16/06/2013
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Rencontre Grand Kah-Velsna à Cerveteri: Intrigues de la cité sur l'eau III

Rencontre Grand Kah-Velsna: 12 juillet 2012

Drapeau

A l'ombre des oliviers, dans la cité libre de Cerveteri, la Grande puissance du Grand Kah et la Grande République de Velsna s'apprêtent à se rencontrer. A première vue, il s'agit d'une rencontre sans grande enjeu pour le gouvernement velsnien qui daigne rarement s'intéresser aux affaires de l'hémisphère sud. Mais à la demande des citoyens de Cerveteri eux-même, des représentants de Somagoumbé et de Gokiary ont été conviés à une rencontre devant formaliser leurs rapports. Soucieux de prendre le bon rôle auprès des autres cités libres qui constituent la Grande République, le Sénat de Velsna, a finalement consentit à envoyer sur place le Maître de l'Arsenal du Conseil Communal de Velsna pour représenter l’exécutif du pouvoir central.

Au delà des enjeux locaux, la rencontre a également été motivée par des querelles internes au pouvoir central. Dans un exécutif en prises à la rivalité entre le Maître de l'Arsenal Matteo DiGrassi et le Maître des Balances, Dino Scaela, ces derniers sont depuis peu à la recherche d'évènements et contacts de prestige afin de s'attirer les faveurs du Sénat. Scaela étant en train de se couvrir de gloire à Velsna en recevant la Zélandia dans un défilé somptueux, DiGrassi a choisit le décor plus sobre d'une province éloignée pour se mettre en scène, mais en présence de l'une des plus grandes puissances mondiales. Son prestige politique est donc en jeu, et de sa réussite dans l'initiation de liens avec le Grand Kah aura certainement son importance...

La délégation se compose comme suit:
- Matteo DiGrassi, pour le Sénat de Velsna
- Ricardo Pedretti, ambassadeur spécialement dépêché par DiGrassi pour l'assister
- 5 représentants du Sénat de Cerveteri, dont Pascal Andreotti, le premier magistrat de la cité
- Plusieurs licteurs, gardes du corps de la République de Velsna qui suivent DiGrassi dans ses déplacements

A priori, le début de la rencontre devrait se faire à l'Aéroport International de Cerveteri, qui toutefois est modeste de par sa dimension. D'éventuels envoyés du Grand Kah devraient s'y poser tandis que si envoyés des communes frontalières de Cerveteri il y a, ceux-ci devraient arriver dans un convoi motorisé au même point de rendez vous. La rencontre est prête...
Lorsqu'on parlait de territoires d'outre-mer à l'étranger, la principale question qui hantait les kah-tanais était de savoir si celles-là avaient un statut d'autonomie ou de colonie. De nombreux facteurs permettaient de différencier les deux, tous peu ou prou rassemblés sous des questions de répartition des pouvoirs et de l'autorité. Si aucun régime représentatif libéral n'était plus qu'une oligarchie, on pouvait tolérer de discuter avec celles-là. Si, maintenant, l'oligarchie entreprenait de se changer en empire...

Concernant Velsna, la question n'était certes pas tranchée et on savait en fait assez peu de choses de la façon dont était gérée la politique de la cité libre, quoi que son nom semblait indiquer une certaine forme de relâchement quant aux populations autochtones, lesquelles, dans une logique pan-afaréennes, avaient droit à l'attention toutes particulière des deux communes voisins. Celles-là avaient connus un parcours tout à la fois similaire et très différent en ça que rejoindre le Grand Kah avait été, pour ces territoires, une façon de préserver leur indépendance d'empires aux revendications autrement plus invasives que la bienveillance lointaine d'une Union à l'époque bien incapable d'imposer sa volonté à ses territoires d'outre-mer. La situation n'avait pas évoluée au pire et les anciennes cités libres et marchandes étaient désormais égales parmi d'autres au sein d'une structure à laquelle s'était désormais pleinement attachés les citoyens locaux.

Ainsi il existait une appréhension naturelle concernant Cerveteri. Une cité "libre" rattachée à une puissance eurysienne, qui n'avait pas fait vœux de rejoindre le Grand Kah... C'était peut-être ce qu'on ne lui pardonnait pas, dans le fond. Mais l'heure n'était pas aux décolonisations forcées, et puisque la convention avait approuvée le principe d'une ouverture de la diplomatie, il fut décidé de ne pas traîner des pieds. D'autant plus que l'allier zelandien rencontrait déjà ce régime. Peut-être que la Grand République n'avait pas à être libérée pour être utile. Peut-être qu'elle pourrait devenir une de ces puissances non-alignées ayant opté pour le camp de l'anti-impérialisme et de l'indépendance. Un nouvel allié capitaliste dans l'escarcelle d'une Union brillant par sa flexibilité.

Le Kah, ou plus précisément les communes de Somagoumbé et Gokiary, étaient représentés par un petit cortège de délégués à la tête duquel se trouvaient les citoyens Asong Sopo et Mojiz al-Makki. Une femme et un homme, noire et arabe, vêtus d'élégants costumes mélangeant les formes et couleurs des esthétiques traditionnelles de leurs régions respectives et les dernières avancées de la mode Kah-tanaise. Une modernité afaréenne assez rare tant les pays se revendiquant à la fois de la modernité et du continent étaient rares. La citoyenne Sopo avec une partie du visage couvert de piercing et de longs cheveux noirs tressés, qui pouvait surprendre de la part d'une officielle. C'était une quarantenaire sérieuse mais souriante. Le citoyen al-Makki, plus jeune et plus taiseux, portait à kufi. La trentaine, ses petites lunettes lui donnait un air d'intellectuel qualifié.

Actée Iccauthli, elle... Eh bien, il y avait deux visions du Grand Kah. Chez ceux qui ne l'aimaient pas, c'était celle d'un révolutionnaire rouge sang, brandissant un fusil et un étendard. Pour les autres, enfin, il y avait Actée. C'était une asiatique aux traits fins. De petite taille, coincée dans un costume en tissus gris légers, elle souriait peu, affichant systématiquement un air ou concerné ou pensif. Transportant systématiquement un attaché-case et un PDA tactile, elle était tout à a fois polyglotte, au point sur les théories révolutionnaires et d’une flexibilité diplomatique à toute épreuve.

Lorsqu'elle descendit de l'avion, elle lança d'abord un regard panoramique à la piste, puis vint saluer la délégation venue pour l'accueillir avant de les inviter à l'amener sans perdre de temps sur le lieu où devrait avoir lieu la rencontre. Là-bas, elle accueillis Asong Sopo et Mojiz al-Makki avec un rare sourire chaleureux, auquel la représentant de Somagoumbé répondit par une embrassade franche et celui de Gokiary par un acquiescement.

"Laissez-moi vous dire, commença Actée, que c'est un plaisir d'être ici. Il était temps que l'Union et la République entament un contact digne de ce nom."

Ses deux collègues acquiescèrent sans rien ajouter. Asong avait déjà commencée à analyser les lieux, notant intérieurement ce qui tenait de l'art afaréen ou de l'art importé, et combien de noirs et d'arabes se trouvaient dans la salle. Elle ne disait rien, pour le moment, mais attendrait patiemment son moment pour poser les pieds dans le plat. L'Afarée serait moderne et égalitaire, avec ou sans les empires.
"Êtes vous anxieux ?". La question de l'ambassadeur Ricardo Pedretti sur le tarmac de l'aéroport fit se retourner le Maître de l'Arsenal vers lui. DiGrassi était presque vexé de cette question. Il lui répondit sèchement:

- Ricardo, lorsque tu te tiendras devant le Sénat pour une séance de questions au gouvernement, alors tu comprendras ce qu'est la définition du mot "anxiété". Je préfère mille fois être ici à discuter avec des socialistes que d'être à Velsna en ce moment. Est-ce que ça répond à ta question ? Maintenant fais ton plus beau sourire et ta plus belle poignée de main. Tâche de poser des questions plus intéressantes à nos invités que ce que tu viens de me montrer.


