04/06/2013
23:31:12
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[PRESSE] Affaires nationales et bulletins officiels

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Klawe Rzeczy, media

La presse kah-tanaise est libre d'expression et jouit de financements communaux systématique. Du fait de la nature confédérale de l’Union, il existe assez peu de publications nationales, mais une foule de publications locales. Le développement des télécommunications a cependant permis d’harmoniser l’ensemble, et quelques grands médias se sont progressivement démarqués, correspondant en fait au regroupement de plusieurs médias régionaux sous des lignes éditoriales et des identités visuelles communs. Les articles locaux s’accompagnant dès-lors de traduction ou d’adaptation d’articles traitant d’affaires plus confédérales.


L'Observateur du Bien Commun
L'observateur du bien commun est le journal officiel de la Convention générale. Se voulant d'un ton résolument neutre, on y trouve entre-autre les lois communales et conventionnelles ainsi que la transcription des débats parlementaires. Organe d'utilité publique, ses éditions régionales rendent compte des décisions prises à l'échelle tant confédérale que communale.

L'Akai Kagami
Le Miroir Rouge est l'une des plus vieilles publications de l'Union, fondée lors du regroupement de plusieurs journaux révolutionnaires de la capitale confédérale, Lac-Rouge, à laquelle elle doit son nom. Révolutionnaire et fière de l’être, c’est l’une des publications les plus à gauche de l’Union, s’intéressant aux affaires nationales comme étrangères et offrant une analyse systématiquement révolutionnaire et communaliste lui valant une grande popularité.

Le Regard
Le Regard est une publication généraliste passant pour relativement conservatrice dans le paysage politique kah-tanais. Évitant généralement les analyses les plus radicales, le Regard était à l’origine principalement intéressé par les faits culturels et économiques. Son ton sobre et ses analyses qualitatives lui valent une certaine notoriété internationale.

La Rente
La Rente est le principal journal économique de l’Union. Analysant les comptes-rendu des commissariats économiques et ayant ses entrées dans la plupart des communes, il offre un travail soigné permettant au kah-tanais moyen d’y voir plus clair dans l’avancement de la planification participative ou l’état de l’économie confédérale. Une édition spécialement adressée aux professionnels de la Finance, La Rente Monde, existe, s’intéressant principalement à la santé économique des consortiums kah-tanais agissant en terrain capitaliste.

L'avant-garde sectionnelle
L'avant-garde sectionnelle est l'organe de presse du club de la Section Défense. Populiste et ultra-radicale, il se veut d'une ligne "révolutionnaire et réaliste", ce qui se traduit par des éditoriaux incendiaires, des analyses mues d’obsessions nationalistes et exceptionnalistes et une critique acharnée de tout ce qui s’oppose à la ligne politique du club.
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Akai Kagami
L’Observateur du bien Commun, Bulletin officiel et quotidien du Parlement Général.



Sur la Question du réarmement des Communes, portées par le Comité de la Volonté Publique par l’intermédiaire du Citoyen MAYHUASCA.

Le Citoyen arrive au Parlement Général à 16H20. Son apparition provoque un certain tumulte rapidement calmé par l’action du premier orateur le citoyen Choque Caipa. L’ordre du jour suit son cours jusqu’à 16H50 où la question du réarmement, avancée par le Comité de la Volonté Publique le 01/04/2004 est à nouveau discutée ; Le citoyen MAYHUASCA se rend à la tribune centrale.

C. MAYHUASCA : Camarades et citoyens, s’il m’est désagréable de le rappeler je crois qu’il est nécessaire de dire, une fois encore, qu’être membre d’un Comité quel qu’il soit ne nous exclus pas de la Députation. Nous avons été nommés par les Communes via votre intermédiaire pour concentrer leurs ambitions au sein d’une même volonté. Parole de centralisateurs, dira-t-on, mais l’essentiel est le suivant : si nous ne passons plus l’essentiel de notre temps au sein de ces nobles murs, nous savons pour autant ce qui s’y passe. Je sais ainsi, chaque bruit de couloir, négociation, discours et avis que chacun peut émettre. Ce qui est attendu de moi comme des autres membres de chaque comité, en vertu de notre mission de représentation et du respect de la souveraineté populaire, tel que le précise la charte constitutionnelle mise en place lors de la Grande Révolution.

Aussi oui, je sais. Il aurait fallu être aveugle et sourd pour ne pas savoir. Savoir ce qui se dit, ce qui se prétend. Les paroles odieuses que l’on murmure entre les bancs de la députation. Les craintes justifiées, aussi.

C. ROJES : Et quelles sont-elles, ces paroles, Aquilon ?

(Rires.)

C. MAYHUASCA : Dois-je rappeler aux Horlogers leurs propres mots ? Mais non. Car nous allons bien en débattre et que le Comité entend bien jouir de vos conseils et opinions. Allons à l’essentiel et laissez-moi vous expliquer ce projet ; Après quoi, citoyen, vous serez bien capable de vous répéter si nécessaire.

Le Comité le propose. Le Réarmement doit être à l’ordre du jour.

(Chahut. Le citoyen attend.)

Le réarmement. Parfaitement. Ô réarmement, perfide serpent, poison des cœurs dirait-on. J’ai entendu prétendre qu’on ne s’armait pas en prévision de la paix mais enfin, les Communes seules ne sont-elles pas à l’initiative de toute action de l’Union ? Et représentants des Communes, ne savez-vous pas qu’elles ne désirent que la paix ? Leur donner les moyens de la guerre n'en fera pas es assassins !

Je sais pourtant d’où viennent ces réactions. Il est attendu que l’évocation des armes vous pousse dans des retranchements épidermiques. Moi-même, j’enrage des extrémités auxquelles nous pousse le monde. La vérité s’accorde mal du rêve révolutionnaire et nous devons de fait en prendre acte.

Alors je sais. Je sais bien ce que nous craignons tous. En Deux siècles de révolution, et deux siècles de crises ; Politiques, économiques diplomatiques et – bien souvent – à l’avant-garde de nos problèmes, l’armée. Celle qui refusa de désarmer le Daïmio. Qui installa Sukaretto à l’aide des bourgeois. Qui tenta tant et tant de nous soumettre au Capital. L’armée incarne l’usage de la force. L’usage de la force la coercition. La coercition ce que nous avons éliminé du Grand Kah. Alors oui, je vois bien que l’on peut penser que mettre la militarisation à l’ordre du jour, c’est en fait mettre la fin de l’Union à l’Ordre du Jour. Le Comité s’envisagerait-il junte ? Pensons-nous seulement en avoir le droit ? Et pourquoi aurions-nous même besoin de remilitariser l’Union ? Des questions légitime auxquelles je vais répondre, et-…

C. XIULT-TRAN : T’as bien intérêt, camarade !

C. MAYHUASCA : Mais tout à fait. (Il attend avant de reprendre.) Il y a plus de cinquante ans la Révolution était menacée par le Coup des impérialistes. La Famille Sukaretto, financée par des intérêts étrangers dont nous tairons encore ici l’origine par souci de décence, a renversé les comités, attaqué les commune et placé un nouveau maître chien au sommet du Kah, tentant le rétablissement de l’État et de la coercition. Nous savons comment cette histoire se termine : dans le sang, la nausée et les morts. Dans la régénération, aussi, de la Révolution par le biais d’un nouveau Cycle. Kah est une roue. (Les députés reprennent en cœur.) Qu’avons-nous appris de cette période ; Qu’on fait nos aïeux ? Ils ont fermé la nation au monde. Puis l’ont reconstruit ; Plus important encore : ils ont pardonné de telle façon qu’une Sukaretto, descendante directe de cette famille dont on pourrait croire le sang maudit tant sa lignée s’est opposée à l’Idéal, a été élue par cette chambre même au Comité. Alors quoi ? Sommes-nous coupables d’avoir pardonné à la fille des monstres ? Pensons-nous finalement que le sang fait les maux plus que l’éducation ? Alors nous serions tous coupables de trahison, l’ayant nommé d’un commun accord tout comme vous m’avez nommé, et la citoyenne Actée, et le citoyen Suchong. Et d’autres.

Le Kah ne détruit pas. Nous le savons bien. Le Kah analyse, pardonne, inclus. La militarisation du Kah ne veut pas dire la réinstallation d’une force armée centralisée fonctionnant sur le modèle de celles qui nous ont tant et tant trahit. La remilitarisation du Kah signifie l’analyse des erreurs du passé et l’adaptation de nos objectifs et des méthodes pour les remplir à la situation présente et à ce que nous considérons êtres notre Idéal.

Quel est notre idéal, je crois que vous me détromperez si je fais erreur. Notre idéal est celui de la paix. Celui de la liberté. Du respect. De l’union et du bien commun par le bien individuel.

Quel est le contexte de notre idéal ? Celui d’un monde dur, traître. Nous sommes entourés d’ennemis idéologiques. Au nord de notre position la première puissance mondiale, d’un capitalisme effroyable. Plus au nord des républiques, oligarchies pathétiques dont la constitution même tient notre pensée en crime. Au sud l’esclavage. À l’est la monarchie. A l’ouest la république prolétarienne qui n’a de républicaine que l’oligarchie et de prolétarienne que le sang qu’elle presse dans son étau. Nous sommes entourés de peuples qui, observant notre idéal, décideront pragmatiquement de ne pas faire affaire avec nous. S’ils ont plus intérêts à nous écraser, ils le feront. Notre modèle menaçant par sa simple existence les présupposés des leurs.

Or c’est parce que nous voulons la paix, spécifiquement, qu’il nous faut estimer ce qui se passera en cas de guerre. Oui citoyenne ?

C. ZUHEN : Les milices communales ne suffiraient pas à nous défendre ? (Elle hésite, car on veut la faire taire.) Puis-je continuer ?

