Ville d'Aenbecan]
Vendredi 15 janvier 2006
[Régie Nationale des Installations portuaires d'Aenbecan]
Une des affiches du syndicat Dilseachd qui avaient pullulé et qui désormais étaient visible sur chaque mur de chaque maison Aenbecan, malgré les campagnes d'arrachage systématique du gouvernement local
Cela faisait des jours voire des semaines que la contestation sociale impulsée et animée par le syndicat des dockers le fameux Dilseachd secouait toutes les couches de la société damann, et plus particulièrement les classes populaires et les familles d'ouvriers, à la fois encensés par la propagande communiste, et méprisés par les instances dirigeantes et les officiels du parti, considérant les "cols bleus" comme une main d'oeuvre laborieuse, dont le premier devoir patriotique consistait à obéir, et dans un second temps à être corvéable à souhait.
L'ex-bastion libéral, le dernier à être tombé dans l'escarcelle des Milices Rouges, avait toujours été réfractaire à la prise de pouvoir du Parti Rouge, et nourrissait un ressentiment assez tenace, considérant, à juste titre, que la faction socialiste avait trahit ses anciens alliés lors de la dissolution du front démocrate.
Depuis la fin de l'année 2005, les grèves générales à répétition s'étaient intensifiées, ainsi que les marches pour les droits civiques qui s'étaient multipliées, et ne se cantonnaient plus aux centre-villes et régions urbaines, dont la population plus éduquée et industrieuse était plus sensible aux questions économiques. Non désormais la grogne et la contestation touchaient désormais les campagnes environnantes bien que les causes sous-jacentes soient différentes.
En effet, les paysans s'étaient vus confisqués de larges portions de leurs terres ancestrales, pour la plupart héritées des traditions féodales. Et la terre où reposaient les ancêtres de ces familles de cultivateurs, pour certaines centenaires et s'étalant sur plusieurs générations, avaient une signification et un impact spirituel et religieux provenant des croyances druidiques et celtiques que les Rouges avaient sous estimé.
La Confédération Générale Paysanne de la Province de Caodaig avait décidé d'apporter son soutien unilatéral et inconditionnel à Dilseachd, par solidarité, et parce qu'ils étaient las d'être harassés par les plans quinquennaux et autres quotas de production agricoles inatteignables et irréalistes fixés par les Commissaires aux Plans, fonctionnaires notoirement corrompus, dont le seul but était de plaire et de s'attirer les faveurs du Comité Central de Baidhenor.
Ce vendredi 15 janvier avait été désigné comme la journée de marche pour la revendication des droits civiques et sociaux de tout le Sud de la Damanie. Le syndicat Dilseachd avait réussi l'exploit de fédérer et de rallier à sa cause les innombrables fédérations et associations syndicales de Caodaig et de Aenbecan, et avait à force de persuasion, de lobby, et de pression finalement obtenu le droit de manifester et de marcher, depuis le centre-ville de la cité portuaire, de la Place des Martyrs de la Révolution, jusqu'aux docks principaux du port industriel, devant le quartier général de la régie des chantiers navals. Les autorités du Comité Central probablement préoccupés par la venue de nombreuses délégations étrangères en leur capitale, avaient très probablement sous-estimé l'adhésion populaire du syndicat Dilseachd, pourtant considéré comme d'obédience socialiste, qui cristallisait l'angoisse et la frustration de la population sud-daman, qui endurait mille privations et pénuries tout en subissant une forme de discrimination voir de persécution des autres factions et communautés du Daman. En effet, les sud-daman avaient toujours été perçus comme des contre-révolutionnaires ou des foyers contestataires, raison pour laquelle un important contingent de soldats stationnait dans la garnison militaire à l'extérieur de la ville, à l'Ouest, non loin des quartiers dits populaires, qui avaient toujours été perçus par le pouvoir central comme potentiellement contestataires.
À la fin de l'année 2005, 29 barricades avaient été mises en place par des membres du syndicat Dilseachd, et notamment par ses sections de jeunesse, de jeunes ouvriers pour la plupart âgés de 16 à 18 ans, pour empêcher l'accès à ce qui était connu comme le Free Aenbecan, un pâté de maison séparant le centre-ville du quartier ouvrier. 16 d'entre elles étaient impraticables, même pour les véhicules blindés des milices rouges. Le vendredi matin, le leader de Dilseachd, Aiden Fearghaíl , avait multiplié les appels au calme et à ne surtout pas provoquer les forces de sécurité et les milices rouges, qui s'étaient déployées dans la ville, notamment aux ponts d'accès principaux, et dans certaines rues adjacentes à la Place des Martyrs de la Révolution. Sur un camion, ce dernier prit un mégaphone, et s'adressa à une foule toujours plus nombreuse et compacte.
Aiden Fearghaíl : "Camarades, je vous demande instamment de marcher pacifiquement, et de ne pas céder aux provocations des Rouges. Personne ici ne veut d'un conflit, nous devons montrer à toutes les nations étrangères actuellement réunies à Baidhenor, que non, la population du Daman n'est pas entièrement soumise à l'auto-proclamée première consule, que non, le peuple n'a pas renoncé à ses libertés et ses aspirations pour plus de justice sociale, mais de grâce, je vous demande de ne pas lancer la première pierre ! Nous avons obtenu le droit de marcher, je vous demande de suivre l'itinéraire prévu et de ne pas perdre de vue le véhicule de tête du cortège".
