Hégémonie de la Dodécapole

Excellence sénateur et Maître,
Je viens et je t'adresse mes plus sincères embrassades, à toi qui est mon frère de Sénat et concitoyen, mais c'est avant tout en tant qu'hégémon de la Dodécapole de Dame Fortune que je viens te quérir. L'affaire qui me motive à attirer ton attention est des plus sérieuses, et je gage de ne pas te faire perdre ton temps, qui t'est aussi précieux. En premier lieu, et avant d'évoquer cette raison, j'ose espérer que nos institutions se portent bien alors que je suis absent de notre pays depuis déjà bien trop longtemps. L'affaire achosienne m'empêche de me rendre auprès de vos excellences, ce que je ressens bien évidemment comme une grande souffrance. Mais je tiens à rappeler auprès de toi que désormais, l'Achosie du Nord et ses cités semblent être dans la paix et la tranquillité, pour le moment. Je veux donc te remercier d'avoir prit la défense de ma cause au Sénat en mon absence, et j'ai conscience que je te suis redevable du renouvèlement de ma fonction.
Nonobstant, j'aimerais m'entretenir auprès de toi au sujet de cette autre affaire, qui selon moi, est des plus urgentes. Toi qui a activement participé à ma nomination à ma fonction d'hégémon, je suis venu à toi me plaindre de cette condition. Je n'exprimerai ici aucun reproche d'avoir été nommé à un mandat auquel je n'aspirais pas, et que j'ai accepté davantage par devoir que par plaisir. L'Hégémonie est une tâche dont personne ne veut s'acquitter pour beaucoup de raisons, car elle est difficile et relève du fardeau, mais je refuse d'être associé à la disgrâce et au déshonneur de rentrer en notre cité sans trophée ni gloire. Aussi, je me suis résolu à accepter ma condition, et je gage ma parole que je ne cèderai désormais en rien cette place. Cependant, ce n'est pas à raison de mon hésitation à prendre cette fonction que cela signifie que je n'en ferai rien. Il est hors de question, désormais que j'y suis, que je reste tel mes prédécesseurs, dans l'inaction et l'impuissance. Dois-je te rappeler le grand mal qui s'est emparé de certaines cités lorsque la nôtre était dévorée par la guerre civile ? Dois-je te rappeler que Volterra est dirigée par des gens qui ont pactisé avec le tyran Scaela ? Celui-là qui a sorti de force des femmes, des enfants et des vieillards de si haute naissance pour les égorger dans la rue ? Car c'est bien toujours Sal Zograno, dont je me priverais d'appeler "excellence", qui en a fait de même à Volterra, et qui administre toujours ses pauvres gens, de la même manière que Dino Scaela. Il insulte notre honneur et se moque de nous depuis son palais. Dois-je laisser ces affronts impunis ?
Volterra n'est pas la seule cité dont j'ai peur de ses actions: sache qu'aujourd'hui, un an après ma prise de l'hégémonie, je n'ai pas eu à lire une seule missive qui vienne de la cité de Cortonna, pas une seule félicitation de ma fonction, aucun cadeau ou geste d'affection. Ses dignitaires ne se sont pas rendus au Congrès, et ne m'ont pas reconnu comme protecteur d'après leur silence. Ils se terrent eux aussi, et font comme si nous n'existions pas. Si demain, je devais m'en aller faire la guerre contre des étrangers qui attaqueraient nos cités, ils ne répondraient en rien à coup sûr.
Je suis seul, je suis démuni et je n'ai pour toute armée quelques centaines d'hommes et deux frégates en mauvais état. Comment puis-je défendre les nations civilisées contre les barbares si je suis dans une telle situation ? Comment puis-je m'assurer que des sauvages ne rôdent pas les mers tels des pharosi ou des achosiens qui feraient du mal au pays, si on ne me donne même pas l'occasion de me défendre convenablement ? Comment pourrions nous tenir en honneur les velléités de Sal Zograno si nous ne pouvons répondre à son coup de force et aux conspirations qu'il fait au feu de sa cheminée ?
Aussi, mon frère de Sénat. Entends donc mes suppliques et réponds-y rapidement, car il en va de l'honneur de notre cité. Donne moi des armes, et je rendrai fier notre Sénat. Donne moi des armes, et j'honorerai la parole de l'hégémon vis à vis des cités de la Dodécapole. Donne moi des armes, et je ramènerai la tête de Sal Zograno dans un panier, dés qu'il aura sorti son venin de la cité de Volterra.
Mon frère, je ne demande pas de vider ta patrie de tout son comptant. Je ne demande rien de moins que le nécessaire et le minimum. Confie moi ce qui est nécessaire à faire agir une petite troupe, et une petite flotte. Et je te serai éternellement reconnaissant et abonné à chacun de tes actes.
Je te prie d’agréer l'expression de mes amitiés et mes affections en te souhaitant des gains financiers nombreux. Je te fais parvenir un présent en bijoux et en riches offrandes avec cette lettre, pour te porter la chance.
Ainsi a été fait ce courrier à la date du 3 décembre 2015 par son excellence Adolfino Agricola,
Sénateur et hégémon de la Dodécapole.