C. MAYHUASCA : Je vous en prie citoyenne.

C. ZUHEN : Ce que vous dites nous le savons bien. L’Union est un modèle unique et notre histoire le montre : un modèle en danger constant. Nos ennemis sont nombreux et sans aller jusqu’à prétendre qu’ils complotent sans cesse contre nous, ce serait grotesque, je crois que nous comprenons tous pourquoi vous désirez rendre le fait de coopérer avec le Grand Kah préférable pour eux que la solution consistant à prendre ce qu’il aurait à offrir par la force. Le Comité a pour mission d’être nos yeux et nos oreilles sur les affaires du monde et de proposer aux communes la manière dont il faudrait coordonner leurs actions. En ça je ne crois pas que nous puissions considérer que vous vous avancez en proposant de mettre la militarisation à l’ordre du jour. Je suis moi-même contre ce projet pour les raisons que je vais exposer mais je tiens à le dire, nous avons été pour beaucoup très sévère avec vous, au nom de la députation je tiens à m’en excuser.

(Quelques chuchotements d’assentiment. Quelques rires, aussi.)

Donc. Comme vous le dite, le Coup de 50 a été réglé par un nouveau cycle révolutionnaire et, comme vous le dites, le Kah a pardonné. Mais le Kah a aussi pardonné l’idée d’armée ! Vous faites comme si nous avions brûlé les fusils et les avions, broyés les navires et rejeté le mot « soldat » pour le ranger avec celui de monarque. Mais c’est tout à fait faux, puisque nous avons les milices. Elles n’ont jamais été dissoutes depuis la révolution et chaque commune le désirant possède la sienne. Tenez, vous le savez bien, la plus grande de ces milices étant la Protection Civile qui a arrêté il y a peu les synarchistes ! Cette même arrestation qui a poussé à la proposition du comité ! Alors nous avons une force armée. Prendre le Kah serait déjà pour toute force étrangère une opération complexe.

C. MAYHUASCA : La Protection civile est une force communale qui, contrairement aux milices, est équipée, entraînée et active. Mais elle n’est pas une force armée. C’est une force de maintien du bien commun dont l’activité ne saurait être au mieux que supplétive à celle d’une authentique force armée. Ce qu’il nous fait ce sont des professionnels de la guerre. Laissez-moi terminer, des professionnels de la guerre comme la Garde d’Axis Mundis.

(Brouhaha et chahut. Un citoyen indéterminé lance le cri de "centralisateurs". Les députés centralisateurs s’offusquent. Le premier orateur appel au retour au calme. Le citoyen Mayhuasca attend à la tribune.)

C. MAYHUASCA : Mais je ne suis pas un centralisateur ! Personne ici n’aime notre système autant que moi, la liberté autant que moi ! N’ai-je pas été nommé sur les valeurs que je représente depuis toujours dans mon action ? N’ai-je pas fidèlement rendu à la nation la somme de ses intentions, représenté les communes de façon à organiser le bien commun ? Vous est-il donc si inacceptable d'envisager que nos conclusions, que ce que nous voyons, serait en fait là encore destiné à la seule collectivité ? Alors ! Vous nous avez nommé pour ça ! Pour le bien commun. Et maintenant vous nous reprochez de vouloir le défendre ! Alors ! Alors, enfin, c’est bien vous qui nous avez nommé. Si vous ne voulez plus du Comité... Si vous ne reconnaissez plus le bien des communes dans ses conclusions… Je vous le demande bien clairement : mettez-y fin ! Et élisez ceux et celles qui, vous semble-t-il, représenteront mieux l’intérêt national !

C. HUALTAYAN : Citoyen ! Le Comité a toute notre confiance ! (Des approbations fusent.) Nous ne doutons pas de ses intentions. Mais la porte que vous voulez ouvrir a déjà été ouverte par le passé sans jamais faire entrer quoi que ce soit de bon.

C. MAYHUASCA : Alors adaptons ! Je sais ce qui vous angoisse. La Garde d’Axis Mundis répond au Comité seul. Mais la Garde sert à défendre la Commune spéciale. C’est un corps de défense. C’est aussi depuis plus d’un demi-siècle le seul exemple de force militarisée professionnelle de notre nation. Une garde similaire pourrait être mise en place dans l’essentiel des communes supérieure, pour commencer. Dirigée à chaque fois par les communes qui pourraient ainsi inclure les besoins et ravitaillement des soldats dans la planification d’ensemble. Pour éviter le factionnalisme les soldats pourraient être des volontaires de toute commune mis au service d’autres.

C. ZHEN : Ce qui retirerait toute forme de réel contrôle aux Communes.

C. HUALTAYAN : Propos d’anti-unioniste !

C. ZAN NEK : Peut-être, mais ça demanderait aussi de revoir toute la planification économique, de revoir à la baisse l'augmentation du niveau de vie, d'empiéter sur le bien-être national.

C. MAYHUASCA : Au profit de sa survie ! Mais j'entends ces avis, et nous savons comment cela se réglerera. Dans un premier temps, établissez vos commissions et prévenez vos communes. Le Comité prendra les mesures nécessaires. Le reste dépend désormais de la députation de l'union et du consensus qu’elle établira. Mais puisque ça ne tient en fait qu’à ça : ne percevez pas notre demande comme celle d’une remilitarisation du Grand Kah. Percevez-la comme celle d’un réarmement des communes. Et le Kah nous guide en cas de guerre. (Mouvement prolongé d’assentiment.)

(Comme ne certaine agitation succède au discours du citoyen; la séance est à nouveau suspendue.)
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Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


Albel. Signature d'un "Pacte anti-bolchévique"

Encore un remous inquiétant des dictatures oligarchiques dont on subodore déjà que, sous prétexte de protéger une quelconque liberté, elles tueront sans distinction tout ce qui s'oppose à leur système bourgeois, sans jamais faire le tri entre les États ouvriers dégénérés et les rares cas de socialisme démocratique. La Réaction, face au changement, fait ce qu'on attend d'elle : elle réagit.

Mouais.

Commençons par un peu de sémantique, voulez-vous ?

À l'origine le terme « bolchevique », loin d'être l'insulte surannée favorite de toute la réaction, dont les idées comme le vocabulaire semblent dater d'il y a plus d'un siècle à un point tel qu'on se demande s'il reste encore du moisi autour des os, désignait simplement dans certaines des langues de l'est eurysien la majorité. Vous êtes bolchevique, lecteurs Kah, en ça que vous êtes la population majoritaire au sein d'un contexte donné. Mais admettons. Après tout ce serait faire du mauvais esprit que de nier l'utilisation politique du terme dans la communication officielle ou la nomenclature de quelques mouvements révolutionnaires (pas tous particulièrement bien inspirés). Il est donc naturel de constater que c'est à cette notion historique que se réfère Albel. Le Communisme, la terreur rouge qu'on a décidé de nommer, par méconnaissance totale du sujet, sous un terme parapluie ne désignant à l'origine que quelques-uns de quelques-partis dans quelques pays.

C'est aussi nier toute la contribution historique des révolutions précédentes. Nous pouvons imaginer que pour ces oligarques empattés toute révolution serait socialiste, y compris celle du Kah, ou leur donner le bénéfice du doute.

En tout cas il n'est pas étonnant de constater qu'il est tout particulièrement historique pour Albel de s'opposer à la majorité, si plus finement qu'au sein d'une dictature classique, comme le font toutes les républiques bourgeoises dont nous connaissons bien le fonctionnement. Le vrai pacte Anti-bolchévique, mes amis, anti-majorité, c'est la république libérale. Elle n'a de république que l'absence d'hérédité (et encore, nous savons bien comment fonctionne la reproduction sociale) et de libérale que l'économie, pensée comme organe d’accumulation et de maintien du pouvoir. Le terme libéral désignant chez nos amis les imbéciles une doctrine économique qui s'opposerait à l'étatisme, au lieu du désir plus général de liberté et d'obtensibilité de cette dernière.

Car c'est le cœur du sujet, pour Albel et pour d'autre, comme nous le savons bien. Ces États de la réaction qui se drapent de la liberté pour mieux s'essuyer avec au sortir des toilettes.

Concernant le pacte, maintenant, que contiennent ses articles ?

L'Article premier définit les termes. Le bolchevisme, la majorité, c'est le marxisme. Un outrage envers la nature – dit la capitaliste qui étiole chaque réglementation pour mieux la violer – et la liberté des peuples. Sur ce point nous noteront et signifieront que le marxisme a donné des dictatures, comme nous le savons et comme en témoigne certains des Etats voisins au Kah. Elle a donné des dictatures et quelques authentiques expériences démocratiques. Qu'a donné leur « libéralisme », pour sa part ? De la bourgeoisie, de l'accumulation des richesses, des ouvriers mourant quotidiennement dans leurs usines de mort, privés de droit, d'éducation et de la moindre chance d'évolution. On est en plein régime voltairien. Une majorité régnant et profitant d'un grand nombre soumis. Ils ne sont pas en mesure de parler de liberté des peuples.

Quant à la notion d'Ordre naturel et d'Intégrité des États elle tient du discours fasciste classique et nous ne nous fatigueront pas à y répondre tant il est évident pour une population éduquée que l'Ordre naturel n'existe pas sinon dans la bouche des dirigeants qui le désigne pour justifier leurs décisions, et que l'intégrité des États n'est que le résultat regrettable de la désunion des hommes. Même leurs textes sacrés et religieux, sur lesquels ils aiment tant jurer et se reporter, qui est la base de toute leur prétendue morale, l'admet.

C'est d'autant plus flagrant qu'enfin, ce premier article, reconnaît le but final, de ce pacte. Les régimes socialistes, faisant parfois fit de toute morale révolutionnaire et oubliant ce qu'elles défendent, s'allient. Les dictatures pactisent avec les démocraties. Idée absurde puisque les deux devraient s'opposer, mais enfin : les républiques socialistes peuvent-elles s'épuiser à lutter contre leurs sœurs dégénérées et stupides quand on sait que les libéraux sans éthiques, sans vision et n'attendant que leur mort, rodent dans l'ombre, prêts à déchirer leurs rêves d'un coup de poignard ? Non ! C'est car la bourgeoisie n'attend que de tuer le peuple que le peuple doit s'unir, y compris avec ceux qui sous prétexte de le défendre l'écrasent dans le sang ! Nous pourrons régler la question des dictatures dégénérées et gerbantes une fois le cas des crypto-fascistes et de la haute bourgeoisie dynastique réglé.

