rappellerai.
NÉRON
Mais je n’en doute point,
Vous servez sans faillir et à tous nos besoins,
Ma confiance envers vous en est presque absolue.
Et c’est pour cela donc que je vous ai voulu,
En proche d’Octavie, non pour la surveiller,
Mais bien pour s’assurer de sa fidélité,
Car je vous sais loyale et prête pour l’Empire,
À dénoncer quiconque s’opposant à mes dires,
Et à ma volonté.
CORDELIA
C’est là tout un truisme,
De servir l’Empereur en esprit d’altruisme.

Scène 2
Cordelia et Octavie
OCTAVIE
Cordelia où est donc passé l’Empereur ?
Je le cherche partout mais il doit être ailleurs.
J’ai à lui parler mais je ne trouve pas,
Il ne me reste que l’espoir de son trépas.
CORDELIA
Allons donc Madame. Il se trouve au Sénat,
Et m’a chargé de vous dire qu’il ne viendra,
Que ce soir car il a des affaires à régler.
Et sinon hier, vous vous êtes retrouvés,
Lui avez-vous fait part des quelques opinions,
Dont nous parlions avant…
OCTAVIE lui coupant la parole
Non je laisse Néron
En dehors de cela. Nous savons toutes deux,
Mais je n’en parle pas, car c’est bien ce qu’il veut.
Qu’importe je reste convaincue par ma thèse :
Ce n’est qu’un meurtrier, et tuant à son aise,
Nul de ses complice n’ose encor l’accuser,
Mais un jour viendra où seule la vérité,
Sera connue de tous, et puis Néron haï :
C’est tout ce qu’il mérite, pour nous avoir trahi.
CORDELIA
Mais pour un tel complot, César ferait pendre.
Ne le crie pas trop fort ou tu te feras prendre.
Ne confonds-tu donc pas rêves et réalité ?
Reconnais le mensonge : Néron n’a commandé,
Aucun assassinat.
OCTAVIE
Je le sais , tu as tort,
Enfin peu m’importe, moi je me crois encore.

Scène 3
Octavie
OCTAVIE
J’ai donc une journée pour revoir mon Amour,
Je m’en vais l’alerter de ce bien heureux jour.
J’espère au moins que par haine pour mes idées,
Cordelia ne viendra son discours m’exposer,
Car elle est aveuglée : la manipulation,
Lui fait croire des faits contraires à la raison.
Tout Rome, sous Néron, demeure suspendu,
À ses vœux, ses plaintes, à son peu de vertu,
Semblant d’humanité qui l’amena là où,
Il siège en tyran, et devenant plus fou,
À mesure que le temps s’écoule, où le pouvoir,
Entre ses mains demeure, et où meure l’espoir.
Pourquoi Claude, le grand, au lieu de son enfant,
Nomma pour Empereur son beau-fils, le dément ?
Pourquoi Britannicus du trône n’eut rien ?
C’est lui le vrai seigneur dont nous aurions besoin.
Rome n’est sous Néron plus qu’une grande ruine.
De l’Empereur l’Empire, une haine se dessine,
Elle est réciproque car le dictateur n’aime,
Le peuple, le Sénat, où le chaos il sème,
Dans l’espoir que nul ne verra clair en ses plans,
Plus que de Rome il se veut maître de la Terre.
Il a déjà pour lui et les cieux1 et la mer,
Et les peuples étrangers lui seront sans tarder,
Définis en sujets, et puis en guerriers,
Pour conquérir le monde et orchestrer ses peines :
Il est l’allégorie de la terreur humaine.