Malgré sa réponse bravache, le Maître de l'Arsenal ne cessait de réévaluer les conséquences que pourraient avoir ce sommet. Que dira t-on de lui en cas de réussite ? En cas d’échec ? Il voyait déjà des articles dans tous les journaux de Velsna, des journalistes déversant une montagne d'encre (et de critiques) sur sa personne: "Comment ose t-il initier des discussions avec ces communistes ?". Au Sénat, il entend déjà ses collègues septuagénaires et admirateurs de son rival, Scaela s'écrier: "Regardez ! Il s'exile dans un trou au fin fond de l'Afarée pour ne pas nous faire face !". Mais quelque part, cela lui plaît, et ça l'arrange. Qu'ils critiquent, qu'ils se plaignent, qu'ils hurlent, qu'ils fassent n'importe quoi du moment que son nom reste sur leurs lèvres.

DiGrassi prend le temps de venir saluer les autorités locales de Cerveteri, à commencer par Pascal Andreotti avec lequel ils échangent quelque politesse de protocole. Si pour DiGrassi cette rencontre ne paraît que d'une banalité absolue qui a pour origine une affaire locale éloignée de Velsna, c'est pour lui le moment du siècle. Celui-ci s'était pressé d'apporter le plus fin des vins de sa cité pour plaire aux arrivants.


Par un temps doux, un avion diplomatique finit par se poser sur la piste d'atterrissage pour y rejoindre les délégations locales déjà sur place que DiGrassi a prit le temps de saluer. Sopo et Al-Makki firent grande impression à Andreotti, qui était capable de détendre une situation par sa bonhommie, d'autant qu'il connaissait quelques rudiments de langue locale qui était autant parlée à Somagoumbé qu'à Cerveteri. Ces derniers purent à cette occasion se rendre compte d'un certain manque de diversité parmi la délégation locale des sénateurs de Cerveteri. En revanche, c'était là un vrai petit choc des mondes pour le Velsnien qu'était DiGrassi. Poignée de main quelque peu hésitante de ce requin politique en costume trois pièces face à cette femme arborant ses piercing traditionnels. "Typique, j'imagine..." pensait-il.

De l'appareil surgit cette femme menue censée représenter le Grand Kah. Parmi la délégation velsnienne, DiGrassi laissa Andreotti venir vers elle en premier avec le cadeau diplomatique. Ce dernier lui serra la main sous un sourire mielleux:
- Excellence Iccauthli, permettez moi de me présenter à vous avec ce cadeau. Pascal Andreotti, Premier Magistrat du Sénat de Cerveteri. Bienvenue dans notre cité. J'espère que l'appellation d'excellence n'est pas trop présomptueuse à votre goût.

DiGrassi se joignit alors aux présentations:
- Excellence. Matteo Digrassi. Comme vous en aviez été informé, mon ambassadeur et moi-même seront les interlocuteurs de notre République auprès de vous aujourd'hui. Mes compétences vont de la guerre à la diplomatie. Je suis fort heureux que mes compétences mises à contribution aujourd'hui relèveront de la seconde catégorie. Si vous voulez bien nous suivre, notre convoi motorisé va prendre la route du Sénat de Cerveteri. Andreotti se fera sans doute un plaisir de répondre à toutes vos questions sur les lieux. Celui-ci peut très bien voyager dans la même berline que la vôtre à cette fin, si vous le souhaitez ainsi.


Les deux délégations prirent la route au travers d'une cité dont l'architecture témoignait d'une Histoire complexe et multiple. La ville avait définitivement des traits eurysiens. On avait construit là à partir du XVIème siècle une petite copie conforme de Velsna. Mais des différences notables se faisaient toutefois sentir. Par ci par là sur les façades des bâtiments, des ajouts architecturaux communs à l'Afarée que l'on pouvait aussi trouver à Somagoumbé. DiGrassi pouvait percevoir que la population elle-même n'était pas celle de Velsna, que ce soit par les attitudes, l'habitus vestimentaire ou dans sa diversité. Cerveteri était définitivement une ville cosmopolite, le reste méridional d'un ancien Empire colonial.
Actée sourit à Pascal Andreotti. Sa poigne était ferme et son sourire franc. Rien chez elle ne respirait la fausse politesse. Elle était plutôt de cette famille d'illisibles, qui cachaient leur pensée sous un air éternellement pensif, qui considéraient le moindre événement avec le sérieux procédural d'un fonctionnaire face à une situation particulièrement fascinante, sans être inextricable. Son ton, assez doux, restait celui d'une femme qui avait appris à placer sa voix. Elle acquiesça.

"Excellence est le prédicat honorifique d'usage. De vous à moi j'aurai été plus surprise que vous m'appeliez "Camarade". Mais si vous voulez faire dans le typique sentez-vous libre de m'appeler citoyenne."

Elle pivota ensuite vers le Maître de l'Arsenal, auquel elle répondit d'abord par un acquiescement.

"Avec l'Union il y a peu de chance que nous discussion jamais de guerre."

Puis elle jeta un regard aux deux représentant Afaréens, qui lui signifièrent discrètement ne pas juger utile de monter dans la berline à sa place. Une simple politesse chez Mojiz al-Makki, elle sentait cependant qu'Asong Sopo avait des attentes précises. Si la question du traitement des populations autochtones l'intéresserait à coup sûr, les représentants des deux communes noires et arabes de l'Union n'en demeuraient pas moins des membres de la confédération vouant une certaine confiance à l'efficacité du Commissariat aux Affaires étrangères et, donc, à Actée. Elle croisa les bras.

"La compagnie du premier Magistrat me conviendrait parfaitement."

Dans la voiture elle resta d'abord silencieuse, absorbant le paysage urbain avec l'air neutre d'une femme d'affaire visitant une nouvelle ville, comme si l'excitation de la nouveauté ne lui arrivait que par touches homéopathiques, tout juste de quoi infléchir, et légèrement, les traits de son visage.

"Votre République fonctionne en quelques sortes à la façon d'une Union, n'est-ce pas ? Et en qualité de cité Libre, Cerveteri est relativement libre de son destin, ou en tout cas n'est pas propriété de Velsna comme pourraient l'être d'autres territoires, c'est bien cela ?"

Elle se passa une main sur le front pour dégager une mèche de cheveux et pivota vers ses hôtes.

"En fait je me demande à quel point Cerveteri est capable d'édicter ses propres politiques car sa situation lui impose nécessairement des problématiques différentes que le reste de la République. L'architecture, détailla-t-elle avec assurance, est souvent une bon marqueur de l'Histoire. Votre belle cité reproduit une architecture continentale peut-être inadaptée au climat mais familière à ses fondateurs eurysiens. Maintenant de l'architecture afaréenne commence à apparaître sur les façades. Je suppose qu'il en va un peu de même de votre gouvernement urbain ? Il doit être encore très eurysien mais je suppose que s'il y avait des lois de ségrégations elles ont été levées, ce qui ouvre théoriquement la porte à de nouvelles populations. Bien entendu mes camarades rétorqueraient que sans mesures réparatrices, l'héritage de ceux qui ont profité d'un système raciste leur permet des générations plus tard de continuer d'occuper toutes les positions d'autorité et de pouvoir. La richesse et la pauvreté s'héritant à parts égales, cela donne souvent une situation ou les populations autochtones d'anciens empires coloniaux restent les plus pauvres et précaires des générations après la fin des législations racistes. Même sans ces législations, en fait. La simple position de colon est une position d'exploitation marginalisant par essence les colonisés, des années après la normalisation de la situation.

