Le coeur serré et la gorge nouée, il passa la porte tambour en ayant le réflexe de poser sa main gauche sur un pan qui tournait sans avoir besoin d'aide mécanique.
Il se ravisa lorsqu'il comprit que rien ne servait de pousser.
Des hommes et femmes en costume et tailleur lui emboîtaient le pas, mallettes, sac à dos en cuir et sac à mains tendances et luxueux.
Avec son costume et chaussures achetées en grande surface, il se dit qu'il était possible qu'il fasse tâche...
Dans l'immense hall d'entrée, un long comptoir, à quelques mètres des portes tambour, permettait à quatre réceptionnistes de faire l'accueil et diriger les arrivants vers des sièges et fauteuils confortables dans un espace lounge d'entrée ou de les faire directement passer par la sécurité et des portiques permettant d'accéder aux ascenseurs.
L'homme se plaça derrière un homme regardant toutes les cinq secondes sa montre, attendant son tour pour parler à une réceptionniste.
Enfin, l'homme pressé fit un pas en avant et il fit de même, restant à distance de celui-ci, pour laisser quelques espaces de confidentialités.
L'homme pressé grommela et alla s'assoir sur un fauteuil confortable, prenant une sorte de sac mallette en tissu, tendance dans le Nord Aleucien.
Il s'avança à son tour et la réceptionniste fut ravissante et sans le regarder lui dit un bonjour des plus enthousiastes.
- Que puis-je faire pour vous, Monsieur ?
Sans s'en rendre compte, il avait déjà répondu, machinalement, il savait exactement ce qu'il devait dire. La réceptionniste pianota sur un clavier qui ne faisait presque pas de bruit lorsque les doigts appuyèrent et percutèrent les touches ; un doux son étouffé qui rappelait que l'Alguarena était le pays avec les technologies les plus avancées et cette entreprise n'y dérogerait pas, pour sûr.
Derrière le comptoir, un logo immense miroitait dans une video où des avions et des réacteurs étaient mis en valeur, dans un "trailer" d'entreprise vraiment impressionnant. Sur le marbre blanc et gris immaculé, des plantes et fleurs endémiques parfumaient et embellissaient l'espace avec ravissement.
- Bien entendu, le Directeur Angel Saez vous attend au 19e étage. Un agent de sécurité va vous accompagner.
Elle leva la tête pour la première fois et l'éblouit d'un sourire radieux l'espace d'un court instant. Elle tourna sa main gauche et paume vers le haut, elle l'enjoignit à suivre un gorille en costume disposant une d'oreillette et un pantalon légèrement trop court, ne couvrant pas des chaussettes de sport noires pour des mocassins en cuir.
Très inhabituel, toutefois la climatisation dans ce bâtiment était digne de l'aéroport de Pomosejo.
Il avança vers l'homme qui utilisa un détecteur pour scanner les jambes, le torse et les bras après qu'il eut déposé son téléphone portable et sa mallette en cuir sur une table.
Un collègue passa cette dernière dans les mêmes machines à rayon X des aéroports, mais en version miniature.
Pas de soucis, il récupéra ses affaires et suivit l'agent de sécurité jusqu'aux ascenseurs. Le gorille lui donna un badge visiteur violet criard à mettre autour du coup.
Les employés s'affairaient devant les ascenseurs qui se faisaient face : six ascenseurs au total. Le "ping" caractéristique de l'arrivée et ouverture des portes précéda un déversement de personnes se faufilant vers la sortie et rapidement il prit l'ascenseur qui lui permettait d'atteindre le 19e. Dans ce genre de tour, les ascenseurs ne desservaient pas tous les étages afin d'optimiser le temps de transit.
- Asseyez-vous Monsieur Hekayat.
Le bureau, ou bocal plutôt, était entièrement adapté à la confidentialité de ces entretiens. Tout était très "corporate" dans ces bureaux luxueux et favorisant la nouvelle tendance de l'open space. Bruyants, les employés parlaient fort. Le sentiment n'était pas que la culture Alguarena forçait le trait à ce niveau là, mais plutôt le désir d'être entendu, d'être tout simplement, dans un environnement sûrement extrêmement concurrentiel.
Du design, au département juridique, Malik ne comprenait toujours pas pourquoi l'entretien n'avait pas pris place à l'aéroport directement.
Comme s'il avait lu dans son esprit,
- Ecoutez Monsieur Hekayat, nous vous avons demandé de venir au siège, car nous avons revu votre curriculum vitae et avons aussi appelé vos employeurs précédents...
Ce poste nécessite des accréditations et un niveau de sécurité qui est important. De ce fait, nous avons fait des vérifications d'antécédents, vous comprenez.
Il n'y avait aucune gêne dans la voix du Directeur de la Coordination Aérienne de l'Aéroport de Pomosejo. Son costume trois pièces en disait long sur son expérience... son salaire dans cette entreprise hautement prestigieuse.
- Ainsi, nous sommes heureux de vous avoir avec nous.
Nous avons votre contrat ici même et vous n'avez qu'à le signer et vous pourrez commencer une adaptation dés demain à la tour de contrôle.
Malik regarda par la baie vitrée donnant sur la ville. Non loin, un avion décollait et laissait la place à un atterrissage de l'autre côté de la piste. Il connaissait très bien ce ballet incessant, contrôlé.