Scène 4
Octavie et Lucius
LUCIUS
Madame me semble-t-il vous m’avez appelé.
J’en suis bien heureux, je ne sais exister,
Qu’auprès de vous ma chère.
OCTAVIE
Mon Amour, je comprends,
Car moi auprès de vous aussi je le ressens.
Mais mon Amour, poète, n’a plus de territoire,
Il se bat constamment et lutte pour savoir,
Comment cohabiter avec pareille haine :
Celle conçue pour César.
LUCIUS
Mais où cela nous mène ?
Ne cédez Madame à de pareils transports,
Qui sont les instruments dont César use à tort.
Il peut bien par l’argent corrompre le Sénat,
Il n’aura point nos cœurs par ces mêmes appâts.
Jalousie et vengeance, désespoir et passion,
Tout s’exprime, tout nuit ; croyez bien que Néron,
Qui vous aime s’il savait que vous ne l’aimiez pas,
Se tuerait sans doute, d’un coup que vous et moi,
Au delà de prédire, ne nous pourrions prévenir.
Comprenez mon Amour que si César décède,
Dans Rome le chaos à cette paix succède.
OCTAVIE
Mais, seigneur, comment donc avez-vous pu vous faire,
Duper à un tel point que même en la misère,
Rome vous semble briller.
LUCIUS
Madame c’est le cas.
C’est l’art des poètes de voir ce qui n’est pas,
Ou bien différemment, à ma manière à moi.
Que ce soit par Néron ou que ça ne le soit,
À défaut d’être stable, elle demeure heureuse.
OCTAVIE
Mais peu à peu Néron la rend bien hideuse.
LUCIUS
Oui mais il est César.
OCTAVIE
Et cela sans raison.
Car je n’oublierai pas que sa nomination,
N’est pas légitime, et qu’il n’est Empereur,
Que par la volonté de son père. Plein de heur,
Il nous semblait gentil, nous exposait ses charmes,
Avant de, contre nous, faire dresser ses armes,
Et asservir les gens, qui sont terrorisés,
Et qui par la frayeur n’osent plus s’insurger.
LUCIUS
Mais le peu s’exprimant est en adoration,
Et les grands sénateurs soutiennent Néron.
Mais peut-être avez-vous raison entièrement,
Le réel s’opposerait à l’idéal des gens.
Seul le pouvoir octroie le pouvoir à quiconque,
Comme Claude et Néron, et les sénateurs donc,
Qui toujours sont soucieux d’être dans les bonne grâces,
De César afin qu’il leur assure leur place,
Au Sénat.
OCTAVIE
Comprenez maintenant mon courroux,
Comprenez que j’en veuille à cet empereur fou,
Car mon inclination se mue en un supplice :
César dès son retour fit œuvre de ses vices,
Et me navra le cœur, en s’en prenant à vous.
Prétendre demeurer à mes yeux être tout,
Tel qu’il le fît maintes fois, cela constitue,
Un grand affront pour vous, et ce sans avoir su,
Que vous êtes son rival.
LUCIUS
Mais l’odieux paiera.
OCTAVIE
Mon Amour dites-moi, qu’est-ce donc que cela ?
Tantôt vous l’admiriez, vous le complimentiez,
Tantôt vous menacez pour moi de l’attaquer.
LUCIUS
C’est parce qu’en lui seul, je trouve deux visages,
Sa double figure n’est point un bon présage,
Car chaque fois que nous trahissons l’Empereur,
Je m’en sens coupable et tâché de déshonneur.
Et en ce même temps, je l’exècre sans fin :
Ce qui m’est dur ici, c’est que je trouve en un,
Homme un dieu et puis un époux détestable,
De la femme que j’aime, quelqu’un de remarquable,
Qui mérite bien plus que tout être sur Terre.
Ainsi donc ma raison et mon cœur sont en guerre.
OCTAVIE
Mon Amour si vous êtes à cette heure en ces lieux,
C’est bien que déjà triomphe l’un des deux.
LUCIUS embrassant2 Octavie
Oui Madame vous dites la stricte vérité.
Ma raison est perdue, je vis pour vous aimer.

Scène 5
Octavie, Lucius et Cordelia
CORDELIA
Madame qui est donc cet homme près de vous ?
Maintenant je comprends votre récent courroux,
Pour César qui vous aime, mais que vous, vous trompez.
OCTAVIE
Non Cordelia ce n’est pas ce que vous pensez.
CORDELIA
J’ai tout vu et ne suis pas dupe à ce point là,
Ne me faites pas croire que vous ne l’aimez pas.
OCTAVIE
Écoutez, c’est juste que Néron à la guerre,
Me manquait et j’étais en proie à la misère,
Qui toujours plus mon cœur ravageait en tous sens.
Il me manquait tellement que durant son absence,
Je dus me résoudre à exprimer chez un autre,
Le chagrin éprouvé, tout comme chacun des nôtres.
Le départ de César nous fut un synonyme,
D’une immense tristesse, résultant de l’abîme,
Qui nous séparait tous de notre beau César.
CORDELIA
Tous ces mots sont bien beaux, mais ne sauront m’avoir.
Cela est bien tenté, mais les dés sont jetés,
Je le regrette fort. Je vous laisse vous quitter.


