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Activités étrangères dans l'Empire Listonien - Page 16

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logos des services secrets alguarenos et du Clan saadin kodedan.

30 novembre 2007 - CONFIDENTIEL - Le Kodeda, un territoire gangrené, un territoire corrompu.


Zone aéroportuaire kodedane
Les zones aéroportuaires kodedanes, théâtres de guerre d'influence pour le clan Saadin.


Les luttes de pouvoirs sont nombreuses au Kodeda et chacune des factions en présence positionne ses pions avant de se heurter aux intérêts rivaux. Lorsque le Consortium kah-tanais mise tout sur des routes terrestres dans le nord du pays, le clan Saadin positionne quant à lui ses pions auprès des infrastructures aéroportuaires, considérant celles-ci comme la seule bouée de sauvetage d’un territoire reculé et esseulé, l’unique atout économique réellement impactant pour inscrire durablement le Kodeda au sein du concert des nations de ce monde. Et pour rallier des atouts à leurs sphères d’influence, les moyens déployés par l’une ou l’autre des factions restent sans limites : actions de sabotage, manœuvres de corruption, infiltrations militaires, recherches de capitaux, acquisitions notables dans des filières stratégiques pour l’économie locale, etc…

Si les affaires de corruption n’éclatent pas au grand jour dans la province ultramarine du Kodeda, il est pourtant avéré que celles-ci ont pris de l’ampleur avec le déclin de l’Empire listonien. Ralentissement économique, inflation constante, le repli de l’Empire listonien sur sa métropole a largement pénalisé les provinces ultramarines impériales, déjà lésées par la diplomatie étrangère exécrable entreprise par l’Empire, auprès du Jashuria, de l’Alguarena, du Lofoten, de Saint-Marquise, du Pharois Syndikaali à une époque… En résumé, la diplomatie étrangère listonienne de l’’époque s’est volontairement heurtée à toutes les nations pouvant s’inscrire dans le paysage économique direct des plus grandes colonies listoniennes. Et quand la situation économique d’un territoire se dégrade trop fortement, les gens cherchent des compléments de revenus, des économies souterraines et in fine, des substituts à l’ordre établi. Particuliers ou fonctionnaires, aucun n’échappe alors à ces contraintes économiques quotidiennes, se heurtant à la nécessité de flirter avec les codes de déontologie auxquels ils ont précédemment aspirés, leurs préférant un franchissement de ligne rouge prospère, pour asseoir plus solidement un train de vie nécessaire dans ces régions en perte de vitesse, où plus aucun complexe industriel ne souhaite s’implanter, la compétitivité de territoires flirtant entre 0 et -10.

Les investissements nécessaires à l’implantation d’un complexe industriel au Kodeda sont en moyenne 2 à 3 fois supérieurs à ceux attendus pour installer la même entreprise, la même affaire, en Alguarena ou au Grand Kah. Dans ces conditions, il est facile d’imaginer le déclin économique rencontré dans les colonies et la dégradation notable des conditions de vie des populations ultramarines.
Des situations économiques désastreuses où une partie des habitants finit par tirer son épingle du jeu en passant le pied au dessus d’une ligne rouge, d’abord des douaniers et transporteurs qui récupèrent une partie des marchandises en transit pour les revendre à la sauvette là où elles peinent à arriver d’ordinaire, puis vient la corruption des nécessiteux au profit de ceux qui détiennent le pouvoir, des policiers à qui l'on dit de fermer les yeux sur un évènement précis, en échange d’un pécule supplémentaire à la fin du mois, des hommes politiques dont la patte accepte volontiers d’être graissée pour permettre l’installation de business lucratifs et clandestins, entièrement affranchis des impôts et ne rognant ses marges qui pour satisfaire un ou deux hommes politiques nécessaires à l’éloignement des contrôles administratifs ou policiers, sur une zone donnée.

Désormais, cette tendance sera plus que jamais confirmée au sein des infrastructures aéroportuaires, à cause des nouveaux besoins affichés par les factions en présence, désireuses de s’opposer les unes aux autres, pour incarner la nouvelle dynamique économique, commerciale et même pourquoi pas politique, du Kodeda décolonisé. Artère économique de taille au Kodeda, la zone aéroportuaire du pays est un enjeu capital dans l’approvisionnement du pays en matières de besoins nationaux, le trafic commercial maritime ou aérien permet effectivement de toucher des fournisseurs plus éloignés, et donc objectivement, de comparer à travers un large choix d’entreprises exportatrices, celles qui satisfassent au mieux les besoins nationaux kodedans.

Outre l’aspect lucratif que peut représenter la mainmise du Prince Mutarrif ibn Saadin sur ce secteur d’activité parmi les plus prospères de la région, le clan Saadin vient également durablement poser le pied dans l’ouverture de la porte d’entrée au Kodeda, en installant localement, un réseau clandestin indispensable à l’entrée (ou la fuite) clandestine des hommes et moyens nécessaires à l’exercice d’un certain contrôle du pays.

Les sociétés et les administrations en charge de la gestion des infrastructures aéroportuaires deviennent alors des cibles privilégiées, autant pour les manœuvres de corruption exercées à l’encontre des hauts fonctionnaires qui en gèrent le fonctionnement, que pour le positionnement clé que souhaite entretenir le clan Saadin dans son réaménagement. En remportant l’appel d’offre pour réaménager la zone aéroportuaire kodedane, le clan Saadin vient effectivement s’offrir toutes les cartes en main, pour aménager des structures appropriées au passage clandestin de matériels, d'hommes et de femmes entrant dans sa sphère d’influence. La corruption de hauts fonctionnaires locaux, mêlée à sa participation active dans le réaménagement des zones aéroportuaires régionales, offre à ce jour un poids supplémentaire au monarque renégat, se promettant de vaincre ou périr, eu égard à l’opportunité unique qu’a le territoire, de recouvrer une indépendance pleine et entière, comme il en a plus connu depuis plusieurs centaines d’années.

Les conseillers du Prince qui sont entrés dans la confidence, son cercle restreint, avaient loué une équation parfaite, entre la sympathie recherchée auprès des seigneuries de guerre mandrarikanes, à même de fournir une main d’oeuvre combattante ou non, de façon quantitative, alors que la Brigade du Jaguar Paltotterran, serait elle capable de fournir des moyens militaires percutants, pour ne pas dire hautement qualitatifs, au clan Saadin, exposé à un gouvernement impérial listonien soucieux de remilitariser la région.
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Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


Déploiement de la Garde Communale : le commerce est désormais sûr, mais pour combien de temps ?

Selon le Commissariat, il s'agit d'une opération coordonnées avec les efforts listoniens, et s'effectuant en toute transparence avec le gouvernement de l'Empire. Quelles conclusions tirer d'un tel délitement sécuritaire aux portes de l'Union ?

Hélicoptères rentrant de patrouille

C’est un spectacle désormais fréquent dans cette région de l’Afarée : des hélicoptères marqués du blason des chevaliers, quittant les bases fortifiées du sud de Goriaky pour escorter les convois commerciaux reliant ses communes au reste du continent. Un spectacle d’autant plus étonnant que jusqu’à très récemment, ces communes étaient réputées pour leur tranquillité, véritable havre de paix dans une Afarée systématiquement en proie aux ingérences impérialistes et aux humeurs des seigneurs de guerre.

Le sujet a été rapidement évoqué lors du seizième congrée pan-communal afaréen du cycle : les communes en elles-mêmes ne sont pas menacées, et toute cette opération répond à des objectifs sécuritaires visant à éviter qu’elles le soient. C’est tout le principe. Car selon les stratèges de l’Union, le risque pour la région est dangereux. D’autant plus qu’il est désormais documenté, et que les sources présentées par les différents acteurs socio-économiques de la Corne Afaréenne ne laissent aucun doute : on vise directement le commerce communal.

On est pas sans savoir, à condition de s’intéresser à la situation de la région, que la principale source d’instabilité s’y trouve être la province du Kodeda. Confetti de l’ancien empire Listonien, conservée dans le giron eurysien par la force des armes, et sans qu’aucun investissement économique ou véritable projet de civilisation n’y soit mené. Comme à l’accoutumer venant des empires, le Kodeda est moins une province qu’un territoire otage, ayant servis pendant des années un rôle d’esclave dans la famille impériale, systématiquement pillé de ses ressources par les industriels blancs en vue d’enrichir une métropole. On connaît les caractéristiques vampiriques des empires coloniaux, et on sait précisément dans quel état détestable ils laissent leurs territoires soumis. La situation de l’Afarée post-coloniale en présente encore les innombrables stigmates et le Kodeda, véritable anomalie historique, n’est jamais qu’une prolongation inutile de ce viol territorial. Les populations locales sont privées de leurs droits, de leurs ressources, de leurs terres et de leur avenir. La situation, cependant, n’avait jamais présenté d’instabilité. Si le Kodeda était un mouroir, on y enfermait pas des malades contagieux. Son caractère détestable n’entraînait pas d’instabilité régionale. Tout au plus, une stagnation économique totale liée à l’absence de volonté politique impériale et de moyens entre les mains des peuples autochtones.

Ce qui a évolué, donc, c’est que l’Empire a décidé de se reprendre en main. Plus précisément, le changement de politique affiché par la Listonie a fait face à la vague de sécession ayant effrité son influence internationale. Outre les indépendances pacifiques, faites sur l’autel de la négociation et de la paix, Porto Mundo, Port Hafen, on peut aussi noter l’exemple réellement déclencheur du Pontarbello, envahi par l’Alguanera en avant-garde de sa nouvelle politique ultra-impérialiste (exprimée à travers les états vassaux de l’ONC comme expliqué dans notre édition de Mars), ou de Jadida, libérée à l’aide de puissances régionales et se construisant depuis une identité Afaréenne libre.

Ces indépendances en appelant d’autre, la Listonie s’est armée du bâton et de la carotte, dépêchant au Kodeda un contingent militaire conséquent et essayant de négocier avec les caciques locaux en vue d’obtenir une paix sociale. Cette stratégie, vouée à l’échec, oublie que la paix ne se crée par du sommet vers la population, mais doit s’obtenir par la population. Population, donc, qui rêve d’indépendance.

La question de l’instabilité régionale est intimement liée à ce dernier point. En effet, parallèlement à la montée en puissance des envies indépendantistes, deux importants acteurs régionaux sont apparus au Kodeda. En premier lieu, Mutarrif ibn Saadin, héritier de sa famille et chef de clan. Prince auto-proclamé de la région, cet homme est porteur d’un projet d’indépendance sous une forme théocratique et communautariste favorisant les valeurs vieillis. Confondant tradition réaction, il porte un projet ne laissant aucune place au monde moderne dans le Kodeda, et favorisant la création d’une énième société de caste qui ne changerait en rien la donne pour les habitants de la province, qui passeraient de la soumission à la Listonie à la soumission à une quelconque famille d’héritier. En opposition au prince se trouve le Parti de l’Indépendance Kodedarienne. Coalition des principaux mouvements démocrates, indépendantistes, socialistes et nationalistes de la région, le PIK porte un projet d’indépendance démocratique, définitivement moderne et ouverte sur le monde, cherchant avant tout à répondre aux besoins des classes économiques les plus en difficulté.

Un troisième facteur important à prendre en compte est la création par un consortium industriel international d’un grand projet d’investissement cherchant à redynamiser la région pour en faire un marché commercial moderne, investissant partout où l’Empire s’est avéré absent au fils des années : soit dans l’infrastructure, l’éducation, les services en tout genre.

En ce qui concerne le Grand Kah, c’est ce Consortium qui importe : ses investissements incluant entre-autre plusieurs grands groupes Kah-tanais et faisant appel à une main d’œuvre qualifiée issue des commuens Afaréennes pour remplir les postes de cadres et d’ingénieurs du projet d’infrastructures. De plus, cette « grande route », pour reprendre le nom qui lui a été donné, devra à terme relier le Kodeda aux territoires voisins – communes Kah-tanaises comprises. C’est ce projet qui, aujourd’hui, est mis en danger.

La situation sécuritaire a commencé à se déterriorer en fin août 2007. On se souvient effectivement qu’en parallèle des discours extrêmement agressifs de Mutarrif ibn Saadin, plusieurs témoignages et rapports de police révélèrent la menée d’opérations de repérage extrêmement grossière par les hommes de main du soi-disant "prince ". Ces barbouzes furent ainsi repérés à proximités de sites sensibles. Prisons, centrales électriques, postes de police, etc. À la surprise générale, l’Empire Listonien, pourtant soucieux de tenir la région et de ne pas laisser l’instabilité se répandre, n’offrit aucune réaction à ce qui compose pourtant l’avant-garde d’une prochaine action dont on imagine déjà la teneur.

Dans les jours qui suivirent, on put remarquer que la garde rapprochée du pontife évolua, se professionnalisa, notamment via l’arrivée de mercenaires étrangers. Ce fut plus ou moins à ce moment que la situation dégénéra pour de bon : des mercenaires du même ordre furent en effet repérés à proximité des principaux axes routiers régionaux, et lancèrent plusieurs attaques contre les convois marchands essayant de quitter le Kodeda. Ces mercenaires mandrakiens, payés à grands frais – à trop grands frais, en fait, pour les moyens réels du prétendu prince, qui n’est probablement que le pion d’une instance étrangère – commettent depuis forfait sur forfait. Des informations déjà révélées par nos confrères Kodedariens prouvèrent de façon irréfutable la proximité du prétendu prince et des mercenaires. Ces hommes, payés pour massacrer les kodedans et mettre un terme aux tentatives des habitants de la province d’obtenir leur indépendance économique, loin des intérêts de caste des grands seigneurs traditionnels, le furent par cet homme qui prétend diriger la région. Cet homme, donc, qui a le sang du peuple sur les mains, et plus directement encore sur la plupart des grandes pontes de son genre.

Là encore, et à la surprise générale, l’administration militaire listonienne ne fit absolument rien pour arrêter le problème à la source. Malgré les preuves de l’implication directe du prince dans ces assassinats, témoignant de sa volonté de contrôler l’essentiel de l’économie régionale et d’utiliser de tout les moyens – y compris les plus meurtriers – pour protéger sa position, la justice Listonienne, totalement inféodée à la couronne impériale, n’a pas daignée agir. Alors même que l’occasion lui était donnée d’éliminer un homme ayant déjà menée des actions hostiles contre ses intérêts, d’éliminer cet homme qui s’exprimait jusqu’à peu contre la couronne, avec une virulence pleine de l’audace de ceux qui se savent des maîtres puissants et capables de le protéger.

Aujourd’hui nous ne pouvons tirer de la situation qu’une seule conclusion : il y a entre Mutarrif ibn Saadin et l’administration impériale une collusion inquiétante. L’armée Listonienne ne se déploya pour défendre les habitants du nord du Kodeda qu’avec un long, terriblement long temps de latence et, selon nos sources au sein des Comités, qu’après une demande officielle de l’Union d’agir. En effet, plus que des kodedens, ce sont aussi des hommes du Grand Kah qui sont morts. Tout de même, ce déploiement militaire repousse pour l’heure le danger représenté par les mercenaires, et s’organise en parallèle à une opération kah-tanaise. C’est aujourd’hui sur la base d’une forme cordiale d’entente que nos hommes et ceux de la Listonie sécurisent l’intérieur et l’extérieur des frontières, et assurent pour de bon que le commerce ne soit plus menacé par les tueurs d’un théocrate aux velléités royales.

Côté Kah-tanais c’est un imposant dispositif qui a été mis en œuvre. On note en premier lieu l’envoi de drones, parcourant la région pour suivre les déplacements des forces mercenaires et repérer leurs bases, qui sont ensuite la cible d’assauts d’aviation ou d’hélicoptères de combat. Des opérations rapides et chirurgicales visant à éviter la confrontation directe et à assurer la destruction de toutes les bases des mercenaires. Parallèlement à ça, un contingent de blindés rapide a été monté de façon à pouvoir intervenir où nécessaire le long des axes commerciaux, déjà protégés par l’action de l’aviation qui assure qu’aucune approche ne soit possible pour les mercenaires.

La menace est donc écartée pour le moment. Le cœur du problème, cependant, demeure. Ces patrouilles ne sont qu’un palliatif et il faudra qu’une décision soit prise par la justice listonienne, si elle souhaite réellement protéger la région et ses habitants.
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Le Photographe

Samir est un photographe indépendant. Comme beaucoup dans sa profession, il a toujours été d’un naturel assez libertaire. C’est la raison même pour laquelle il fait ce métier. Capturer des images, librement. Il est encore jeune. A son âge on ne peut pas parler d’un homme bien installé, même s’il commence à prendre des habitudes et qu’il a ses entrées çà et là. Les photographes dans son genre sont branchés. Parfois huppé – pas lui. Il est partout chez lui, caméléon social, on l’accepte dans les lieux les plus privés, jusqu’aux réceptions des hommes les plus secrets. Mais ça reste un garçon des rues. De cette mouvance presque, je-m’en-foutiste. Cette universelle jeunesse du vingt-et-unième siècle. Cette jeunesse qui a compris que le monde continuerait d’aller mal, d’empirer, parce que les leviers du pouvoir sont aux mains de ceux à qui profitent le crime.

C’est comme ça. On y peut rien et tout le monde le sait. L’autorité, cette saloperie d’autorité, ce sont les mêmes riches, puissants. Hommes politiques, industriels, dévoreurs qui profitent de tout ce qui tue la planète, la région, puis les gens. La misère, le travail à bas coût. Travail d’esclave qui ne dit pas son nom. Tout ça pour permettre la production en masse de biens de consommations, conçus dès le début avec des failles, une obsolescence programmée assurant le retour du client. Samir se souvient, un petit con, étudiant en droit. « Et tes appareils, ils viennent pas du travail d’esclave ? C’est curieux quand-même, de critiquer le capitalisme et d’acheter des trucs. » Et toi, gros fils de pute. Tu aimes le travail d’enfant ? C’est ton kiff ? Est-ce que ça te fait bander de les imaginer se saigner les mains sur les ateliers, crevés dans les tunnels des mines artisanales ? Non ? Tu serais plutôt contre, pas vrai ? Alors pourquoi ton téléphone, ton ordinateur. Parce qu’on ne peut pas faire sans. Tout est pourri sur toute la ligne. C’est comme ça. Samir repense aussi au quartier où il a grandi. Un coin de Nasabis qui a des canaux. Pas le truc charmant comme on en trouve à Fortuna, non. Des canaux d’écoulement d’eau. Installés pour permettre aux usines situées plus au nord de se délester sans trop de problème. Comme on est dans une région "pauvre", tout le monde s’en fout de la santé des gens. C’est aussi vrai dans les pays riches, les pauvres sont des citoyens de seconde zone. Ils n’ont aucun droit et on se branle de ce qui leur arrive – sauf officiellement, car il faut préserver les apparences. Alors ici, les canaux sont pleins de cette eau dégueulasse, rejetée par les usines, crachées sous une forme toxique qui empoisonne les familles. Démultiplication des cancers, des bébés manchots, difformes, des maladies rares. Les gens meurent, mais ce n’est pas bien grave. Ces gens n’ont pas de voix. Ils ne comptent pas. Parfois quelques médecins pratiques des autopsies des morts. C’est rare, mais ça arrive. C’est ironique mais quand ça arrive, les pauvres trouvent enfin une voix. Le post-mortem de leur carcasse révèle les réalités de leur vie. Microplastiques dans les poumons et le ventre, les boyaux en morceau, les artères bourrées de merdes toxiques. Crevés du trop plein de pollution atmosphérique, aquatique, aérosol. Tout.