Est-ce que c'est un problème que rencontre Cerveteri ? C'est une question qui m'intéressait quand j'étais encore chercheuse en sciences sociales. Franchement ça semble être un casse tête, je n'ai pas encore vu de pays arrivant à réellement régler cette problématique.
"
L'escorte:

Alors de passage dans les rues étroites de cette ville, dont le plan urbain anarchique avait été façonné par les siècles et l'Histoire tumultueuse de l'endroit, le magistrat Andreotti fut le seul "velsnien" (accompagné d'un sénateur de Cerveteri) à partager la berline de la délégation étrangère. Il glissa un commentaire respirant une banalité "provinciale", voulant s'assurer de la disposition de ses invités:
- Les berlines sont de production esméenne. Nous sommes loin de Velsna et nous avons plus facilement accès aux productions afaréennes. On m'a dit le plus grand bien de cette marque alors j'ai joué des relations avec les autres sénateurs pour que la cité en commande une flotte. Elles sont arrivées juste à temps pour vous !

Andreotti fut agréablement surpris de la curiosité d'Actée Iccauthli. Il se fit un plaisir de lui répondre, avec davantage d'entrain que ne l'aurait sans doute fait DiGrassi s'il avait été à sa place. Son amabilité et son sens de la comparaison compense quelques lacunes en sciences politiques:
- Eh bien...si je devais définir la nature du rapport qui nous unit à Velsna, je dirais qu'il s'agit davantage d'une troupe de cités-états dont chacune ont un statut très spécifique par rapport à "la cité sur l'eau". Il y a Velsna, qui nous représente auprès d'autres pays et qui assure notre sécurité en échange d'une taxe annuelle, ce pourquoi la Grande République a envoyé monsieur DiGrassi. C'est...un peu comme un patron que l'on voit assez rarement pour réussir à l’apprécier. Avant votre arrivée, cela faisait 2 ans que nous n'avions pas vu un seul membre du Conseil Communal de Velsna - fait-il en plaisantant avant d'enchaîner - Ensuite il y a les cités-libres comme la notre qui ont été fondées par des colons velsniens pendant à une certaine époque et dont les institutions ont été souvent calquées sur Velsna. C'est...une réplique en miniature si vous voulez: nous avons notre propre Sénat qui peut adopter des lois dans tous les domaines sauf l'armée et l'étranger, nous avons nos propres tribunaux à l'exception des cours de dernière instance qui relèvent de Velsna uniquement. Nous disposons de notre propre citoyenneté...bref, la belle vie tant que les impôts sont payés.

Enfin, à côté des cités libres, il y a les cités de droit colonial, dont l'autonomie est réduite et qui n'ont pas le même degré de liberté que nous concernant la législation et le droit, mais je ne vais pas me risquer à expliquer leur statut en détail. Disons que l'on est une cité de droit colonial lorsque le Sénat de Velsna juge que la localité n'est pas assez financièrement viable pour mériter le statut de cité libre. Excusez moi si je ne connais pas tous les détails, il faudra discuter de cela avec monsieur DiGrassi, lui-même est natif d'une cité de droit colonial.

Maintenant que vous m'y faites penser, ce n'est pas souvent que Velsna envoie le Maître de l'Arsenal. D'habitude, c'est le Maître des Canaux qui vient nous voir, ou le Maître des Universités à la limite. Si DiGrassi s'est déplacé, c'est qu'il y a des raisons...Mais bref, passons...


Vous me posiez une question très intéressante à propos du passé colonial. La ségrégation sur base d'une hiérarchie raciste n'existe pas au sein de notre cité, et si nous avions l'idée d'en établir une, le Maître de l'Arsenal reviendrait sûrement...mais avec la Marinieri de Velsna au complet. -fait-il remarquer d'un rire nerveux - Bien sûr, il y a un héritage colonial qui pu déboucher sur un manque de représentativité des populations d'origine native qui ont longtemps étaient laissées de côté. Mais, dans le cadre de ma mandature je m'efforce autant que possible à encourager les initiatives politiques qui permettent aux citoyens de Cerveteri d'origine afaréenne afin de les élever au sein de notre système de cens électoral. De plus en plus réussissent à gravir les classes censitaires.



Pendant ce temps, dans l'autre berline, DiGrassi et l'ambassadeur Pedretti se retrouvent dans le blanc des yeux. On dirait un poisson mort, pense le Maître de l'Arsenal. Ce dernier profite de l'absence de ses hôtes du Grand Kah pour recourir à son issue de secours favorite: une cigarette. Pedretti lui demande:
- Vous pensez qu'ils se disent quoi dans l'autre voiture, Maître DiGrassi ?

- Quelque chose qui me permet de repartir d'ici avec des accords avec mon nom dessus. J'espère juste que l'entrevue de Scaela avec les zélandiens à Velsna se passe aussi mal que dans mes rêves...

Le convoi parvient enfin à la Curie de Cerveteri, petit palais dans le style gothique velsnien qui abrite le Sénat de la cité. On invite les délégués du Grand Kah à bien vouloir emboîter le pas de DiGrassi. Le contraste avec Andreotti est saisissant. DiGrassi a l'air soucieux, presque maladif. Il prend soin de jeter sa cigarette à l'abri des regards d'Actée avant de prendre la tête de la délégation. Ensemble, ils font leur entrée dans l’hémicycle du Sénat local...

Les kah-tanais étaient parfois considérés à torts comme au-delà de toute nationalité. C'est que leur idéologie même appelait à la fin des frontières au profit d'une forme nouvelle de gouvernance. Pour autant, à partir du moment où cette forme de gouvernance existait au sein d'une institution telle que le Grand Kah, et tant que cette institution cohabitait sur Terre avec des régimes plus traditionnels, il existait mécaniquement une forme de nationalisme. Celui-là était, pour dire les choses honnêtement, prévalent au sein des représentants de la "grande union". Actée elle-même considérait qu'il existait une forme d'exceptionnalisme kah-tanais. Quoi que pas pour des raisons mystiques ou intrinsèques comme certains de ses camarades les plus radicaux, mais plutôt par un hasard historique. Un fait mécanique, qui s'exprimait dans le comportement de chacun. On était tous, après tout, des produits de notre milieu. Et les kah-tanais des produits d'un Grand Kah unique à bien des égards.

Ainsi elle ne tenait pas rigueur aux pays étrangers de la décevoir, et n'avait pas les mêmes standards et attentes concernant leur ressortissant que ses concitoyens. Ce paternalisme kah-tanais, bien connu dans les cercles socialistes et un peu moins compris dans les cercles diplomatiques, participa à rendre les réponses d'Andreotti satisfaisantes. Elle ne s'attendait à rien et ne pouvait par conséquent pas être déçu de la politique potentiellement insuffisante de ces néo-colons.

Elle acquiesça à la fin de ses explications et sourit.

"Je vois." Elle aurait pu en rester là mais jugea son laconisme habituel déplacé en ça qu'il aurait pu inquiéter son interlocuteur, ce qui n'était pas son but, aussi se forçat-elle à compléter la remarque. "Merci pour ces explications. Il est bon de savoir que l'interlocuteur qu'auront mes camarades au sein de ce territoire est un homme éclairé. Cela rendra la coopération agréable."

Ses collègues afaréens n’ajoutèrent rien.

