Rencontre Diplomatique Sylva - Royaume de L'ARCHE

Le trajet de Sylva à l'Arche se fit en à peine deux heures par avion, les deux pays étant presque frontaliers. Le manteau de nuage ne fut aucunement une gêne pour les pilotes, habiles à la navigation aux instruments, doublée de l'appui des opérateurs de la tour de contrôle.
Une fois l'avion posé, la Duchesse en émergea, vêtue de son style traditionnel héritant d'une hybridation des modes sylvoises et eurysienne il y a bien longtemps. Elle fut agréablement surprise d'entendre si bien joué l'hymne de sa nation, hymne qu'elle appréciait pour toute la symbolique historique. Elle trouva l'air un peu frais, mais pas assez pour enfiler son manteau qu'elle laissa à un majordome l'accompagnant à sa droite. A sa gauche la suivait deux autres hommes, son conseiller et un diplomate.
Malgré son apparente fragilité du haut de sa soixantaine d'années, elle répondit à la poignée de main avec une fermeté mesurée, franche sans être écrasante, brièvement sans être précipitée. En un mots comme en cent, elle savait serrer des mains, ce qui aussi idiot que ça en a l'air n'est pas une chose acquise par tous le monde.

-Bonjour, monsieur le Président. La voyage s'est très bien passé, et il n'a pas eu le temps d'être fatiguant. Il faut dire que s'il n'y avait pas les montagnes, un chemin de fer en ligne directe aurait été envisageable et tout à fait raisonnable en termes de durée.

Elle jeta un coup d'œil à l'orchestre.

-Ce séjour commence très bien, vous pourrez féliciter de ma part vos musiciens. L'attention portée à mon arrivée me donne confiance pour la suite. Allons y sans attendre, je vous suis et suis impatiente d'en apprendre plus sur votre pays.

Alexanda n'appréciait pas particulièrement les journalistes, du moins pas dans les bains de foule de cette façon. Toutes ses expériences dans ce contexte étaient les mêmes : elle ne pouvait rien dire de concret, et les propos étaient détournés faute de pouvoir être exprimés en profondeur. Et de toute façon, les journalistes dans les bains de foule cherchent juste le sensationnalisme, autrement ils l'inviteraient sur un plateau pour discuter de façon posée avec des experts sur place pour confronter ses dires.
Mais elle était dans l'Arche, peut-être ces journalistes étaient plus professionnels, et que la culture médiatique locale était plus constructive ? "Peu probable", songea-t-elle, mais elle se plia à l'inéluctable exercice. Mieux valait que ses propos soient déformés, plutôt qu'elle vexe les archéens et que son refus de s'exprimer soit décontextualisé. D'une voix suffisamment forte et articulée pour être audible malgré l'éventuel bruit ambiant des journalistes, elle prit la parole.

-Nous allons avec le gouvernement de l'Arche discuter de grandes choses. Nul doute que d'ici la fin de la semaine, l'Arche et Sylva s'entende sur de nombreux points.

Elle ne s'attarda pas plus, ce n'était pas le moment pour. Et de toute façon cela lui demandait un trop gros effort de supporter dans ces conditions les journalistes, quand bien même elle se maîtrisait parfaitement en ne laissant rien paraître.

Une fois arrivée au palais royal, elle parcoura du regard les différents membres de la famille royale en prenant le temps de mémoriser le nom de chacun. C'était un certain effort, d'autant quand les noms diffèrent de ceux auxquels elle était habitué, mais là encore son expérience de Duchesse l'avait exercé à retenir rapidement des individus importants.
Elle s'inclina poliment.

-Bonjour à tous, vous me faites part d'un honneur réciproque avec cet accueil. C'est avec joie que je visiterais avec vous les jardins.

Alors que la petite troupe nobiliaire entamait la marche, elle entama des sujets anodins pour faire la conversation.

-Le nom Boisderose, avec la plupart des noms en référence aux arbres, datent d'un peu après la colonisation de Sylva par des expéditionnaires eurysien. Mes ancêtres ont été fascinés par les forêts et les arbres exotiques, et par divers processus, les dynasties se sont composées ont adopté des noms y faisant référence. C'est sans surprise que ma dynastie s'est formée par des individus vivant dans une forêt riche en bois de rose, essence de valeur très prisée.
Le nom de votre dynastie a t'il lui aussi une signification particulière ?

Après avoir passé quelques minutes pour se refaire une beauté, la Duchesse se joignit au déjeuner. Gourmande, elle ne manqua pas d'exprimer son appréciation du repas avant de poursuivre la discussion. Il était à noter que son ton avait changé, bien que toujours aussi clair et articulé, il était subtilement devenu plus "relaxé" sans pour autant perdre de son formalisme.

-Oui, vos quartiers sont remarquablement à mon goût. J'ai pu y installer mes affaires et ne doute pas un instant que je le m'y plairais le temps de mon séjour. Et oui, nous sommes très fiers en Sylva de nos spécialités gastronomiques. Pour vous donner des exemples, nous avons le colombo de cabris ou de poulet, qui est une façon de cuisiner la viande avec du curry et du riz. Le riz est très par chez nous, maintenant que j'y pense. Il y a le riz djon djon, cuisiné avec un champignon en particulier. Ou encore le riz et haricot rouge, simple mais très apprécié. Et du côté des boissons, nous brillons pour notre rhum et toutes ses formes.
Au-delà de l'aspect culinaire, nous avons pas mal d'autres spécialités. D'un point de vue industriel, nous nous spécialisons dans l'aéronautique et faisons de grands progrès dans le domaine. Sur une note plus artisanale, le travail du bois a une grande histoire avec de nombreuses traditions venant avec.