On dit qu’il est pus simple d’imaginer la fin du capitalisme que la fin du monde. En société néolibérale, estime Samir, c’est tout à fait vrai. On est dans cette espèce de réalité alternative où le monde ne saurait exister qu’en profitant du travail d’esclave, de la mort. Où chaque homme, chaque femme serait obligé d’avoir le sang de centaines d’autres sur les mains pour s’habiller, se déplacer, manger. C’est ridicule mais les gens y croient parce que ceux dont la voix compte profitent du confort de vie, s’offusque à l’occasion pour faire bonne figure, et que les autres, eh bien, ils sont muets, après tout. Ou bien n’ont pas la tête à pensée à ça. Le système néolibéral est de toute façon très bien fait. On traite de rebelles, d’anticitoyens ceux qui essaient de s’exprimer sur les réalités du régime cannibale. Ils peuvent s’exprimer dans les limites de la légalité molasse qu’on leur tend, mais ce n’est jamais le moment. Il n’y a pas de bon moment pour critiquer le système. Le faire au mauvais moment revient à s’exposer au tabassage en règle. La police, outil de contrôle absolu. Une armée de porc employée à loisir pour rosser les crétins qui ont cru bon de se dresser contre le bain de sang. On arrêtera pas le massacre, il est bien trop rentable. C’est désespérant, et il est impossible de ne pas ressentir de la haine. Sauf bien entendu à ne rien ressentir du tout. À regarder passivement le sang couler dans les canaux, et à traiter les morts, les mutilés, les massacrés comme des statistiques. Ils ne sont pas humains, de toute façon. Ils sont pauvres, ou étrangers, ou séparatistes. Et tu en connais, Samir, de meilleurs systèmes ? Samir, pourtant, est sûr qu’on peut imaginer un système qui ne survivrait pas en changeant quatre-vingt-pourcent du genre humain en bagnard. Il déteste tout ça. Il se sent impuissant, et sait qu’on ne peut pas agir dessus. Il n’y a pas de révolte qui vaille. S’opposer dans les limites du système n’y changera rien, et celui-là est si doué pour assimiler les contre-cultures qu’à terme, toute révolution est impossible. Le néolibéralisme, vraiment, s’éteindra quand il aura fini d’étouffer le monde. Pas avant. Et la jeunesse crève la bouche ouverte. Et Samir prend des photos.

Soirée punk dans une cave, de riches artistes boivent du champagne d’importation en refaisant le monde, rodéo urbain, un politicien en vue donne une conférence. Des animaux sur un toit. Son groupe d’ami. Des tags, graffitis divers. Parfois ses clients lui donnent des instructions. De plus en plus on veut de l’anti-système, mais propre. De l’anti-système qui évite de rappeler le problème réel. Une fois, il a pris une photo de manifestation, et a failli y laisser son matériel et peut-être aussi un oeil.

C’est étonnant. La répression de la manifestation, en coût de déploiement, en militarisation des forces de polices, en munitions tirées massivement, est si chère. Tout cet argent aurait pu être employé à régler les problèmes ayant amené à la manifestation réprimée. Mais ce n’est pas comme ça que fonctionne le néolibéralisme. Pour commencer il n’y a pas de problèmes, il y a des marchés; Pour toutes ces questions stupides de survie du genre humain face à la destruction de l’écosystème, par exemple, il faut plutôt se féliciter des opportunités créées par la situation générale. À terme, cette situation donnera des marchés rentables dont se saisiront les entreprises. En attendant on freine à quatre pattes et on traite la question par-dessus la jambe. Le marché réglera lui-même la catastrophe qu’il engendre. Il est sain de lui faire confiance.

Ordures putassières. Ils nous prennent pour des cons parce que c’est plus rentable pour eux. Tout le monde peut bien crever, tant qu’ils restent au sommet. Et le plus beau c’est qu’ils y resteront. Et Samir le sait. On peut les haïr tant qu’on veut, il faut reconnaître qu’on ne peut rien contre eux. Les puissants. Le rapport de force est bien trop défavorable. La plupart des gens sont apathiques. Ils ont appris, comme un bon cheptel, à ne plus s’en faire et à regarder la situation comme si elle était normale, ou souhaitable. Mais on ne peut pas en vouloir aux gens. Ils n’ont pas l’énergie, le temps ou les moyens de comprendre comme on les exploite. Ils n’ont pas les perspectives nécessaires pour comprendre. C’est un truc pour classe moyenne. Ceux qui servent à consommer, qui achètent les produits. Eux peuvent pleurer sur l’horreur de la situation, parce qu’ils en jouissent, et ont par conséquent le temps et les moyens de la conceptualiser comme autre-chose qu’une douleur vécue quotidiennement. Et que peuvent-ils faire, ces gens de bien ? Pas grand-chose. Quelques-uns sont sincèrement opposés à la situation, mais la plupart préfèrent se complaire dans leur empathie du moment, et ne surtout rien changer. Il ne faudrait pas prendre le risque de changer la situation, de risquer ce confort de vie. Et puis on se fait à l’odeur du sang, ce n’est pas si grave. Quelqu’un trouvera bien une solution. Solution technique, industrielle, qui n’engage rien ni personne à quoi que ce soit. Nouvelle opportunité incroyable, c’est ce que disent les experts, les analystes, les journalistes, les invités des plateaux de télévision : tout se réglera comme il se doit parce qu’après tout, s’il y a un problème, il y a un marché. Les autres ? Les révolutionnaires ? Oh non, pas de ça. Trop radical, trop dangereux. Ils sont louches à vouloir l’égalité, ou changer les choses. Ils sont jaloux du succès des uns, ou menteurs et manipulateurs. Le plus beau syllogisme, peut-être, c’est quand ils clament avec la fierté de l’ignare qui croit avoir inventé ce qui existe depuis des siècles, que ceux qui réclament l’inégalité, la fin du meurtre de masse, sont en fait contre la Liberté. Samir ne voit pas vraiment où se trouve la liberté, dans un système qui réduit systématiquement à l’état de corps brisés et tués la majorité de la population humaine. La liberté des uns ne se construit pas sur la mort des autres. C’est très littéralement une bande de seigneurs s’offusquant qu’on veuille libérer leurs serfs. Mais enfin, vouloir libérer les serfs c’est s’opposer à la liberté. Crétins. Manque de vision, égoïsme cynique ou simple absence d’éducation. Rester ignorant est un bénéfice : on peut continuer d’exister sans comprendre, sans savoir que le monde est en train lancé à pleine vitesse vers un mur. Que la seule direction prise par l’humanité est celle du désastre, et qu’on ne peut de toute façon rien y faire.

Samir le voit aussi, ça.

Société atomisée. Les gens existent de plus en plus à l’échelle individuelle. Hyper-individuelle. Personal branding, mise en avant des accomplissements personnels en excluant volontairement le contexte, l’assistance et l’héritage y ayant amené, culte du moi et du matérialisme exprimé. Méthodes publicitaires classiques. De toute façon l’individu n’existe plus en tant que société. Ou de moins en moins. On peut prêcher, toujours et encore, mais ça revient toujours à prêcher dans le vide. Ou plutôt, faire comprendre à quelqu’un la situation ne sera jamais que ça : lui faire comprendre à lui. Il n’y a plus de communauté, plus de groupe. Les gens ne diffusent plus ce qu’ils comprennent. Expliquer, donc, c’est frapper dans l’eau. Tout prendra trop de temps, les résultats se feront trop tard. Il y a un goulot d’étranglement. Le principe est simple pour ceux d’entre haut : assurer que le changement arrive toujours trop tard et trop lentement. Ainsi il est inutile, assimilé, anodin, mais calme tous les modérés, qui ont le plaisir de disserter sur leurs avancées bidons.

En bref, il n’y a rien à faire, et Samir, chaque jour passant, perd un peu plus goût à la vie. Il n’est pas seul. Ils sont des milliers comme lui. Des jeunes, de cette génération qui commence à se demander si elle ne sera pas la dernière génération, celle héritant du monde cassé par leurs aînés, comme des enfants capricieux auraient cassé leur jouet. Cette génération qui se demande vraiment à quoi bon vivre dans cet univers qui ne profite qu’à quelques-uns, et certainement pas à eux. Ce spleen d’une jeunesse qui ne comprends pas toujours nécessairement les raisons du spleen, mais qui le ressent profondément, instinctivement. Quelque-chose, comme la prétendue mémoire de l’eau, ou de l’ADN. Quelque-chose de profond. Même sans savoir ils savent, et ils ont la haine.

Puis, concernant Samir, les choses changèrent. On sonna à la porte de son appartement.

« Vous êtes Samir Saffoui ? »

L’homme entre.

« Moi et mes collègues on a vu vos photos. On aime beaucoup. Ça vous dit de faire quelque-chose d’un peu plus utile ? Et oui, ce sera bien payé. »
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Le Coursier

Le début d’après-midi charia son lot de mauvaises nouvelles. Elles arrivèrent portée par un coursier à la base d’opération 12 du troisième Panopticon afaréen. Un ensemble respectable de bureaux et de sociétés écran dont il aurait été difficile de déterminer la vraie nature, et qui cachait plus de couches et de secrets que les plus grandes banques Carnavalaises. Un lieu solide, donc, dans la plus grande tradition des quartiers d’espion kah-taais. La voiture du coursier s’y était rendu après un trajet des plus innocents, se payant même le lux de s’arrêter dans un de ces salons de thé pullulant le long des quais, où se rendaient les cadres moyens et les étudiants après leur journée de travail. On y passait des heures à refaire le monde, sur des petites chaises plastiques colorées, fixant la marée huileuse du port et les navires infâmement rouillés qui y échouaient leur carcasse. Exception faite des vaisseaux de guerre, qui malgré leur grand âge étaient d’un entretien impeccable, et des vaisseaux Pharois, dont l’imposante flotte marchante ne souffrait pas, elle, de sous-budgétisation. Les dockers allaient et venaient pour décharger le peu de fret qui atteignait réellement Kodeda. Il fallait dire les choses, beaucoup de bateaux ne faisaient que passer; Quelques-uns, aussi, venaient y mourir. L’unique cale sèche du port industriel, dont on devinait les contours de tombeau à l’autre bout de la baie, était inopérante faute de personnel qualifié. Un tanker y reposait depuis des mois sans qu’on ait encore décidé s’il fallait le remettre à l’eau et espérer qu’il ne coule pas dans le port, oui le démanteler malgré le risque que représentait l’opération, sans personnel réellement compétent. Le tanker était là, attendait qu’on délibère sur son sort. Un rappel visible e la situation, un marqueur de l’infection qui avait pris la région, et qui disparaîtrait peut-être avec elle. Ou peut-être pas.

Après avoir bu du thé et discuté avec quelques contacts qu’il avait dans la zone, le coursier était lui aussi un tulpa, et malgré sa mission qui n’avait rien de très élégant, il entretenait son propre réseau de noms et d’amis, il repartit non sans passer brièvement dans l’échoppe même pour saluer le patron, régler l’addition, discuter de sa fille, qui se remettait d’une mauvaise chute et n’avait pu payer les soins que grâce au nouvel employeur de son mari et à la forte syndication qu’il promouvait, puis accepta la boîte de carton blanche qu’on lui tendait, quittant les lieux en souriant. La journée, à ce stade, était assez belle. S’il ne portait pas de bonnes nouvelles, le coursier évoluait dans un beau temps. Beau pour la région, ça signifiait chaud brûlant même, mais respirable. On zonait à l’ombre des tours, on profitait des courant d’air, de l’aspiration des portes et fenêtres ouvertes, et on buvait énormément. Il y avait aussi out les travailleurs qui n’avaient pas le loisir de s’abriter, et qu’on voyait suer comme des outres percées sous le poids de leurs charges. Imbibant leurs marcels gris, flottant dans leurs habits comme après une grosse pluie. Pas une goutte n’est tombée du ciel, pourtant. Et ces hommes et femmes continuent leur labeur. Transporter des caisses, réparer la voirie, refaire une façade. Un entend à toute heure de la journée cette symphonie perpétuelle des villes pauvres. Coups de marteau, cris, injonctions gueulées d’un bout à l’autre de la rue. Scie, outils divers, voitures et camionnettes à l’arrêt, moteur ronflant. Brique et tuiles s’écrasant au sol. C’est comme un corps donc chaque cellule continue de mourir et de se dédoubler à la foi. Sauf que le corps est malade, et sent l’urine et le gasoil.

Pourtant il est facile d’aimer cette ville. Nasabis souffre énormément d’être ce qu’elle est : une capitale coloniale pauvre, dans laquelle on a séparé les quartiers blancs, riches, propres, à la mode et moderne, devanture en carton de Parc d’attraction, des quartiers indigènes, musulmans, réels, où la ville existe réellement, ou la population grouille, où l’on actionne la mécanique qui permet à l’autre ville d’exister. Sa mission, le coursier le sait, doit amener à la fin de cette distinction. Il doit faire tomber le mur séparant les bourgeois empattés, racistes et fainéant de la population laborieuse, soumise à autant de pauvreté qu’elle ne peut en subir sans s’effondrer. Il faut exterminer la division de la ville et de la région, et imposer un mélange, une répartition de richesse assurant à chacun le droit à une vie ne serait-ce qu’agréable. C’est déjà en cours dans des secteurs entiers de la société, profondément changés par l’action concrète de nouveaux acteurs économiques. Le PIK et ses syndicats, le consortium, un véritable mouvement s’est imposé de ce côté-là. On est loin des paroles des populistes indépendantistes d’usage, qui entièrement dépendant du peuple et de son action, ne font pas l’effort de lui offrir plus qu’un regard méprisant. Pourtant, la situation continuera d’être celle d’un apartheid silencieux. Car pour l’heure, le système demeure, et que la colonisation est bien un problème systémique. Institutionnel. On continuera de crever la bouche ouverte dans ces rues « musulmanes » pour que les rues blanches puissent s’écouter du fado dans des restaurants huppés, faire les boutiques, parler affaire dans les halls d’imposants hôtels. Pour le moment.

De toute façon il ne faut pas s’attendre à grand-chose de la part des listoniens. Le coursier le sait. Les nouvelles qu’il transporte vont toutes dans ce sens. Le listonien est une espèce cliniquement morte. Le cœur de l’empire bat encore, mais le crâne est plein de vers. Tout est pourri, et parfois un terrible écoulement nasal voit la carcasse vomir un morceau de cerveau, indiscernable de ces fromages eurysiens que la douane de tout pays civilisé refuse à l’importation tant la masse d’insecte y grouillant entérine sa nature de danger sanitaire.

Zigzaguant dans les rues, avançant rapidement quoi que pas plus que n’importe quel autre motard de la métropole, le coursier se fraye un chemin à travers les contrôles de police, les barrages militaires, les embouteillages divers. Enfin, la base d’opération 12 du troisième Panopticon afaréen est en vue. C’est en plein quartier dit musulman. Il n’y a pas vraiment de rue praticable en véhicule, par ici, car c’est une zone où on habite et où il n’y a jamais vraiment eu de commerce d’une ampleur suffisamment importante pour justifier un quelconque élargissement des rues. Construit sur une colline, le quartier surplombe la ville. Enchevêtrement de ruelles, de tours reliées par des passerelles, de petites maisons aux cours immenses. Parfaitement silencieux, on y navigue d’escaliers en portes dérobées. Des tapis et des rideaux pendant aux fenêtres et le long de fils à linge.

Le coursier descend de sa moto, qu’un partisan rangera dans son petit garage, au pied des grands escaliers traversant le quartier. Son carton blanc sous le bras, il commence l’ascension. Derrière lui, le bruit de la fille s’atténue et est remplacé par le souffle d’un vent léger, qui arrose toutes les façades de cette ville hors de la ville. Fut un temps se trouvait une colline nue, peut-être qu’il y avait là de la végétation. Peut-être qu’habitaient là les premiers kodedans, et que tout le reste, Nasabis, n’était qu’une excroissance infidèle à l’esprit d’origine de ce quartier où tout est commun, et rien n’est privé. L’homme progresse encore. Il s’arrête à une plateforme, s’adossant à une balustrade pour observer la forme allongée d’un vaisseau de guerre. L’étendard listonien flotte haut, et c’est parfaitement ridicule. Il n’y a que les nationalistes et les imbéciles – proches mais pas tout à fait synonyme – pour croire qu’un drapeau a le moindre effet sur la nature réelle des choses. La listonie ne domine pas le pays par son drapeau, mais par ses armes, sa violence sourde. Sa domination est strictement physique et n’a rien à voir avec le monde hautement mystique et spirituel des identités nationales et des conceptions idéologiques : la listonie n’est que la main tenant la cravache. Qu’elle parle portugais ne change pas la donne : son drapeau ne signifie rien.

Le coursier secoue doucement la tête. Son regard quitte le navire de guerre, passe sur les quais et les docks. Il voit une petite délégation du nouveau syndicat des marins et dockers, qui agitent leurs petites bannières autour d’un homme, monté sur une caisse. On entend rien, quoi qu’en ce concentrant on devine l’accent du mégaphone, dans la muette cacophonie de la ville. Il parle sans doute de choses concrètes. Conditions de travail. Salaire. Droit à la dignité. Les syndicats se comparent aux travailleurs du nord, qui ont droit à de bonnes conditions, de bons salaires. Ils ne comprennent pas pourquoi ils n’y ont pas droits. Les camarades du nord leur disent qu’ils n’y peuvent rien, que la lutte peut se faire ensemble, ou plutôt, doit nécessairement se faire ensemble. Alors depuis plusieurs jours on la prépare. Pétitions, tractage massif, grève en devenir. Peut-être que suivront bientôt les sabotages de tout ordre. Celui visible du casseur détruisant l’outil de travail – de toute façon ce qui appartient au patron à valeur d’ennemi – au cadre moyen, faisant remonter des informations inutiles, traînant la patte, promouvant des incompétents. Traitant l’industrie où il officie comme celle d’une puissance occupante. Fût-t-elle listonienne ou patronale. Du pareil au même. L’occupation est une violence qui ne s’embarrasse pas d’identité. Le coursier continue son tour de la ville. Il voit la très imposante structure de la nouvelle chambre de commerce. L’immense pyramide de verre, inexplicable élan de modernité qui semble aussi à sa place ici qu’un vaisseau alien, et en a plus ou moins les aspects. La citadelle depuis laquelle le consortium fait mine de dominer l’économie régionale. Simple apparence. La direction est largement centralisée aux mains des acteurs de terrain, qui répondent à des directives internationales. La pyramide, elle, avec ses hôtels, ses chambres, ses salons, n’est qu’une démonstration de force. Une structure quasi-fétichiste qui tend, selon les regards, à s’ériger en promesse d’avenir ou en menace. Plus loin il y a les villes et palais, parmi lesquels ceux du Prince. L’homme n’évoque rien de bon au coursier, qui méprise l’ambition personnelle et ne s’intéresse qu’à l’égalité. Son regard continue, s’arrête sur l’aéroport. Il est inactif depuis des mois. Depuis l’arrivée des militaires, qui en avaient fait le cœur de leur administration militaire.

C’était étonnant, mais ça indiquait quelque-chose sur la pensée, l’être profond du gouverneur militaire. Ce n’était pas un politicien, ce n’était pas un homme de confort – ou bien c’était un excellent homme d’image. Il s’était installé dans une structure qui ne servait en aucun cas à vivre. Changeant son armée en groupe d’itinérants, et l’aéroport en camp retranché. Les drapeaux flottaient haut, on entendait le clairon tous les matins, les véhicules blindés de l’armée attendaient sur les parkings où attendaient les taxis et les bureaux vides des derniers étages étaient s’étaient sans doute remplis de cartes, d’ordinateurs, de diaporamas, de photographies satellites. Là-bas grouillait le coeur de la réaction. Celle de l’empire mourant pour protéger ses colonies. C’était une structure pour le moment inutile, et on s’arrangerait pour qu’elle le reste.

Le coursier se remit en route, et termina de grimper les quelques marches le séparant de la base proprement parler. Il passa la porte.
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logos des services secrets alguarenos et du Clan saadin kodedan.

11 décembre 2007 - CONFIDENTIEL - Peut-on embellir l’image des brigands mandrarikans dans un contexte politique et économique difficile?


Bandit de grand chemin maure durant l'antiquité, égérie du courage et de la liberté.

Souvent éclipsée par les histoires médiévales eurysiennes, l'Afarée d'hier et d'aujourd'hui a elle-aussi différents mythes autour de ses bandits de grands chemins.


"Symbole de l’anarchie et de l'anti système, les brigands mandrarikans portent avec eux l’image du bandit résistant" s'est risqué à dire un sociologue intervenant sur les ondes radio d'une antenne mandrarikane.