Dehors, Actée se garda bien de tout commentaire sur la cigarette du Maître de l’Arsenal. Pas qu’elle y ait particulièrement attention, mais l’odeur du tabac ne lui échappait pas. Son pays était d’un hygiénisme notoire et on y fumait assez peu. C’était une habitude qu’elle jugeait elle-même assez détestable. De façon amusante ce n’était pas le cas de d’al-Makki ou de la citoyenne Sopo. Une différence culturelle entre le Grand Kah continental et les communes afaréennes.

"Ce palais est comme une rose en plein désert," fit remarquer Sopo avant de légèrement secouer la tête. Ses deux collègues lui lancèrent un regard en coin mais n’émirent aucun commentaire. Les communes afaréennes avaient rejoint l’Union pour se prémunir des tentatives coloniales de l’Eurysie. On pouvait supposer que Mojiz al-Makki et Asong Sopo voyaient en ce palais, si beau qu’il fut, la démonstration de ce que craignaient leurs ancêtres.

Actée s'avança pour se mettre au niveau du maître de l'Arsenal.

"Vous avez déjà pensé à un ordre du jour ?"
"Curie Julia", Sénat de Cerveteri:


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A la remarque de la représentante Sopo, Pascal Andreotti eu une réponse qui laissa deviner à ses interlocuteurs qu'il n'avait probablement pas saisi le sens du propos.
- Oh. Eh bien, merci ! - rétorqué t-il enjoué, en prenant soin de s'exprimer quasi parfaitement dans la langue de Sopo -

Dans les escaliers menant à l'entrée de la Curie, DiGrassi répondit dans une concision qui ne faisait pas défaut à sa réputation (chose peu commune à Velsna, habituée à des politiciens dépourvues de laconisme):
- Premièrement excellence, nous allons laisser son excellence sénateur Andreotti dérouler son protocole. Plusieurs sénateurs vont nous attendre à l'entrée du palais et vont décider si ils veulent bien me faire entrer ou me laisser sur le pas de la porte. N'ayez crainte, c'est avant tout du folklore et du spectacle, ils ne refusent jamais. Les cités aiment bien faire valoir leur souveraineté par toute une série de "rituels". Nous avons les mêmes à Velsna. Pour ce qui est de l'ordre du jour de la négociation, je proposerais que nous laissions en premier lieu nos représentants respectifs discuter de leurs problématiques locales. Après tout, c'est la raison première de notre rencontre. Et puis Pascal parle la même langue qu'eux, la communication n'en sera que plus facile. Pour nous deux, excellence, je nous réserve la seconde partie de notre entretien: à savoir si vous êtes intéressée à l'idée de mettre en place une relation de commerce entre vous et la Grande République de Velsna elle-même plutôt qu'avec Cerveteri seulement. Je ne vous cache pas que de notre côté, nous sommes très favorables à cette perspective.

Andreotti se dépêcha de rejoindre un petit groupe de sénateurs attendant les deux délégations en haut des escaliers. DiGrassi s'arrêta fit quelques pas de plus que le reste des "invités" et se présenta devant le plus vieux d'entre eux. Le "doyen du Sénat" parla le premier comme si il tutoyait un enfant:
- Matteo, citoyen de Velsna né à Stomboli. Maître de l'Arsenal, sénateur et membre du Conseil Communal de la Grande République. Est-ce que tu promets de respecter nos institutions ?
- Je le jure. - répondit d'une traite le velsnien -
- Est-ce que tu promets de respecter la liberté de notre cité ?
- Je le jure.
- Est-ce que tu promets de défendre cette liberté comme si tu défendais celle de tes parents et de tes enfants ?
- Je le jure.
- Est-ce que tu promets d'être l'ami du peuple de Cerveteri ?

DiGrassi eu un très bref instant d'hésitation, avant de répondre à nouveau:
- Je le jure.
- En ce cas, tu es invité dans notre Sénat, Matteo.


Le Maître de l'Arsenal embrassa alors les sénateurs sur chaque joue avant d'entrer. Ces derniers firent don aux délégués du Grand Kah d'un nombre de cadeaux devant refléter la prospérité de Cerveteri. Ces derniers indiquèrent la direction du salon dans lequel les négociations devaient avoir lieu. La longue table, entourée d'une riche galerie de tableaux baroques du XVIIème siècle velsnien, devait largement pouvoir laisser coudées franches à tous les délégués. Les deux groupes de diplomates furent invitées à prendre chacun un côté de la table. DiGrassi se mit légèrement en retrait d'Andreotti et des représentants de Cerveteri. Celui-ci inaugura la réunion:
- Devons nous commencer par notre proposition d'assurer une liberté de circulation des individus entre nos communes respectives ?


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Elle écouta la réponse de DiGrassi d'un air concerné, acquiesçant à plusieurs reprises pour signifier son accord, notamment lorsqu’il fut proposé de laisser la priorité aux affaires locales. Elle laissa ensuite quelques secondes s'écouler, lesquelles furent consacrées à prendre un air pensif. Enfin, Actée acquiesça une dernière fois.

"Le commerce est le nerf de l'idéologie libérale, c'est une langue que nous avons appris à parler."

Ce qui ne devait pas particulièrement avancer son interlocuteur. En fait la décision kah-tanais était déjà prise, mais elle ne voyait aucune raison de précipiter les choses. Ou bien c'était une petite "vengeance" pour la cigarette. Un acte aussi impulsif qu’irraisonné mais qui prenait chez elle des airs de méthode. Ne l'avait on pas déjà félicité pour la justesse de décisions prises, parfois, sur un coup de tête ? Son image de calme stoïcisme la protégeait de toute critique.

Tout ça, considéra Actée, est délicieusement provinciale.

La principale ambassadrice du Grand Kah oubliait fréquemment sa formation universitaire, celle-là même qui la prédisposait à une conception assez ouverte du monde. C'était plus fort qu'elle. Parfois, les traditions l'amusaient. Pour autant le sens symbolique de celles-là était évident, et sur le plan historique au moins il devait y avoir des choses à dire et à penser. Elle n'y pouvait cependant rien. La théâtralité, en politique, lui semblait toujours osciller entre le burlesque et le nécessaire.

Asong Sopo se pencha vers son collègue afaréen.

"Nous devrions instaurer le même genre de pratique, tu ne penses pas ?
Je rêverai de laisser Actée à la porte, au moins une fois."

La concernée haussa vaguement un sourcil mais ne dit rien, les trois kah-tanais s'inclinèrent plutôt, bras le long du corps, devant les sénateurs, avant de les remercier pour leur accueil et de se diriger vers le salon diplomatique où ils s'installèrent. Actée se mit en retrait, laissant aux délégués régionaux la liberté de négocier en leur propre nom.

Mojiz al-Makki acquiesça en entendant la première proposition. Il rehaussa légèrement ses lunettes et se racla la gorge.

"Autant commencer par les choses simples : cela réglerait un problème important pour la commune de Gokiary, que je représente. Vous le savez peut-être mais notre république est installée sur l'emplacement traditionnelle de grands smalas. Si nous avons fait le deuil d'une partie de notre style de vie nomade, des traditions religieuses et pastorales poussent beaucoup de nos ressortissants à espérer pouvoir traverser votre territoire.
Et ça rendra la liaison terrestre entre nos deux communes plus faciles, Mojiz. Du reste nous pensons que la première étape pour assurer la paix est de permettre à nos peuples de mieux se comprendre, et donc de se côtoyer." Elle posa ses coudes sur la table et joignit ses mains devant elle. Sa multitude de bracelets tintèrent joyeusement. "Et à cette fin nous pensons aussi qu'il pourrait être... De bon ton d'envisager des coopérations sur les questions culturelles et matrimoines. À des fins de préservation et de sensibilisation."
Comme annoncé, Andreotti prenait la tête de la première partie des négociations.

