
Au Hall des Ambassadeurs jashuriens,
Comme la distance est une chose Ă©trange, un soir nous sommes Ă©loignĂ©s d'un monde, au matin en regardant mon globe terrestre, nous voici voisins. Il y aurait des choses Ă Ă©crire et Ă penser sur ces gĂ©ographies fluctuantes, loin du cĆur loin du corps, que dire alors maintenant qu'il y un petit bout de Syndikaali juste sous vos fenĂȘtres ?
Voici presque deux annĂ©es que des baquets entiers de nos Ă©tudiants reviennent de vos universitĂ©s, la tĂȘte pleine de souvenirs et de descriptions exotiques d'un pays fascinant. Un jour, je me joindrai Ă un de ces contingents de touristes pour dĂ©couvrir un peu mieux ce pays si lointain et pourtant si proche qu'est le votre.
Mais pourquoi attendre, me direz-vous ? Et je me pose la mĂȘme question !
Car le temps qui file est un temps qui nous échappe si l'on ne le saisit pas au vol. Je vous joins à ce message une copie du dernier rapport que m'a transmis le Capitaine Ilmarinen, directeur du renseignement Pharois et en qui j'ai la plus grande confiance bien que ses goûts musicaux soient exécrables.
Pour le dire de maniĂšre cru, nous avons matiĂšre Ă craindre le chaos et peut-ĂȘtre l'effondrement imminent de l'Empire Listonien. La crise Ă©conomique majeure que celui-ci traverse peine Ă se rĂ©sorber et le gouvernement dĂ©savouĂ© cache comme il le peut les troubles politiques que subit sa capitale. Plusieurs faisceaux d'indice nous font craindre le pire, dont l'incapacitĂ© prochaine du gouvernement central Ă maintenir la cohĂ©sion dans son vaste empire ultra-marin.
C'est en tant qu'ami que je vous transmets cette information, et de sorte que vous ne soyez pas pris au dépourvu. DiscrÚtement, pour ne pas alerter la communauté internationale ce qui risquerait de précipiter les choses, le Syndikaali se prépare à accueillir un flot de réfugiés sur son territoire. C'est bien naturel, quand on a l'humanité pour soeur, on la laisse dormir sur le canapé lorsque sa maison brûle.
Je me garderai bien de supputer la politique prochaine du Jashuria en ce qui concerne ces rĂ©fugiĂ©s, Ă vrai dire cela ne me regarde pas, ce qui m'intĂ©resse toutefois c'est le sort des provinces nazumĂ©ennes listoniennes. Vous pourriez naturellement ĂȘtre amenĂ© Ă jouer un rĂŽle prĂ©dominant dans leur destin et de fait, puisque nous sommes Ă©galement sur place depuis peu, nous aussi.
Je pense qu'une stratĂ©gie concertĂ©e serait un excellent moyen de contenir la catastrophe dans la rĂ©gion, tout en prĂ©servant, et je le dis avec rĂ©alisme et sans cynisme aucun, nos intĂ©rĂȘts rĂ©ciproques.
J'ose mĂȘme - mon naturel optimiste sans doute - voir dans la crise Ă venir un pont qui pourrait rapprocher solidement nos deux nations, plus encore qu'elles ne l'ont Ă©tĂ© par le passĂ©.
En espérant lire bientÎt de vos nouvelles,

Bien Ă vous,
Capitaine Mainio,
Ministre des intĂ©rĂȘts internationaux du Pharois Syndikaali