Bureau du Maître du Grand Commerce et des étrangers
En premier lieu, et avant de prendre le temps de répondre à vos inquiétudes ainsi qu'à votre liste de demandes, je tenais à me quérir de votre bonne santé suite aux péripéties ayant eu lieu à l'Ambassade velsnienne de Sylva. Je peux déjà vous féliciter de l'arrestation du Sénateur-ambassadeur Toni Herdonia, dont je suis certain que les méfaits trouveront réponse dans la justice internationale. Il me tarde de voir ce jugement de mes yeux.
Ces politesses et ces félicitations exprimées, je me permets donc de me pencher sur votre lettre. En premier lieu, je tiens à tempérer le jugement que vous portez à la diplomatie étrangère de la Grande République, qui me semble largement exagéré. Aussi, je pense que vous surestimez, du moins d'après les informations m'étant parvenues, l'importance de l'OND dans les préoccupations de nos excellences sénateurs. Pourquoi la conférence de Velcal, et pourquoi plus précisément tourner un pacte de défense vers de grandes organisations internationales, ce qui inclue la très honorable Organisation des nations démocratiques ? A cela, je vous répondrais avec honnêteté et franchise, et en vous expliquant un concept omniprésent afin de comprendre la philosophie politique velsnienne: la libertas.
La libertas se présente en ces termes: les velsniens sont unis au sein d'un corps civique sacré qui est le cadre de toute leur vie politique. Nous sommes une cité d'hommes libres et de femmes libres, et par extension le corps civique doit être responsable de ses propres actions. Nous sommes libres, ce qui implique que notre gouvernement doit prendre ses décisions sans qu'une influence étrangère ne puisse constituer une interférence. Nous rejetons la tyrannie de ceux qui veulent nous gouverner en rois, ainsi que la tyrannie de toute entité étrangère à notre corps civique, sans quoi nous ne serions rien de plus que les esclaves de la fortune.
Que vient donc faire la Conférence de Velcal dans cette histoire ? Notre cité est puissante, nos navires sillonnent les océans et nos rolex s'exportent jusqu'au Wanmiri. Et nous voulons qu'il en reste ainsi. Mais nous avons conscience que les logiques de blocs peuvent faire tout basculer, et les hommes et les femmes libres entendent bien le rester. Nous ne reprochons rien à l'OND, pas plus qu'à l'ONC et au Liberalintern. Ces organisations, je suis certain, ont des buts nobles et je suis persuadé que les sylvois sont de cet avis. La faute de l'ONC, du Liberalintern ou de l'OND n'est pas de faire le mal, leur faute est d'initier des rapports de force au sein desquels les pays isolés seront toujours perdants et soumis à leurs caprices. Les excellences sénateurs n'ont pas peur de vos intentions de faire le mal, mais de votre possibilité de le faire. Et comme je l'ai expliqué: notre cité est constituée d'Hommes libres, et non d'esclaves.
Le gouvernement velsnien ne s'abaisse pas à faire de "la propagande", le gouvernement velsnien ne donne guère d'interview, ne communique pas, ne produit guère d'affiches en pointant du doigt son voisin car son but n'est pas de désigner le mal et le bien. Le Sénat parle et représente son corps civique, ses inquiétudes et des craintes, et s'assure depuis 1 300 ans que les velsniens ne deviennent pas les esclaves d'un roi ou des étrangers. Aussi, vous pourrez comprendre que je ne puis accéder à votre requête, de même que vous n'avez guère votre mot à dire sur les positions que prend notre gouvernement d'Hommes libres: en premier lieu parce que je n'en ai pas le pouvoir, en second lieu parce que je ne suis pas d'accord avec cette demande.
Dans la même ligne d'idée, les velsniens sont libres d'adhérer au parti politique qu'ils veulent, à conditions qu'ils en assument les conséquences. Vous pensez bien que j'étranglerai de mes mains les eurycommunistes si je le pouvais, mais les velsniens ont choisi d'élire 300 sénateurs du PEV. Ce parti est problématique, et nous l'éloignons soigneusement de toute forme de pouvoir. Aussi, je vous remercie de mettre de côté ce qui semble à mes oreilles être une théorie du complot qui voudrait que les velsniens républicains, libertariens et eurycommunistes fassent partie d'un grand complot visant à vous nuire. Quant à ces libertariens, ceux-ci ont dépassé les bornes, et vous serez satisfait d'apprendre que nous leur réservons de grands projets dont vous entendrez parler.
En second lieu, votre demande d'arrêt de soutien matériel. Avant de vous faire part de la recommandation que je compte faire au Sénat concernant cette demande, permettez moi de vous poser une question: est-ce que notre cité a exporté un jour des armes à destination des ennemis de l'OND ? Aussi je ne comprends pas que vous puissiez m'adresser cette demande: nous n'avons jamais eu l'intention de donner les armes qui font notre liberté à des barbares et nous ne l'avons jamais fait. A l'inverse, des pays membres de l'OND l'ont fait, eux, et je constate donc que cette organisation aurait davantage à se reprocher que nous sur ce sujet. J'accepte de transmettre cette requête à nos excellences sénateurs, mais je ne puis vous confirmer que cela aura une quelconque utilité étant donné que le problème dont vous me faites part n'existe pas.
Enfin, votre requête vis à vis de vos exportations de sucre sur le territoire velsnien. Vous n'êtes pas sans savoir notre cité pratique des taux de taxes de douane particulièrement faibles. Les produits sylvois se vendent bien et vous pouvez vous en féliciter. Mais vous voulez sans doute faire allusion aux récentes sanctions prises par le gouvernement tanskien, que nous trouvons aussi scandaleuses que vous. Nous pensons que ce genre de manœuvre constitue une enfreinte à la liberté, terme que j'énumère décidément beaucoup dans cette lettre. Aussi, je vous rassurerai en vous disant qu'il n'est pas dans le projet de taxer l'industrie sucrière sylvoise, ou vos fantastiques CD de zouk. J'accepte de faire parvenir votre requête à mes confrères sénateurs qui statueront sur votre demande. Qui sait...ils pourront peut-être même sanctionner le sucre tanskien par un malheureux concours de circonstance.
En vous souhaitant une bonne continuation dans vos tractations,
Ainsi a été fait ce courrier à la date du 7 février par le sénateur, et ambassadeur de la Grande République au pays des pyramides,
Riccardo Pedretti.