Alors existe l'internationale, sur laquelle nous avons de bonnes et de très mauvaises choses à dire. Et Albel, prenant conscience que l'unité du socialisme bon comme dangereusement mutant signifie que ces pays ne peuvent plus être malmenés, décide d'ériger une alliance de destruction.

Voyons maintenant la forme de cette entreprise de destruction.

L'Article premier est assez peu remarquable. Partage d'intelligence militaire et politique, comme nous l'attendions. Sous prétexte de luter contre l'international on se donne le droit de surveiller n'importe qui dans n'importe quel pays et de qualifier quiconque demande une amélioration de sa condition de dangereux marxiste à surveiller ; L'autoritarisme a besoin d'un ennemi intérieur et extérieur pour prospérer.

L'Article second indique que les nations signataires devront collaborer et mettre en place une stratégie que nous imaginons évolutive pour contrer les tentatives d'obtention par la population majoritaire de droits sociaux. L'aspect inquiétant et qu'il n'est toujours pas précisé si cette stratégie agira sur le territoire des régimes bourgeois signataires, ou sur l'ensemble de notre planète. Absence de précision dans laquelle nous lisons en creux la réponse à la question.

L'Article troisième indique clairement la création d'un État-major coalisé. Ou plutôt d'une commission de liaison entre les nations signataires, semblant aller de soi considérant les articles précédents – était-il seulement utile de préciser la forme organisationnelle du pacte dans ce traité ? Probablement. Mais le faire en si peu de mot c'est amorcer la démarche sans chercher à l'achever.

Le dernier Article, enfin, assume pleinement que le Pacte a vocation à s'étendre. Chaque nation se jugeant menacée par un changement social d'ordre historique, la moindre dictature pathétique, le moindre régime personnel dirigé depuis seize générations par la même famille dont la consanguinité intellectuelle et culturelle n'est plus à prouver, pourra ainsi rejoindre le pacte et jouir de l'aide de ses pairs à travers le monde si, par mégarde, le peuple venait à demander des droits.

Alors, qu'en penser.

Que ce pacte n'est en lui-même qu'un document mais que nous savons bien quel est l'esprit général d'Albel. Nous connaissons leurs positions, leurs discours, leurs lois. À cette lumière nous pouvons interpréter ce texte pour ce qu'il est. Peut-être, à ce jour, la plus grande menace jamais proférée à l'intention du peuple. En tout cas une promesse de guerre et d'interventionnisme. Les gouvernements ayant signé ce traité se rendent coupables de conjuration et de meurtre. Si pas de suite, dans un avenir qui ne saurait se montrer, sinon inéluctable, prévisible. Ces pays promettent la guerre et se congratulent mutuellement de leur décision courageuse. Désormais, plus aucune avancée sociale, plus aucun acte de courage prolétaire, plus aucune revendication légitime ne saurait être faite sans être fixée par ce « Pacte », puis malmenée à l'envie.

Plus grave encore : désormais, les républiques socialistes ou d'inspirations utopiques seront obligées de faire alliance avec les États ouvriers dégénérés et autres bureaucraties mutantes, par simple esprit de conservation la dictature au nom du prolétariat aura le loisir de s'allier avec les authentiques expériences libertaires. Car c'est ça où être laissé à la merci de ces va-t-en-guerre.

Ce pacte, en bref, est le début d'une nouvelle guerre dont l'intensité saura sans doute tous nous étonner. Albel et sa clique ont empoisonné le puits des relations internationales, de l'idéologie et de la libération des peuples.

Au nom d'une hypothétique liberté ils envisagent de l'assassiner.

Comme nous l'attendions de la part de la Réaction. A défaut d'être surpris, nous sommes simplement las, et exprimons notre sincère amitié aux prolétaires de tout les pays.
Citoyens de toute nation, unissez-vous.

Plus que jamais.
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Billet d’opinion de la très estimée Citoyenne Xi-Chiang, fondatrice du Syndicat des Brigades, publié dans différents journaux et lu dans différentes communes.

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"J'ai pas passé quinze ans dans la jungle et dix sur les barricades pour être reléguée au charnier sitôt la paix acquise !" - Citoyenne Dolores Xi-Chiang, "la Bulldozer de Kanosa"


Des jeunes gens assassinés par le fascisme. Les démocraties libérales écarquillent vaguement les yeux, sans plus.

C’est en quelque-sorte la continuation de ce que certains avaient commencés à ressentir avec la signature de ce foutu pacte anti-rouge, où sous prétexte de tuer un tyran on cire allègrement les pompes d’un autre, et sans aller jusqu’à faire une échelle des maux – les classifications douteuses c’est un truc de chemise brune – il faut bien admettre qu’en l’état, les caudillos du marxisme ont tués moins de gosses étrangers arrivés chez eux que les croûtons desséchés du nationalisme à Papa. Les gosses éliminés, lavés, lapidés et effacés des registres en interne ? Autre sujet, sur lequel on finira bien par revenir, quelle que soit sa couleur une dictature reste une saloperie. Mais ! C’est qu’il faut les voir, ces dictateurs de tout poil. Personne ne s’emmerde à bouger son cul quand ils tuent chez eux, mais enfin, maintenant c’est dit, ils ont tué de l’étranger ! L’affaire devient internationale, on a enfin le droit de parler du désastre en cours et de se pencher sur la question sans qu’on nous accuse de regarder où l’on ne devrait pas.

Alors regardons donc. Les autres avaient initié le Pacte Anti-bolchevik, pris d’une soudaine inspiration et d’une sainte terreur pour leurs oligarchies respectives. C’est qu’il fallait bien trouver une raison de limiter le droit de grève et de surveiller les syndicats. Nos collègues du vieux continent, similaire à une paire de couille qui ne sert plus, dans laquelle s’agite tout à la fois les pulsions de vieillards frustrés et le marasme consanguin d’idées restées trop longtemps entre elles, commençant sérieusement à fermenter, nous a pondu une autre alliance d’un goût tout à fait différent et même, si on oublie de la regarder avec attention, d’un goût tout à fait convenable.

En bref, nous parlons bien de cette fameuse alliance Boréale. Nouveau coup de génie des oligarchies libérales qui arrivent en l’espace d’une semaine à donner le bâton pour se faire battre puis l’opportunité qui va bien avec. On les en remercie. Même plus besoin de les couvrir de ridicule, elles le font toute seule avec la grâce ultime qu’on leur connaît bien.

Quel était le propos, qu’en savons nous, que pouvons-nous vous en dire ?

Pas assez à notre goût, hélas ! Mais suffisamment pour en tirer les conclusions qui s’imposent, et heureusement.

L’initiative vient du Makt. Nos petits oisillons pensent qu’il s’agissait à la base du coup classique du pacte économique visant à péter les droits douaniers comme un bourreau péterait les chevilles de sa victime, en préambule du massacre total. On leur souhaite bien du plaisir pour trouver un accord, aux roitelets des pays signataires. C’est un véritable casse social et on le sait bien : puisque les produits des nations pactisants pourront s’écouler sans surveillance il faudra ruiner les droits sociaux, les salaires et de même les coûts de production pour rester compétitif. Une bagarre de nantis dont on connaît déjà le résultat ! Le capital fera ses gros chiffres et la population dormira sur ce qu’on voudra bien lui laisser : avec un peu de chance de la paille, dans le pire des cas des bancs anti-sans abris. Quelle chance pour ce continent vieillissant que les vieilles recettes capitalistes soient encore d’usage ! Et quelle chance pour les nations signataires d’être en si bonne compagnie, car regardons enfin qui, de ce que nous avons entendu, a été convié aux discussions.

– Le Makt, qui a organisé la sauterie.
– L'Althenlant, sans surprise vu sa position.
– Le Walserreich, qu’on pensait au-dessus de ça.
– L'Empire Latin Franc, qu’on ne présente plus.

Nos petits oisillons prétendent aussi que les gars du Syndicat Pharois auraient eut le bon goût de s’abstenir malgré une invitation très formelle. Est-ce par réalisme social ? Par incorruptibilité idéologique et politique ? Ou pour d’autres raisons ? Nous ne pouvons que théoriser, faute d’informations claires. Mais on tient quand-même pour sûr que le Makt, à l’origine de cette conjuration, est signataire du superbe Levier Fasciste, du Facilitateur d’Autoritarisme par excellence, le Pacte anti-bolchevik. On se rappelle bien comme certains journaux Pharois avaient réagis à sa signature ; Alors peut-être que nos frères les pêcheurs du nord ne voulaient pas que leur hareng salé alimente les conserveries d’Albel par un truchement inévitable, les amis de mes amis étant, comme on le sait bien…

Mais revenons plutôt sur cette Alliance Boréale dont on attend avec grande attention la signature officielle pour avoir grand plaisir à expliquer la stupidité profonde de ses closes et les désastres qu’elles annoncent.

C’est qu’il y a comme un problème éthique concernant ce pacte. Dont on sait bien qu’il a sans doute été défendu à base des gargouillements habituels sur la paix régionale, la sécurité, l’échange, la compréhension culturelle, etc. C’est qu’il inclut une nation bien Brune comme on les hait, qui nous a fait dans la foulée la preuve de son immanquable crasse. L’Empire Latin Franc. (Peut-être qu’ils lui donneront le titre de scandinave d’honneur une fois le pacte signé ?)

On pourrait croire en nous lisant que nous prenons les évènements à la légère – la distance aidant – mais nous sommes furieux, mortifiés de rage et en empathie totale avec les familles victimes de cette construction nationale sordide. Comme nous le disions, ce pacte à peine en cours de signature que des enfants Pharois sont capturés par les chiens de l’empereur. Nous comptons à ce jour un mort. Le bilan pourrait s’alourdir. Nous entretenons peu d’espoir du contraire.

La dictature, c’est le règne de l’arbitraire et de la folie. On le sait bien. Et dans ces disciplines, l’empereur nous a fait une preuve irréfutable de son impayable talent sans parler de son grand humour : tout son règne étant une mauvaise blague. Maintenant c’est sûr, l’alliance boréale travaille à la paix dans la région et nous avons hâte de voir les Républiques libérales regarder leur nouveau meilleur ami tuer deux enfants de plus, puis gronder les pharois s’ils venaient à éprouver un minimum de colère légitime. On le sent bien venir, le retournement de veste absolu de ces uns et autres qui signent des pactes contre les prétendues dictatures rouges, se claquent la bise sous prétexte de protéger les droits du citoyen et du marché, et regardent sans ciller leurs alliés s’adonner à des actes de barbaries gerbant. C’est qu’ils s’en foutent, les grands pontes libéraux. Ils sont là pour faire du chiffre. Alors vos gosses assassinés, vous savez...