Au cours de l’année 2007, les problématiques et les faits divers liés au crime social au Kodeda se sont considérablement concentrés autour de la situation des diasporas mandrarikanes. Contrainte à quitter leur nation située à l’Est de l’Afarée, la population mandrarikane s’est effectivement et simultanément faite la victime ainsi que le bourreau, d’une situation complexe dégradée.

Incapables de s’intégrer en société et celle-ci les ostracisant avec force, les pillards mandrarikans semblent poursuivre bien plus qu’une voie par défaut, une voie nourrie par les mites et les légendes que des brigands, à l’instar de Cristobal Ravatomanga surnommé “Charko”, inspiraient. Libres d’aller où ils veulent, payer grassement de leurs méfaits, opposés à toutes les manifestations d’ordre qui se manifestent face à eux, les pillards mandrarikans inquiètent autant qu’ils fascinent, la présence parmi eux de jeunes enfants ajoutant encore son lot de sympathie pour les jeunes publics, qui peuvent plus facilement s’identifier à eux. Un autre aspect vient rendre plus attractive la vie des pillards mandrarikans, il s’agit de leur approche clanique de la société. Une micro société où chaque individu s’élève par ses moyens et non la volonté des autres. Les chefs se font et se défont pour ne laisser transparaître au sommet de la pyramide, que les plus forts et les plus rusés. Dans ces conditions, les gangs de voleurs mandrarikans trouvent toujours de nombreux émules par les jeunesses varanyennes ou mandrarikanes elle-même.

Au Kodeda comme dans certains pays confrontés au même phénomène, des penseurs viennent populariser les idées selon lesquelles le phénomène est une démonstration de rébellion de la classe dite subalterne, “celle qui n’est rien” comme les milieux mondains n’hésitent plus à l’appeler. Des classes inférieures et intériorisées, qui s'élèvent contre le régime oppresseur et vampirique, condamnant les gens à des schémas types où ils gaspillent amèrement le peu de fortune et de temps conférés par la vie.

“Le banditisme social s’est longtemps nourri des histoires médievales où des hors-la-loi se dressaient pour faire le mal à l'incarnation du mal” explique la politologue heenylthaine Felicity Edminston. “Plus les sociétés sont dures, et plus la frontière entre le bien et le mal s’estompe. Car faire ce qu’il faut pour survivre n’est plus aussi moralement attaquable que par le passé…” L’Afarée, avec la guerre civile varanyenne qui a vu s’armer les milices communistes, les intégristes religieux et antimonarchistes pour mettre le pays à feu et à sang, est une terre portée vers le banditisme contestataire, une terre où l’on abat l’élitisme de la classe dirigeante, pour rendre les fruits du travail chacun plus palpable aux nécessiteux. A bien des égards, la lutte contre les représentations étatiques et leur oppression fiscale en Afarée est un exemple qui donne aujourd’hui naissance à toute une lignée de bandits de grands chemins, évoluant dans une zone grise où ils se mettent à la fois à dos les institutions gouvernementales sur lesquelles ils font leur beurre, et à la fois dans leur poche les résidents locaux, par la distribution de revenus complémentaires, afin de fédérer ces derniers autour de la nécessité d’une absence d’ordre et de hiérarchie en société. C’est un procédé que certains osent comparer aux pratiques mafieuses, qui consistent à engager moralement la société civile contre rétribution afin de couvrir des actions plus cruelles encore et dirigées vers l’état et ses représentants, qui oeuvrent aussi à différents degrés, dans l’intérêt commun…”

A tort, les sociétés civiles et le monde littéraire ont associé le banditisme social comme une signature profondément ancrée dans l’Histoire des nations eurysiennes, faisant état de récits où la noblesse d’épée s’éclipse derrière une noblesse de coeur défendue par des personnages de l’antiquité et du moyen-âge. Si les historiens et les sociologues ne souhaitent pas faire davantage d’ombrage à ces évocations, ils veulent toutefois “remettre l’Eglise au coeur du village et le clocher au milieu de l’Eglise…” Une mobilisation qui s’est traduite par une série de publications et d’intervention, rappelant que le banditisme social est un apanage bien plus marqué dans l’histoire des sociétés afaréennes, particulièrement dans le monde contemporain qui nous est le plus familier.

Le banditisme héroïque est pour eux et désormais, inhérent au banditisme présent en Afarée. “Il faut s’interdire de disqualifier le caractère moralisateur et politique des actions de brigandages perpétrées en Afarée” prévient Moussaoui Benegour, sociologue dans un bureau d’études statistiques international. “Un brigandage sur deux est la conséquence d’un rejet, d’une action politique armée en Afarée. Il n’y a pas une seule seigneurie de guerre en Mandrarika, qui ne tente pas de recréer une micro communauté en marge de la société civile là-bas.” Toujours selon ce spécialiste, les brigands là-bas ne se contentent pas de piller pour profiter des apports de la société civile mandrarikane, mais pillent pour finalement s’offrir une alternative. Une alternative qui passe par la construction de communautés autonomes, financées sur les malheurs versés sur les représentations étatiques et ce qui les composent. Les alternatives communautaires viennent alors rejeter d’un bloc toutes les choses offertes par les sociétés organisées autour d’une gouvernance centralisée, traditionnelle en somme.
N’oublions pas qu’il y a eu un passif colonial en Afarée, le banditisme dans ces régions accompagnaient de facto les dissensions politiques locales ou carrément les mouvements en faveur du décolonialisme. Tous les mouvements condamnés à la clandestinité, qu’ils soient politiques ou non, vont converger sur des durées plus ou moins longues, voire mutualiser leurs moyens et leurs réseaux, pour survivre. Pour ces experts et particulièrement en Afarée, de nombreux groupuscules tournés vers le banditisme ont été incités ou contraints, à agir dans une certaine corrélation, avec les lignes politiques, les lignes morales, de plusieurs mouvements très engagés.

Si l’image du bandit de grands chemins sanguinaire est un épouvantail dressé par les autorités kah-tanaises et impériales, pour effrayer les populations locales et entretenir un rejet des bandits et autres affranchis oeuvrant dans la région, il est nécessaire de rappeler que ces derniers ont les moyens de renverser la communication à leur propos, pour favoriser une cohésion sociale viable entre les brigands et les sociétés civiles.

Outre ces points, il faut également avoir en considération le fait que les nations doivent mesurer tout le rapport bénéfices/pertes d’une déclaration de guerre faite à des groupuscules issus du banditisme. Effectivement, les plus grands bandits connus en Afarée peuvent emmener quelques milliers d’individus dans leur sillage si l’on prend l’exemple des seigneuries de guerre mandrarikanes. Ce sont donc pour les pouvoirs locaux des réserves opérationnelles quantitatives, mais aussi qualitatives car vous avez en leur sein, des hommes et des femmes rompus au combat, à l’utilisation des armes et plus important encore, dotés d’une excellence maîtrise du terrain.

Dans des régions en proie à la guerre civile ou à l’invasion, il est plus que probable que les bandits et les gangs apparaissent comme des alliés potentiels face à un état de guerre imposé sur un état. Il est de notoriété publique que des brigands notoirement connus au Varanya, ont pris les armes au sein de la guerre civile varanyenne.

Tout état en temps de paix qui se respecte, est tenté de déclarer le brigandage parmi les activités illégales. Mais force est aujourd’hui de constater qu’en Afarée et au sein des situations politiques locales clivantes, à l’instar du Kodeda et d’autres provinces listoniennes, sans bien sûr oublier le Varanya, de nombreux territoires afaréens ont l’opportunité de composer avec cette force mineure mais aguerrie.

Si la colonisation est aujourd’hui encore très réduite dans les régions afaréennes, l’insécurité et le risque de coups d'État peuvent apporter une des mille raisons visant à inciter les pouvoirs publics afaréens et les gangs mandrarikans à s’agglomérer entre eux. Obligeant les pouvoirs publics si ça se fait, à ménager l’image des groupuscules brigands entrés en résistance, face à un ennemi représenté par un tiers parti étranger. Dans le cas kodedan, le clan Saadin pourrait bien réorienter les missions des brigands mandrarikans, pour désormais les représenter sous la forme d’un acte résistant, face à l’empreinte de plus en plus palpable de lobbies financiers, incarnés ici par le consortium kah-tanais. Un défi de taille, qui vient toutefois mettre en exergue une chose, la notion de brigandage, de banditisme et même de terrorisme, est in fine très politisée, puisque chacun de ces actions peut s’inscrire en temps de guerre et constituer une stratégie de long terme face à un ennemi, ce qui rend particulièrement movible, pour ne pas dire maléable, la ligne rouge tracée entre les définitions du bien et du mal.

Instrument de terreur, de sabotage ou d'illustration d’actes héroïques, le brigandage est donc au final un outil plus qu’une fin, un outil pouvant apparaître sur tous les tableaux, tant il peut servir des objectifs et des groupes d’intérêts différents. Dans ces conditions, il est évident que l'image des brigands mandrarikans écumant le long des routes commerciales terrestres du pays, fait l'objet d'une manipulation auprès des différents acteurs de la vie politiques et économiques kodedans. Car en présence d'une armée étrangère telle que celle kah-tanaise, et une armée coloniale listonienne, les oppositions d'images faites autour du phénomène et nourries par la propagande peuvent être monnaie courante, chacun se partageant les bons et les mauvais aspects de cette présence brusque et indésirable, au coeur de la campagne kodedane où certains se juraient d'établir les ponts commerciaux nécessaires à un rapprochement avec les territoires ultramarins kah-tanais.
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Logo d'un journal local.

15 décembre 2007 - Les mandrarikans, une immigration précieuse au service de la paix et de la sécurité au Kodeda.


Photographie de Solofo Razafindrakoto, lors d'une représentation publique de sa Majesté.
Qui est Solofo Razafindrakoto, le pare-balle mandrarikan du Prince Mutarrif ibn Saadin?


Remarqué dans une vidéo d’anniversaire du Prince Mutarrif ibn Saadin pour avoir gardé une salopette en jean, Solofo Razafindrakoto est devenu en quelques temps la figure de l’ombre la plus connue de l’entourage du Prince kodedan. Symbole de puissance et de virilité au sein du cercle rapproché, il constitue une incarnation grandeur nature, des moyens princiers dédiés à la sécurité du chef de clan Saadin. Tantôt aux côtés du Prince ou d’un membre de sa famille, ce quadragénaire en provenance de Mandrarika est l’un des nombreux ressortissants de ce pays, ayant trouvé leur voie une fois au Kodeda.

Les mandrarikans sont-ils tous des brigands sanguinaires et des foyers d’insécurité pour le Kodeda? A cette question, le colosse d’Afarée orientale nous sourit et nous confie “je ne crois pas que sa Majesté le Prince m’emploie pour faire flotter un sentiment d’insécurité dans les airs… Il y a des bandits kodedans, il y a des bandits mandrarikans et il y a des bandits kah-tanais, par lots de quelques milliers au Pontarbello dirons-nous même et ceux-là portaient un uniforme, on les retrouve même au Vinheimur.” Des propos qui trouvent un certain écho dans l’entourage du Prince, avec les affirmations de certains conseillers qui jugent plus que probables des tentatives d’assassinat contre le Prince dans les mois à venir, s’agissant de l’un des derniers acteurs de la cohésion sociale dans la société kodedane. Patriarche des Saadin, figure notable des communautés beïdanes et de la ruralité kodedane, le Prince Mutarrif ibn Saadin est une figure forte mais plus important encore, une figure locale, certains diront d’ailleurs que c’est par le biais de ce dernier trait qu’il tire l’essentiel de sa force.

“Nous sommes attristés et particulièrement inquiets de voir la dangereuse corrélation entre les foyers d’instabilité à l’international et la survenue de groupuscules armés, pouvant prétendre jouir d’une certaine connivence avec les autorités kah-tanaises. La Guerre d’indépendance au Pontarbello, qui a vu plus de 7 000 miliciens des brigades solaires, financés et équipés par le régime kah-tanais, les exactions au Vinheimur frontaliers des territoires kah-tanais et victime du passage de groupes paramilitaires sanguinaires affiliés aux brigades solaires précédemment citées, aujourd’hui c’est au tour du Kodeda d’essuyer de façons simultanés, les troubles provinciaux et le passage de contingents militaires étrangers, en provenance une fois encore du Grand Kah…” s’était alarmé en ces mots Nizar Toulaoui, conseiller du Prince Mutarrif ibn Saadin.

Dans ce contexte politique difficile, la présence de gardes du corps issus des terres arides mandrarikanes, constitue un gage supplémentaire à la protection et à la sécurisation des déplacements princiers, dont l’agenda ne saurait les réduire, partageant tantôt ses disponibilités entre les investisseurs identifiés pour ses projets à inscrire dans l’économie locale et puis les autorités listoniennes, elles aussi vouées à souffler le chaud et le froid face à un paysage politique cristallisé dans un contexte soumis à plusieurs sphères d’influence matérialisées au niveau national (le clan Saadin) et international (le Grand Kah).

Une communication voulue par l’entourage du Prince Mutarrif ibn Saadin, soucieux de développer l‘idée selon laquelle la figure notoire du clan éponyme, est en sécurité face aux multiples dangers croissants qui apparaissent dans le paysage politique kodedan. Dressant des parallèles directs avec le Vinheimur, ces mêmes personnalités ont insisté sur la nécessité qu’aurait le Kodeda, et par extension la Listonie, à assurer sa propre sécurité. “Il en va de la crédibilité des institutions elles-mêmes, qu’il y ait un supplétif, pourquoi pas Kah-tanais, dans la sécurisation de nos frontières, soit.

Mais qu’il y a une substitution et une présence outrancière de forces armées kah-tanaises sur les frontières du pays serait susceptible de véhiculer deux messages :
  • le premier message est bien entendu celui selon lequel les forces impériales listoniennes ne seraient pas en mesure d’assurer l’intégrité du territoire kodedan, face à une, allez voire deux à trois poignées de bandits,
  • le deuxième et dernier des messages, non des moindres, est celui selon lequel le Kodeda serait facilement atteignable par une force de projection importante et surtout hostile, à ses institutions locales...

Si ce qui relève de la sécurité du territoire souffre encore de nombreuses incertitudes, ce qui relève de la sécurité du Prince est pour ce cas tout désigné. Solofo Razafindrakoto, figure publique du cordon de sécurité auprès du Prince et de ses concubines, est rapidement présenté comme l’homme de la situation, 1m83 et 95 kg de muscles sculptés durant des entraînements quotidiens d’une heure et demi, rien n’est laissé au hasard pour cette équipe qui constitue l'ultime rempart entre le Prince Mutarrif ibn Saadin et les dangers qui entourent sa récente exposition au sein de la sphère publique.

Plus que son gabarit, c’est aussi et surtout une personnalité, eu égard à son look rafraîchissant qui vient détonner avec les us et les dress codes établis lors des rencontres diplomatiques entre les élites. Si aucun élément de sa vie privée ne saurait être divulgué pour ne pas nuire à sa sécurité ou celle de ses proches, là où on nous a d’ores et déjà affirmé qu’il était un (heureux) célibataire, le garde du corps mandrarikan Solofo Razafindrakoto peut néanmoins être décrit comme un personnage enjoué et hauts en couleurs, à l’image de sa garde robe. Outil de sécurité et de communication face aux médias, le quinquagénaire est un élément remarqué et décrit comme remarquable par les agents coordonnateurs, chargés du commandement de la sécurité du Prince…
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Renegado est une chaîne d'information en ligne, connue pour ses retranscriptions dans les principales langues paltoterranes

23 décembre 2007 - Le monde rural pourrait payer le prix fort après l’installation de routes commerciales terrestres vers le nord du territoire.


Paysan kodedan à l'oeuvre, au champs.
Le monde agricole kodedan, composé de petits exploitants et producteurs céréaliers, pourrait bien être en péril face aux routes commerciales terrestres kah-tanaises, alimentées par les consortiums étrangers qui viennent faire dégringoler les prix de vente en Mandrarika.


Alors que certains pays luttent encore pour éradiquer la faim parmi les populations qui y vivent, le contexte agricole kodedan pourrait lui plonger dans d’autres difficultés, après les facilitations d’accès routiers faites vers le Nord du continent. C'est pourquoi une partie de la sphère économique kodedane a récemment entretenu une projection bien alarmiste pour le monde agricole et rural du pays, après l’ouverture du projet de routes commerciales terrestres vers le nord du territoire.

Des échanges régionaux facilitant l’importation de marchandises et pénalisant les producteurs régionaux du Kodeda.

En effet, tandis que certains se réjouissent de pouvoir joindre les pays limitrophes en des temps jusqu’ici inégalés, les fermiers locaux ont constaté qu’il y avait une recrudescence d’importations, garanties par le fret international empruntant les nouvelles routes commerciales. “Désormais, il est facile, comprenez par-là plus pratique et peut-être pas plus cher, de faire venir des quantités de grains par camion. Si le Kodeda voit maintenant arriver des quantités de grains dont le coût est amorti par la récurrence et l’importance des flux, les produits de sa production nationale vont apparaître de plus en plus chers, moins compétitifs…" déclare le politologue et économiste Mujaïd Ben Kalhaou. “En facilitant les flux commerciaux, on élève immanquablement le niveau concurrentiel des secteurs économiques kodedans, le domaine agricole en tête car la faible industrialisation du pays implique forcément que sa production actuelle soit encore trop dépendante de petites exploitations, entretenant une activité très traditionnelle…”

Pour le spécialiste, ces routes pourraient créer non seulement une dépendance des consommateurs vis-à-vis des importations étrangères, mais surtout un dérèglement des tarifs en vigueur considérant le déséquilibre qu’il y aurait entre la matière disponible (l’offre) et les besoins nationaux (la demande). Sous cette analyse, on comprend aisément que le petit producteur agricole kodedan ne peut assurer le même rendement, et donc des tarifications plus attractives, que les grains produits au sein d’exploitations plus industrialisées et importées via ces routes commerciales économiquement meurtrières et que certains tendent à applaudir. Le caractère volatile des prix du grain, mêlé à un sentiment de futilité de la part des petits exploitations agricoles kodedans, pourrait bien exacerber les tensions entre le monde rural, les communautés beïdanes et les lobbys kah-tanais implantés sur le territoire.

Le développement de l’agriculture industrielle devient alors une priorité mais les opportunités de la financer sont minces… “Investir au Kodeda, et plus globalement dans l’Empire listonien, coûte 2 à 2,5 fois plus cher qu’investir ailleurs. L’Empire Listoniena vu son économie imploser ces dernières années, avec la fuite de capitaux, de cerveaux et globalement, la perte d’intérêts des marchés étrangers pour ce territoire en grande souffrance.”

Créer une installation industrielle au Kodeda coûte trop cher, de par la nécessité de mettre en place des systèmes d’irrigation, des contraintes matérielles et logistiques en somme, puis par l’existence même d’un contexte économique défavorable à l’échelle de l’Empire. Les personnes pouvant investir dans l’Empire Listonien sont de moins en moins nombreuses car le coût d’entrée sur des projets de réindustrialisation du territoire est plus élevé que partout ailleurs…

Éviter la faim au Kodeda par l’abondance et la disponibilité des matières agricoles? C’est très bien, mais on comprend très vite ses limites dans un territoire faiblement industrialisé, qui subit les flux à l’importation sans réellement avoir les billes pour en profiter en retour. Les petits producteurs céréliers locaux peuvent effectivement et difficilement intégrer les flux marchands tournés vers l’exportation. Vous avez donc des petits exploitants possiblement inondés par la marchandise étrangère, mais paradoxalement trop petits pour négocier le prix de leurs marchandises, en quantité limitée, pour les positionner à l’exportation. Dans ce contexte et sans nous répéter, considérant seulement la conjoncture actuelle des choses, on comprend que la montée en puissance des fermiers kodedans devient une nécessité absolue. Un objectif indispensable, essentiel, pour leur permettre d’avoir un meilleur rendement, de réduire leurs coûts de production et donc de rivaliser avec le prix des produits céréaliers étrangers, importés par les routes commerciales terrestres au nord du pays. Produire plus permettrait aux producteurs céréaliers kodedans de s’aligner sur les prix de vente des marchandises étrangères positionnées sur le marché intérieur kodedan, mais pas uniquement, leur capacité à produire de façon quantitative leurs marchandises serait également susceptible de leur permettre une meilleure visibilité, une meilleure attractivité, sur les marchés internationaux, leur permettant de fait de vendre sur le marché intérieur, mais pas que…

L’industrialisation de l’agriculture kodedane, une nécessité que peu d’acteurs économiques locaux pourront financer.