Ce dernier était bien au fait de l'habitus propre aux citoyens de Goriaky étant donné le fait que cette commune et Cerveteri se trouvaient dans le même continuum culturel, ce qui rendait la frontière politique entre les deux localités plus artificielle qu’autre chose . Ainsi, la plupart des citoyens des deux bords de la frontière parlaient la même langue, ou presque si on excepte les habitants d'origine velsnienne de Certeteri. Le nomadisme avait définitivement disparu du côté velsnien de la frontière, mais Andreotti avait une connaissance élémentaire de ces pratiques perdues.

Matteo DiGrassi, lui, avait décroché du sujet au mot "smalas", celui-ci interpella discrètement le Premier magistrat de Cerveteri:
- Qu'est ce qu'un "smalas" ?
- Ne vous en faites pas, Maître DiGrassi, laissez moi faire. - lui répondit Andreotti -

Celui-ci reprit les propos de al-Makki, toujours avec une certaine légèreté, et le sourire:
- L'article que je voudrais vous proposer concernant le libre-passage des individus d'une frontière à l'autre serait tout à fait conforme aux pratiques culturelles de vos citoyens bien évidemment. Nous pourrions tout à fait ajouter les motifs religieux (cultuels) et culturels aux motifs économiques sur lesquels nous faisons l'emphase dans la première version de notre proposition. Une autorisation de résidence temporaire pourrait être accordée aux citoyens affaréens du Grand Kah. Il faudra toutefois que nous sécurisions un parcours migratoire qui permette aux citoyens de Cerveteri de ne pas voir leur tranquillité perturbée. Le Sénat de la cité pourrait émettre des réserves sur ce point, autant dissiper leurs inquiétudes avec une mesure dans ce sens.

En ce qui concerne des mesures qui facilitent un éventuel rapprochement culturel, j'ai déjà deux ou trois idées que notre Sénat a préparé pour vous.
En premier lieu, nous pouvons proposer un accord de libre-passage des citoyens entre nos communes pour raisons familiales. En effet, nous nous sommes rendu compte que la frontière coupait parfois des familles en deux et que la situation actuelle faisait que la procédure de passage à la frontière nécessitait une autorisation de visa ne pouvant s'obtenir qu'au cours d'un très fastidieux processus. De notre côté pour ce type de requête, nous devons actuellement en référer à l'administration de Velsna. Mais notre éloignement de la métropole fait qu'il faut parfois attendre plusieurs semaines pour espérer être en règle à la frontière.


Ensuite, une proposition plus ambitieuse et qui pourrait s'ajouter à la première serait de faciliter les échanges inter-écoles et inter-universitaires dans l'optique de cette recherche de compréhension mutuelle. Cela pourrait de notre côté enrichir le département d'études affaréenes de l'université de Cerveteri. Cela fait déjà longtemps que l'université tente de développer une meilleure manière de représenter les langues locales, notre territoire étant multilingue, c'est une problématique ancienne de notre côté. De même, une baisse des frais d'inscriptions et des dépenses universitaires pour les étudiants de Goriaky voulant effectuer leur cursus à Cerveteri est une idée que nous pouvons creuser.

En conclusion sur ce plan, nous avons de nombreux axes de travail. Il est à votre convenance d'y adhérer ou d'en proposer d'autres, excellence. Qu'en pensez-vous ?


Sur ces mots, Andreotti termina son argumentaire...à moins que les penchants bon vivant du magistrat provoquent chez lui un petit aparté de courtoisie:
- Oh. Au fait. Vous avez faim ? Voulez vous que je fasse venir les traiteurs du Sénat ?


A côté de lui, DiGrassi s'affaisse dans son fauteuil, lui et sa silhouette fine d'homme ascétique et dénué de la moindre envie de profiter de ce que propose Andreotti.
"Bonne idée !" répondit Asong Sopo. Elle frappa ses mains l'une contre l'autre. "La vérité c'est que ce dispositif de rencontre est très froid, carré. Eurysien si j'ose dire. Nous avons l'habitude de traiter avec d'autres afaréens, ou d'autres kah-tanais. Ce n'est pas tout à fait la même chose. Sans offense, c’est une question d’architecture ou de décoration peut-être. Enfin de culture." Elle cligna des yeux. "Ah, et je ne mange pas de viande.
Hm." al-Makki acquiesça sans faire de commentaire. "Notre but n'est absolument pas d'inquiéter vos concitoyens. Ces pèlerinages doivent se faire dans le respect des conditions modernes, c'est à dire de la situation urbaine et politique actuelle. Une fois les principes signés nous pourrons laisser des commissions décider du balisage afin d’établir un parcours ménageant nos besoins et votre confort."

Sa collègue acquiesça à son tour avant de reprendre.

"En général nos communes se prononceront en faveur des mesures facilitant l'obtention de visas ou organisant une forme de libre-passage. Même partielle.
Et universitaires. C'est presque un quart des étudiants kah-tanais qui partent étudier à l'étranger quelques mois ou plus, nous avons multiplié les accords à ce sujet à travers le monde.
Au sein du LiberlaIntern pour commencer. Mais des accords plus bilatéraux existent au niveau confédéral et communal. D’ailleurs communes profitent d'institutions très prestigieuses en ce qui concerne l'enseignement.
Surtout Gokiary, Asong.
Somagoumbé est trop humble." Elle haussa les épaules et s’orienta vers son hôte. "Historiquement notre ville est un lieu de passage et de refuge pour divers communautés. Dès sa renaissance la Cité libre a accueillie des madrassas soufies, des écoles juives, des fondations animistes, puis quelques sites chrétiens. Cette importante concentration de lettrés a donné lieu à la fondation d'universités qui représentent toujours l'une des forces de Gokiary.

En tout cas la commune pense qu’il faut essayer de voir plus large.

Une position que nous partageons.
Organiser des festivals culturels communs ou d’autres initiatives poussant nos populations à se rencontrer dans des cadres moins officiels pourrait aussi participer à créer un état d’esprit positif dans la région, avec tout ce que cela implique. C’est encore un simple principe mais nous pourrons réfléchir à son implication plus tard, s’il est accepté en tant que tel."
- Carré ? Moi ? Vraiment ? C'est bien la première fois qu'on dira ça de ma personne ! J'aurais pu vous recevoir chez moi si vous le vouliez. - fit Andreotti, émettant un rire plaisantin, vite étouffé par sa propre barde - Donc je résume nos points d'accord pour l'instant: création de commissions en vue de la migration des smalas, libre-passage mutuel de nos citoyens pour regroupement familial, mise en place d'échanges étudiants et enseignants inter-universitaires, baisse des frais d'inscription des grandes écoles pour les citoyens de nos communes respectives. Ai-je tout bon ?

Et oui, nous pourrions volontiers encourager de notre côté la mise en place d'évènements festifs, ceci dit nous ne ferions qu'encourager le mouvement. Ce genre d'initiative doit être du fait des citoyens à mon avis. Mais nous pourrions faciliter la création d'associations de ce type, en leur allouant un budget annuel qui sera soumis à un vote du Sénat de notre cité. Qu'en pensez-vous ?