Oh nous ne serions pas surpris que tout se passe exactement comme ça. Et tout au contraire nous serions bien surpris (mais très soulagés) de voir la situation se régler de façon un tant soit peu sensée.

De toute façon, l’un des gosses est mort. Lukaas, comme ils l'appelaient. Il est déjà trop tard pour les familles, et pour l’empire. Maintenant le monde entier peut juger de son génie diplomatique, de la justesse de ses lois, de l’absolu modèle de vertu qu’il compose. Même les plus hypocrites seront bien forcés de le faire par décence élémentaire. Et les nations de l’alliance Boréale, dans tout ça ?

Vont-elles s’éloigner des tueurs d’enfant, ou leur tapoter l’épaule comme à un vieux frère ?
Nous sommes bien curieux de le savoir, ça, tiens.

En tout cas, pour le moment c’est sûr, chaque parent est un pharois, chaque tueur un franc

Post-Scriptum :

C'est avec une grande émotion que mes oisillons m'ont rapportés la mort des deux otages. Après le petit citoyens Luukas, c'est Joonas, Raakel. Morts. Arrachés gratuitement à la vie. Il n'y aura pas forcément de procès, mais la foule a une mémoire. Personne n'oubliera, je crois, ce que l'empire représente.

Qu'il aille au diable, lui et ceux qui marchent à ses côtés. Nos condoléances aux familles.
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Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


Remilitarisation des Communes : vers un militantisme armé ?

Presque 150 jours après l'approbation par le Parlement général du plan de remilitarisation des Communes, syndicats et républiques du Grand Kah, nous avons rencontré le citoyen-général Atl Mikami pour faire le point sur la nouvelle force armée de l'Union.

Mouais.

Il est encore tôt le matin lorsque nous arrivons sur le terrain du Grand Renouveau, gigantesque ensemble architectural logé au creux de Tlacuahian, pudiquement séparé de la ville par des parterres d'herbes et une haie sauvage de faux-poivrier. On peut y accéder par divers routes, le plus simple restant encore de prendre l'avenue Liberté, courant directement de l'aérodrome aux lieux. Passer par la Voie Syndicale, traversant toute l’agglomération en passant par sa gare centrale, est aussi une option viable. À notre approche nous sommes accueillis par deux agents de la protection civile émergeant d'un corps de garde moderne. Ils nous saluent, sourient quand nous leur présentons nos laissez-passer puis nous indiquent la direction d'un parking vide à l'exception d'autobus banalisés, de l'autre côté des haies. Désormais nous pouvons apercevoir les monuments, plus ou moins éloignés. Le Grand terrain de manœuvre, celui de parade – cerné de ses tribunes – le vieux stade antique, le plus récent – encore en travaux. Quelques pyramides finement entretenues, ponctuant le paysage. Après quelques minutes un homme vient à notre rencontre en nous saluant. Il est assez grand, propre sur lui, porte un uniforme que nous n'avons encore jamais vu, se rapprochant un peu de la tenue cérémonielle de la Garde d'Axis Mundis. Nous comprenons qu'il s'agit d'un des hommes de la nouvelle armée de l'Union, ce qu'il nous confirme tout en nous demandant de le suivre : le général nous attend.

C'est une sensation inhabituelle, celle de traverser un lieu dédié à l'effervescence quand il est au plus vide. Nous nous disons que dans la mémoire collective du Kah, la strucutre sera bientôt immortalisée pleine de vie, d'un public venu observer les grandes cérémonies civiles et militaires auxquelles on la promet. Mais pour le moment il n'y a que nous, parcourant les couloirs vides du Grand autel de la Roue. Tribune néoclassique aux proportions d'immeuble – plus de vingt mètres de haut, presque quatre cents de large. Témoin du génie et de l'ambition du projet porté par le Comité de Volonté Publique. Alors que nous arrivons dans le couloir menant aux tribunes des officiels, au sommet de la structure, nous remarquons comme un piédestal de musée, entouré d'une cage de verre. Sous celle-là, un étendard relativement ancien, soigneusement plié de façon à présenter à l'observateur l'éternelle Roue du Kah. Nous comprenons qu'il s'agit d'un des drapeaux dressé lors de la dernière révolution. Notre guide nous fait signe de continuer, prenant tout de même le temps de commenter l'objet : « Ils voulaient consacrer les lieux ». Il nous précise ensuite qu'un prêtre juge devait bientôt venir honorer l'éternel recommencement. Enfin, nous sortons. Dehors, c'est une sensation d'immensité qui nous accueille : Le terrain de parade est un vaste carré de plusieurs milliers de mètres cube, entouré de part en part par un prolongement du Grand autel, couvert de tribunes, et traversé par un chemin de granite élégant liant bâtiment à l'espace d'où d'éventuels soldats en manœuvres devraient entrer sur le terrain. On devine à son bout un petit temple à l'Être Suprême, la Volonté populaire commune. Quelques soldats défilent aux ordres d'officiers. Ils sont peut-être cinq milles, armes en mains, dans leurs uniformes de cérémonie. Faisant preuve de la coordination qu'on attend d'eux. Nous notons que les uniformes changent d'un groupe à l'autre : si la plupart des recrues sont en vert, il se trouve des rangées en blanc, en bleu, en rouge. Un homme d'âge mûr est installé à la Tribune, un peu excentré. Sa tenue est aux couleurs de la Garde d'Axis Mundis et nous comprenons ainsi qu'il s'agit de notre hôte : le citoyen Atl Mikami, général de son état, plus haut gardé de l'appareil militaire de l'Union. Pour être honnête le citoyen est moins intimidant qu'attendu, dégageant une espèce d'aspect sympathique qui colle bien avec son image de gardien efficace mais réservé des libertés communes. Nous nous installons à ses côtés sur son invitation et pouvons commencer l'interview.

Nous commençons par l'interroger sur les lieux. L'architecture, la taille du complexe. Des critiques avaient déjà avancé que l'ensemble pouvait faire penser aux délires pharaoniques mis en place par les pays totalitaires pour flatter leurs armées. On lui demande s'il s'agit de ça. La question est soigneusement impertinente, la réponse du général, claire : Non. Il fronce les sourcils, mais nous offre tout de même un sourire aimable. Ce n'est pas pour flatter ni même honorer l'armée. L'architecte à horreur des guerres, il faudra que vous la rencontriez, nous dit-il. Cependant elle voulait honorer les soldats. Pas l'Armée en tant qu'institution, mais bien les hommes et femmes qui la composent. Le général ne nie pas l'aspect symbolique des lieux, semble réfléchir puis nous confesse ensuite, souriant : j'admets que le tout a un côté un peu religieux. L'architecte voulait s'inspirer des stades antiques d'Ullamaliztli, ou encore des hippodromes hellènes. Vous savez, ajout-t-il le plus grand stade antique du continent peut accueillir quelque 150 000 spectateurs. Celui-là – il indique un le grand stade encore en travaux, dont nous devinons le sommet entouré de grues de l'autre côté des gradins, devrait pouvoir en héberger 400 000. Il se passe une main sur le front et hausse les épaules, nous laissant le loisir d'en conclure ce qu'on veut en déclarant le plus prosaïquement du monde : nous avions aussi besoin d'un terrain de manœuvre adapté aux effectifs prévus de la Garde.

La Garde. Ce sera donc bel et bien le nom de cette nouvelle force armée. Il acquiesce ; comme si nous n'avions pas suivi les débats parlementaires sur le sujet. C'est ça, la Garde. Car il ne s'agira pas du bras armé d'un impérialisme, d'une force armée, mais bien d'une garde. Garde de la Révolution. Garde de la Liberté, du Kah et tutti quanti. En pratique cet aspect se répercutera aussi sur son organisation en comparaison aux armées habituelles. Toute son organisation sera basée sur celle de la Garde d'Axis Mundis. En la matière elle fait vraiment office de modèle. Nous utilisons déjà la démocratie interne, la hiérarchie non-contraignante, la décentralisation des corps - avec par exemple l'appuie du Syndicat des Brigades - l'esprit d’Élan…

Le terme a son importance, désignant traditionnellement un fanatisme courageux, une forme de chevalerie et d’entêtement dans le fait d'aller au bout de ses convictions. Le général fait en fait référence à une vieille doctrine de la Révolution voulant que chaque citoyen soit un soldat, et chaque soldat un héros individuel et communautaire. En bref, la Garde du Kah sera un organe comme un autre de la volonté du Kah, et non un outil froid détaché de son esprit pur. Nous demandons au général de confirmer notre interprétation, il acquiesce puis reprends.

Pour le moment les recrues répondent à nos attentes sur ce sujet, comme sur tous les autres. Nous avons vingt mille futurs soldats en formation, et à quelques exceptions notables ils correspondent tous aux attentes. La plupart d'entre eux sont issues de la Protection civile, nous confie-t-il en observant les femmes de la première division progresser sur le champ de manœuvre. Quelques confrères d'un autre journal se positionnent pour les photographier. Nouveau sourire, qui s'accompagne d'un petit acquiescement. Le général prend ensuite un air grave. La guerre est un métier d'homme, si on en croit les régimes réactionnaires. Pourtant plus de la moitié des citoyens ayant rejoint la Garde à l'occasion de sa création et de sa première extension sont des femmes. J'espère que les étrangers verront ces photos. Après tout nos ennemis sont pour la plupart des régimes qui confinent tout ce qui n'est pas masculin et fermement homosexuel à des rôles de second plan.

Pas le Kah, donc.