Si l’industrialisation de l’agriculture kodedane apparaît nécessaire, cela ne veut en rien dire qu’elle est possible, compte tenu du contexte économique actuel, dans les territoires ultramarins listoniens ou même sa métropole. Comme cela a été évoqué plus tôt, l’Empire Listonien embrasse une crise économique sans précédent, qui freine durablement tous les projets d’investissement imaginés pour le territoire. Lancer une entreprise au Kodeda et plus généralement dans l’Empire Listonien revient à deux fois, voire à deux et demi fois plus cher que si vous lancez cette même entreprise dans un autre pays. Quels investisseurs pourraient se permettre un pari aussi risqué, en déboursant une fortune pour le lancement d’exploitations agricoles industrielles à la réussite incertaine? De l’avis général, très peu. Peu de monde est aujourd’hui en mesure de débourser une somme folle, pour l’ouverture de nouveaux sites industriels, “il faut pas moins de trois millions de pesetas alguarenas pour ouvrir une exploitation agricole industrielle conforme” souligne notre expert, Mujaïd Ben Kalhaou, “dans le monde agricole kodedan, c’est un invstissement que peu pourront se permettre et je ne suis pas certain que l’état impérial listonien, souhaitera subventionner les producteurs céréaliers locaux au Kodeda, comtpe tenu des périls d’ordre socio-économiques, qu’il doit déjà affronter à d’autres endrotis de son territoire.

Si vous avez d’un côté des producteurs céréaliers qui n’ont pas les moyens d’industrialiser leurs exploitations et de l’autre un acteur institutionnel qui n’en aurait, peut être pas les moyens, mais assurément pas la volonté, vous comprenez qu’il apparaît comme plus que nécessaire de faire entrer d’autres acteurs dans le contexte économique dégradé du territoire. C’est à ce titre que le Prince Mutarrif ibn Saadin prend place dans le paysage économique kodedan. Détenteur d’une fortune colossale, estimée à plusieurs centaines de millions de pesetas alguarenas et interlocuteur d’importance dans la sphère économique locale, le Prince est finalement un candidat de choix, dans la recherche d’investisseurs pour le développement d’exploitations céréalières.

L’Afarée est un continent relativement esseulé en matière économique, puisque des cinq continents existants, à savoir l’Aleucie, la Paltoterra, le Nazum, l’Eurysie et finalement l’Afarée, il faut attendre le top 10 des puissances économiques mondiales pour enfin voir apparaître l’une des nations afaréennes au classement. Un seul représentant au top 10 des puissances économiques mondiales, c’est peu glorieux pour illustrer la puissance économique afaréenne, d’autant plus que l’Empire listonien est quant à lui totalement absent de ce même classement. La première “puissance” économique afaréenne, est classée neuvième à l’échelle mondiale, et son PIB ne représente que 8,15% des PIB cumulés des autres pays qui la précèdent au classement. C’est-à-dire qu’en fin de compte, en plus d’être éloignées du classement, les écarts de performance économique entre la première puissance économique afaréenne et la huitième puissance économique mondiale la précédant (là où la nation afaréenne apparaît 9e au classement mondial), les nations afaréennes sont considérablement distancées par les puissances non continentales inscrites au classement des économies mondiales.

Les fonds pour entretenir des capitaux préalables aux investissements économiques ne sont pas au Kodeda et plus globalement, ils ne sont pas sur le continent afaréen. La fortune du Prince et derrière lui, du clan Saadin, fait office d'exception et constitue par conséquent, une opportunité rare à ne pas négliger par l’Empire Listonien, considérant de manière parallèle, la relative absence des fortunes présentes sur le territoire et des nations afaréennes parmi les classements économiques mondiaux. En matière de production agricole, seul le Kodeda peut donc se sauver d’une perspective concurrentielle plus poussée qu’elle ne l’a jamais été. Mais cela implique de confirmer l’aristocratie kodedane dans un rôle d’acteurs, particulièrement économiques, et non un rôle de tapisseries ornementales destinées à temporiser la présence des autorités ainsi que des institutions coloniales, par l‘affichae d’un semblant d’élite kodedane.

Il est par ailleurs important de préciser, que les exploitations agricoles traditionnelles actuellement en place au Kodeda, sont certes plus fragiles face à la concurrence étrangère qui importe ses produits sur le territoire, mais également plus fragiles face aux épisodes de sécheresse et plus généralement, aux conditions climatiques et naturelles, qui pourraient affecter les récoltes d’une saison sur l’autre.

Le Kodeda, un territoire dépendant des importations qui sont pourtant fatales à ses activités économiques, toujours très artisanales, traditionnelles et faiblement industrialisées.

“C’est là le drame du Kodeda, en ce sens qu’il a besoin d’exporter pour développer ses tissus économiques et industriels mais continue, de façon inexorable, à se montrer dépendant des importations. Le Kodeda se comporte tel un camé accro au poison qui lentement, lui fait la peau” énonce l’économiste, non sans s’excuser au préalable, pour la forme des propos et de l’image empruntés dans l’illustration de son propos. Pour cet expert, le Kodeda est victime des importations étrangères sans qu’il lui soit pour autant possible de la contrer. "Pour lutter contre les importations étrangères, il faut produire plus et à moindre coût localement. Toutefois, le schéma industriel actuellement en place au Kodeda, ne permet pas cela. Dès lors, le salut du territoire reposerait davantage sur des regroupements de petits exploitants, afin d’optimiser les rendements et les coûts d’exploitation, voire à entamer des procédures d'agrandissement des exploitations, les dirigeant peu à peu vers des capacités de production semblables aux activités agricoles de nature industrielle…”

Si les investissements publics ne sont pas possibles, compte tenu de l’importance des coûts nécessaires à l’installation d’une zone industrielle au Kodeda, il faut trouver des fonds privés et prendre acte du fait selon lequel l’aristocratie kodedane milite en ruralité, pour provoquer et accompagner le changement des modèles de production actuels.

On ne sait pas si le gouvernement impérial a pris la pleine mesure et conscience de cette problématique, toujours est-il que la sphère économique kodedane semble l’avoir fait, à l’image du clan Saadin, qui souhaiterait rencontrer différents exploitants traditionnels des communautés beïdanes, sensibles à la représentation politique que peut incarner le Prince Mutarrif ibn Saadin, au Kodeda. Le Prince Mutarrif ibn Saadin est ouvert à l’idée selon laquelle il financerait l’installation de plusieurs exploitations céréalières industrielles, afin d’offrir aux fermiers kodedans la capacité de production nécessaire pour tirer vers le bas les prix de vente, tout en contrebalançant la baisse des prix par un accroissement des ventes (renforcement des ventes sur le marché intérieur + capacités de production nécessaires à la mise en place d’exportations).

L’agriculture kodedane n’aurait pas assez des budgets impériaux pour se développer, il importe plus que jamais à celle-ci de quérir le soutien de ceux qui ont les moyens mais plus encore les intérêts, d’investir dans le pays. A ce titre, le clan Saadin et son Prince font office d’incontournables. “La question des adaptations matérielles de l’agriculture kodedane est centrale, et même en fin de compte majeure, pour surmonter les adaptations logistiques qui s’imposent au territoire kodedan et lui font courir un péril, à cause d’un manque de compétitivité flagrant.
La prise de décision faite, par l’ouverture des routes commerciales terrestres et lam ultiplication des flux vers le nord du pays, dégradé considérablement la rentabilité des exploitations traditionnelles kodedanes, par conséquent les acteurs institutionnels à l’origine de cette ouverture économique, sont moralement tenus de compenser la perte infligée aux exploitations agricoles de petites et moyennes tailles. Pour autant et en l'absence d’un retour clair de l'exécutif listonien quant à cette question, les fortunes kodedanes réunies au sein des clans beïdanes, dont le principal, celui des Saadin, ont d’ores et déjà déclaration leur disponibilité, quant au financement d’un outil agricole davantage industrialisé, davantage rentable.

Le consortium kah-tanais, un monstre industriel qui frappe l’outil de production traditionnel kodedan en plein coeur.

Le fait même que les routes commerciales terrestres développées vers le nord du pays, soient pour leur plus grande partie financées par un regroupement d’entreprises étrangères, n’en finit plus d’attester des intentions vampiriques affichées par ces derniers. La création de ces routes commerciales, avait la volonté manifeste d’inonder, de noyer le marché intérieur kodedan de produits étrangers, ce qui fit inéluctablement dégringoler les prix de vente des producteurs locaux, au regard de la concurrence, de ses capacités de production nettement inférieures et au final des déséquilibres présents sur le marché kodedan entre l’offre et la demande. La promiscuité entre consortium kah-tanais et les projets d’ouverture de l’économie kodedane apparaissent dès lors comme une “fausse bonne idée” compte tenu du rapport de force intenable qu’il entraîne, auprès des exploitants agricoles kodedans.

“Le projet de routes commerciales terrestres n’est pas dirigé dans l’intérêt des producteurs traditionnels kodedans, mais bien dans l’intérêt du consortium d’entreprises kah-tanaise qui en a assuré le financement. C’est d’une logique imparable, quelles entreprises viendraient financer un projet néfaste à leurs activités? C’est contre nature, il est évident que ce projet, ainsi financé par les acteurs industriels et économiques kah-tanais, serait nécessairement dirigé vers leurs profits et non le développement de l’activité économique kodedane. C’est susceptible à court et à moyen termes d'entraîner une concurrence déloyale pour le secteur agricole de notre pays… Il faut trouver des moyens de parer le phénomène et à ce stade, le seul identifié est celui précité : recourir au financement de l’aristocratie kodedane, à l’instar du clan Saadin.”

Le modèle social-économique du Grand Kah, une supercherie à la lumière du soleil afaréen.

Parler du consortium est une chose, mais évoquer le soutien politique du Grand Kah dans la manifestation d’une telle exploitation des hommes et des femmes du monde paysan kodedan, par un pays qui vient revêtir une image le présentant comme un porte-étendard de l’internationale libertaire sur la scène mondiale, c’est cocasse pour les uns, voire “à vomir” pour d’autres, comme nous confiait un jeune militant estudiantin dont les deux parents agriculteurs peinent aujourd’hui à vivre de leur labeur…

“Léser les petits agriculteurs et le monde paysan du Kodeda, face à des consortiums étrangers venus inonder le marché intérieur et dérégler les cours des marchandises, y compris celles des produits de première nécessité comme ceux issus du monde agricole, ne traduit pas la politique sociale escomptée par l’idéologie kah-tanaise” nous indique l’expert en économie Mujaïd Ben Kalhaou. “C’est un projet d’extrême-gauche foireux, qui permet aux industriels de l’agroalimentaire d’acheter du grain à bas prix, en exploitant des petits exploitants et producteurs céréaliers aux portes de la misère…” Sur ce constat, le fret international et la mondialisation imposés par le Grand Kah au Kodeda, apparaissent légitimement comme une tâche de pourriture grandissante, sur un fruit qui ne trouve plus la force et les moyens nécessaires pour mûrir.

HRP a écrit :Budget du clan Saadin = 116 873 points de développement + 15 645 points de développement = 132 518 points de développement.
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A quelques encablures de là, les individus préparaient leurs véhicules. Le champ de vision bougeait légèrement, mais seulement à cause de quelques bourrasques brûlantes du vent du Sahra'. Les jumelles chauffaient et cela en devenait désagréable, alors elles étaient enveloppées dans un tissu quelconque, aux couleurs de l'environnement. Rien de mieux aussi pour éviter que le soleil ne dévoile un reflet lumineux hasardeux.

Des jeunes, des plus âgés, ils étaient armés et scrutaient avec expérience l'horizon tandis que l'un des leurs... sûrement pas l'un des leurs en fait, de la façon dont la personne était traitée, frappée à coups de pieds par un homme armé et nerveux.... et donc tandis qu'un "volontaire" réparait la roue du véhicule immobilisé.

Trois véhicules légers, autrefois blancs, fenêtres ouvertes, et un pickup armé d'une mitrailleuse avec un tireur affalé, faisant une sieste presque debout, avachi sur un métal lui aussi recouvert d'un large tissu sale.

Le flou de la chaleur désertique était omniprésent et empêchait de bien discerner au loin, toutefois il y avait suffisamment de détails aux jumelles pour observer et comprendre la situation.

Aussi loin de la maison...

Les walkies talkies utilisés n'étaient pas cryptés et elles écoutaient ce qu'il se disait. Aux côtés des femmes vêtues à la façon des nomades du Sahra' de la région, un homme regardait par intermittence lui aussi. Il ne semblait pas forcément à sa place, plus inconfortable à rester immobile pendant des heures à cuire au soleil ou à se cacher derrière des rochers. Par moment, il apportait une réponse à une question que les femmes posaient avec un accent doux et cotonneux.



Oui, ils semblent avoir les mêmes origines que ceux que nous avions décrits.


Des preuves avaient été apportées aux femmes, mais leur mission était de collecter au maximum des informations sur la situation de plus en plus préoccupante. Il n'y avait aucune autre raison de la présence de ces véhicules que pour apporter la terreur, piller, voler et pire encore. La région devenait extrêmement dangereuse, cela se voyait au comportement, trop habitué à ce genre de situation, de ces individus.

L'une des femmes sortit une bouteille d'eau et s'hydrata, puis ordonna aux autres de se retirer.
Le compte rendu était à présent complet. Voilà plusieurs longues semaines que les forces spéciales relevaient des informations sur les groupes à l'oeuvre à l'orée de cette région. L'Etat Major donnera plus de détails sur la suite.
Se retirant avec discrétion et agilité, les femmes descendirent du promontoire rocheux et sablonneux pour se diriger vers un groupe de dromadaires à l'ombre dans un recoin du petit massif.
L'homme les accompagnant souffla, content de reprendre enfin le chemin du retour. Il portait sur ses sacoches le symbole très reconnaissable de la pioche verte.
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Logo d'un journal local.


4 janvier 2008 - La sécurité rapprochée du Prince Mutarrif ibn Saadin, un enjeu majeur de communication et de séduction.
Solofo Razafindrakoto, un gurre
Solofo Razafindrakoto, le garde du corps mandrarikan au service du prince Saadin.


Si le Prince Mutarrif ibn Saadin multiplie les apparitions publiques, il y a bien un tout autre personnage qui marque les esprits. Solofo Razafindrakoto, la manifestation grandeur nature de la virilité masculine au service de sa majesté, occupe une place importante dans le champ médiatique entourant le Prince, faisant l’attraction, identiquement à la personnalité publique qu’il a vocation à protéger.

Un personnage de l’ombre en pleine lumière, qui fait désormais l’objet de nombreuses discussions, tant par son origine mandrarikane, un pays exotique de culture et de moeurs, même pour l’Afarée, et qui s’est pendant longtemps fondu avec une relative aisance, dans le paysage politique régional que nous connaissons. Tantôt jugé impressionnant par les uns, tantôt considéré sexy par les autres, le garde du corps du Prince a pour lui de ne pas laisser indifférent, faisant réagir nombre des personnes, de l’entourage ou non du Prince. Retour sur un quadragénaire mandrarikan qui cumule à lui seul les fantasmes véhiculés par son audimat. Il ne manque pas une seule apparition du Prince Mutarif ibn Saadin et pour cause, il compte parmi le cercle intime de la gouvernance du clan Saadin. Son visage ne figure jamais loin de celui du Prince, partout où il est pris en photo.

En marge de ces représentations publiques, Solofo Razafindrakoto est également connu pour entretenir une communauté de fans, très orientée vers le culturisme. Dispensant des conseils de santé et de musculation via un blog et sans aucune vidéo en direct pour ne pas trahir la localisation du Prince Saadin lors de ses déplacements d’affaires, l’homme alimente l’image d’une figure sûre de lui et efficace, dans ses différentes entreprises.

Cette présence lors des évènements politiques phares entourant le clan Saadin, apparaît pour beaucoup comme une présence rassurante et inconsciemment favorable à l’influence du Prince en ce sens que le garde du corps est une personnalité connue, identifiée, de proximité, avec de nombreux internautes mandrarikans mais aussi kodedans.
Solofo Razafindrakoto, l’agent en sécurité rapprochée qui pourrait faire craquer les jeunes (et moins jeunes) kodedans?

Si jusqu’ici le Prince Mutarrif ibn Saadin traînait dans son sillage un audimat relativement âgé, compte tenu des sujets de prédilection abordés et largement tournés vers la politique ainsi que le développement territorial, l’alchimie entourant le bodyguard d’exception et le public a très vite permis un rajeunissement rapide de l’audimat, l’âge moyen du téléspectateur des allocutions du Prince perdant significativement de l’âge au gré des mois écoulés, passant de 41 ans en janvier 2017, à 34 ans en juin de la même année. Même si la portée politique du Prince se trouve encore très limitée, compte tenu des rivalités exacerbées avec le consortium kah-tanais qui multiplie lui aussi le trafic d’influence autour de ses zones de profits, les spectateurs pourront donc retrouver un certain intérêt pour le quotidien de l’aristocrate.

Pour le garde du corps tout droit venu des territoires pauvres mandrarikans et qui pensait déjà atteindre la consécration en assurant la protection d’une personnalité publique kodedane, c’est une heure de gloire qui n’en finit plus.

Depuis ses premières apparitions, les milieux sympathisants du Prince Saadin, largement formalisés dans les campagnes et les communautés beïdanes du pays, sont aux aguets, les divorcées et célibataires d’âge mûr n’en finissant plus de se pâmer, de se languir, de s’extasier à chaque présence marquée du bodyguard dans l’espace médiatique kodedan. S’il arrive que le Prince Mutarrif ibn Saadin lui-même glâne quelques compliments pour son charisme et sa prestance, c’est bien son épée et son bouclier qui récolte le reste des éloges. Un mal nécessaire car selon quelques études pseudo scientifiques, les femmes kodedanes tendent à s’émanciper et à s’investir dans le déroulement dans la vie politique du pays. Les intégrer d’une façon ou d’une autre au débat et à la campagne du Prince, peut contribuer à les inscrire durablement derrière le mouvement.

“Il est vraisemblablement prouvé, que les hommes votent sur des considérations intellectuelles, un programme économique engagé notamment, à contrario, les femmes misent davantage leur choix sur l’affect, et à ce titre, la carte séduction du garde du corps princier est un atout qui se tente” explique Nadir Laoussa, correspondant au Renegado au Kodeda. “Cette situation peut amener un lot d’instants cocasses” avait confié un membre de l’entourage du Prince, juste avant de nous parler de la fois où une quinquagénaire s’était trop approchée de sa Majesté pour espérer se voir bloquer par Solofo Razafindrakoto. “Exceptés ces instants mignons, la situation ne présente rien de critique pour la sécurité du Prince, qui n’en reste pas moins très imperméable lorsqu’il y a lieu de bloquer les mouvements de foule” tenait-il toutefois à préciser à notre antenne.

Il faut dire que l’homme a certes, le physique nécessaire pour exacerber les pensées féminines, mais il a surtout pour lui l’accomplissement d’une série d’actions déroulées aux côtés du Prince et de ses proches, qui fait jalouser partie des militantes. En effet, en le regardant ouvrir les portes, protéger d’une averse ou encore écarter un militant (ou opposant) trop virulent, Solofo Razafindrakoto nourrit l’image d’un homme d’exception, idéalisé à l’esprit de beaucoup des personnes le suivant, au gré des déplacements du Prince à travers tout le territoire.