ACTE QUATRIÈME
Scène 1
Octavie et Lucius
OCTAVIE
Mon Amour partez vite, je connais Cordelia,
Auprès elle l’Empereur elle nous dénoncera.
Je ne puis vous suivre autrement qu’en pensée,
Allons, je vous en prie, mon Amour, dépêchez.
LUCIUS
Sachez Madame, qu’au sein de mes souvenirs,
Demeurera toujours votre précieux sourire.
Regardez-moi encor, je ne voudrais gâcher,
Chaque instant où je puis rester à vos côtés.
Mais enfin mon Amour, je vous dis dans les yeux,
Je vous aime sans fin. Madame, mes adieux.
OCTAVIE
Mes adieux poète, mes adieux mon Orphée,
Mes adieux mon Amour, déjà vous me manquez.

Scène 2
Octavie
OCTAVIE
En quel honneur le sort souhaita donc ma souffrance,
Pourquoi suis-je la cible de la persévérance,
Et de tant de tourments, dont mon cœur est navré,
Je ne saurai vivre, le sachant échappé,
À ce monde de fou, par Néron orchestré.
Que va-t-il devenir ? Le fera-t-on tuer ?
Et moi, vais-je mourir ou serai-je épargnée ?
Mon ignoble mari m’aura-t-il en pitié ?
Des questions m’assaillent, pour si peu de réponses.
Je t’en prie Cordelia, à la folie renonce.
Qu’ai-je donc pu faire pour mériter cela ?
Le départ de Lucius me blesse, mais pourquoi ?
Mon seigneur est parti, mon bien s’en est allé,
Ma douleur se grave en mon cœur meurtri, peiné,
Qu’elle ne saura quitter qu’à l’instant de ma mort.
Mon Amour est cruel tout comme il devient fort.
Je souffre et toujours plus à mesure que le temps,
M’éloigne du poète que j’aime infiniment.
Nos destins sont celés, rien jamais ne sera,
Plus comme en mon bonheur, dont l’absence me nuira ;
Pourquoi vivre si je ne suis plus comblée ?
Ma peine me tuera, je serai accablée,
D’une telle distance, nous séparant tous deux.
Des nuées de chagrins, en mon cœur amoureux,
Auront raison de moi et ma vie bien futile.
Me nourrir, respirer, ne sont plus guère utiles,
Que faire donc d’une vie qui ne s’estime plus ?
Si je souhaite mourir sous ma joie révolue,
Quel antidote autre que mon Amour parti,
Quel remède rendrait donc heureuse ma vie ?
Je serai seule pour tout le temps qu’il me reste ;
Mon désespoir tuera mon cœur de sa main leste,
L’Empereur tentera de me séduire encor,
Mais mon cœur fidèle, si triste, presque mort,
Saura bien me causer mon trépas incurable.
Mais de quoi, sauf Amour, suis-je nommé coupable ?
C’est là un problème, dont la résolution,
Définira ma vie et marquera mon nom.
Moi toujours dévouée au désir impossible,
Je serai honorée en un monstre irascible,
Contre lui-même et ne sachant point maîtriser,
Ses propres sentiments. Pourquoi donc se tuer,
Est-il vu comme il l’est ? Je n’ai plus de raison,
Pour rester en ce monde : je n’ai plus de passion.
Mais qui sait un beau jour, je reverrai peut-être,
Mon Amour et qui sait, l’espoir en train de naître,
Mon cœur sauvera et je sais bien que lui,
N’aurait jamais souhaité qu’éprise de folie,
Un élan de désir me fasse me jeter,
De la fenêtre de ce palais désolé.
Mais enfin ces larmes, impuissantes soient-elles,
Pourront-elles témoigner d’un Amour dont les ailes,
Demeurent fragmentée ? César portera-t-il,
Valeur à tout cela ou me condamnera-t-il,
À errer chez les ombres, ma dépouille exposée,
Mon nom déshonoré pour un crime oublié ?

