La gestion démographique du pays a fait naître une crise sociale sans précédent sur le (petit) territoire de la Satrapie de Bina. Et c’est bien cette crise sociale qui inquiète tout particulièrement les acteurs économiques dont une partie d’entre eux serait aujourd’hui susceptible de rediriger ses capitaux en dehors de la Satrapie. “Les citoyens les plus aisés de Bina n’accepteront pas tous de payer pour l’intégration de 200 000 réfugiés dans leur province. Une arrivée massive qui entraîne, rappelons-le, un accroissement de la population locale à hauteur de 133%” confie le politologue Erfan Riahi pour marquer la gravité de la conjoncture actuelle au Varanya. “C’est un cercle vicieux où la crise sociale inquiète les milieux économiques, qui peuvent se détourner du pays et in fine aggraver la misère sociale qui s’y trouve…” Et même lorsque les capitaux ne sont pas exfiltrés du pays, ils sont à minima exfiltrés du circuit économique, le principe d’une épargne que des ménages n'hésitent plus à stocker sous les matelas selon l’expert. “Si l’identité nationale faite autour de la Satrapie de Bina s’effondre, ce sont les banques, la monnaie qui y a court qui s'effondrent aussi…” Citant les différents rapports régionaux sur la situation démographique de la Satrapie, la qualité de vie des réfugiés varanyens présents là-bas et plus récemment l’ampleur des manifestations sociales qui se déroulent localement, le politologue Erfan Riahi continue d’alerter sur la criticité d’une crise économique majeur qui n’a pas encore dit son nom. Selon lui, il est encore difficile d’estimer, compte tenu de la situation politique locale et de l’absence de données économiques fiables sur la Satrapie, les sorties d’argent effectuées par la classe moyenne et aisée de Bina. La misère s’est faite une place qui n’a jamais eu son pareil à l’intérieur de la Satrapie.
Directement liée à la hausse de 133% de la population locale, la pauvreté fait également peser des risques sanitaires graves parmi les populations, des risques sanitaires qui sont autant de facteurs anxiogènes pour les classes modestes et aisées. “Plus de 50% de la population de l’île sont logés dans des abris de fortune aménagés par le gouvernement local, qui n’avait manifestement pas anticipé un tel afflux de populations vers son territoire. Quel pays dans le monde enregistre également de tels résultats? Que ce soit dit de façon claire et intelligible pour chacun: aucun pays dans le monde après la Satrapie de Bina enregistre un parc immobilier déficitaire pour 50% de sa population…” Si la situation dans la Satrapie de Bina est une chose, celle dans la République du Varanya en est une autre et contribue activement au déplacement des capitaux vers cette région. “Il y a au Varanya de nombreux besoins en investissements pour la reconstruction du pays, les terrains sont vendus contre une bouchée de pain sous réserve que les acquéreurs présentent une ébauche de projet industriel ou commercial… Si des capitaux doivent quitter la Satrapie de Bina, il n’est pas déraisonnable de penser qu’ils vont être redirigés vers la République du Varanya, car c’est là-bas que l’investissement risque d’être le plus prometteur. Par ailleurs, n’oublions pas que si l’identité nationale autour de la Satrapie de Bina s’effondre, la monnaie locale ne vaudra plus rien. Aussi, si les acteurs économiques présents à Bina veulent conserver la valeur de leur capital, ils doivent sortir d’une épargne au format monétaire et l’investir dans des projets économiques ou immobiliers…”
Une projection confirmée par la recrudescence des investissements étrangers au Varanya avec pour 60% d’entre eux une origine afaréenne, notamment issue de la Satrapie de Bina. La République du Varanya cumule simultanément une situation politique en voie de stabilisation et des opportunités économiques réelles pour qui souhaitent s’investir dans le pays, il est donc tout à fait logique de constater que les capitaux binans mais aussi étrangers, partent là où leurs détenteurs se sentent le plus en sécurité et jouissent d’une certaine visibilité quant au devenir de la région.
Cette situation est de nature à inciter à une large contribution des acteurs économiques binans dans la relance économique du varanya continental où les projets d’investissement peuvent se multiplier, indépendamment du contexte démographique, social et humanitaire présent dans la Satrapie. La récente ouverture de négociations diplomatiques entre la Satrapie et la République est de nature à rassurer les habitants de l’île mais également à mettre en lumière la reprise économique et la stabilité politique croissante du Varanya. “La coopération entre Bina et le Varanya n’a pas vocation à tirer la première vers le haut, puisque celle-ci viendra mettre en relief les premières institutions démocratiques de la région sur les cinquante dernières écoulées. Un modèle de démocratie et des perspectives d’avenir qui vont immanquablement séduire certains des citoyens de Bina ayant les moyens de retourner dans la République.
L’appauvrissement de la Satrapie de Bina, sur les plans à la fois culturel par sa rupture historique avec le Varanya, mais aussi économique et militaire, est à même de faire fuir les classes moyennes et aisées d’un pays qui n’est plus identifiable à proprement parler. La Satrapie de Bina rompt avec le Varanya dont elle est le fruit historique, elle vient dépendre militairement des forces armées cémétéennes et voit son économie à genoux par la sortie brutale d’un tissu industriel varanyen et l’arrivée de flux migratoires non maîtrisables, autant de signaux qui permettent de passer les indicateurs au rouge lorsque les intellectuels, scientifiques et penseurs présents dans la Satrapie, doivent s’interroger sur leur avenir possible sur l’île de Bina…
Après la fuite des capitaux, c’est donc également la fuite des cerveaux et intellectuels qui est à craindre, inquiétés par le déclin général qui sévit sur tout le pays et sa dépendance croissante à l’étranger, synonyme flagrante d’une perte de souveraineté que la Satrapie espérait pourtant instaurer par sa sécession au territoire varanyen. Soheila Gankhaki, sociologue nous prévenait sans détour “la guerre et le conflit armé sont en effet des périls notables pour la région de Bina mais ils ne sont pas plus probables et pas plus dommageables, qu’une crise économique et sociale inédite pour l’Afarée orientale…” Le départ des intellectuels et des capitaux feraient 800 à 1 000 fois plus de dégâts à l’économie de la Satrapie que ne le ferait un conflit armé entre républicains et loyalistes, fut-il étalé sur plusieurs années. “L’arrêt des exportations pétrolières, ok, le déroulement de combats armés dans les principaux centres urbains du territoire ok, mais la fuite de ceux qui seront à même d’investir dans les projets économiques (actionnaires et autres investisseurs économiques) ou à même de donner une plus-value à ces investissements (acteurs de la recherche et du développement, cadres dirigeants), cela serait clairement fatal à la Satrapie sur 10 voire 15 ans, le temps de former les futures générations et de réformer le pays pour maintenir ces dernières sur le territoire…” Compte tenu de la situation présente et des perspectives économiques ainsi que sociales dans la Satrapie, il est acquis aux experts interrogés sur le sujet que les strates de la société parmi les plus éduquées de Bina, quitteront nécessairement l’île, au profit de la République naissante qui leur fait face de l’autre côté du détroit.