La réponse le fait sourire. Bien-sûr que non. Nous reprenons, l’interrogeant cette fois sur l'équipement qu'utilisera la future Garde. A-t-il été décidé de faire appel à des fournisseurs étrangers ? Il secoue la tête. C'est vrai, équiper une armée de terre, de l'air et une marine a un coût. C'est vrai aussi que le Kah a un léger retard à rattraper en ce qui concerne les technologies de pointe, et que la démilitarisation forcenée ayant suivie la dernière révolution handicape gravement les efforts matériels. Cependant il est essentiel, dans sa doctrine, de conserver une parfaite indépendance en matière de production d'équipement. Actuellement les troupes au sol ne manquent pas de fusils et d'équipement tactique, du matériel visant à répondre à l'absence d'aviation de combat à proprement parler est en préparation et une flotte logistique est en cours de construction. Il faudra du temps pour remplir tous les objectifs d'armement, mais le Kah avance sur la bonne voie, et considérant ses besoins actuels, n'a pas besoin de se presser plus que de raison. Pour l'heure l'industrie militaire représente un poids de près de 2 % du PIB annuel de l'Union, un chiffre qui sera amené à stabiliser vers 4 % selon les prévisions des Comités. Il s'agit d'abord de créer une armée de défense du territoire, puis de l'équiper de façon à pouvoir intervenir de façon limitée sur des terrains et espaces étrangers, en cas de besoin. Une éventuelle armée d'invasion ? L'idée n'évoque rien au général. Il botte en touche : Si les Communes le demandent. Ça ne serait pas sage, cependant.

C'est vrai. Le Kah vise à défendre ses acquis. Pas à les mettre en jeu dans d'éventuelles guerres totale. Pourtant les risques sont là : l'Union est entourée d'ennemis. Au nord, au Sud, sur d'autres continents. Là encore le général botte en touche : un adversaire idéologique n'est pas nécessairement un ennemi.

Et concernant les fronts plus pressant ? Le Varanya ? La question préoccupe les communes, et il semble logique de se demander si l'armée du Kah participera ou non au conflit. La réponse tombe, comme une évidence : Ce n'est pas à la Garde de décider ce que l'Union lui demandera, mais le Varanya est dors et déjà dans l’œil des Comités, alors qui sait.

Il se retourne pour fixer les recrues. Elles s'alignent face à la tribune, saluant rangée après rangée. Les officiers dirigeants la manœuvre se placent devant les formations, attendant un signe que le général leur donnera finalement, se levant et se plaçant sur un prolongement de la tribune pour les saluer d'un geste sec. Les futurs gardes pivotent alors, comme un seul homme, et quittent le terrain.

Lesquels de ces hommes et femmes mourront sur un sol étranger, ou en défendrant héroïquement le Kah ? Une chose est sûre, l'heure n'est plus à la paix naïve et désarmée.
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Akai Kagami
Le Regard, une autre vision du monde.


Le livre kah-tanais à la conquête du monde.

Depuis la réouverture du Kah à l'internationale, son secteur culturelle d'une étonnante vivacité se répand dans de nouveaux marchés. Après le cinéma, la littérature, et un phénomène de société que l'on pensait incompatible avec les mœurs de consommation étranger : le canhoxtli.

Mouais.

« C'est bien simple, nous avons doublé nos ventes, et ce n'est qu'un début. », a affirmé le citoyen Canhoxtli, représentant du syndicat intercommunal d'édition de la Grande Corne. Jusque-là les activités du syndicat consistaient essentiellement à soutenir les auteurs des communes participantes et à fournir un tirage adéquat aux œuvres de ces derniers. Cependant, et au même titre que toute l'économie de l'Union, le secteur culturel prend le pas de la mondialisation. « Techniquement nous pourrions continuer produire et diffuser en autarcie. C'est assez confortable et les ventes sur le sol confédéré suffisent à assurer le fonctionnement du syndicat. Sans parler des fonds communaux. Mais après tout pourquoi se priver, maintenant que nous pouvons exporter officiellement sans que ça ne devienne une gabegie administrative… Et c'est qu'il y a un public pour ça ! » Ce que le syndicat intercommunal qualifie lui-même de « changement de niveau » ne s'est cependant pas fait sans heurt : d'importants fonds durent être déployés pour négocier avec les éditeurs nationaux étrangers, ou pour parfois créer de toute pièce des structures d'importations. La formation de traducteurs pouvant efficacement faire passer un texte du syncrelangue à un autre parlé s'avéra aussi être un sujet complexe. « Heureusement, » nous confia Sélène Marquise, en charge de la question dans le syndicat, « de plus en plus d'étudiants brillants apprennent le syncrelangue. Ceux qu'on débauche à la sortie des universités sont à la fois curieux et doués. » Passé les balbutiements inévitables, cependant, la machine est bel et bien en marche, et des textes originaires du Grand Kah s'exportent aux quatre coins du monde. Des éditions traduites de classiques politiques et philosophiques à destination d'universitaires et des lettrés, bien-entendu, des textes autochtones tels que les quinze grands classiques ou la Doctrine du Combat, les classiques romantiques, gothiques, néoréalistes, réalistes-magiques, irrationalistes... Pourtant, et malgré le très important répertoire littéraire kah-tanais, la plus grosse part des ventes à l'étranger n'est pas exactement composée de grands classiques...

« Nous avons de bons auteurs. » Insiste Canhoxtli. « Certains diraient même de grands auteurs, qui ont été récompensés dans plusieurs pays, qui jouissent d'une très sérieuse réputation dans les milieux de la littérature et de l'édition. Mais ce qui se vend le mieux, en fait, ce sont les canhoxtli. »

Les Canhoxtli, contraction de canahuac – fin, léger – et amoxtli – livre. Aussi surnommés pulps, romans de gare ou encore light novel selon les éditions et les pays. Ce sont ces formats légers, produits en très grande quantité dans un but de pure distraction assez éloignée des objectifs littéraires des principaux auteurs des syndicats. À la grande surprise de ceux-là, cependant, ce sont bien ces éditions sans prétention qui ont le plus gros succès. Lorsque nous évoquons le sujet auprès de notre hôte, il sourit d'un air amusé avant d'acquiescer.

« Vous devez comprendre qu'à la base ça n'a pas vocation à être exporté. Ce sont des fictions d'amateurs, de gens qui écrivent un peu pour le plaisir. Dans d'autres pays elles seraient publiées dans des magazines spécialisés mais ça ne nous coûte pas vraiment plus cher d'en faire des éditions papier. Le pulp ne vaut vraiment rien. Avec le temps c'est devenue une véritable institution. Dans les années cinquante les canhoxtli ont commencés à être accompagnés d'illustrations, pour mimer le succès qu'avait eut Treize Meurtres, d'Animata Williams. » Un classique, le premier canhoxtli à avoir accompagné chaque chapitre d'une illustration, dessinée pour la première édition de Treize Meurtres par le maître surréaliste Stephen Kodoha, professeur de Shigenori Hashino qui révolutionna la bande dessinée kah-tanaise en lui donnant ses codes pré-modernes. « Dans les années soixante les syndicats se sont rendu compte que les canhoxtlis représentaient un bon moyen de trouver de nouveaux auteurs à succès, et ont organisé de plus en plus de concours, appel à texte. Quelques auteurs prolifiques finissent par faire la transition et ralentissent pour écrire des romans plus classiques, mais la majorité ne le font pas. Puis il y a aussi ceux qui s’organisent eux-mêmes en syndicats uniquement orientés autour de ce style bien particulier. De manière générale ça a toujours été un bon moyen de financer des projets plus ambitieux ou risqués, et comme tout le monde peut écrire du pulp, c'était aussi un bon moyen d'expression pour des gens qui n'avaient pas le temps ou l'envie de développer leurs talents d'écriture. Mais de là à les vendre à l'étranger !... »

Comme lui, des dizaines d'autres représentants et représentantes de syndicats nous tiennent les mêmes propos. Exporter les canhoxtli ? Impossible. Chaque pays a sa littérature pulp, bon marché. Pourquoi donc des lecteurs alguarenas voudraient lires des romans de gare kah-tanais ? Les faits, pourtant leurs donnent tort. La plupart des démarcheurs étrangers étaient venus pour la haute littérature, et sont repartis les bras chargés d'édition bon marché. Pour le moment les canhoxtli s'écoulent principalement dans les pays du Paltoterra et d'Aleucie, mais un important marché serait en voie d'être ouvert au Nazum, et on parle de futurs accords avec des maisons d'édition eurysiennes. Une explosion des ventes achevant de transformer la structure jusque-là locale des syndicats littéraires en véritables béhémoths de l'édition, on parle même d'adaptations télévisées et cinématographique des textes ayant le plus de succès. « Si les gens ont aimé le lire, ils aimeront les voir adaptés pour le cinéma. ». Un bon moyen d'exporter la production audiovisuelle de l'Union ? Peut-être. Mais pas partout, malgré un tableau des plus positifs, tout n'est pas exactement parfait. Canhoxtli nous le concède.

« Les textes de science-fiction et de fantasy s'exportent assez bien et sans problèmes. Mais les textes plus classiques ont du mal. C'est curieux, non ? Les comités de censure de certains pays nous refusent obstinément toutes nos tranches de vie et nos romances. Je ne peux pas citer de nom, mais on nous a dit une fois pour un même texte qu'il était « contre-révolutionnaire », puis, dans un autre pays, de la propagande communiste ! Les gens n'arrivent simplement pas à assimiler que nous décrivons simplement notre quotidien. C'est dommage, je suis sûr qu'une littérature terre à terre pourrait faire beaucoup de bien aux habitants de ces pays. Vous savez, leur présenter un autre modèle de société. On ne révolutionne pas tout avec des grands discours. Mais bon. Déjà on leur vend nos textes de fantasy. Plus inoffensifs, probablement. » Puis, concluant avec un grand sourire. « Et puis les jeunes adorent. »

En attendant c'est bien une certaine vision du monde qui fait le trajet dans ces petits livres de poche. À la conquête du monde, bien qu'on ne s'y attendait pas.
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Akai Kagami
Le Regard, une autre vision du monde.


Thylacine Corporation s'installe sur le sol de l'Union, et déchaîne les passions.

Avec l'installation d'un site à fonctionnement capitaliste au sein du district supérieur de Kuotshima, certains redoutent un recul de l'idéal démocratique tandis que d'autres se félicitent d'un nouveau succès du modèle Kah-tanais. Qu'en penser ?

Mouais.