Scène 3
Néron et Cordelia
NÉRON
Cordelia vous semblez avoir les yeux humides,
Votre angoisse est palpable, vous paraissez timide,
Quelque chose de va pas ? Devez-vous m’annoncer,
Une quelque nouvelle ?
CORDELIA
Vous avez deviné,
Je vous dois alerter, bien que j’aime Madame,
Et ne souhaiterais pas qu’il lui arrive un drame,
Qu’elle aimât sans limite et durant votre absence,
Un poète de Rome, qui en vive insolence,
Osa la courtiser et conquérir son cœur,
Alors même qu’il était déjà vôtre, Seigneur.
Cependant il advint que je les vis tous deux,
Ou bien les découvris, pour être pointilleux,
S’aimant ici-même, sans quelque retenue.
J’estime, mon Seigneur, en vous ayant prévenu,
Que j’ai fait mon devoir, Madame conviendra,
Qu’à ma place elle aurait bien sûr fait comme moi.
Je m’excuse César, et comprends la douleur,
Que peut bien ressentir, tout en aimant, un cœur.
NÉRON
Idiote ! Vous auriez pu veiller davantage,
À ce qu’en mon absence, mes quelques avantages,
Me soient gardés intacts, comme je les ai laissés.
CORDELIA
Je vous assure avoir, César, pourtant été,
D'Octavie à l’écoute mais nulle confidence,
Ne me fit le récit de leurs doubles avances.
NÉRON
Madame laissez-moi, car je dois méditer,
À une vengeance qu’elle ne peut oublier.
Elle aime les poètes, elle aime les artistes,
Je lui conservai donc un destin des tristes.

Scène 4
Néron
NÉRON
Pourquoi donc partis-je pour servir à la guerre,
Alors même que je ne fus point militaire ?
Et pendant ce temps là, Octavie, que j’aimais,
Avec un poète celle-ci me trompait.
Moi aussi, dès jeune, je souhaitais être artiste,
Mais ma famille était bien trop élitiste,
Et vit d’abord en moi la grandeur impériale.
Je ne pus renoncer, ma mère, ma rivale,
Ne me laissa le choix et m’offrit le pouvoir.
Mais en honnêteté, bien loin de le vouloir,
Je préférai au trône ma voix et puis ma lyre,
Pour qu’en bon poète, un jour je puisse fuir,
Dans mes mélodies ou bien en mes poésies.
Pourquoi donc fallut-il que j’adore Octavie,
Alors même qu’elle est seule à n’aimer point César.
Pourquoi donc déviai-je de ma passion pour l’art ?
Elle aime les poèmes, elle aurait pu m’aimer,
Mais pour être Empereur je dus y renoncer.
L’Amour est bien cruel, aiguisant mon courroux,
Il me tourmente au point que je devienne fou.
Ignoble qu’est ma vie, mon rival sera mort,
Ma démence est actée, je sais que faire du corps.
On me traitera de loup3 pour tout ce que je fais,
Mais je suis Empereur et fais ce qu’il me plaît.
Octavie le saura, je lui ferai comprendre,
Ce, par mille tourments : je la ferai se pendre,
En la poussant à bout, je serai impavide4,
Et très subtilement, l’inciterai au suicide,
Mais si cela ne marche, ma garde prétorienne,
Se fera une joie de lui trancher les veines.


ACTE CINQUIÈME
Scène 1
Octavie
OCTAVIE
Voilà deux jours passés, toujours pas de nouvelle.
Mon Amour est parti, et son départ mortel,
Ne laisse derrière lui qu’une vie de misère,
Pour moi qui l’ai chéri. Cela achève une ère,
Où j’étais si heureuse que le réveil n’était,
Plus une déception de n’être morte mais,
Une joie sincère de savoir le revoir.
Je n’aimais cette vie que par l’unique espoir,
D’un jour pouvoir sans m’en cacher l’idolâtrer.
Mais ma tragique voie, ne laisse décider,
D’où étendre le si puissant spectre et si,
Indomptable, si fort bien plus qu’infini,
D’une tendresse ainsi que mon inclination.
Elle n’est éphémère en étant passion,
César aussi puissant qu’il voudrait bien l’être,
Ne saurait enterrer ni faire disparaître,
Les fruits de mon cœur, mes sentiments sincères,
Mon désir si ardent, que rien ne saurait faire,
S’éteindre en moi la flamme qui me brûle sans cesse.
Ayez pitié, César ! Nulle femme n’est maîtresse,
Des enfers son cœur. Oui je suis harcelée,
Par une armée de flèche dont je suis navrée.
Laissez-moi me tuer, laissez-moi Cupidon !
Cessez de m’obséder, car mon adoration,
Exige que je meurs, alors j’obéirai,
Et là où souhaite le sort je m’y rendrai.
De mes yeux s’écoulant de larmes mille mers,
Je me noie chaque instant en ces abysses amers,
Et refuse à la haine une quelconque gloire.
Le jour comme la nuit sont pour moi d’un noir,
Si profond que mon cœur n’aura plus aucun choix :
Dans la tristesse froide c’est son bonheur qui choit.
Mes charmes toutes sont aux splendeurs effacées ;
Demeurera l’hiver sur mon feu trépassé,
Ne brûlant plus de rien en l’honneur de personne,
Ce sont les fleurs de l’âme qui en mon cœur façonnent,
Un jardin des ténèbres et de désolation.
Si les dards acérés de fascination,
De l’Amour déchaîné conçoivent à son image,
Une œuvre en ma mémoire, mémoire à son passage,
Les jardins de mon cœur seront tous arrachés,
Aux ronces innocentes et aux roses fanées.
Quitteront à jamais les papillons de nuit,
Les territoires obscurs de mon esprit meurtri,
Car mon corps enchaîné près de mon idéal,
Ne verra, oui partout, plus que la part du mal,
Et ne souhaitant plus être proie de tant de tourments,
S’efforce de mourir, cédant aux sentiments.
Ma vie ne sera plus que vestige et poussière.
Des jardins de l’Amour, restera la misère.