Elle continuait de discuter entre deux bouchées du repas (qu'elle appréciait beaucoup).

-Je me permettrais d'acheter une bouteille de vin avant mon départ, afin de ramener une petite spécialité archéenne. Saurez vous me conseiller sur le choix à faire ?

Alexandra fut parfaitement satisfaite de ce repas, discutant avec son altesse de ti-punch et nourriture. Il y eut des discussions plus techniques, mais en surface faute d'expertise approfondie de la Duchesse, concernant la gestion de l'eau.
Elle fut aussi contente de se faire offrir le vin, car après tout elle en rêvait mais n'avait pas osé par politesse le dire tel quel. Elle avait qui plus est accepté les deux invitations, de visiter la cave à vin et de participer à la réunion familiale du dimanche.
Avant que la visite ne débute, elle fit un tour à ses appartements pour quelques détails, avant de rejoindre le roi.

Comme beaucoup de sylvois, Alexandra répugnait le béton mais aimait la pierre (pas autant que le bois). Cette allée antique empreinte de traditions et d'histoire avait donc sans surprise de quoi la séduire. Elle se laissait bercer par la visite, écoutant Enriqué conter l'histoire des lieux dans ce monument de souvenirs, imaginant en détail les scènes qui s'y étaient jouées.
Ce n'était pas une fanatique du vin, contrairement au rhum qui lui devait être presque aussi apprécié que le bois en Sylva, mais elle cette bouteille lui plu à un degré surprenant. Elle qui pensait en emporter avant tout pour ses prochains invités diplomatiques, voilà qu'elle en prendra sans aucun doute pour sa consommation personnelle.

-C'est remarquable comme goût. Étrange comparaison, mais celà m'évoque la première fois que j'ai goûté du chocolat à la fleur de sel. "Mélanger chocolat et sel ? Quelle idée !" m'étais-je dis, avant d'apprécier profondément cette saveur. C'est pareil ici, cet arrière goût iodé relève les saveurs du vin.
Mais vous avez raison, il ne serait pas sage de goûter à tout en une soirée, autrement les escaliers nous sauteront au visage si je puis dire.

Poursuivant la discussion, elle se laissa accompagner par le roi à la sortie pour se reposer un instant et profiter d'un moment à elle avant le dîner du soir.

Alexandra se livra pleinement aux festivités, écoutant les orchestres, se servant généreusement au repas, et se livrant même à un (court) exercice de danse. Elle ne connaissait pas les danses locales et préférait éviter de se livrer à une maladresse qui donnerait à manger aux journalistes (quand bien même ils ne semblaient pas présents sur place).
Par contre, la nourriture, elle ne s'en privait pas : cespatcho, cazuela, curanto, leche assada, il n'y a pas une étape sur laquelle elle se cacha d'être gourmande, appréciant manger chaque plat nouveau. Cela en rendait impressionnant sa silhouette qui était pourtant bien svelte, rien ne laissait témoigner un tel appétit.

-J'ai un peu appris sur le Tournkitouki-tournkitouka en survolant votre histoire pendant mon voyage. En effet, c'est un sport qui a particulièrement l'air de différer de ce que l'on voit habituellement. C'est avec plaisir que je serais présente, pour rien je ne manquerais ça.

Elle assista aux festivités jusqu'à la fin, quand bien même on voyait l'effort qu'elle devait déployer vers la fin pour tenir sous la fatigue. Fort heureusement pour elle, elle n'avait pas abusé des cocktails autant que des plats, autrement l'effort aurait été impossible.

La Duchesse se leva d'excellente humeur bien qu'un peu fatiguée par la soirée de la veille. Elle compensa ça avec un jus bien énervé de gingembre citron et se présenta, radieuse, au roi pour la visite de la journée.

-Bonjour excellence, oui, la nuit fut parfaite.

Tout en suivant son hôte, elle poursuivait la discussion.

-Le dispositif de sécurité est tout naturel pour un chef d'État, mais est ce qu'il y a des risques particuliers hors normes ? Je veux dire, en Sylva par exemple, les gens ne sont pas violents envers ma personne dès qu'ils en ont l'occasion, mais une frange de la population avec des idées collectivistes n'hésiteraient pas un instant pour se manifester. Comme je l'ai dit, rien de violent, mais je me prendrais un jet de farine si jamais je venais à me promener seule dans la rue. Les sylvois ont du caractère et cherchent en permanence à s'affirmer, qu'ils soient collectivistes, capitalistes ou monarchistes.

Elle se laissa ensuite porter par l'ambiance et l'environnement, couplée aux commentaires d'Enriqué sur l'eau. Frileuse, la duchesse tressaillit rien qu'à l'idée de se baigner dans l'eau froide. Et quant au marché, c'était un régal pour elle. Elle insista pour tarder un peu, choisissant longuement un bijoux qui lui conviendrait. Si les vêtements en laine de lama étaient communs en Sylva, ce n'était pas le cas du lapis-lazuli. Elle fit donc une petite folie et s'offrit un bijoux sertie d'une belle pierre "exotique".