Le Maître de l'Arsenal observait la discussion entre Soppo, al-Makki et Andreotti d'un œil curieux. La politique culturelle étatique, hormis dans le domaine des échanges universitaires, n'existe pas à Velsna en des temps habituels. La Grande République n'a jamais eu de véritable politique culturelle, ce n'est pas dans la mentalité de l'élite politique au pays de penser que l’État devrait avoir un rôle à jouer dans de tels évènements. Velsna n'a même pas de budget pour les affaires culturelles. Il est donc intéressant de voir à quel point la cité de Cerveteri, dans son autonomie, s'est adaptée aux problématiques qui se sont présentées à elle.
"Une migration ?" pensa t-il. Mais d'un autre côté, il était admiratif de la capacité d’adaptation du Premier Magistrat de la ville. Il ne le pensait pas capable d'être bon politicien, peut-être cet aspect lourdaud avait joué en sa défaveur. Andreotti devenait tout à coup intéressant. Et que penser de ces délégués étrangers ? Actée Iccauthli était en face de lui, dans le même retrait. Elle ne s'était guère dévoilée ni étalée en bavardages depuis le début de cette rencontre. Peut-être était-il temps, après les dernières tractations locales de se concentrer sur ce pourquoi un envoyé de Velsna est ici, c'était là la seule manière d'apprendre à connaître la manière dont raisonnait Actée. DiGrassi prit la parole pour la première fois depuis leur arrivée au Sénat:

- Maintenant que les problématiques locales ont été traitées, devrions nous passer aux sujets "nationaux", excellence Actée ? Encore une fois, nous avons plusieurs axes de travail dont vous pouvez nous donner un avis: le premier pas qui ne coûte rien à personne serait de procéder à la création d'une ambassade permanente dans nos États respectifs. C'est d'ailleurs la raison de la présence de notre ambassadeur, le Sénateur Pedretti ici présent. Dans un second temps, nous pourrions discuter de l'éventualité de nouer des partenariats commerciaux dans certains secteurs. La perspective d'une réduction de frais de douane ou de droit de mouillage figure dans notre liste. De notre côté, nous aurions un accès privilégié à des ports et des marchandises de l'hémisphère sud, ce qui nous fait défaut actuellement. De votre côté, en plus de bénéficier des mêmes avantages que nous, vous noueriez des liens commerciaux avec une puissance indépendante de tout bloc politique ou commercial. Car je tiens à le rappeler et cela peut constituer un avantage: nous ne sommes membre d'aucune organisation supra-nationale et avons une doctrine stricte de neutralité politique...à moins de menace directe envers nos intérêts évidemment.
Asong rit de bon cœur, tandis que son collègue se contenta d'un sourire entendu. La personnalité d'Andreotti semblait leur convenir : c'était en fait un changement apprécié des autres représentants eurysiens qu'ils avaient pu rencontrer par le passé. Généralement des impérialistes mal-dégrossis, qui se croyaient encore au temps des "aventuriers" et persistaient à avoir le même rapport avec l'Afarée que celui d'un violeur avec une femme. Le type était bourgeois, mais décent. C'est à dire que sur ce dont il ne pouvait rien - son ascendance - il était un adversaire, mais sur le reste, au moins, il faisait bonne figure. C'est tout ce qu'on pouvait attendre et demander.

Asong acquiesça.

"Oui j'oubliais. Bien-sûr que ces initiatives doivent venir des citoyens. Chez nous il n'y a pas vraiment de différences entre les comités, le gouvernement si vous voulez, et le peuple. Mais en effet. Laissons les choses se faire. Le vote d'un budget de soutien, même symbolique, devrait suffire à réveiller les volontés.
Cela satisferait pleinement nos communes," conclut le représentant al-Makki.

Actée salua la remarque finale d'un léger acquiescement de la tête, puis orienta son regard vers le Maître de l'Arsenal lorsqu'il prit la parole. Elle se redressa légèrement dans son siège, et attendit un instant avant de répondre.

"Faisons donc." Et un sourire très aimable. "Vos représentants seront évidemment les bienvenus à Axis Mundis, ou à Lac-Rouge s'ils préfèrent éviter de siéger dans la Chambre Hyper-structure. C'est là que se trouve l'administration du commissariat aux affaires étrangères, que je représente. C'est aussi là que nous logeons nos invités, sauf ceux demandant et obtenant le droit d'occuper un autre bâtiment en ville. Si monsieur Pedretti le préfère les communes devraient se montrer accommodantes et rapidement lui faire parvenir une liste d'emplacement potentiels."

Un geste de tête en direction de l'ambassadeur. Elle reprend.

"Ce que vous me proposez, concernant le commerce, est intéressant. Je pense que vous le saviez déjà, ce doit être ce pourquoi vous nous faites cette proposition et peut-être même la raison pour laquelle on vous a permis de nous rencontrer malgré la nature... Différente de nos régimes, propre à effrayer certains sénateurs, j'en suis sûre. Le Grand Kah s'est hérigé en empire commercial.

Je fais référence à l'Initiative du Collier de Perle Mondial, déjà déployée sur trois continents, et intégrant plus d'une dizaine de pays. Vous le savez. Nos réseaux commerciaux ne se limitent pas à hémisphère sud : nous avons progressivement transformé l'Union en carrefour économique central. Et en modernisant des routes, des rails, des ports, des structures énergétiques partout à travers le monde, en mettant, pour ainsi dire des régions entières à nos normes, à notre niveau technique, nous avons permis d'intensifier le commerce et d'enrichir collectivement l'ensemble de la planète.

Pour autant !
" Et elle se pencha pour saisir une tartine de houmous dans laquelle elle mordit avant d'acquiescer. "Ma foi. Je disais, pour autant vous soulignez un point important : nous ne possédons rien ou presque dans le Grand Nord. Si nous avons pu nous implanter - légèrement - en Teyla, les territoires Aleuciens, du nord de l'Eurysie et de l'Île celte ont été délaissés au profit de nos partenaires pharois et kotioïtes, notamment.

Ainsi donc oui. Le droit de mouillage nous intéresse. Et évidemment, la modulation de certains droits de douane pourrait être favorable à nos croissances respectives en nous permettant d'acquérir à meilleur prix ce que nous trouvons trop cher ailleurs, et en vous ouvrant les portes de nos réseaux. Maintenant, je me demande à quel point la République serait intéressée par la possibilité d'investissements infrastructurels kah-tanais sur son sol. Comprenez-nous bien. Votre indépendance et votre neutralité sont un gage extrêmement important à cette époque d'intense polarisation des relations internationales. Mais si nous voulons commercer ensemble, il convient sans doute que nous nous donnions les moyens d'en tirer le maximum possible.
"

Elle ménagea un silence en mordant dans sa tartine, puis se réinstalla un peu plus confortablement dans son siège, avant de sourire.

"Les traiteurs du Sénat, monsieur Andreotti, font un excellent travail. Pour autant que je puisse en juger."
"Quelle rhétorique." pensa DiGrassi, non-ironiquement. "Je suis heureux d'être mis au fait de la philanthropie du Grand Kah à échelle planétaire...cela doit être la troisième fois depuis ma prise de fonction qu'une nation dit d'elle-même qu'elle est un carrefour économique." pensa t-il, plus ironiquement.

- J'apprécie les attentions que vous accordez aux besoins structurels de la Grande République, mais j'ai appris à mon arrivée à Velsna durant mon enfance que rien n'est gratuit dans la vie, jusqu'à la nourriture que l'on trouve par terre... Ce n'est pas Velsna qui est en recherche d'investissements, ce sont les velsniens. Le République ne servira dans l'éventualité d'investissements du Grand Kah sur son sol, que d'intermédiaire entre votre gouvernement et les acteurs privés velsniens. Acteurs privés très intéressés, tant à l'idée de recevoir des investissements à Velsna que de découvrir ce..."Collier de perles mondial" et "l'enrichissement collectif". Pardonnez moi si je fais une digression, mais étant donné que vous avez l'air intéressée par d'éventuelles opportunités commerciales en hémisphère nord, je me permets de vous expliquer.