Scène 2
Octavie et Cordelia
CORDELIA
Madame j’avais faux et vous aviez raison,
C’est bien de la folie oui qu’est atteint Néron.
J’ai si honte ! Honte,car j’agis selon lui,
Et sais être une arme contre vous, mon amie.
Cependant je ne peux vous cacher tout cela,
Il me raconta tout et puis m’ordonna,
D’aller vous répéter l’ensemble de l’histoire.
J’en fus tant effrayée que je cherchais à voir,
Des témoins de la scène qui me fut dévoilée :
Tout ce que je vous dis est pure vérité.
Aucun complice ne reçut instruction,
De garder le secret, car au contraire Néron,
Les invita à dire ce qu’il s’était passé,
Mais nul à part l’Empereur ne savait l’entièreté
De l’horreur alors même qu’ils en étaient auteurs.
J’allais donc voir la garde, qui confirma ma peur,
Votre amant, le poète, fut arrêté hier,
Avant l’aube alors même qu’il passait la frontière,
Et par ordre impérial on le fit envoyer,
Chez le bourreau que j’ai également rencontré,
Et qui me confirma avoir décapité,
Celui que de tout cœur vous sembliez aimer.
OCTAVIE
Comment est-ce possible ? Pourquoi la vie est-elle,
À ce point atroce, à ce point si cruelle ?
CORDELIA
Attendez ce n’est tout, car de nouveau César,
Ordonna à ses hommes, ces ignobles barbares,
De découper le corps de manière à ce que
Son caractère humain s’efface peu à peu.
Il ne restait alors plus qu’un amas de chair,
Et qui fut transférée, comprenez ma misère,
Au palais, aux cuisines.
OCTAVIE
Dieux, ne me dites pas…
CORDELIA
J’en ai bien peur Madame, il fut votre repas,
Servi comme chaque jour, en cette pièce même.
OCTAVIE
Cordelia, pourquoi donc ?
CORDELIA
Mais Madame, il vous aime !
Ainsi que vous il est inconstamment épris,
De sentiments puissants, lui valant la folie.
Madame croyez bien que je regrette fort,
Ce que vous traversez. Il est vrai, j’avais tort,
L’Empereur a perdu en guerre sa raison,
Il n’est plus un humain.
OCTAVIE
Il n’est plus que Néron,
Cet ignoble monstre, n’en avait jamais eut,
Il prouve seulement son si peu de vertu.
CORDELIA apeurée
Madame regardez ! Dehors tout est à feu,
Rome semble mourir de même que vous deux.
OCTAVIE
Ainsi donc en cendres notre histoire s’achève,
Et tout Rome avec moi partage mon grand rêve.
Elle meurt de ses flammes, dans l’ardente douleur,
D’un esprit submergé par les cris et les pleurs.
Cordelia fuyez donc, il vous reste un espoir.
CORDELIA
Mais vous aussi Madame, vous avez le pouvoir,
De tout recommencer.
OCTAVIE
Non, Cordelia, ma vie,
Est déjà terminée, et je n’ai plus envie,
De souffrir encore. Je vous dis donc adieu,
Je rejoins mon Amour et exauce mon vœu.

Scène 3
Octavie et la garde prétorienne
OCTAVIE
Mon Amour est parti, mon Amour est bien mort,
Mais au moins avec lui reposera mon corps.
UN GARDE
Pour haute trahison envers Rome et l’Empire,
Vous êtes condamnée par César à mourir.
OCTAVIE sortant une dague
Je me refuse au fait de mourir de la main,
De quelqu’un que je hais et qui fait mon chagrin.
Octavie se tranche la gorge et s’écroule sur le sol.

FIN
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