Ses détracteurs disent à tort que le garde du corps s’est fait une notoriété grâce à la couverture médiatique du Prince Mutarrif ibn Saadin, il est raisonnable d’affirmer que ce n’est pas tout à fait vrai. Effectivement, le mandrarikan Solofo Razafindrakoto a eu une vie avant la conduite de missions de sécurité rapprochée pour des personnalités publiques kodedanes. Amateur de culturisme et de bodybuilding, le monsieur muscle au service du Prince entretenait déjà une importante communauté de fans. Outre son physique impressionnant, l’homme alimente également la toile par des contenus vidéos présentant différentes techniques de self-défense, ce qui lui vaut une notoriété vis-à-vis du public, au moins aussi importante que celle de certains conseillers du Prince qui agissent encore jusqu’ici dans l’ombre.

Une admiration qui transpire en ligne avec l’intervention de certaines militantes dont nous avons recueilli certaines publications.

“Alors si je comprends bien, aux conférences du Prince Mutarrif ibn Saadin, vous avez maintenant ses soutiens et les fans du garde du corps Solofo Razafindrakoto? ça va en brasser du monde, sortez le 2nd plateau de petits fours.” @Al-Bayzi94.

“Solofo Razafindrakoto est peut-être un pare-balles pour le Prince mais faut avouer que c’est surtout un putain d’aimant à femmes…” @Sinnara-yi

“Mesdames, sécurité rapprochée. Ok rapprochons-nous !” @Nassima-Makhloufi.

“Je crois que vu le nombre de nanas intéressées par Solofo Razafindrakoto, homme marié je suis sûr, c’est lui qui va bientôt avoir besoin d’un garde du corps… :) :) :) ” @TamaraMarik.

“La protection rapprochée du Prince Mutarrif ibn Saadin est-elle à l’épreuve des groupies?” @Mentor-Bachir.

Des éloges marqués et appuyés, dont le caractère sarcastique de certaines tournures n'enlève rien à l'importance du jeu de séduction qui s'opère réellement entre un agent de sécurité du prince et le vivier des militantes, dont une infime partie d'entre elles auraient même, retenu le nom du Prince Mutarrif ibn Saadin grâce à l'agréable présence de son bodyguard à proximité. Dans ces circonstances, il n'est pas possible d'être assez catégorique et d'affirmer que c'est l'agent Solofo Razafindrakoto qui fasse de l'ombre à la couverture médiatique du Prince car une (infime) partie de ses soutiens populaires l'a connu grâce à cette présence que certains dans le cercle rapprochée du Prince Saadin, viendraient juger comme indésirable.

Si le Prince et son entourage n’ont jusqu’ici pas commenté la notoriété grandissante d’un membre de la sécurité rapprochée de l’aristocrate, ces derniers semblent toutefois prendre cette notoriété en considération, avec l’éloignement systématique de Solofo Razafindrakoto lors des déplacements d’affaires du Prince et sa réaffectation beaucoup plus fréquente, à la protection de la famille du Prince.

"Il n'y a aucun lien permis entre les récentes réorganisations des équipes de sécurité actuellement dédiées à la protection du Prince ainsi que de sa famille, et les rumeurs publiques qui font états de malaise, dans la communication voulue par le Prince" cherchait-on encore à nous rassurer hier, après cette brêve allocution d'un membre du cercle restreint, le conseiller permanent Jawad El Bouragaoui. Dans les faits, il faut dire que le cercle rapprochée du Prince Saadin a de la matière pour profiter de cette notoriété, hors norme étant donné les fonctions de Solofo Razafindrakoto, particulièrement au sein d'une équipe souvent qualifiée de milices politiques par les opinions publiques, tant ces équipes ne peuvent avec la proximité quotidienne établie avec le Prince, que partager tout ou partie des opinions de la cible qu'elles protègent. Dans une conjoncture comme celle-ci, le choix d'exposer aux médias le garde du corps pourrait prendre tous son sens, même après avoir considéré les enjeux d'images et de discrétion à faire valoir.

Pour le politologue Chariff Bouzegaoui, le choix délibéré de davantage positionner l'agent Solofo Razafindrakoto sur la protection des proches du Prince Mutarrif ibn Saadin et non lui-même peut ne pas être une sanction mais une stratégie de communication encore non assumée. "L'agent Solofo Razafindrakoto jouit d'une certaine notoriété publique, que vous le fassiez apparaître dans un cadre ou un autre, à pâtir du moment où vous avez des éléments visuels rappelant la famille princière, sa visibilité en publique suffit à le rendre indissociable de l'aristocratie kodedane. Par contre, il est vrai que les présences combinées du Prince et de l'agent Solofo Razafindrakoto peuvent se nuire mutuellement lorsqu'elles sont cumulées en un même lieu. Il y a pour ne citer qu'eux, des enjeux sécuritaires à cela, car la présence de l'agent Razafindrakoto en un même endroit que le Prince peut contribuer à une montée de l'affluence du public lors des meetings, ce qui rendre plus difficile la délimitation et in fine la gestion, d'un périmètre de sécurité par les équipes chargées de la protection rapprochée du Prince.

HRP a écrit :Budget du clan Saadin = 132 518 points de développement + 9 536 points de développement = 142 054 points de développement.
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Nous sommes là !

La sororité Althajir n'a pas son pareil dans le monde. Le rapprochement Althaljir, établi avec la population Jazirati depuis le déclin et l'abandon de la Péninsule par le tout puissant Empire métropolitain, est au beau fixe. Alors même que les actions et influences internationales font généralement tomber des têtes et basculer des gouvernorats vers de nouvelles structures politiques, indépendantistes ou séparatistes, il y a un réel investissement au long-cours de la part de ce pays d'Afarée autrefois considéré comme la risée, un caprice Afaréen dont la mansuétude continentale lui permettait la survie.

L'Althalj devient depuis 2005 une puissance régionale, continentale et certaines pourraient déjà oser le terme de puissance mondiale.
Ambitieuse dans son programme d'ouverture à l'internationale, elle n'oublie pas son héritage matriarcale et son approche unique à la vie, la politique et aux relations internationales.
L'Afarée de l'Ouest n'est plus considérée comme un voisinage, mais comme un pré carré Althaljir, pour reprendre l'expression Eurysienne, lui permettant d'assoir d'autant plus son statut d'oasis au sein d'un continent sans vergogne.

Nous voyons une nette accélération des desseins Althaljirs à irradier l'Afarée de l'Ouest de sa bienfaisance.
Les journaux Eurysiens mentionnent la fauconnerie Althaljir et alors que le péjoratif se lit entre les lignes, la symbolique n'a jamais été aussi appréciée au sein des Tamurt n Althalj.
En effet, les Althaljirs voient dans les rapaces, un animal élégant, dont la patience et l'humilité sont appréciables.

L'Althalj prend de surcroît son essor au sein de l'Afarée et espère chaperonner les peuples frontaliers.
C'est aussi avec l'air débonnaire que la Maktaba entend consolider et étendre son influence.
Lorsque les gorges chaudes (au sens propre de la fauconnerie) ne suffisent plus, l'Althalj sait aussi hausser le ton, comme ce fut le cas lors de la crise avec feue l'Aricie.

Nous estimons qu'un ponton constant de plus d'une année s'est installé entre Shati Alqahwa et Icemlet. Une fois de plus, jamais une constance n'avait été aussi forte ces dernières années alors que les puissances étrangères se lassent ou décident d'user de méthodes discutables en général.

Mais le sage au regard hagard prédira sûrement que l'Althalj ne sait pas s'imposer dans un contexte qui favorise l'identité de l'Afarée de l'Ouest.

La Qari Ijja Shenna s'est entretenue avec les journaux nationaux et a abordé avec une certaine intransigeance les "méthodes outrageantes, de l'intérieur et de l'extérieur semant l'instabilité et le désarroi en Afarée de l'Ouest." Les inquiétudes ne se tournent pas seulement vers le Shibh Jazirat Alriyh, mais aussi vers le Kodeda plus au Nord Ouest où plusieurs retours journalistiques et d'ONG font état d'une dégradation grandissante de la sécurité, de plus en plus de bandits d'origines subsahrannes s'affichant au grand jour dans une contrée d'ordinaire calme.


Les territoires coloniaux Listoniens souffrent ou sont en passe de subir des souffrances inacceptables pour une Althalj attachée à la plénitude et au bonheur.










Althalj Alkabir



La Maktaba affiche, pour la première fois, depuis le discours de la Grande Responsabilité de la Qari Ijja Shenna, la volonté de rattachement des Territoires Libres du Sahra' aux décisions régionales Althaljirs.

Les chefs de tribus ou des communautés de ces territoires bordant le Sahra' et ainsi en partie l'Althalj ont été accueillis au sein de la Maktaba, le bâtiment de la capitale Icemlet, afin de les joindre à la Sororité, l'Assemblée prestigieuse Althaljir. Cocasse de voir autant d'hommes et de politiques non Althaljirs entrant dans le bâtiment le plus secret et ancien des Tamurt n Althalj ? Le choc culturel devrait être en partie atténué par le poids des responsabilités et l'honneur qui leur en revient de faire valoir leurs droits d'exister, de peser dans l'avenir Sahranne.

L'Althalj a investi une immense partie de ses dépenses militaires de 2005 à 2007 dans cette zone autrefois abandonnée et considérée comme insignifiante du fait d'un climat rude, d'un manque d'infrastructures, de faibles populations et aussi d'un sentiment de zone de non droit.
L'Althalj fut la seule à estimer la vie de ses habitants et, avec célérité, permit autant que possible à l'instabilité et au chaos de l'opportunisme du banditisme de ne pas s'installer des suites de la Crise des Courageux.

Ils étaient au nombre de 31. Affichant de magnifiques vêtements traditionnels, allant du simple au vêtement d'apparat, les Althaljirs auront pu apprécier le défilé de ces peuples soeurs au sein des rues d'Icemlet.

"... voilà peut être une vingtaine d'années que je n'avais pas vu de dromadaires en dehors des défilés des FMI... je pense avoir reconnu les Kel Immidir. C'est un honneur que de les voir parmi nous", précisait un passant de la place du Coffre.
Et cet artisan avait raison. Il avait bien reconnu les couleurs du Kel Immidir, suivi de nombreux autres prêts à rejoindre la table de la Sororité. Les Kel In Rar et Kel Ahnet n'étaient guère loin.

L'Althalj a déclenché des exercices militaires de grande envergure dans le Nord Althaljir, proche de la frontière Nord d'Asefsaf. La coordination régionale est d'autant plus grande que toute action des Tamurt n Althalj affectera ces Territoires Libres Sahrannes.


La Maktaba confirme la volonté d'intégrer en usant de plus en plus du terme "Grande Althalj" ou "Althalj Alkabir" depuis plusieurs semaines.








EXTRAIT des ARCHIVES du Almutasawilin a écrit :Quelques inquiétudes vis à vis de la centrale nucléaire d'Abassie aux frontières de la région d'Ifilku. Les ingénieures et instances Althaljirs ont été refusées l'entrée sur le territoire manquant malheureusement cruellement de fonds afin d'entretenir une antiquité Listonienne achetée par des Abassiens autocrates, ambitieux et sûrement bien peu regardant sur le long terme de leur mandat à la tête d'un peuple traditionnel et généreux.

La Maktaba n'a pas souhaité commenter pour le moment. Il semblerait que le ton se soit haussé entre les ambassadeurs alors que des rapports filtrent sur l'état de deux réacteurs dont seul le plus récent fonctionne encore pour une puissance estimée de 819 MW.
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Je ne sais pas quoi te répondre simplement à dire vrai...

Laisse moi formuler mes pensées.


La vieille femme porta à ses lèvres le breuvage noir et épais et le laissa se glisser entre les lèvres, les dents pour emplir l'arrière de la bouche. Ce liquide sombre apportait cette amertume que beaucoup connaissent autour de la langue et au fond de la gorge. Les effluves remontèrent et s'échappèrent par le nez pour englober pleinement les sens.
Presque machinalement elle se toucha le nez et sentit à la proximité du creux de la main, la douceur mielleuse de l'odeur de sa peau, cette douceur créée des fortes chaleurs, d'un équilibre alimentaire et de vie saine. Elle sourit de cette odeur régressive, quand elle jouait avec ses amis sur les abords de l'océan, les mains de sa mère lui essuyant le visage du sable et du sel en fin de journée, cette odeur si particulière qu'elle pensait autrefois que maternelle.



A l'orée de la décolonisation, le déclin impériale excite les égos.


Elle leva les yeux vers son interlocutrice. Dans la pénombre de la pièce, le soleil filtrait à travers des volets laissant quelques ouvertures finement travaillées, tel un moucharabié. Les couleurs de la pièce se focalisaient sur un brun, ocre et jaune par endroits où le soleil était permis.


Tu n'entendras pas les Tamurt n Althalj officiellement utiliser ce terme... "décolonisation"... car l'Althalj dispose d'une relation toute particulière avec son voisin de Lacrima di Perla. Imagine donc bien l'Althaj prôner la décolonisation en Afarée sans toutefois oeuvrer pour le territoire qui a apporté et apporte toujours beaucoup à l'Afarée de l'Ouest.

Non, je pense qu'elles ne cherchent pas une décolonisation en tant que telle. Elles cherchent avec tout à former un cocon de stabilité et "prospérité" pour reprendre le terme Fortunéen.

Ca fait désordre toute cette histoire au Shibh Jazirat Alriyh. L'Empire Listonien n'a pas été à la hauteur et a dérapé assez régulièrement ces dernières années vis à vis des Courageux ou Jazirati alors tant bien même que l'Althalj peut influencer en son sens ou soutenir ce comptoir colonial, l'arrivée des armées Listoniennes a certainement froissé la Maktaba.

Voilà plusieurs décennies déjà que l'Afarée dispose d'un complexe d'infériorité, mais en plus un Matriarcat Ilâhmique, branche de l'Islam, d'ordinairement traditionnelle dans cette partie du monde, prospère dans une région autrefois oubliée du globe pour en faire un havre économique et social d'intérêt à dimension internationale...

Bah oui, ça fout les boules quand juste à la frontière, les méthodes employées ne diffèrent pas de l'époque de l'Eurysie colonisatrice.


Elle s'arrêta pour écouter l'interlocutrice et hocha de la tête en plissant les yeux comme pour mieux assimiler ses dires. Il faisait chaud... les militaires Listoniens souffraient sûrement de ce climat désertique. Pourvu que la chaleur n'exaspère pas ou n'énerve pas.


Oui enfin, la légitimité n'est pas que héréditaire. Soyons honnêtes avec l'Histoire ; les dirigeants, autocrates, royaux, démocrates et autres survivent en jouant un jeu que nous connaissons tous que trop bien.

L'équilibriste est au pouvoir ce que le vent est au navire.
Pas de vent et l'équipage se mutine.
Pas d'équilibre et la révolte s'active.

Là, Listonia a laissé à l'abandon ses territoires coloniaux et maintenant que l'Empereur a fait du nettoyage en métropole, il s'attend à un retour à la "normale".
C'est toutefois à travers le choc d'évènements exceptionnels que la plénitude de la paix, des beaux jours ou du statu quo, est mise à mal.

Et là tu as raison lorsque tu évoques le fait que le Shibh Jazirat Alriyh a joué de malchance, car la Péninsule a été loyale et calme lorsque ses homologues n'ont pas hésité à tourner le dos à Listonia.
Naïveté, je ne sais pas. Je dirais que la pondération du Gouverneur O Prefeito est certainement louable lorsque la métropole Listonienne démagogue et nationaliste dispose toujours de casseroles diplomatiques.

Je ne suis pas aussi d'accord avec toi sur le point suivant : c'est que le Shibh Jazirat Alriyh n'a pas acté une volonté loyaliste de retour sous le giron impériale, tout comme des pincettes ont toujours été prises afin de signifier une prise de position sur une "indépendance" territoriale.
Okay, on se rappelle des discours du Gouverneur au plus fort de la crise. Il suffit aussi de voir les femmes dans la rues, orienter le débat politique et social vers un avenir Althaljir, mais des solutions intermédiaires sont envisageables, si tant soit peu qu'elles ne se dévoile tel un écran de fumée qui serait interprété comme un camouflet pour les Jazirati.


J'ai bien peur que les négociations entre militaires et politiciens soient inadaptées pour des raisons de desseins et d'approches antagonistes.


Elle fit une pause et toutes les deux laissèrent le silence prendre place sans en être importuner. Après quelques longues minutes de réflexion et d'appréciation du moment, elle lança en soupirant.


Au final, nous resterons des spectatrices et non des actrices du changement.


1604
800 kilomètres à l'Est de la contrée de Kodeda


Je le sens... tu verras.

Hume et ressens le changement dans l'air sur la peau.


La jeune femme lâcha les rênes et écarta les bras.
Se laissant bercer par le roulement de la démarche de la monture avec une souplesse et facilité expérimentée, elle n'avait pas besoin de se tenir.
Après des mois, années à monter, la monture était comme une extension naturelle du corps et une symbiose s'instaurait avec le temps, les deux êtres se faisant mutuellement confiance.


Tu sens ou pas ?


La femme plus âgée, le visage découvert, yeux dorés, lui montra l'arrière de la main, où quelques poils effleuraient l'air. Elle regarda un instant et sentit en effet une différence dans l'air. La pression ? Un changement de vent, plus constant ?
Le groupe s'arrêta sur l'ordre de la femme au visage découvert et toutes descendirent, presque à l'unisson.
Deux femmes à l'arrière de la colonne escaladèrent à grandes enjambées la dune jouxtant un monticule rocheux et s'allongèrent à l'ombre de celui-ci une fois arrivées au sommet. Sortant jumelles et fusils, elles scrutèrent l'horizon tandis que le gros de l'unité commença à décharger les dromadaires.



Nous aurons besoin de tenir jusqu'à la fin de ce qui arrive. Faîtes en sorte que les attaches soient solidement fixées. Je m'attends à ce qu'il soit gros celui-là.


La seconde en cheffe s'approcha et confirma l'information avec un message crypté reçu par les Etats-Majors de la Force Matriarcale.
Les tentes furent installées.
Des cordes attachées aux pieds des dromadaires pour éviter qu'ils ne se perdent ou s'éloignent de trop et enfin les provisions furent ensevelies à l'ombre des rochers.



Nous rejoindrons la Force Alyaqaza dés que nous le pourrons. La Mutadayin a précisé que le régiment sera bientôt au complet. Nous attendrons les ordres dés lors.




HRP a écrit :Campement militaire en construction à 500km à l'Est de Kodeda.
27623
Après des mois de déploiement, il serait attendu de la part des détachés de la haute manne qu’ils s’ennuient. L’ennui était le propre de la guerre et un bon soldat savait sans doute que le déploiement, quelle que soit la mission le justifiant, donnerait lieu à plus d’attentes, à plus de grands moments de vide et de solitude, qu’autre-chose. Les fusillades sont brèves et rares, les batailles composées de grands mouvements et de longs silences. Les opérations, des détonations occasionnelles donnant suite à la folie des officiers qui se pensaient assez intelligents pour contourner par leurs tactiques celles déployées par leurs cibles. L’attente, enfin, était omniprésente. C’était l’acte ultime de l’armée. Son incarnation la plus parfaite, bien qu’inconnue du grand public, infilmable disent les studios imbéciles, qui croient sincèrement plus intéressant de filmer des images fantasmées des tueries, des batailles où l’héroïsme, ce fantasme d’adolescent, a la part belle, que le long déclin psychologique des hommes et femmes confinés dans l’attente explosive du moment final. Comme autant de casseroles couvertes, dans lesquelles monte une pression explosive qui ne pourra s’exprimer qu’en termes de violences, de peur, d’explosion, d’aliénation. Avant toute chose, c’est l’aliénation, au sens le plus adapté il faut croire. L’aliénation au sens ancien, socialiste, primordial. La violence existe dans la nature, on pourrait même parler de guerres entre animaux sociaux, qui aiment s’exterminer à l’occasion. Mais l s’agit moins de guerre que de conflits, de batailles en un acte. L’humanité a développé la tendance, puis l’a industrialisée, et a donné naissance à un nouveau genre de conflit : la guerre. La guerre. La terrible et abominable guerre moderne. Aliénante, donc, en ça précisément qu’il n’est pas utile d’y participer en amenant quoi que ce soit de l’animal ou de l’homme. On y participe en tant que carcasse, que création creuse. Invention ultime de la civilisation, centre brûlant de tout les efforts de société, la guerre est pourtant la négation de ce que l’humanité moderne prétend généralement défendre. Les droits humains, le respect, la construction d’un monde nouveau. Injustifiable sur le plan moral et éthique, même l’auto-défense passe pour suspecte auprès de qui a un semblant de conscience. Ce pourquoi on hurle généralement aux soldats de ne pas en avoir. On les presse pour qu’ils oublient. Il faut tuer l’homme dans le soldat si on espère le voir tuer. L’autre méthode consiste à camoufler la guerre. Les conflits asymétriques sont plein à craquer de ces méthodes. Mettre autant d’interface, de distance virtuelle ou physique que possible entre le soldat et l’être qu’il va être amener à détruire. L’Homme est une espèce constructive. Il faut briser l’homme si on souhaite lui demander de détruire.