Résultat inattendu pour certains, conclusions satisfaisantes pour d'autres, après de longs mois de négociation et d'échanges entre les différents partis concernés, la Convention générale, le district de Kuotshima, leurs représentants et les envoyés de la société Thylacine a enfin été autorisée de financer l'ouverture d'un site sur le sol de l'Union. Résultat d'un long feuilleton politico-économique où se mêlèrent les intérêts économiques, diplomatiques et démocratiques de l'Union, l'installation d'un site de production de matériel médical de pointe au sein de l'Union a en tout cas su réveiller les passions, dans un pays où les sujets économiques éveillent rarement les foules. C'est que l'exception représentée à ce jour par Thylacines et sa décision de s'installer au sein du Grand Kah interroge. Là où certains se félicitent que le sol des communes puisse attirer des sociétés au nom prestigieux, malgré les difficultés liées au modèle Kah-tanais de protection de la démocratie et des citoyens, d'autres craignent qu'il ne s'agisse là que d'une première étape dans un plan de colonisation de l'Union par des intérêts étrangers capitalistes.

C'est par exemple l'avis du citoyen Espoir, membre du Club des Splendides – mouvement radical, radical et communaliste dans son appréciation du Kah. « C'est n'importe quoi. On laisse des intêréts étrangers s'installer sur le sol de l'Union. On crée une situation où les citoyens sont soumis à un actionnariat, où ce même actionnariat possède les moyens de production, créer des richesses qui lui seront utiles à lui et non-pas au peuple. On laisse entrer un petit bout de capitalisme, et demain c'est toute l'armée des bourgeois, des grands patrons, des financiers à la con (sic) qui viendront coloniser l'Union. Le Kah est une idéologique unique, un système qui brille par son caractère unique. Ce n'est pas en trahissant la Roue au nom d'un je ne sais quoi pragmatique qu'on arrivera à faire voir la lumière aux pays voisins.

Le peuple de l'Union avait-il besoin que l'on ouvre un nouveau site de production médical ? Non, sinon les commissariats les auraient ouverts. Ce site de production ira-t-il alimenter des marchés socialistes, à des prix raisonnables ? Non. Sa production sera vendue de manière capitaliste, dans l'irrespect des besoins des peuples, exporté dans des conditions délétères pour l'environnement. C'est un renoncement de la part de la Convention générale et du Comité Estimable. Un scandal à tous les niveaux ».

L'avis du citoyen espoir ne fait cependant pas l'unanimité. L'un des principaux porteur du projet, le citoyen-délégué Wilxhem du dictrict supérieur de Kuotshima, défend ainsi le projet comme suit :

« Nous n'exporterons pas la doctrine Kah-tanaise en suivant les schémas des nations qui ont raté l'exercice. Ces grandes renfermées, soi-disant républiques, soi-disant sociales. Il est nécessaire de montrer aux habitants du monde libéral – nous ne parlons pas ici des propriétaires et capitalistes qui savent déjà que le Kah leur est fermement opposé, mais aux citoyens de tout pays qui peuvent percevoir en nous l'équité, la liberté individuelle d'être, de penser et de faire, la démocratie réelle, il faut montrer à ceux-là que le Kah est une nation ouverte. Il convient de ne pas tenir une position diplomatique d'impotence et d'inaction. L'ouverture de cette usine n'est pas un renoncement au capitalisme. L'usine en question suivra le fonctionnement démocratique et syndicaliste de toutes les autres industries installées dans le District supérieur. Il s'agit d'une franchise, si vous voulez. La production ne revient pas aux communes – qui n'en ont pas besoin – mais aux investisseurs. C'est un compromis qui ne change rien au fonctionnement démocratique du lieu de production et permettra d'employer un certain nombre d'experts, ingénieurs, chercheurs, ouvriers de pointe, qui n'auraient pas forcément trouvé un travail satisfaisant dans le domaine de la santé du fait de la faible demande interne et du redémarrage lent de notre industrie d'exportation. La richesse produite profitera aussi aux communes d'implantation. Voyez ça comme un investissement du monde capitaliste au profit du monde démocratique. Nous produisons pour d'autre, à notre façon. 

 Quant au fait que les capitalistes y gagnent aussi cela n'a rien de révoltant : sans nous, ne pensez-vous pas qu'ils se seraient installés ailleurs ? Au moins, en s'installant chez nous, ils ouvrent la porte. Font sauter un barrage idéologique, un faux dilemme de leur côté : Oui, le Grand Kah est une nation fréquentable. On aura plus de mal à nous cracher dessus si on donne les gages d'une société ouverte. Désormais c'est à nous et à nos partenaires de prouver que ce partenariat peut fonctionner, que notre système n'est pas aussi fou qu'ils aiment le penser. Par cet intermédiaire, nous saurons montrer aux habitants de leurs pays respectifs la réalité du Grand Kah. On les séduira en s'ouvrant à eux, par en se refermant. Ça a toujours été notre modèle, finalement. »

La question promet de hanter les murs de la Convention Générale et des conseils communaux pour de longs mois. Reste à voir ce qu'il en découlera, et dans quelle mesure l'Union peut s'ouvrir aux investissements étrangers sans pour autant trahir ses engagements. Pour rappeler les mots du citoyen Aquilon Mayhuasca, coordinateur à la théorie politique et rapporteur de la Volonté Publique auprès du Parlement, « Ni la démocratie, ni le respect de la nature, ni le rejet des autorités injustes ne sont remises an cause par ce partenaire. Il tient désormais de notre effort collectif d'assurer que la situation ne soit pas comprise ou interprétée comme un précédent ouvrant la porte à tous les délitements du rêve Kah-tanais ».
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Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


Coalition Damaniste Kah-tanaise : L'Union passe à l'offensive.

Après cent jours de tractation, de préparation et de jugement, l'Union déclare enfin la CDK et son occupation du territoire illégale. Les observateurs nationaux craignent le début d'un nouveau conflit interne opposant le Kah à ses composantes réactionnaires.

Mouais.

L'affaire aura pris du temps, mais c'est maintenant officiel. La Magistrature a, par l'intermédiaire de son échelon le plus élevé, condamnée la Coalition Damaniste Kah-tanaise et ses cadres dans un inventaire de crimes et délits qui aurait quelque-chose d'assez poétique s'il ne faisait pas état des souffrances infligées à des communes de l'Union. Parmi les accusations les plus notables prononcées par les prêtres-juges on peut ainsi noter que le mouvement et ses leaders sont reconnu coupable :

– D'occupation illégale de territoire communal,
– De formation illégale de milice armée,
– D'irrespect de trente-deux closes de la Charte constituante,
– D'expropriation illégale de citoyens du Kah,
– De monarchisme absolu,
– De non-respect des règles de laïcité imposées aux autorités régionales,
– D'illégitimité à représenter quoi que ce soit,
– D'illégitimité à utiliser de la force,
– D'illégitimité à rendre la justice,
– D'héberger des individus interdits de séjour au sein des communes occupées,
– De non-respect du principe de collégialité,
– De non-respect du principe de communalisme,
et la liste est encore longue.

Un inventaire qu'on pourrait trouver absurde sans le cumul des peines, permettant par l'addition de tout ces crimes qui, on le sait composent simplement un crime plus grand qu'est celui de l'action terroriste, de charger le mouvement, ses membres et tous ceux lui étant apparenté de peines puissantes et ne laissant pas la place au doute quant à leur sort.

Le plus difficile, nous confit un individu proche du dossier, a été de définir s'il fallait considérer la Coalition comme une commune ne respectant pas ses obligations ou comme un groupe armé occupant le territoire. La première position était défendue par les avocats de la CDK, très au fait des lois et de la Charte constituante de l'Union, et qui manœuvraient pour obtenir le soutien de certains des délégués les plus décentralisateurs de la Convention Générale. La seconde position permet pour sa part de mener des actions plus directes et de justifier une intervention instantanée de la Protection Civile, conformément aux précédents légaux existants.

En effet, ce n'est pas la première fois qu'un groupe armé ouvertement réactionnaire occupe une partie de notre Grand Kah. On se souvient des guérillas fascistes et monarchistes, écrasées après plusieurs décennies de lutte acharnée, laissant pour seul héritage les cicatrices d'un conflit civil, des régions appauvris et un important corpus légal permettant à la Magistrature et aux Communes de se montrer beaucoup moins démunis contre leurs émules qu'elles ne l'ont été lors de l'apparition soudaine de ces mouvements jouant avec les lois et droits accordés aux communes.

Certains critiques notent que la condamnation aurait pu venir du Comité de Volonté Public, mais l'Estimable a été forme pour ouvrir le Kah, en conséquence il ne s'intéresse presque qu'aux affaires extérieures et techniques. Les cents jours séparant la proclamation réactionnaire du CDK de cette condamnation traduisent le transfert de responsabilité depuis les communes touchées aux communes supérieures jusqu'à la Magistrature. Ce n'est pas un dysfonctionnement de l'Union mais la simple conséquence de son système démocratique combiné à une certaine intelligence des leaders guérilleros, qui firent en sorte d'éviter toute action les mettant directement en cause. Il fallait un jugement pour permettre une opération contre eux. C'est désormais chose faite.


L'action de l’égide sera dirigée par le Commissaire Inquisiteur Liam Aragon Ixazaluoh. L'Homme de Bien, qui avait déjà participé à l'enquête ayant amenée à la condamnation du CKD, est bien connu pour son profil particulier. Comparé à un Protecteur de la Révolution, à ça près que le titre ne lui a jamais été délégué, il est principalement spécialisé dans les affaires de corruption et de conflits d’intérêt politique, ce qui ne doit pas faire oublier son passé révolutionnaire et ses longues années de combat contre les guérilleros fascisant et les terroristes réactionnaires, années qui lui auront laissé les terribles cicatrices que nous connaissons bien. Sollicité par les médias du pays, il a accepté de communiquer sur l'opération en cours.

Je tiens déjà à dire que je réfute absolument les termes de rébellion. Il ne s'agit pas d'un groupe propre au Grand Kah rejetant son ordre dans un soudain élan populaire. Il ne s'agit pas non-plus d'une sécession qui, dans vocabulaire légal de l'Union, qu'utilise l’Égide, se traduit pas une votation de la part d'une majorité de la population, suivant un certains nombres de règles et de pratiques acceptées par toutes les communes lors de leur inclusion ou fondation.