Il prend le soin de choisir une pomme dans le panier que le traiteur a préparé à cette effet, et de la croquer avant de dérouler son explication du système économique velsnien:

- Le cadre économique de Velsna est totalement libre, à l'exception du besoin de s'entendre pour un éventuel arrivant du Grand Kah avec les entreprises déjà existantes dans le secteur concerné. C'est ce que l'on appelle des conventions: l'entreprise arrivante doit s'accorder avec ses concurrentes sur un marge de prix acceptable et sur les frais de main d’œuvre, ce dans le but de ne pas déstabiliser le marché existant. Tous les secteurs obéissent à ce principe élémentaire, et la République n'intervient que pour faire respecter ce statut-quo. Vous n'avez donc en théorie pas besoin du moindre accord de notre part pour investir. En revanche, les entreprises qui contactent directement le Bureau du Maître des Balances pourraient se voir bénéficier d'exemptions de taxes d'exploitation et de contacts précieux quant à une implantation. C'est cela que nous pouvons négocier aujourd'hui. Et dans l'idéal, nous nous attendons à un juste retour des choses quant à des supposés investissements velsniens au sein du Grand Kah.

Et puis, sur le plan diplomatique cela sonnerait comme un bon signal supplémentaire envoyé aux membres du Liberalintern dont vous faites partie. Nous avons déjà un traité d'alliance militaire avec la Zélandia, et nous nous apprêtons à débuter des tractations avec le Pharois. Neutres, mais pas isolés. Nous adresser à vous, et commercer avec vous sur un pied d'égalité semble à ce titre être logique du point de vue diplomatique, en plus d'être un facteur de croissance économique supplémentaire. D'une pierre deux coups, comme on dit.

Pour répondre à votre curiosité quant à l'intérêt de commercer avec vous, j'ai plaisir de constater que vous êtes consciente que votre forme de gouvernement et d'organisation de l'économie n'est pas au summum de sa popularité auprès des membres de notre Sénat. Vous avez tout à fait raison: la partie du Sénat la moins alerte voudra ma tête lorsqu'ils verront les termes de notre accord s'il est conclu. Mais moi ce que je vois c'est de l'argent. Et l'argent n'est pas capitaliste, pas plus qu'il n'est socialiste. L'argent, c'est l'argent. Ce que je vois, quand je regarde cette délégation hétéroclite en face de moi, c'est un partenaire économique potentiellement fiable qui comporte dans ses pays partenaires des nations avec lesquelles nous avons déjà ce type d'accord.

Ravi que nous soyons en accord sur le droit de mouillage et la modification de droits de douane sur certains produits. Sinon, j'aurais voulu savoir. Comment s'organise les activités commerciales et industrielles au sein du Grand Kah ? On a prit le soin de me l'expliquer, mais dans l'idéal, j'aimerais l'entendre de vous. Quelle est votre perception, à vous, et rien qu'à vous, de votre système économique ?
La kah-tanaise s'était légèrement penchée en avant pour écouter la réponse de son interlocuteur, souriant ou acquiesçant doucement à certains moments - notamment lorsqu'il fut question d'un retour d'ascenseur en cas d'accords, ou d'argent. Elle faisait face à un homme politique qui avait la décence de jouer cartes sur table, ou au moins de présenter les choses d'une façon suffisamment brutale pour créer une sensation d'honnêteté. Les subtilités de la politique républicaine lui échappaient encore malgré les excellentes fiches de synthèses fournis par ses aides, mais elle considéra platement que quiconque avait décidé de pousser son pays à faire affaire avec l'Internationale méritait sinon de la sympathie, une forme de soutien. Impossible de savoir s'il avait placé tous ses œufs dans ce panier. Improbable. Mais il fallait tout de même considérer l'hypothèse. Le pousser à le faire si possible, ou nécessaire. Puis le protéger. Les positions que semblait défendre le Maître de l'Arsenal en faisait un investissement à part entière.

"Comme je le disais à l'instant, le libéralisme est une langue dont nous avons appris les finesses : d'autres vous répondraient sans doute que les produits de nos investissements sur vos territoires sont un retour bien suffisant en ce qui vous concerne. Fort heureusement nous ne sommes pas l'ONC." Elle sourit. "Si nous savons très bien quels avantages apportent de meilleures infrastructures, et ce pour toute l'économie, il semble évident que toute aide de la république aurait droit à une réponse des plus considérée de l'Union. Pour autant le champ de cette aide resterait limité. De façon pas tout à fait incomparable à la République, la Confédération n'a qu'un contrôle partiel et lointain sur son économie. Celle-là est, comme tout le reste, le fait des citoyens."

La citoyenne ménagea un silence durant lequel elle sembla réfléchir, puis se pencha en avant levant son index.

"Vous savez, on a tendance à croire que l’anarchie c’est le chaos. Ce n’est pas le cas. L’anarchie c’est l’ordre sans l’autorité. Et nous aimons ce qui est organisé, ou se pense clairement. C'est pourquoi votre avarice est salutaire : elle est lisible, elle a du sens, elle s’inscrit dans une logique claire. Je l’apprécie énormément.

Le Grand Kah, lui, ne cherche pas tant l’argent que sa juste répartition. Nous créons de la prospérité moins comme une fin mais comme un outil. Cet outil n'est pas au service des plus riches, qu'on les considère naïvement comme les plus méritants ou, plus prosaïquement, comme les maîtres du jeu, en fait il n’y a même pas de "plus riches". Notre économie sert toute la communauté qui la produit. Ce qui fait de nous, je suppose, de doux rêveurs.

Certains pensent aussi que parce que nous ne permettons pas la formation d’une élite économique, nous nous opposons à toute forme de liberté des acteurs économiques. C’est un contre-sens dans lequel sont éduqués des milliards d’âmes, je suppose. La vérité c’est que l’économie est politique, et au Grand Kah la politique est l’affaire de tous. Notre économie est coopérative. Chacun doit répondre aux besoins de l’ensemble et tous collaborent à cette fin. Les syndicats et compagnies se développent selon les commandes et besoins des communes, les instances se coordonnent entre elles grâce aux informations récoltées par les commissariats, chaque citoyen est libre de son artisanat ou de se lier à d’autres pour fonder une coopérative. Ceux qui travaillent dans les usines et les ateliers, dans les sociétés de service ou de recherche, sont ceux-là même qui participent aux comités communaux. Là ils peuvent défendre leur travail, obtenir des financements communautaires pour étendre leur activité, ou croître par le mécénat d’une clientèle dépendant des chèques dédiés à la consommation de luxe. Tout ceci vise l’abondance. L’abondance et le maintien de notre démocratie.

Cela soulève maintenant la question des investissements étrangers. Ils se négocient avec les acteurs économiques et politiques communaux et intercommunaux. Des fonds étrangers peuvent intégrer notre économie, si façon superficielle, et profiter de la rente excédentaire. Je crois qu’on peut dire qu’investir au Grand Kah c’est prendre le risque de gagner moins de plus-value qu’ailleurs. C’est vrai, si l’on s’en tient à ça on fait cependant erreur. Nous taxons peu, la taxation n’a aucun sens dans un régime économique où tout est propriété commune et l’acquisition de bien mesurer par d’autres moyens. Nous avons parmi les meilleurs ingénieurs, chercheurs, techniciens et cadres du monde. Parce que nos travailleurs sont heureux et libres ils travaillent vite, bien. Mieux qu’ailleurs. On ne vient pas investir au Grand Kah pour y ouvrir une usine de vêtements, on y vient pour ouvrir des laboratoires, des sites de production de micro-composants. Nous laissons de nombreux économistes perplexes. Quand ceux-là comprendront que notre Union est là depuis deux siècles et que son modèle fonctionne, ils prendront peut-être le temps de revoir leurs thèses.
"

Elle fit claquer sa langue contre son palais.