Aliénation. La position de celui ou celle qui s’oublie soi-même, oublie ses priorités, oublie ses intérêts. Aliénation, position de celui ou celle qui intériorise ce qui le dégoûte et accepte de souffrir pour des intérêts qui ne l’auraient jamais intéressé si on ne l’avait pas déconstruit par la situation et l’apprentissage. L’ouvrier veut manger on l’exploite comme un esclave pour le propriétaire. Le soldat aussi veut quelque-chose. Défendre son pays ou sa maison, lutter pour la paix, dans certains pays financer ses études. Il oublie qu’il ne protège rien, ne défend rien, est juste là pour tuer, si besoin. C’est là encore un acte d’aliénation. Le soldat est parmi les prolétaires les plus oublieux de ses propres intérêts. Qu’est-ce, on se demande parfois ? N’y a-t-il pas une dose de volontaire ? L’armée moderne est souvent l’armée de métier. Celle des hommes et femmes qui acceptent de se sacrifier. Sacrifice sordide et injustifiable. C’est une création de la société, il n’y a rien de naturel ou d’élémentaire dans l’acte militaire, l’acte soldatesque. Tout ce qui est artificiel, sociétal, construit, peut-être analysé, critiqué, déconstruit. Le soldat moderne mérite qu’on s’arrête sur lui et qu’on le déconstruise. Sinon il est condamné à s’ennuyer sur le front, jusqu’au jour où il tuera. Traditionnellement, les kah-tanais parlaient de Gardes. Et ils connaissaient les notions de théorie, savaient comme d’autres que la guerre était l’infamie la plus obscène du monde moderne. Ils ne croient pas en rien, ce qui est rend naïf et permets de justifier leurs écarts de conduite : les révolutionnaires sont anti-guerre, les révolutionnaires sont pacifistes, pourtant la révolution est un combat, et la lutte des classes souvent armée. C’est le privilège de celui qui a un rêve d’oublier les faits. La Garde existe car le Kah sommeil encore. L’Armée du peuple est vue comme belle car on a tant expliqué le pourquoi de son être. Les détachés de la haute manne ne sont pas des soldats au sens où on l’entends traditionnellement ; L’Armée de l’Union est la réponse moderne à une question vieille comme le monde de la pensée libertaire. Si tout est révolution, comment l’Armée peut-être fonctionne en révolution. Il n’y a pourtant rien de plus rigide, de plus fermé, non ? C’est qu’on pense toujours aux armées du vieux monde. On croit que parce qu’il n’existe que des armées de pays autoritaire, il ne peut pas en exister d’autres. On a pensé la même chose, de façon stupide et insensée, des pays. Il n’y a que des monarchies féodales et des républiques bourgeoise. Point de place pour le peuple sur le banc des puissants. Et maintenant ? La Révolution n’a-t-elle pas essaimée tant de fils et filles ? Son armée aussi est une expérience. La critique des armées révolutionnaires se fait souvent sous la forme d’une attaque contre ses principes et leur efficacité. Les gens confondent hiérarchie et ordre. Ils pensent qu’il ne peut pas y avoir d’ordre sans hiérarchie parce qu’ils sont imbéciles, et éduqués en individualistes. L’individualiste et un être aliéné, sacrément aliéné, qui apprend à tenir son humanité à l’écart, comme les gens biens tiennent leur bestialité à l’écart. Il croit que tout est rapport de force et d’égoïsme, et qu’il n’existe au mieux que des regroupements forcés ou par la force ou par le besoin d’hommes et femmes. Ils ne croient pas, même quand ils le voient, aux forces humaines et altruistes. Aux regroupements d’idées et de volonté, au volontariat du travail commun. Ils ne conçoivent pas qu’une force armée puisse se faire sur les bases du volontariat réel. Ils méprisent les soldats, il faut le dire, du haut de leur position bourgeoise. Ils les méprisent car ils sont des prolétaires, mais qu’ils défendent leurs intérêts dans un acte de pure soumission. Et les méprisent tant que dans leur esprit étriqué, soldat et policier devient synonyme de tout ce qu’ils prennent de haut comme acquis. L’ordre, la sécurité de leur système et de leurs intérêts. Même quand elle prend le pouvoir, l’armée le fait souvent pour a classe supérieure. Ainsi personne là-bas ne comprend ces corps de volontaires, ces brigades et ces milices d’hommes et femmes qui acceptent de travailler à un même but, et ne questionnent pas leurs officiers, pas plus qu’ailleurs, s’ils ont appris à leur faire confiance. Ils ne peuvent pas comprendre ces armées dont le fonctionnement ne laisse pas de place à la corruption. Car la démocratie dissous la corruption, qui est en fait son antithèse. Personne ne comprend qu’on peut tuer, qu’on peut s’aliéner – c’est vrai – en toute connaissance de cause, qu’il existe des gens armés qui ne défendent pas leurs maîtres mais leur être, et que ces gens forment la garde. Ils ne comprennent pas la beauté d’un corps armé créé en quatre ans sur des théories utopiques. Ils disent, en imbéciles, « mais il faut des années pour former sans violence ! » comme si respecter les hommes les rendait plus incapables. Ils sont coincés dans une vision du monde d’imbéciles. Il faut des années, aussi, pour briser le soldat et l’envoyer se faire tuer. La formation militaire est une chose sérieuse et longue, qu’on s’y prenne en libertaire ou en enfoiré. Et la Garde s’y est toujours prise au mieux, constamment. Les hommes du kodeda sont issus de ce héritage à la foi si jeune et si vieux. Derniers nés d’une armée de la révolution, du armée qui EST la révolution. Ils se sont enterrés ici en connaissance de cause et préparent, minutieusement, la mission qui a justifié leur présence. De longs mois s’écoulent, invisibles sous la terre des montagnes centrales.

Les hommes y sont arrivés par la voie des airs, du sol, invisibles comme des ombres, au milieu du bordel et des tueries, de la bataille constante de leurs aînés de l’aviation légère, de leurs rivaux de l’armée listonienne, contre les pillards mandrakiens. Voleurs, assassins, pillards de tout ordre : il existe une presse pour en parler comme autre-chose que des animaux au service d’un tueur gras et imbécile. Elle est d’autant plus idiote qu’elle vise à toucher un peuple qui se fait quotidiennement assaillir par les créatures. Dites à cet homme qui a vu sa femme emportée, à cette femme qui a vu ses enfants déchirés, à ces enfants qui ont vu leur maison brûler, regardez-les dans les yeux et dites-leur, avec votre sourire hypocrite de grand bourgeois, que les tueurs sont des gens biens, qu’ils sont beaux et forts, et là pour aider. Cet homme, cette femme, ces enfants, ne vous cracheront pas au visage. Parce qu’ils savent que demain, s’ils le font, ce sera à leur tour de disparaître. La violence intimide, mais ne gagne pas les cœurs. Le travail, l’apprentissage, l’altruisme et la sécurité les gagnent. Et ceux-là sont kah-tanais. Dehors, la bataille éternelle fait rage autour d’un chantier qui n’en termine pas de promettre et d’exaucer. Combien de familles tirées de la misère ? Toutes. Combien d’enfants scolarisés ? Tout. Et des paies si hautes dans la région, employée en priorité à améliorer les conditions de ces villages, suivant les conseils avisés des amis kah-tanais qui s’exercent à empêcher les travailleurs de virer petits bourgeois. Ils gagnent honnêtement leur argent, qu’ils l’emploient honnêtement. Ils le font. C’est à travers ces terres acquises que les soldats se sont déployés. Le plus dur fut de faire passer le gros œuvres,mais dans une région à la fois passoire et marchande, c’est tout à fait réalisable. Combien de marchandises de contrebande, de mercenaires étrangers, de pièces de contrebande passent la frontière ? Combien de temps cela pourra-t-il continuer ? Et les hommes sont passés. Maintenant ils sont partout, comme des garnisons informelles et secrètes. On en trouve dans les villages, les petites villes, travaillant aux champs ou sur les chantiers, présent aux réunions politiques dans les caves de la grande ville. Les kah-tanais sont omniprésents. Ils parlent la langue, ne font pas de vague, pas un bruit. C’est l’armée des insoupçonnés. Pire, des inremarqués. L’armée de celles et ceux auxquels on ne peut rien reprocher même si l’on sait, à un degré ou un autre, ce que leur présence incarne, finira par incarner. La mort, mes amis, mais pas pour vous.

Ils ont ce qu’ils appellent la Fourmilière. Certains parlent aussi de ruche, car les deux mots ont quelques similarités en syncrelangue, mais c’est définitivement plus une fourmilière. Une base creusée à même la montagne, à la discrétion des ombres millénaires, réseau de tunnels anciens recyclés, réhabilités, personne ne s’y rend, il y a trop de galerie pour trouver celle ou la reine kah-tanaise a essaimée sa portée d’ouvrières. Elles sont toutes arrivées en même temps, pour former la communauté ultime des invisibles. L’enclave d’une armée qui attend, et s’ennuie. Lot de la guerre et de ceux qui y prennent part. Lot si utile que pour rien au monde on aurait eu pitié des déployés. Oui, il n’y a ici rien d’autre à faire que le long travail de la préparation, l’entraînement, l’entretien des armes, tout est bon pour occuper l’esprit pendant que les experts, les officiers du renseignement, contrôlent la situation et la ville. Le réseau invisible est omniprésent, suit à la trace toutes les actions de tout les individus. Cellule principale, centre nerveux d’une gigantesque initiative de délation et d’analyse. Des yeux partout, autant d’oreilles. Les taupes, les rapporteurs, les agents infiltrés et ceux qui ne savent même pas qu’ils sont agents. Ils forment les pseudopodes d’un être immatériel qui, pourtant, voit et entend tout. Kodada n’est pas sous écoute. Elle est infiltrée comme par certains de ces étranges parasites marins, s’infiltrant dans la carapace des crustacés et s’attachant leur système nerveux, ces créatures flasques et blanches, occupant tout l’espace de la carapace, doivent bien savoir ce qui se passe dans l’esprit rudimentaire des crabes. Hurlent-ils à l’aide jusqu’à leur mort d’épuisement ? L’expérience kah-tanais tend à prouver que non. L’expérience kah-tanaise tend à prouver que le crabe ne sait même pas ce qui lui arrive. Il continue d’avancer, suit sa vie normale. Un jour sa carapace explosera et sa chair sera libérée des contraintes que la nature lui a imposées. Le crabe deviendra autre-chose de plus beau, de meilleurs, le parasite, pour sa part, pliera bagages. C’est plus un symbiote, dans les faits. Et un symbiote extrêmement bien organisé. Malgré quelques changements d’officier aux postes clefs lors d’élections, la grande structure n’a pas changé. Une haute pyramide au sommet de laquelle se trouvent hommes et femmes issus des meilleures écoles d’officier de l’Union. Loin du petit chef traditionnel qui émergent de ce genre d’académie, ils incarnent al compassion et la ruse. On y retrouve plus du chef de bande, accepté car appréciable, doué et intelligent, que du jeune premier incapable d’empathie ou d’adaptation, catapulté à la tête d’une centaine de vieux barbus détestant la vie et tout ce qu’elle peut encore leur « chier dessus ».C’est ce que fait la vie des soldats, lorsqu’elle est dictée par les officiers. Eux aussi sont des bourgeois : ils font des ronds de jambe pour mieux déféquer sur vos intérêts. Pas ceux du Grand Kah, donc. Ils dirigent un corps d’élite qui sait ce qu’il a à faire et quand il doit le faire, mais n’attends que les instructions bienveillantes et celui ou celles dont ils ont plébiscités la position du fait de son efficacité. C’est que tout le monde est très anxieux. On a pas mis les mots sur la nature du Kodeda et de son indépendance à venir. On a pas mis les mots par peur de ce que laisserait éclater la transparence. Que verrait-on une fois débarrassé de la cloison du langage militaire ? La guerre et la terreur, immanquablement. Les gardes n’ont pas besoin de ça. Tout est trop important pour qu’on se laisse aller à définir des termes que l’on comprend implicitement. Déjà, il n’y a pas de rapport entre le détachement et les évènements qu’il allait provoque. Tout ça était de la faute de l’occupant Listonien. S’il devait y avoir une guerre, plus précisément, s’il devait y avoir une révolution armée, ce serait du seul fait que les conditions historiques et matérielles s’y prêtent. Sans entrer dans un discours de causalité, la Garde n’était-elle pas elle-même déployée en vertu d’accords et de décisions que l’on expliquait elles-mêmes que par la situation HISTORIQUE ? N’était-ce pas là tout le principe ? Il n’y avait aucune décision à l’œuvre, on suivait des courants de l’histoire, sans cesse plus violents à mesure que son cour s’escarpait et s’accélérait. Bientôt on arriverait à une cascade et les particules se disperseraient dans l’air. Brumisation de l’Histoire, il n’y aurait plus ni structure ni continuité, seulement la force brute de la chute. Application de la physique à la métaphore dialectique, bientôt l’heure sera trop sombre pour y penser. On se refuse pourtant à y penser. C’est un refus quasi-mystique, comme si les évènements cachaient des secrets de fabrication, quelque-chose de magique qu’il ne fallait pas comprendre sous peine de le perdre.

Mais ce n’est pas une raison pour ignorer, ne pas se préparer. C’est une suite d’évènements auxquels on ne peut rien faire. L’histoire ne s’arrêtera pas. Jamais. Jamais sous l’effet de ceux qui ne s’y préparent pas. Elle incarne la vitalité, cette force qui a justifié jusqu’aux premiers jours de la civilisation : tout est faim, tout est repas pour substanter cette faim. Il y a bien entendu le libéralisme, qui n’est que chiure d’oie et ne comprends pas la faim. Le libéralisme gave car il croit qu’on satisfait mieux en abusant du système et des hommes qu’en acceptant la faim. Il n’accepte pas la faim car la faim est la vie, et le libéralisme, pour sa part, l’idée de la mort. La mort est mise à mal par la révolution, qui elle aussi est la vie. Il faut la prendre en compte, savoir qu’elle approche. S’y préparer. Les gardes déployés s’y préparent. Grouillant dans les sous-sols propres et modernes de leur base souterraine, ils planifient l’avenir de la région par l’action coup de poing. Bientôt il ne restera plus d’opposants à la victoire de tout les travailleurs, car la fin de l’Histoire, si elle n’est ni proche ni possible pour l’heure, reste l’objectif que l’on cherche à accomplir. Peut-on accélérer l’histoire ? Le désir d’accélérer l’histoire n’est-il pas une conséquence de l’histoire même ? Lorsque l’on croit accélérer l’histoire n’est-ce pas son cours qui s’accélère, et nous qui y participons ? La poule, l’œuf. La révolution et le révolutionnaire. Travailleurs de tout les pays, etc. La guerre se prépare et on en a la certitude sans cesse renouvelée. Les évènements sont les augures de leurs successeurs et on lit dans leurs entrailles, sitôt qu’ils passent, ce que l’avenir réserve. La guerre, oui. Donc on attend et on s’ennuie, anxieux. Mais moins qu’au début Le rapport de force à changer et ce n’est plus une région étrangère que l’on traverse. Ce n’est plus un Kodeda sauvage, tout pétris de l’infâme oppression de tous par quelques-uns. C’est une terre mûre, qui tombera d’elle-même si on ne l’accompagne pas. Lorsqu’un fruit tombe, il essaime moins sûrement que lorsqu’on le plante. Laisser une plante mourir c’est un crime contre la vie. Le Grand Kah s’imagine jardinier.

La situation change. Il y a des oppresseurs qui font mine de collaborer mais qui ne préparent qu’une chose : la fin promise de leur histoire. Ils se regardent et se serrent la main. L’armée de la Listonie, les barons du Kodeda. Ils se haïssent. Ils se méprisent. Ils n’ont pas le choix de faire autrement. Ils sont si insignifiants, si faibles. Ils sont si comme ça, si typiques. Le premier éclat de violence incarnera la fin de leur Histoire. Ne le savons-nous pas ? N’est-ce pas très exactement ce dont il est question ? Il n’y a aucun doute à avoir sur le fait qu’ils ne peuvent pas préparer un conflit réel pour le moment. Ils ont besoin de chaque homme pour tenir leur position, et ils en ont peu. La révolution du kodeda sera une guerre de quelques-uns pour le destin de tous. Les fusils sont jetés dans la rue comme autant d’occasions manquées. L’avenir sera rouge, camarade. Rouge sang, rouge révolution. Les soldats se regardent en chien de faïences avec les gardes du corps. Ils occupent l’aéroport ce qui leur assure la survie : tant qu’ils tiennent l’aéroport les alliés du prince ne pourront débarquer dans la région : on laissera le tenir encore et encore. Qu’ils tiennent, petits soldats, qu’ils tiennent c’est bon pour tout le monde. Et leur navire, seul au port. Une belle pièce d’intimidation, rappelant à tous où se trouve l’Empire et ce à quoi il pense. Les empires rêvent-ils ? Peut-être de soie et de dorures. D’empire propre de conquête glorieuse. Ils ne croient pas à la réalité de la colonisation car ils fantasment leur oppression. Ou bien, cruels en plus d’être sots, ils apprécient l’acte de la violence et se font plaisir à imaginer toute la destruction mortifère qu’enfante leur régime. C’est un grand bordel de sang et d’os brisés. Celui des esclaves, des familles soumises, des humains réduits en bête de somme. Il n’y a rien à dire de positif sur ces colonies. Le navire, silencieux dans le port, rêve et attend. Il fantasme des jours qui ne viendront pas, qui ne sont jamais venu.