A 11heures, alors que la foule prit la direction du port, tout en scandant "NOUS SOMMES LE PEUPLE, NOUS SOMMES LE PEUPLE !", des manifestants avaient prévu de marcher vers l'hôtel de ville Aenbecan, qui avait été sécurisé par la milice, et était solidement défendue par la police locale, qui avait pris soin de disposer sacs de sables et mitrailleuses lourdes, afin de dissuader tout assaut frontal.
Cependant, les Milices Rouges, qui avait clairement pour objectif de mater le mouvement de contestation sociale, avaient sournoisement conçus des "checks points" afin de modifier le parcours, et rediriger le maximum de manifestants vers le Free Aenbecan Corner, une partie du vieux quartier adjacent au centre ville, faits d'impasses et de rues sinueuses. Un groupe d'adolescents se sépara du cortège principal et tenta de franchir le check-point pour marcher vers l'Hôtel de Ville, ce qui avait été anticipé par les autorités communiste. Une bande de jeunes arrivèrent au niveau de la barricade tenue par la Milice Rouge, qu'ils commencèrent à attaquer avec des pierres. À ce stade, un canon à eau, des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc furent utilisées pour disperser les émeutiers. Ces affrontements entre les miliciens et les jeunes étaient peu intenses et s'étaient jusqu'à présent limités à quelques provocations, mais cette fois, un seuil avait été franchi.
A 13 heures, le cortège était désormais divisé en deux manifestations distinctes. La plus importante, la manifestation principale suivait le trajet initial, tandis que le seconde manifestation, majoritairement composée de jeunes se retrouvait prise en tenaille entre les milices et leurs propres barricades.
A 14h retentit le premier coup de feu, semblant provenir des rangs des manifestants, auquel répliqua presque immédiatement et sans sommation aucune le feu des forces de sécurité de la ville, appuyées par les fanatiques des Milices Rouges.
La secrétaire de la sous-commission inter-syndicale Aisling Leary, qui avait été séparée du groupe principal par inadvertance, continuait à haranguait les manifestants :
Aisling Leary : "Pas de panique, ils tirent des balles en caoutchouc, gardez votre calme et dirigez vous vers le port".
Mais lorsque les premiers corps s'écroulèrent, et que des cris d'effroi retentirent, un indescriptible chaos s'empara de toutes les personnes présentes dans les rues.
Aisling Leary : " Oh mon Dieu, ils tirent à balles réelles, FUYEZ "
Une effroyable et indiscible confusion régnait alors parmi les manifestants qui fuyaient et couraient dans tous les sens.....les fumées des grenades lacrymogènes ajoutaient à l'atmosphère suffocante et apocalyptique du centre ville d'Aenbecan, dont les murs résonnaient des détonations et des tirs d'armes automatiques.
Un journaliste du "Lofoten News" se trouvait parmi les manifestants, et malgré les risques, prit soin de réalise run maximum de photographies de cette sanglante journée.
Des agents du FSD, en civil, se trouvaient également dans le cortège de tête, aux côtés des leaders syndicalistes de Dilseachd. Si les rapports d'activité et de surveillance avaient fait état de tensions importantes et d'envie manifeste de la jeunesse d'en découdre avec les autorités, ils n'avaient clairement pas anticiper de tels évènements.
Toutefois le Chief Executor avait été clair dans ses directives : pas d'interaction avec la population, ni d'intervention directe. "Observation, repérage, identification, prises de contacts," voilà le périmètre du mandat de mission qui avait été assigné à la branche Damann du FSD.
À 16 h 00, l'état major du Daman autorisa à entrer dans le Free Aenbecan Corner pour y rétablir l’ordre selon le vocable officiel, ce que les soldats traduisirent sur place par abattre les éléments subversifs et potentiellement hostiles. La première victime, fut Jackie O'Donnell, une riveteuse de 19 ans du chantier naval, surprise parmi la foule qui s'enfuyait. Elle courait aux côtés d'un étudiant-infirmier, lorsqu'elle fut abattue dans le dos. Ce dernier, Aethan Conegan, tenta de lui prodiguer les premiers secours et de la ranimer en vain.
La poursuite des violences par les troupes communistes s'intensifia et finalement l'ordre fut donné de mobiliser les troupes dans une opération d'arrestation des manifestants pour "troubles à l'ordre public", "rébellion", "sédition" et "atteinte contre l'état". Tous ces synonymes et prétextes fallacieux dont seuls les communiste sont le secret pour étouffer et neutraliser toute opposition.
A 18h, le commandant en chef des forces de police d' Aenbecan proclama un ordre de cessez-le-feu, alors que plus d'une centaine de cartouches furent tirées directement dans la foule par les troupes sous le commandement des Milices Rouges, les véritables donneur d'ordre, qui n'avaient cure de leur "image" à l'international.
Douze autres personnes furent tuées, et beaucoup d'entre elles tentaient d'aider celles déjà tombées sous les balles. Quatorze autres furent gravement blessées, douze par des tirs de soldats et deux renversées par des véhicules blindés.
Une ambulance a également été ciblée et criblée de balles sans que la provenance des tirs ait été formellement identifiée.
Bien entendu les autorités du daman prirent grand soin d'étouffer l'affaire et confisquèrent tous les appareils photographiques et caméras qu'ils purent trouver, mais ne purent empêcher la diffusion de certains clichés et témoignages, qui diffusèrent, certes lentement mais surement, parmi la population de la sud-damanie.