"Notre économie est aussi une économie de guerre, car nous sommes un pays continuellement assiégé. Cette économie est donc solide. Pensée pour l’être, en tout cas. La part économique visant la croissance et celle visant à maintenir la qualité de vie de nos concitoyens sont séparées, fermement. Tout ce qui vise à produire du consommable, de l’essentiel, doit pouvoir se produire par des moyens locaux eux-mêmes autonomes. Tout ce qui produit du luxe, ou de la richesse dédiée à être réinvestie dans des programmes confédéraux accessoires ou l’augmentation des moyens de productions essentiels, peut se sourcer à l’étranger ou via des industries locales elles-mêmes dépendantes du monde économiques extérieur.

Ce secteur, le plus sensible aux crises, pourrait s’effondrer du jour au lendemain sans emporter l’autre. D’ailleurs il l’a fait, il y a à peine plus d’un an maintenant. Plus de 30 % de notre industrie s’est effondré suite à une grave crise chez nous fournisseurs en Eurysie du nord. Savez-vous comment l’ont vécu les kah-tanais ?
"

Elle marqua un temps de latence, puis sourit.

"Comme une victoire. La crise qui aurait ruiné d’autres nations, si l’on s’en tient aux chiffres du PIB, n’ont ni vidés les assiettes, ni privés les foyers de chauffage, de lumière, ou même encore de loisirs. Il y a eu du chômage, mais nous étions préparés à prendre en charger et à redéployer les travailleurs désœuvrés, à répartir la charge de travail comme il se devait. Et depuis l’économie s’est relancée. Cette crise terrible n’a été qu’une courte parenthèse qui, pour autant que les citoyens aient été concernés, n’a fait qu’effleurer leur existence. Le miracle économique enclenché après la reconstruction des années 90 continue de porter ses fruits. Nous voilà plutôt chanceux.

Donc j'ai tendance à estimer notre économie solide, démocratique et à la pointe. Bien-sûr, je représente l'Union. Il est peu probable que j'en dise spontanément du mal. Mais notre régime est matérialiste au moins pour l'essentiel. La question de la richesse et de sa production est au centre de ses préoccupations et de ses améliorations. C'est un système qui ne fait que s'améliorer, c'est peut-être la seule chose qui mettra tout les kah-tanais d'accord.

Et pour le reste je crois seulement que l’on peut dire qu’elle suit des principes de libre-marché, si encore chaque entreprise était propriété à part égale de l’ensemble de ses membres. Cette description vous semble-t-elle éclairante ?
"

Elle croisa les jambes et releva légèrement le menton, avant d'afficher un sourire presque ironique.
- Votre exposé est fascinant, excellence, et il satisfait pleinement ma curiosité.

DiGrassi remet la pomme qu'il avait entamé dans le panier que le traiteur se dépêche se reprendre dans son sillage.

- Peut-être un jour seront nous en accord avec le but de la croissance économiques et de la prospérité dans ses aspects philosophiques et sociaux. Pour l'instant ne c'est pas la cas, mais comme je vous l'ai dit, c'est bien le dernier de mes problèmes. En tout cas, vous avez rendu le fonctionnement interne de votre nation beaucoup plus intéressant qu'il ne l'était à mes yeux au départ de cette discussion. Et je suis sûr que les acteurs économiques velsniens seront tout aussi satisfait que moi s'ils auront un jour le plaisir de constater par eux même le bilan que vous dressez. Je pense que nous savons ce que nous avons besoin de savoir, assez pour vous proposer le premier rendu de notre travail de coopération. Riccardo, peux-tu me donner le nécessaire ?

L'ambassadeur Pedretti s’exécuta promptement. Il fit glisser sur la table son dossier, lequel figurait le brouillon d'éventuels accords en première page. DiGrassi reprit:

- Voici un premier jet. Libre à vous de demander la renégociation ou la modification de certains points que vous trouvieriez trop flous.


Matteo DiGrassi a écrit :
Accords de Cerveteri




Préambule :
Par ce présent traité, les représentants des Communes Unies du Grand Kah et de la Grande République de Velsna s'engagent à respecter les termes suivants pour une durée indéterminée dans un esprit de coopération et de concorde:



Article 1 :
Les communes de Somagoumbé, de Gokiary et de Cerveteri s'engagent à émettre des garanties de libre-passage dans les conditions suivantes:

- A titre temporaire dans le cas d'évènements culturels et religieux et ce pour toute la durée des dits évènements.
- Dans l'optique d'assurer le regroupement familial à l'échelle des trois communes, l'obtention d'un visa ou d'un passeport national affilié à la République de Velsna ou au Grand Kah ne sera plus nécessaire pour le passage des frontières des communes de Somagoumbé et de Gokiary. Seul un justificatif d'identité et de regroupement familial restera exigé et délivré par les entités communales.
- Dans le cas du travail trans-frontalier, l'obtention d'un visa ou d'un passeport national affilié à la République de Velsna ou au Grand Kah ne sera plus nécessaire pour le passage des frontières des communes de Somagoumbé et de Gokiary. Seul un justificatif d'identité et de travail restera exigé et délivré par les entités communales.

Article 2 :
Dans le cas particulier de la conservation des modes de vie nomades et autochtones, les trois communes mentionnées dans l'article 1 seront tenues d'assurer financièrement la bonne logistique et la prise en charge de tels évènements dans le cadre d'une commission inter-communale.

Article 3 :
Les établissements scolaires et universitaires implantés sur le territoire des trois communes mentionnées dans l'article 1 s'engagent à aligner leurs éventuels frais d'inscription et de scolarité, s'ils existent, sur le traitement des élèves et étudiants natifs de ces communes. L'accès aux filières et écoles de leurs nations respectives sur le plan financier et culturel doit être facilité.

Article 4 :
Les établissements scolaires et universitaires implantés sur le territoire des trois communes mentionnées dans l'article 1 s'engagent dans la création d'un programme commun d'échange étudiant et enseignant.

Article 5 :
Les trois communes mentionnées dans l'article 1 s'engagent à dégager un budget minimal alloué à la création d'évènements culturels inter-communaux, tout en encourageant la création d'associations citoyennes capables d'assurer l'animation et la bonne tenue de ces dits évènements.

Article 6 :
Les Communes Unies du Grand Kah et de la Grande République de Velsna s'engagent à l'ouverture de relations diplomatiques officielles et de représentation diplomatique dans un esprit de concorde.

Article 7 :
Les Communes Unies du Grand Kah et de la Grande République de Velsna s'engagent à imposer une baisse de l'ordre de 15% au droit de mouillage de tout navire civil de l'autre partie. Le pourcentage peut être ultérieurement soumis à négociation et modification suivant l'évolution du contexte économique des deux parties. Dans le cas où les deux parties ne parviendraient pas à dégager un nouvel accord, le dit article deviendrait caduque.

Article 8 :
Les Communes Unies du Grand Kah et de la Grande République de Velsna s'engagent à la baisse de droits de douane de certains types de produits, suivant des négociations ultérieures et les besoins qui seront adressés par les ambassadeurs des deux parties respectifs. L'article 8 servira ainsi de base légale de travail pour les dits représentants.

Article 9 :
Les Communes Unies du Grand Kah et de la Grande République de Velsna s'engagent à promouvoir pour leurs acteurs économiques respectifs, un climat positif qui permettrait la bonne implantation et l'activité de ces derniers sur le territoire administré par l'autre partie.

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