Pendant un temps on avait peur de lui, et des cinq cent hommes qu’il transporte. On croyait qu’il représentait un risque. Il avait fallut de l’observation par les meilleurs, les tulpas, ces invisibles excentriques, moins humains qu’esprit voyou, pour comprendre qu’il n’en était rien. Le navire était un animal qui, loin d’être innocent, pouvait être vaincu comme dans un mythe, par l’usage d’une force suffisante. Inconnue des Listoniens, des batteries de missiles kah-tanaise attendaient leur heure. Il n’y aurait pas de guerre entre l’Empire et l’Union. Ni l’Empire ni l’Union ne le voulaient. Il n’y aurait pas de guerre entre l’Empire et l’Union, mais il pouvait y avoir du conflit. Les crimes devaient être stoppés. N’était-ce pas la position qui avait justifié la prise de la Mährenie ? N’était-ce pas en ce nom qu’on tuait, parfois, et sans attendre ? Alors oui, le vaisseau pourrait repartir. On n’avait aucun grief contre lui. Mais on pourrait le tuer. Si la bête insistait pour être monstrueuse, il faudrait l’abattre. On en avait les moyens, on attendait tous l’heure avec anxiété. Au sol c’était différent et il y avait plus prioritaire. On parlait assez peu du grand soir promis, dans la fourmilière où grouillaient les gardes. Ambitieux mais visionnaires, ceux-là voyaient ce que leur réservait l’avenir immédiat. Un autre éclatement des poudres, d’un genre tout à fait différent. Il fallait qu’un homme paie pour ses crimes, et ceux-là étaient nombreux. L’homme avait fait tuer, violer, piller et détruire. L’homme était un pur imbécile et allait le payer, car ce qu’il avait fait, ce qu’il avait commandité, il l’avait commandité sur des kah-tanais. De tout les crimes possibles, il n’y en avait qu’un seul que l’Union ne pardonnait pas : celui de tuer les siens. Les criminels n’étaient jamais chassés sans raison. L’interventionnisme avait toujours une cause. C’était la faute à l’État de droit. La justice n’autorisait pas de telles actions sans des preuves et du concret. Tyran, que cela vous serve de leçon ! Restez dans vos frontières, ne tuez pas le kah-tanais, ou ses frères viendront vous chercher. Ils viendront chercher le prince. Le plan était complexe sans être compliqué. Sans cesse remis à plus tard pour préserver l’équilibre des forces. Il était impossible de ne pas être admiratif devant son élégance et les moyens mis en place pour le réaliser. La victoire était non-seulement promise, mais presque déjà acquise. L’homme qui avait fait tuer des kah-tanais serait surpris non-pas d’être enlevé, on ne lui ferait pas l’honneur d’utiliser les termes du martyr ou de la victime, mais d’être, très ouvertement, amené devant les tribunaux avec l’accord de l’Empire et du peuple. Le peuple n’ignorait pas ses crimes, placardés partout en ville, les fermes et corps carbonisés brûlaient la rétine et s’imprimaient dans la conscience collective. Il n’y avait pas d’autre moyen d’apprécier ou comprendre l’oppression qu’en voyant la pure violence, la jubilation, de ses exécutants. Les soldats imbéciles dont on parlait plus tôt. Ils étaient là, aux ordres de la bourgeoisie éternelle et sophistique. Il était maintenant temps de comprendre où cela pouvait mener. Au cimetière, oui, et à la fin d’un règne puant et nécrophage. La machine de l’argent, le libéralisme, huile ses mécanismes au sang du travailleur. Le travailleur, maintenant, est protégé. Bon salaire, syndicat, une armée populaire aux portes du royaume, sous ses montagnes, belle bête que celle-là, attentive à l’avenir et à ce qu’il risque de donner dans les jours à venir. Et il ne faut pas avoir peur d’être précis : il risque de donner des morts, principalement des morts, qui engraisseront à leur tour un arbre fruitier. La terre sera un jardin. Combien d’os dans les racines du verger ? C’est peut-être là le principal crime de l’oppresseur. Bien qu’il ne s’en rende pas compte, il empêche le changement d’advenir sans violence. Parce que son régime est cannibale, il impose tous le goût de la viande, parce qu’il est mortifère, il crée un système où tout doit passer par là. La différence étant que le peuple, lui, ne manque pas d’empathie. Son armée tue sans le goût du sang. Des anthropophages ascétiques.

On s’y prépare. La tension dans l’air ne ment pas : l’heure de l’orage approche. Ce sera une explosion d’eau et de sang, de plomb et d’alliages rares. La mécanique de la guerre fait appel à la mécanique des éléments, inutile de nier leur lien, les anciens le savaient bien, et leurs mythes font notre culture. Tout est culture. L’interprétation même du monde est culture. Alors qu’on le veuille ou non, la guerre est météo, il pleuvra, bientôt, jusqu’à la dernière goutte de sang, damné comme innocent, et mourront les derniers jours d’une atmosphère sombre. C’est la guerre qui se prépare, sensible et palpable, l’air électrique pulse comme une artère. Il gonfle et s’opacifie, et les gens tremblent sans savoir pourquoi. Tout est secret. Des plans à leur résolution, mais on sent déjà un changement approcher. Ces femmes étrangères bâtissent un camp à l’est. Pourquoi ? Elles aussi viennent pour la guerre ?

C’est une question encore sans réponse. On promet d’y réfléchir, d’envoyer tulpas et ambassadeurs pour rencontrer celles-là. Et de quel droit ? Le Grand Kah n’est rien ici. Si. L’investisseur d’un projet de route. Alors c’est décidé ? Bonjour mesdames, que font vos fusils si près des nôtres ? Venez-vous tuer ou voir ? Êtes-vous des libérées ou des oppressées ? Venez-vous forger des chaînes ou briser celles des esclaves ? Franchement ce serait si simple si en dehors du problème de la discrétion il n’y avait celui de la timidité. Le Grand Kah est un pays, mais souvent, aussi, compris comme un être. Un être tendu, philosophe, sensible et taiseux, volubiles en proverbes. Ce n’est pas le Pharois qui ose parler à tous, ce n’est pas les EAU qui n’ont peur de rien. C’est un être de contradiction et d’inquiétudes. Plutôt attendre que risque de leur parler, alors ? Non. Il faut savoir. Kah est une roue, elle doit tourner, avancer. Ce qui se dresse sur son chemin peut être rampe ou obstacle. Il faut s’en informer à l’avance, pour forcer les évènements à évoluer comme on le souhaite. Les femmes dans le camp militaire seront contactées. Plus tôt qu’elles ne le pensent. Peut-être pensent-elles qu’elles ne le seront pas. On peut croire que personne n’est aussi naïf mais c’est vrai : certains agissent sans comprendre qu’il existe un monde physique au sein duquel toute action entraîne sinon une conséquence, au moins une réaction. Elles construisent ce camp et savent bien que cela apportera quelque-chose d’autre : un changement, peut-être. On viendra leur dire bonjour et l’avenir seul portera les promesses de ce que cela pourra signifier dans leur esprit. Mais elles doivent le savoir. Au moins à un degré animal, inconscient. La question étant dès-lors : pourquoi n’ont-elles pas communiquées avec nous ? Avec les Listoniens ? Oh, nous savons qu’elles ne leur ont pas parlé. Les tulpas sont partout et savent tout. Le capitaine, le petit chef dépêché par l’Empire, a vu les femmes, mais pas à ce propos. Sur un autre sujet. On a pas creusé, on en sait pas plus. On sait ce que l’on veut savoir et ça, on s’en moque. Alors pourquoi ? Pourquoi venir sans demander quoi que ce soit ? Sans revendiquer la nature de leur présence ? Jouent-elles la carte de la discrétion ? Elles sont si souvent silencieuses qu’on tend à oublier tout ce qu’elles ont à dire. Elles ne disent rien à dessein, c’est assuré. Ce qui en soi promet déjà la violence du futur. Elles sont ici chez personne et donc chez elles. C’est très inquiétant. On ne sait jamais ce que vont faire les gens, lorsqu’ils sont chez eux. La guerre ? Pourraient-elles réagir à la guerre ? Il ne saurait y avoir d’escalades. Pas avec elle. Après des heures et des jours de débats, on décide qu’elles sont des alliées. Oui, on ira leur parler.

Fort de ces multiples conclusions et de l’avenir que lui promettent ses plans, la fourmilière s’endort et rêve de sang.


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Une rumeur qui suit son chemin.

Parfois il convient d’oublier ce que l’on croit savoir. D’abandonner la théorie pour l’observation pratique des choses. Les faits, bien souvent, ne font pas mentir la théorie, mais tendent à la confirmer par des biais que l’on avait pas envisagés en premier lieu. Un tel détournement de la cause et de la conséquence oblige, dans une logique scientifique autant que politique, de revoir toute la théorie. La conclusion est bonne, les données de départ aussi, pourtant quelque-chose ne passe pas dans le calcul. La question étant dès-lors : est-ce un problème ?

Depuis qu’elle était au Kodeda, l’Ingénieure se posait constamment la question. Est-ce un problème ? Est-ce un problème ? Elle ne venait pas en avocate d’une pensée précise. Elle ne venait pas défendre, comme les chantres du marxisme et les vendeurs d’illusions capitalistes, offrir une pensée préfabriquée. Sa théorie était celle de l’action. Plus flexible encore, qui s’adaptait à ses propres manquement et savait avouer ses erreurs. Tout de même, le modèle théorique devait servir de mode d’emploi. Pas de révolution sans déboucher, pas de déboucher sans système. Elle venait armée de ce système. Système imparfait, système qu’elle devait constamment réparer, modifier, comme l’ingénieure de bord d’un vieux bateau croulant, réparant ses turbines grinçantes, hurlant quelques instructions qui, l’espérait-elle, permettrait à l’ensemble – et plus important, à son équipage – d’arriver à bon port.

Le peuple s’en moquait bien. C’était peut-être l’élément le plus étonnant. Celui qu’elle n’avait, pour le coup, pas vue venir. Aglaya Lilich était une défaitiste dans l’âme. Défaitiste mais obstinée, une combinaison qui ne lui permettait que de bonnes surprises, ayant déjà prévu toutes les mauvaises. Éléments qui faisaient aussi d’elle une bonne révolutionnaire, selon ses camarades. Le peuple s’en moquait bien, parce qu’il lui faisait confiance. Ce point était hautement perturbant, d’autant plus que la confiance avait aussi gagnée les hauts. Les élus, représentants, petits chefs. Que ça vienne des chefs traditionnels, ces vieillards qui finissaient gentiment leur temps, et qui seraient un jour remplacés dans leurs villages et quartiers par des conseils et des comités, c’était encore audible. Mais quand les communistes locaux, les indépendantistes de longue date, les corporations d’artisans eux-mêmes abandonnaient leur souveraineté ? Lui déléguaient, pour le temps de la révolution à venir, une part si importante de leur pouvoir ?

Ces gens étaient si intensément libertaires. Pour beaucoup ils ne le savaient pas, mais Kah est roue, ancienne et neuve, et ses racines sont celles de sociétés tout aussi anciennes que celle du Kodeda traditionnel. Ces gens, ils ne le savaient pas, étaient des libertaires. Ils apportaient plus d’importance à la parole donnée qu’à l’argent prêté. Plus d’importance à la confiance qu’aux écrits. Ces gens déléguaient leur pouvoir, acceptaient de remettre leur destin entre les mains de celui ou celle qui donnait les preuves et ses intentions. C’était une société d’ordres silencieux et discrets, qui n’attendaient qu’à disparaître pour laisser place une fois de plus, à la société horizontale. L’horizontalité laissait place à des rapports non-plus de domination, mais d’entente. C’était la base des anciens de village, de quartier, de temple, ceux-là qu’on écoutait non-pas parce qu’ils disposaient d’un pouvoir réel, mais plutôt, car ils avaient l’expérience, et la confiance de chacun. Ces gens, lorsqu’ils remettaient leur pouvoir à d’autre, verbalisaient l’acte de subordination, faisaient un bond immense. C’était presque, déjà, comme s’ils étaient morts pour la Cause.

Mais pas morts pour longtemps, se disait encore celle qu’on surnommait l’Ingénieure. Elle repense à son éducation d’Orthodoxe, et se revit brièvement assise sur les bancs d’une église. Ces lieux sordides et scintillants, tout de richesses volées parées. Elle en gardait un souvenir douloureux et vif. Celui d’une obligation qu’on lui imposait, chaque jour un peu plus. Elle n’était pas tombée hors de la religion en entrant dans l’anarchisme. Tout au contraire, elle avait sauté dans l’anarchisme, car la religion, du haut de sa compréhension de jeune enfant, d’adolescente puis de jeune adulte, lui avait semblée injuste. Hypocrite dans ses fondements et son existence. De bout en bout, une chaîne de mensonges et d’interprétations qui en arrangeait quelques-uns, au détriment de tout les autres. Comme toute chose dans ces sociétés pourris. Elle les vomissait du plus profond de son être, mais remerciait ses parents de lui avoir fait sourire ce calvaire abominable. Au moins savait-elle contre quoi elle luttait, contrairement à ceux qu’on appelait les alliés. Les éduqués, les bourgeois sympathisants. Qui comprenaient sur le plan intellectuel, ce qui était déjà tout à leur honneur, mais n’avaient jamais ressenti l’instant et l’humiliation dans la viande qui souffre, à qui on inflige autant de microblessures que de microagression. Le symbolique devient fait, et l’on crève un peu, chaque jour. Elle verbalisait ça en termes brefs. C’était plus simple, avec les éduqués. Plus simple de répondre sans s’étaler. Leur soif de comprendre était blessante. On ne pouvait pas leur en vouloir. Elle ne leur en voulait pas. Mais l’auscultation froide de leur raison sur les blessures qui la faisaient la rendait folle de rage. Jamais contre eux. Toujours contre le système qui décidait que certains seraient des bêtes de foire et d’autres un public empathique. Non. Plus de public. Plus de bêtes de foire ! Seulement des hommes. C’était toute la base de tout le projet, et de tout ceux qui suivraient. Aux intelligents elle disait ceci, fixant dans leurs yeux avides et cultivés les siens sombres, déterminés, cachant sous le paravent de la révolution la souffrance de la fillette. «Oui. C’était ainsi. » Et pour soulager leurs questions incessantes, sans jamais se laisser aller à l’amertume. « Lisez tel texte. Il l’exprime bien. L’étude d’untel donne de bons chiffres. S’il vous faut de l’émotionnel, il y a ce journal, d’une fille remarquablement similaire. Il dit tout ce qu’il faut savoir. » Elle botte en touche, garde son linceul de mystère. Elle l’aime bien, en un sens. Cette souffrance est son jardin secret, a jamais inexprimé en dehors des discours tonitruants, poing levé vers le ciel, vers l’avenir, devant un parterre de prolétaires qui eux, enfin, compatissent. Pas d’empathie, mais de la compassion. Celles et ceux qui souffrent comme elle souffrait, et comprennent qu’il est possible d’arrêter, enfin. La chair parle à la chair, tout s’exprime, les idées fusent. Le mot est dit, prononcé. Révolution.

A l’époque elle ne le prononçait pas. Elle ne l’aurait jamais prononcé seule. Pas plus que les prolétaires qu’elle éduque maintenant aux mots qui rendent puissants. Elle était l’enfant que l’on traînait dans ces lieux putrides Ils parlent d’église, mais ce sont des nécropoles ; Celles des idées, des ambitions, de tout ceux qui croient au potentiel humain plutôt qu’à celui des puissants, sanctuarisés par une religion idiote ; Elle se revoit encore.

Il fait toujours froid dans les églises, si Orthodoxes fussent-elles. L’or n’isole pas, et on a beau en couvrir les murs, des mosaïques aux immenses portraits dorés, il fait toujours aussi froid. Les murs, au moins, gardent le froid constant. En hivers il ne fait pas plus froid qu’en été. C’est le froid de la mort, une saison en elle-même. On y entre par petits groupes. Toujours en famille, la cellule familiale est un mensonge des puissants, elle est invitée à participer comme telle pour renforcer sa forme dans l’esprit des gens. Réalité n’est que pensée faite fait. La famille doit être renforcée par les institutions pour garder sa prévalence. La petite foule approche depuis la grande rue et passe la porte à l’appel des cloches. Les hommes sévères et barbues, les enfants silencieux, qui croient parce qu’on leur impose, parce que comme un cheval auquel on a mit des œillères, ils ne voient pas d’autre chemin. Et les femmes. Leurs belles chevelures coincées sous des châles ternes, endimanchées comme pour un enterrement. Fermées, silencieuse, qui s’interdisent de prier ce pourquoi elles voudraient vraiment des réponses. Les femmes entrent. Elles sont méprisées par le lieu même où on leur impose de passer. La femme, dans la société capitaliste comme religieuse, est un être de seconde zone. Dans le couple, aussi, elle est le prolétaire.

La foule passe le seuil et s’engouffre entre les immenses piliers, les bancs de bois sec et froid, des nids d’échardes comme la couronne du Christ. Il y a une certaine beauté dans l’indécence des lieux. La monumentalité a ses effets. Dans beaucoup de révolutions, on changea les églises en réserves. Réserves de poudres. Magasins d’alimentation. Parfois aussi en hôpitaux. Les cathédrales, jamais. Elles sont trop immenses, trop magnifiques, et trop froides; Mortes. On ne laisse pas de nourriture, ou de grands blessés, dans un charnier. Pas si on peut l’éviter. Le monument survie à l’époque, peut-être doit-il être réinventé; Comme au Grand Kah. A l’époque elle ne connaissait pas encore le Grand Kah. Même à l’école on en parlait jamais que comme un secret bien gardé. Elle comprit bien plus tard pourquoi. Au Grand Kah, en tout cas, ils protégèrent les églises et les cathédrales. Comment les remercia le culte catholique ? Comment les remercia le culte Protestant ? Mal. C’est le terme. En s’alliant systématiquement aux ennemis du peuple, et en perdant, à chaque occasion, un peu plus de la place qu’on lui tolérait. Maintenant c’était une église d’anarchiste, tenu par celles et ceux qui comme elle, toute enfant, honoraient la foi pour ce qu’elle était, dans les textes, dans l’histoire. Elle y repensait souvent.

Le Christ sur sa croix, matraqué et brutalisé par les Rémiens. Comment le révolutionnaire par essence était-il devenu l’image de tout les oppresseurs ? Enfant elle ne pensait pas la question comme ça, mais en termes différents, conclusions similaires : elle faisait mine de prier. Se questionnait. Pourquoi. Pourquoi des églises si riches quand il fait si froid ? Pourquoi des prêtes si vieux, si sentencieux, habillés d’or et de pourpres, osaient-ils demander à ceux qui ne pouvaient se chauffer tous les soirs un genre d’aumône ? Pourquoi parlaient-ils en leçons de morales, en ordres, en obligations si souvent incompatibles avec les propos même du Seigneur qu’ils prétendaient représenter ? Que des hommes, exprimant une sale loi d’homme. Le Christ existait, historiquement. C’était un fait, indépendamment de la nature réelle de sa chair. En oubliant tout mysticisme, en se concentrant sur l’aspect factuel et historique, on obtenait pourtant une figure claire, non ? Les prophètes de l’Évangile n’étaient pas les vieux barbus conquérants des juifs. On s’éloignait des rois et des princes guerriers, de ces gens adorant un Dieu dont la seule vertu était de les consacrer. Le Christ était cet individu profondément opposé au système Rémien, à ce système qui enfanta le monde occidental, qui enfanta à son tour le monde moderne, à comprendre capitaliste. C’étaient sur cette opposition bizarre que tournait le monde. La morale de l’Église était devenue la morale des hommes. Pourtant, les humanistes, les socialistes, arboraient la morale du Christ. L’homme-Jésus était contre la violence. Contre la guerre. Contre les empires. Contre la possession individuelle. Contre le marché. Conte le mercantilisme. Il était pour l’amour. Pour l’égalité des hommes, pour une vision des choses définitivement communale, anarchisante. C’était la raison de sa mort aux mains des premiers grands oppresseurs. Au final c’était aux anarchistes de brandir l’étendard de la croix. Non. Pas de la Croix. La Croix était l’outil de l’oppression, ce qui en faisait le symbole parfait des religions nécrophages qui émanaient de l’interprétation mauvaise et scabreuse de la mort du Christ. Mais le Christ lui-même. Sa couronne d’épine. Son corps tuméfié par la violence des empires. Cet homme était mort avant tout les autres pour la liberté. Et enfant, l’Ingénieur l’avait plus ou moins compris. En tout cas elle ne comprenait pas pourquoi entre ce que disaient les psaumes, et ce que disaient les hommes récitant les psaumes, il y avait un tel monde.

Tout le monde peut comprendre, à son degré personnel, ce qu’est l’oppression. Tout le monde peut trouver révoltant le mensonge, la fausseté, les manipulations. Les termes n’ont pas besoin d’être posés en d’immenses discours sur la nature de l’économie, et la théorie du pouvoir. Les choses sont simples. Le monde est compliqué, mais les choses sont simples; Tout est question d’émotions, de ressenti, puis de faits. Les faits aussi sont simples : on vous exploite. C’est ainsi.

Aglaya Lilich pour autant, n’en considérait pas moins la théorie comme quelque-chose de sérieux. Et quand on lui avait demandé spécifiquement de prendre la tête de la révolution à venir, sa première réponse avait été de rire, puis de secouer la tête, enfin de refuser. Et ils avaient insisté.