Non. Ce que nous observons est une pure occupation illégale du territoire par un groupe religieux aux ambitions évangélisatrices et aux moyens militarisés. Cette occupation n'est pas une première historique, et nous savons déjà comment y réagir. Il n'y a pas de débats à avoir. Nous ferons notre travail.

Pour l'heure la Protection Civile se déploie. Nous avons déjà ordonné à la Coalition de se dissoudre d'elle-même et à ses cadres de se rendre. Bien entendu nous n'avons pas reçu de réponse, ces individus ne reconnaissent pas notre autorité.

Il y aura de la violence, et je le déplore. Il y aura des morts, et cette région déjà touchée par le passé devra encore une fois compter sur la solidarité si chère à l'Union pour se redresser. Si ces damannistes sont intelligents ils se cacheront dans les montagnes et la jungle, l'affaire pourrait durer plusieurs années en ce qui concerne le fait de les éliminer pour de bon.

Concernant les villages occupés, nous les libéreront. Une grande partie de la population a déjà évacuée dans les mois suivant l'occupation illégale de leur terre. Nous ferons le nécessaire pour éviter que ces terroristes ne fassent le moindre mal à nos citoyens. Cette opération doit être comprise comme une intervention de police en situation potentielle de prise d'otage. Selon nos informateurs et nos agents la Coalition n'est pas suffisamment équipée pour nécessité une intervention de la Garde.

Pour conclure je tiens à rappeler le caractère anecdotique de la nature religieuse de ce mouvement. Toute religion institutionnalisée est par essence réactionnaire, mais tous les pratiquants religieux ne le sont pas. La Protection civile ne tolérera aucun débordement anti-damanistes, aucune attaque contre les lieux de culte, aucune insulte envers les druides. Cette affaire est entre le Grand Kah et un groupe terroriste.

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Akai Kagami
Le Regard, une autre vision du monde.


Nomination d'une Commission sur la Numérisation de l'Administration.

Cette semaine, un dossier sur l'idéologie technocratique et le cybernétisme politique, avec une préface écrite par le docteur William Blackburn.

Mouais.

Après trois semaines de débat et de tractation entre les délégués de la Convention Générale, les Communes et les Commissariats, un accord a été trouvé sur la question de la Numérisation de l'Administration. Problématique soulevée initialement par un collectif de communes locales, ayant amassé assez de soutien à l'échelle confédérale pour être portée directement à la Convention sans s'acheminer par les voies normales de la hiérarchie communale. Le problème étant de rationaliser la dématérialisation des services publics, entreprises par certaines communes et certains Commissariats – tel que le toujours très à la pointe Commissariat à la planification – sans concertation globale. Si ces démarches de dématérialisation, fonctionnant sur les réseaux Communets locaux et les compétences de techniciens et ingénieurs régionaux, remportèrent quelques francs succès et présentèrent des avancées prometteuses, elles étaient aussi vivement critiquées du fait de l'absence de protocoles communs à l'ensemble des systèmes, chaque commune ayant conçue les siens. L'argument justifiant finalement la mise en place d'une commission d'échelle confédérale fut qu'un certain nombre de communes n'étaient pas dotées du personnel compétent pour dématérialiser leurs administrations. Ces mêmes communes, généralement moins peuplées ou orientées sur une économie d'extraction ou de production industrielle, avaient déjà dû recourir à l'aide de l'Union pour mettre en place leurs infrastructures de télécommunication, de Communet etc.

Ainsi ce sera bien l'affaire d'une Commission. On avait envisagé d'employer les services du Commissariat à la planification ou du Commissariat à la coordination des communes, mais il a plutôt été décidé de nommer des délégués compétents pour chapeauter ce qui devrait être un projet à moyen terme, et non une composante essentielle de la Convention devant s'inscrire dans la longue durée. La commission, qui jouira du soutien du citoyen Xen Suchong du Comité de Volonté Publique, et des compétences des commissariats cités plus haut, aura pour première mission de faire un compte rendu de la situation des réseaux Communets confédéraux, des expérimentations préexistantes en dématérialisation, puis de rassembler un personnel compétent pour concevoir les protocoles d'utilisation et les déployer sur l'ensemble des communes le désirant. La mission de la commission risquant d'amener à des travaux de densification du réseau de télécommunication de l'Union et à la formation de personnel chargé d'entretenir les futurs serveurs et infrastructures nécessaires à la dématérialisation, un budget d'une valeur de deux milliards de devlib-kah a été débloqué.

Concernant la gestion de la Commission même, elle a sans surprise été confiée à cinq délégués partisans du Club Technocratie ©, qui insistèrent pour que soient inclus un membre du Club Un Un Un et un idéologue d'Un Esprit. Ces trois mouvements réclamant depuis longtemps la modernisation de l'infrastructure administrative du Grand Kah, et notamment que soit achevée sa numérisation. Projet initié dès le lendemain de la dernière Révolution avec la création des Communets, alors très en avance sur leur temps, mais délaissé depuis plus de huit ans au profit de programmes industriels et militaires coûteux. C'est que la ligne, relativement centralisatrice, des trois mouvements, est issue d'une longue histoire politique, d'une « destinée volée, » pour reprendre les mots du citoyen technocrate Beckett, coupée dans son élan, mais qui laissa au Kah un goût prononcé pour l'expérimentation technologique et le mélange de solutions philosophiques et techniques.

Les conceptions technocrates apparurent au sein du Grand Kah au profit du Positivisme scientifique. Idéologie découlant de celles dites des Lumières, s'intéressant à l'étude réelle et empirique du monde, des faits et de leurs conséquences, au-delà de toute notion politique, philosophique et métaphysique. Une conception du monde qui eut d’abord du mal à s'implanter au sein de l'Union. Si elle se voulait holistique, son rejet de l'idée spirituelle et son utilisation par la nouvelle bourgeoisie libérale comme alternative au socialisme des travailleurs et au conservatisme des grands propriétaires ne manqua pas d'être remarqué par les clubs politiques Kah-tanais. Malgré tout, l'idée put s'implanter. L'Union tolérait effectivement durant cette période de nombreuses expériences que la Convention et les Comités d'alors auraient jugé indésirables à l'échelle de la Confédération. Concevant ce que l'on appelait la Politique d'Asile Permissif, qui visait à récupérer des esprits et du personnel formé étrangers en permettant sur soumission d'un dossier ou d'une bourse d'expérimenter librement des théories techniques et sociales sur des territoires prêtés par l'Union.

Beaucoup de ces colonies expérimentales ne durèrent qu'un temps, d'autres furent intégrées à l'Union en tant que Communes à proprement dites après le succès de leurs tentatives. Certains des médecins, avocats, ingénieurs, philosophes, et autres personnalités expatriés finirent par repartir, d'autres restèrent sur place, s'installèrent pour de bon au Grand Kah, soit pour continuer leurs recherches, soit charmées par la constante effervescence humaniste, scientifique et politique de ce pays si particulier.

Malgré tout, et ce fut un problème que rencontrèrent tous les tenants d'une idéologie technocrates au sein du Kah, les Objectivistes ne furent jamais perçus autrement que comme de purs techniciens à œillères, refusant de percevoir les implications sociales de leurs modèles de société, de leurs inventions, de leurs méthodes, et cherchant une réalité « Objective », une Perfection de leurs modèles incompatible avec les réalités sociologiques, la nature humaine, et le principe même de l'adaptation et de la démocratie directe. Pour reprendre les mots du Traité sur la Troisième Voie :

« Le principal axiome du centraliste – à comprendre qu'une société doit incorporer des mécanismes de contrôle global – est certainement vrai, si l'on utilise le terme « contrôle » dans le sens du maintien d'un grand nombre de variables critiques au sein de limites données et à un seuil considéré comme tolérable. L'erreur du Centraliste est de penser qu'incorporer des mécanismes de contrôle global est toujours l'équivalent d'inclure une unité de contrôle fixe, isolée de la majorité et auquel le système serait subordonné. C'ette interprétation des termes est peut-être adéquate pour parler de modélisme ferroviaire, mais pas pour une société humaine. Le modèle alternatif est nécessairement complexe et évolutif dans sa quête de stabilité face à des circonstances imprévisibles. »

L’essor de l'idéologie technocratique dans le Grand Kah se fit vraiment à partir des années 1920, au profit d'une relative libéralisation économique de l'Union, initiée par le Comité de Volonté Public dit « Nouveau ». L'économie du Grand Kah, en coopératives, usines associatives et réseau d'interdépendance économiques, cherchait alors à se réorganiser dans le but d'attaquer plus efficacement les marchés étrangers. C'était le « mal du siècle », l'esprit industriel de l'époque. Cette période fit naître de nombreux ingénieurs et diplômés Kah-tanais, persuadés qu'il était plus que temps de revoir les modèles sociétaux de l'Union en utilisant les nouvelles évolutions technologiques et mécaniques. Le choc de la culture spirituelle et syncrétique de l'Union avec les nouvelles techniques de guerre, de production industrielle, de déplacement, donna naissance à la très vivace nébuleuse Accélérationiste. Terme initialement créé par des socialistes orthodoxes pour désigner ces nouvelles idéologies, partisanes d'une expansion rapide et radicale de la lutte visant à identifier, approfondir et radicaliser les forces de la modernisation et du progrès technique dans le but d'obtenir à terme un nouveau paradigme social. Cette nébuleuse était principalement encadrée par une intelligentsia d'avant-garde, d'étudiants hautement qualifiés, de chefs industriels communaux, d'artistes ambitieux.

Cette nébuleuse fut sujette à de nombreux fantasmes et à de nombreuses critiques. Qualifiées de « Belles idées funèbres », la pensée Accélérationniste arma une grande partie de l'extrême droite internationale, dota le Kah d'arguments militaristes et messianiques jusque-là esquivé par sa production culturelle mettant l'accent sur la communauté et la conception de l'Homme en tant qu'individu faillible, et pourrait en bref être considérée comme un genre de fascisme Kah-tanais, exprimant les mêmes préoccupations viriles, militaristes, messianiques et apocalyptiques que les répertoires idéologiques habituellement illégaux au sein des Communes, mais d'une façon détournée, ne s'intéressant par à la Race, au Genre, au Sexe, à l'Ordre social, mais à une pure notion abstraite de progrès.