Mais. Elle était une blanche ? Une orthodoxe ? Jamais elle ne serait le visage d’une révolution anti-impérialiste. La colonie serait sauvée par ses propres habitants. Elle ? Elle n’était qu’un outil de plus à leur disposition. Là pour faciliter. Alors, lui avait-on dit, soit un outil, et dirige ce qui doit l’être. D’autres représenteront. D’autres représenteront. L’idée lui allait, jusqu’à un certain stade. Maintenant tout était différent : elle n’était plus la femme qui parlait et qu’on écoutait d’une oreille distraite, plus ce bruit de fond insidieux qui présentait les plans et murmurait les solutions. Elle était celle qu’on mettait, dans les meetings, au sommet d’une estrade, et qui levait le poing, qu’on imitait en criant. Elle avait même le droit de rire, d’être plus humaine, on lui avait pardonné jusqu’à sa nature d’étrangère. Et ça l’avait beaucoup étonné.

« C’est que quand on a beaucoup donné pour un pays, même s’il n’est pas le nôtre, on finit par en devenir un citoyen. »

Ou, moins poétique.

« La révolution n’a pas de couleur ou de nationalité. Toi ou une des notres, une arabe, qu’est-ce que ça peut leur foutre. »

Vrai. Qu’est-ce que ça peut leur faire ? Sauf que symboliquement ça change tout. C’est bien ce qu’elle avait dit aux Kah-tanais quand il y avait eu ce foutu vote, et qu’on l’avait envoyée, elle seule dans un camion baché, traversant toutes les localités de la grande pleine sèche, sur cette route minable que les grands travaux remplaçaient; Elle leur avait dit, «Symboliquement, je ne veux pas être une sauveuse. D’accord ? Je suis juste une alliée. Mais il y a déjà des indépendants. Des gens du cru.» Elle pensait alors au Parti Communiste du Kodeda, et à leurs alliés sociaux-démocrates, qui étaient en fait plus des nationalistes pan-arabes, sans pour autant perdre leurs racines marxistes. «Ce sont ces types-là qui doivent sauver la région. Pas une blanche. Surtout pas une blanche.» Elle vomissait le principe du sauveur blanc. Ce type, bourgeois par excellence, qui croyait pouvoir réparer les erreurs de ses ancêtres, qui profitaient jusqu’à maintenant à son pays, à son style de vie. Ce type qui ne remettait jamais en question les causes de sa propre richesse, mais qui l’utilisait pour... Sauver ? Usurper les luttes des minorités divers. Car c’était bien ça, de l’usurpation. Jamais donner plus de visibilités à un combat qui méritait d’être mené. Jamais offrir des moyens ou des outils à des gens qui n’en avaient pas. Toujours prendre leur place. Devenir la tête d’affiche. Se pavaner dans les médias du système, les médias des dominants. C’était un moyen pour eux de prendre le contrôle, de neutraliser les luttes.

Bien entendu elle n’était pas une bourgeoise et ne venait pas neutraliser quoi que ce soit. Révolutionnaire comme elle l’était c’était même tout le contraire : elle venait - et avait très efficacement - radicaliser tout un pan de la société. Cependant elle savait que c’était l’image qu’elle pouvait donner, et voulait par-dessus tout conserver son anonymat, et ne pas devenir le visage d’un néo-impérialisme qui prendrait la place du précédent sous prétexte de l’abandonner.

Mais bon. Les gens du coin, eux, ne s’en faisaient pas. Tant mieux, tant mieux.

l y avait eut une réunion importante du PIK. Généralement celles-là s’organisaient en début de soirée, et s’annonçaient une semaine à l’avance par des biais détournés qui changeaient à chaque fois. On ne faisait confiance, pour passer les messages, qu’à des agents parfaitement sûrs. On ne faisait confiance à personne. Toute la ville était sous le siège. L’Armée, le Gouverneur, le "Prince". Des puissants qu’une absence remarquable de soutien populaire ne décourageait pas, employant leurs grandes fortunes, le résultat de leur pillage, le fruit de leur régime esclavagiste, pour financer tout un réseau d’informateurs secrets. De traîtres divers, mercenaires haïs et puants dont le destin le plus probable était de mourir, généralement un coup de surin entre les côtes, mais peut-être bientôt dans les geôles d’une nouvelle république populaire. La Révolution avait cet effet d’ordonner les choses, et de changer les traîtres identifiés en condamnés. Remarquable chose que l’état de loi. Cette fois ç’avait été un enfant, qui était parti des quartiers indigènes pour faire son rôle de petit coursier, remettant à l’Ingénieure une enveloppe où se trouvait une carte, dans laquelle se trouvait un poème. Le poème était un code, qu’elle interpréta grâce aux chiffrements du mois, dont elle se souvenait par cœur. Elle savait désormais où se rendre et quand, il suffisait d’attendre quelques jours encore.

C’était mercredi. Le vent soufflait, chaud et humide, remontant du port et charriant dans ses bourrasques l’odeur forte du poisson et du labeur. Toute la façade maritime était couverte de selle, des quais léchés par les vagues aux immeubles traditionnels, couverts de torchis jaune, des quartiers autochtones. Le barrage installé par les militaires était des plus poreux, surtout à cette heure, et on arrêtait jamais que les Arabes. En femme blanche, Aglaya Lilich passa sans problème : elle devait faire affaire dans la haute-ville, comme su surnommait ironiquement ces zones perchées sur la colline, où s’amassaient tous les Arabes, donc tout les miséreux. La haute-ville. Ironique, oui, pour désigner un ghetto. Une "zone de non-droit" que l’on savait vaguement aux mains des indépendantistes du PIK. Pas que l’étonnante coalition d’individus ait jamais fait quoi que ce soit pour s’attirer les défaveurs du gouverneur militaire. Au contraire, en matière d’indépendantistes ils étaient un modèle à suivre. Si on oubliait les quelques morts et disparus, pauvres agents d’un gouvernement qui savait bien que ceux-là, officiellement, ne pouvaient être morts que de "conflits inter-ethniques", le Parti de l’Indépendance ne faisait pour ainsi dire rien. Rien que des choses légales. Limite bien en vue. Du commerce, de l’encadrement de jeunes qui avait l’effet tout à fait populaire auprès des blancs de désengorger les rues, des associations chics, bon genre, où l’on pratiquait des activités sociales ou sportives tout à fait acceptables en bonne société : de la mécanique, de la cuisine, apprendre à réparer un poste radio à cultiver certaines plantes dans certaines conditions. Tant de choses, en fait, qui permettaient concrètement d’économiser de l’argent et, à l’avenir, d’assurer l’indépendance des travailleurs durant la grève, en premier lieu, puis lors de l’indépendance, en second lieu. Et ces activités attiraient de plus en plus de monde ! Oui, après tout, un travailleur, même s’il n’est pas très politisé, pas même très en colère contre l’occupant colonial, ou le petit patron qui l’oppresse, un travailleur aime toujours économiser de l’argent. Quand ses collègues l’invitent pour boire quelques bières et apprendre à réparer un téléviseur ou à cultiver ses légumes sur sa fenêtre, il en ressort grandit, qu’il le veuille ou non. Et qu’il le sache ou non, il apprends aussi la solidarité de classe. Un jour ce sera lui qui, comme ça, amènera d’autres collègues à ces réunions. Et lors du Grand Soir, il comprendra d’instinct où vont ses intérêts et ses convictions.

Mais ça, bien entendu, le gouvernement ne le comprend que très marginalement. Qu’un parti dit de l’indépendance encadre la masse laborieuse; Qu’il se change en parti de masse, cela n’inquiète pas vraiment, tant qu’on a la sensation que les pauvres sont maîtrisés. Après tout, le PIK a ses entrées dans l’administration. Plus important, il en a, et pas qu’un peu, dans le monde de l’économie. Alors bon, c’est en soi qu’il est respectable. D’ici dix ans il entrera au parlement, et toutes les belles places gagnées par ses élus finiront de le castrer. Il oubliera la révolution, entrera dans le rang. Et avec lui les ouvriers qu’il embarque dans son rêve imbécile.

Aglaya Lilich chantonnait sur le chemin. Les gens la reconnaissaient. Déjà au barrage, certains des militaires se souvenaient d’elle, et elle leur rendait la politesse. Elle était cet étrange morceau de femme, peut-être une travailleuse humanitaire, que les Arabes appréciaient bien. Elle était toujours aimable avec les militaires. Une fois ou deux elle leur avait offert des fruits ou une bouteille. C’était sincère : ces types étaient des ennemis de classe, oui, mais aussi et surtout des êtres humains. À leur parler elle apprenait à dissocier les deux, bien qu’au moment voulu elle les jugerait sur leurs actions.

Les habitants des hauts-quartiers, ensuite. Les enfants, surtout, l’aimaient bien. Ils étaient aliénés par le système d’oppression coloniale, de telle façon que pour eut, blanche voulait dire, d’une certaine façon, riche. Et riche, d’une certaine façon, bien. Éthiquement bien. Ils la regardaient avec un mélange bizarre de crainte et d’envie, et le temps passant, ses passages se multipliant, avaient acceptés sa présence dans leurs rues. Depuis ils lui avaient trouvés des surnoms, et elle avait appris à les connaître. Bien se comporter avec les enfants c’était gagner l’approbation des parents. La plupart, de toute façon, étaient liés d’une façon ou d’une autre au PIK. Et, d’une façon ou d’une autre, savaient qu’elle y avait ses entrées. Ils la respectaient. À une ou deux occasions elle avait été invitée pour prendre part à une cérémonie familiale ou religieuse; Des genres de tests, de ce qu’elle en comprenait, qu’elle avait toujours réussie grâce à son profond et sincère respect des gens de la région.

Remontant les rues, elle prenait toujours les petites ruelles qui longeaient les limites extérieures du quartier, les façades des vieux immeubles. Ces passages grimpaient de terrasses en terrasses, offrant une vue à la fois belle et triste sur le port, où siégeait encore le navire de combat listonien, et les avenues adjacentes. Un spectacle dont elle ne se lassait pas. Pas plus que des vents chauds, de leur odeur entre l’étouffant, le répugnant et proprement vivant.

Quand elle arriva sur le lien de la réunion, on lui ouvrit la porte et la fit entrer sans poser de question. Elle était, comme toujours, attendue.

Puis le portier lui dit, et ce fut à ce moment qu’elle comprit qu’ils étaient prêts à passer aux choses sérieuses - mais aussi qu’on allait lui imposer la charge de la direction des opérations révolutionnaires : « Ils vous attendent tous. C’est le moment, on dirait. »

Eh bien soit. Mais si elle était nommée cheffe, elle se garderait le privilège d’en décider. Il n’y aurait pas de révolution précoce, ou avortée. La guerre serait menée de la bonne façon ou pas du tout. Et elle croyait, dur comme fer, qu’elle pourrait s’assurer que les choses se fassent bien.

En définitif, c’était un beau mercredi soir.
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logos des services secrets alguarenos et du Clan saadin kodedan.

24 août 2008 - CONFIDENTIEL - Après la réussite de la révolution populaire varanyenne, la Fédération d'Alguarena serait le meilleur atout à jouer pour l'indépendance du Kodeda voulue par le Prince Mutarrif ibn Saadin.


Prince Mutarrif ibn Saadin
Après les investissements de ce dernier dans les activités aéroportuaires stratégiques du pays et la corruption de fonctionnaires, le Prince Mutarrif ibn Saadin flaire les opportunités auprès de la Fédération d'Alguarena, dont il espère un soutien militaire assumé, identiquement au cas varanyen où la révolution s'était vue équipée et épaulée au combat, par des forces armées alguarenas.

Aux chaleurs locales et aux fortes températures, la situation politique du Kodeda venait ajouter une nouvelle pesanteur. Manoeuvres militaires kah-tanaises dans le nord du pays, jeu trouble des administrations impériales qui tendaient la main à une faction tout en laissant les pieds et mains libres à une autre, le panel des forces politiques présentes sur zone se troublait, laissant un voile opaque et sombre sur lequel il était difficile de dessiner le futur kodedan. Une incertitude palpable, tant les consultations chez un astrologue ou un medium avait doublé dans la province kodedane, là où les praticiens emprunts d’un certain charlatanisme pouvaient exercer sans s’exposer à la critique des institutions religieuses musulmanes, davantage installées dans les centres urbains.

Malgré cette ambiance sans pareil, c’était une journée d’un bleu parfait, marquée par un ciel et une océan qui se reflétaient l’un sur l’autre. Un de ces cadres que les touristes eurysiens auraient volontiers pu envier à cette période de l’année, à un mois de l’automne, cette saison qui ne voyait se dévêtir, que le feuillage des arbres.
S’il y a bien une saison qui devait pourtant inspirer le Prince Mutarrif ibn Saadin, c’était bien le printemps. Etrange mélange de renouveau et de traditionalisme, l’éminence avait récemment réussi partout où il ne l’attendait pas, et ses aspirations pour le pays ne décroissaient pas, promettant un renouveau palpable pour ce petit grain de sable au sein de la grande famille “afaréenne”.

Galvanisé par un élan populaire remarquable, épaulé par les services secrets alguarenos, et soutenu par un réseau de fonctionnaires corrompus le Prince avait dans sa manche quelques atouts qu’aucun de ses ennemis locaux, qu’ils soient de l’administration militaire listonienne ou des influenceurs kah-tanais, ne pouvait se targuer d’avoir. Une guerre au Kodeda? Chiche ! La théorie du chaos était un contexte favorable aux personnes telles que le Prince, habituées à tirer les épingles d’un jeu dont il laissait volontiers croire aux autres qu’il ne connaissait pas les règles.

Remplumé par un dispositif de protection rapprochée née de l’arrivée de plusieurs mercenaires mandrarikans de renom, le service de sécurité du Prince sollicitait parallèlement le concours du renseignement alguareno, pour espérer anticiper les dangers et prendre les initiatives dans un échiquier politique en perpétuel mouvement.

Le renseignement et l’armée alguarenos ont-ils un rôle déterminant à jouer dans l‘orientation du conflit politique larvé au Kodeda? Depuis l’intervention militaire kah-tanaises dans le nord du pays, assurément !

Le recours aux forces armées kah-tanaises par les autorités impériales listoniennes, contraint ou souhaité par ces dernières, traduisait au mieux pour un aveu d’échec des autorités listoniennes à assurer la sécurité de leur territoire ultramarin en Afarée, au pire pour une marque d’inféodation à cette manifestation internationale malfaisante qu’était le Grand Kah.
Dans ce contexte, les agents de l’OISF redoublent d’assiduité pour leurs rendez-vous téléphoniques avec le chef du clan Saadin. Des échanges essentiellement dirigés vers des points de situation sur l’ordre public sur place et l’avancée de certains projets, exprimée à travers des noms de code.

Pour les directeurs des agences et des institutions gouvernementales en Alguarena, la place laissée libre aux côtés du clan Saadin constitue un appel du pied, en vue de construire une collaboration fondamentale, dans la pacification afaréenne et l’identification des débouchés commerciaux dans cette région, facilement malléable eu égard à l’effondrement progressif des différents régimes aristocratique locaux, à l’instar de l’Empire Varanyen. La parrallèle entre l’Empire Varanyen et Listonien est pour une partie de la classe politique alguarena, évident, tant les deux empires se complaisent à nier la réalité sociétale de leurs époques, entraînant peu à peu la décolonisation de leurs espaces souverains, pour un pouvoir trop accaparé et des concessions vers plus de représentativité tardivement envisagées.

La politique étrangère listonienne, imbuvable pour les principales nationales de la scène internationale, était le poison quotidien subi par les territoires ultramarins. Perte de partenaires commerciaux, craintes d’un conflit latent avec certaines puissances étrangères malgré l’éloignement de la métropole impériale, étaient des sujets d’inquiétude permanents qui rongeaient peu à peu, la qualité de vie et la confiance des citoyens résidant en outre-mer.

Les élections présidentielles alguarenas pouvant altérer l’intérêt à court et moyen terme de la Fédération pour le Kodeda, le Prince Saadin et les agences de renseignements alguarenas souhaitent voir s’accélérer le calendrier d’intervention alguareno, particulièrement sur le front des fournitures d’armes, amorcées depuis le premier semestre 2008 et dont le retard de traitement pourrait altérer la suite des opérations.

Après un soutien militaire réussi à la révolution varanyenne, qui lui a ouvert les portes de l’Est Afarée par l’installation d’un régime amical stable, les agences du renseignement alguareno sont prêtes à renouveler l’essai, cumulant les éléments à charge contre les actions interventionnistes kah-tanaises, afin de motiver une intervention militaire durable au Kodeda, pour l’en expulser.

La proximité diplomatique instaurée entre la Fédération d’Alguarena et la République Varanyenne, pourrait être une base solide pour justifier la présence d’une force militaire alguarena sur le continent afaréen. Une force opérationnelle conséquente et permanente qui, au déclenchement des troubles dans la province du Kodeda, pourrait apporter si ce n’est une capacité logistique décisive étant donné l’éloignement équidistant du Kodeda vis-à-vis de la Fédération d’Alguarena et la République du Varanya, une certaine légitimité à l’intervention armée, compte tenu des nombreux coups d’états et tentatives de putsch fomentés par les autorités kah-tanaises, en Mahrénie et au Pontarbello pour ne citer qu’eux.

L’intervention alguarena durant la révolution varanyenne a marqué une certaine inflexion dans le domaine des interventions militaires à l’étranger. Avec elle, ces projets ont désormais comporté d’ambitieux souhaits de refondation des sociétés et de l’appareil exécutif lui-même, au sein de ces États, marqués du colonialisme.

Après l’intervention militaire alguarena au Varanya, la Fédération s’est bâtie une légitimité et une crédibilité, dans l’aide aux révolutions démocratiques. Un soutien déclaré de la Fédération d’Alguarena n’est pas anodin après son engagement dans le conflit varanyen. Dès lors, si les aspirations kodedanes tendent effectivement vers plus d’émancipation vis-à-vis de l’Empire listonien, il y a fort à parier que des tractations vers les autorités alguarenas soient nécessaires pour les indépendantistes ou en tout cas si ce ne sont les indépendantistes, des tractations initiées par le Prince Saadin, soucieux de s’offrir plus de latitude dans la gestion du pays, lui qui constate le recul grandissant de l’autorité impériale dans ce territoire ultramarin. L’intervention armée de la Fédération d’Alguarena au Varanya a été portée d’une certaine manière, porteuse d’espoirs pour tous les courants kodedans, sympathisants du monde Pan-paltoterran, désireux de renverser la table. Considéré comme un état failli, l’Empire du Varanya avait effectivement ouvert la voie à une série de contestations populaires durement réprimées par le régime, motivant l’intervention militaire de plusieurs acteurs internationaux dont la Fédération d’Alguarena en tête.

Par son effondrement politique à l’international et son effondrement économique au niveau national, après s’être vu criblé de sanctions subies ou émises vers les principaux acteurs mondiaux du commerce, l’Empire listonien occupe un statut bien peu différent de son homologue. Une pente glissante pour l’un des derniers empires eurysiens, sur laquelle il essaie de tenir, ménageant une série de parties prenantes étrangères et nationales, à couteaux tirés pour installer leur influence là où l’Empire a vocation depuis plus d’un an déjà, à perdre la sienne. Là où le Varanya présentait des signes de répressions et de persécutions policières contre sa population, le Kodeda ou plus communément appelé à l'international, l’Empire listonien, a toutefois la particularité de ne pas avoir franchi cette ligne rouge auprès de ses populations locales, ce qui rend l’emballement des vautours autour de ce dernier, moins enthousiaste. Néanmoins, devant le naufrage économique amorcé et le souhait grandissant des territoires ultramarins listoniens à recouvrir la prospérité, les initiatives hostiles à l’emprise impériale pourraient se multiplier et les lobbies entourant le clan Saadin, ne dérogent pas à la règle, tractant le service du renseignement alguareno pour diriger le pays vers une révolution en devenir, un raz-de-marée nécessaire telle la vague qui balaie les écritures inscrites dans le sable, pour permettre à un autre passant d’y faire page blanche et de concevoir l'instant à son image et selon sa pensée.
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