Bien entendu il n'y a pas que ça. Et pour chaque Club Intercommunal de l'Accélération ou Ordre de l'Escadron, on compte autant de mouvements mesurés, de groupes d'études scientistes, de planificateurs strictement socialistes. Ce furent plutôt à ceux-là que l'on permi d'obtenir d'importantes places au sein de la Convention Générale. Inspirée par l'apparition de nombreux régimes socialistes, le Grand Kah expérimenta à son tour avec la Planification économique. Convaincu par les arguments de l'époque et la sensation que l'on avait alors de pouvoir contrôler toutes les variables du marché, de la production, etc. L'arrivée des chaînes de montage fit émerger au sein du Kah comme ailleurs une industriephilie prononcée, et le caractère social de la confédération fut brièvement mis en sourdine, ne se traduisant plus vraiment dans les méthodes d'organisations de la macroéconomique, mais dans le maintient de la participation ouvrière à la vie collective du lieu de travail et la mise en place d'importantes commissions visant à encadrer et minimiser toutes les nouvelles sources d'aliénation accompagnant ces nouvelles méthodes de travail.

Le modèle planificateur, porté par plusieurs grands noms parmi les plus modérés de la nébuleuse Accélérationniste, eut ses succès et ses échecs. On doit au moins lui reconnaître d'avoir su viabiliser l'autarcie relative de l'Union et de s'ériger en véritable rempart face aux nombreuses crises économiques majeures que traversa le monde libéral à cette époque. Il normalisa aussi une partie de l'idée technocratique et déradicalisa progressivement les Clubs les plus virulents, les réorientant vers un réformisme plus compatible avec la Démocratie directe Kah-tanaise et la relative démilitarisation de l'Union à cette époque. Malgré tout il restait sujet à de nombreuses critiques de la part des communes et des partisans de certains Clubs politiques. Trop centralisateur, trop lourd administrativement, trop aisément sujet à de la corruption malgré les vérifications fréquentes de l’Égide, pas assez de communications entre les industries et les centres de recherches, hermétisme empéchant les idées développées dans un milieu de se répandre dans les autres etc. Progressivement, un certain nombre de communes sortirent du modèle planificateur centralisé pour retourner au modèle coopératif local, fragilisant leur économie mais lui donnant par ailleurs plus de liberté fonctionnelle. La situation dura plusieurs décennies de telle façon qu'à la nomination par la Convention du Comité de Volonté Publique dit « Expérimental », qui avait pour mission explicite de rénover le Kah et de réparer les dysfonctionnements de son système économique et politique, les commissaires se retrouvèrent à la tête d'un empire désorganisé de mines et d'usines, certaines occupées par leurs ouvriers, d'autres au service du Commissariat au Plan, peu fonctionnant à leur plein potentiel. Au sein du comité se trouvait le Commissaire Tsukihiro Manatawa, qui avait par le passé travaillé hors de l'Union et rencontré le Cybernéticien hylvetien Cirano Bernabe.

La Cybernétique, développée au début des années 40, se conçoit comme une science interdisciplinaire d'approche du fonctionnement des systèmes (machines, organismes, animaux, groupes etc) et de la manière dont ils s'auto-organisaient et régulaient en réponse à leur environnement. L'originalité de Bernabe avait été d'appliquer cette science à la sociologie. Ses écrits, énergiques et originaux, s'opposaient aux fondements centralisateurs de la planification ou de certaines des méthodes capitalistes. Il pensait la cybernétique comme moyen d'analyser le fonctionnement des choses et d'en établir une critique, proposa de nombreux modèles visant à une expérimentation heuristique dans le but de critiquer des organigrammes et théorisa sur l'automatisation des processus de décision et l'utilisation des ordinateurs dans l'industrie et la politique. Quand Manatawa fit appel à sa société de consulting pour aider l'Union à réorganiser son économique, Barnabe laissa tomber toutes ses autres occupations et s'expatria pour se charger personnellement de l'opération. On donna à l'ensemble le nom de Projet Contrôle (voir la définition proposée plus haut du terme) et Information. Le principal problème de la Planification économique était la lourdeur et la lenteur de son administration. La solution trouve par Barnabe et ses équipes, en collaboration avec les chercheurs de l'Union, fut précurseur en la matière. On commença par organiser l'économie par Pôles Régionaux, suivant l'a tradition de récursivité organisationnelle de l'Union : Les sites de production devaient communique avec des sites de gestions communiquant entre-eux et avec un site d'analyse du milieu (économique), faisant la liaison entre les sites de production et un site de planification lui-même en communication avec un site de liaison politique faisant le lien avec les échelons économiques supérieurs. Cette rationalisation de l'organigramme permis de laisser une plus grande marge de manœuvres aux acteurs économiques en ajoutant plus d'échelons et, paradoxalement, plus de communications entre les Usines et le Commissariat au Plan. De même, on augmenta sensiblement la part de démocratie interne au sein des systèmes récursifs de telle manière que l'organigramme hiérarchique n'était pas tant appliqué tel quel que compris comme une méthode d'analyse du fonctionnement économique. En bref chaque partie (produire, communiquer, analyser etc) ne doit pas tant être comprises comme un poste à part dans une hiérarchie pyramidale, mais comme un rôle devant être rempli, peu importe qui le rempli et selon quels critères. Pour reprendre les termes de Barnabe :

« Ce modèle de viable est un modèle de structure organisationnelle propre à tout système autonome capable de se produire seul. Tout système organisé de cette manière est apte répondre aux exigences de la survie dans un environnement en mutation. » Il ne s'agissait pas tant d'un plan à appliquer que d'un outil de diagnostique servant à interpréter l'équilibre des pouvoirs et des fonctions, la centralisation de l'autorité, les dysfonctionnements d'un système donné etc.

En parallèle à cette réorganisation structurelle, chaque pôle économique communal (puis progressivement, chaque usine) fut doté d'un téléscripteur branché en réseau, et permettant d'entrer en communication avec un puissant ordinateur central installé à Lac Rouge, dans les locaux du Commissariat au Plan, qui devint à cette époque le Commissariat à la planification pour marquer le changement et le retour à une organisation plus démocratique de l'économique. Ce réseau de téléscripteur permettait à chaque site de production de faire un état total des lieux journalier aux échelons supérieurs. Des informations sur la production, les problèmes rencontrés, les doléances des travailleurs, les besoins techniques ou humain des sites naviguaient ainsi quotidiennement de chaque site de production économique de l'Union jusqu'à Lac Rouge. Des informations qui en temps normal auraient dû prendre des mois à être remontée étaient communiquées en un rien de temps. L'ordinateur central, chargé de ces données et à l'aide de programmes de simulations économiques, permettait d'orienter les décisions de la planification démocratique en simulant des modèles basés sur les propositions votées. Ce système de Téléscripteur, fonctionnel en seulement cinq ans, fut rapidement densifié. Chaque échelon économique de l'Union fut doté de ses propres calculateurs, les téléscripteurs, d’abord réservés aux usines, mines, furent étendus dans l'ensemble des administrations etc. Ce franc succès – et cette sensation un peu prétentieuse qu'avaient les Kah-tanais d'entrer dans le futur – donna naissance à tout un nouveau courant technocratique, dont est issu l'actuel club Technocratique. Rejetant les conceptions indutrialistes et scientistes au profit de la science des algorithmes et d'une conception particulière de la Cybernétique comme outil d'analyse d'un fonctionnement anarchiste. En bref, l'utilisation d'ordinateurs et de modèles d'étude sérieux pour analyser des propositions organisationnelles politiques. Ce mouvement fut si populaire que les groupes d'inspirations Cyber-anarchistes et Technocrates révolutionnaires remportèrent plus d'un tiers des sièges du Parlement général en 1982, amenant à la fondation du Comité de Volonté Publique dit « Cybernéticien », qui envisageait sérieusement la mise en place rapide d'une démocratie directe d'une nouvelle échelle à l'aide des Communets, terminaux informatiques reliés à des réseaux vidéotex préfigurant Internet. Cette remarquable ascension prit brusquement fin avec le coup d’État réactionnaire qui, malgré la brièveté du régime impérial qu'il initia, eut le temps de libéraliser l'économie et de remiser l'ensemble du réseau Projet Contrôle et Information.

Les technocrates et cyber-anarchistes furent lourdement purgés par la Junte et sortirent de la révolution très affaiblie, voyant leur popularité et infrastructures décliner au profit de celles des mouvements socialisants, d'un renouveau Accélérationiste et de groupes néo-humanistes, prônant un retour relativement conservateur aux idées initiales de la Révolution Kah-tanaise.

Ce discret retour des Technocrates sur le devant de la scène pourrait être pour eux l'occasion d'une vengeance sur l'Histoire. Si le souvenir des exploits techniques du Projet Contrôle et Information se font vieux, et si le réseau Communet est entré dans les usages de telle façon qu'on en oublie l'origine de ses architectes, la création d'une Commission gouvernementale dotée d'un budget conséquent, excédant en fait les estimations nécessaires prévues par les planificateurs, sonne comme une invitation à l'expérimentation. Un message discret, peut-être, du Commité de Salut Public Estimable à cette importante idéologie politique. La Technocratie a profondément changé le Kah par le passé, peut-être pourrait-elle encore lui apporter quelque-chose.
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Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


Signature de plusieurs accords entre l'Union et la Floralie.

La République Démocratique indirecte de Floralie et les Communes Unies du Grand Kah ont, sur l'initiative de l'Union, signé une série d'accord bilatéraux relatifs à des questions diplomatiques, culturelles et militaires. Un premier pas dans une construction régionale stable, présentée comme un modèle souhaitable face à l'exemple Eurisien.

Drapeau Grand Kah et Floralie.

Malgré l'opposition d'un certain nombre de députés du Parlement Général parmi lesquels les isolationnistes et de quelques-uns des radicaux (notamment les camarades du Syndicat des Brigades et du Club de l'Avant-Garde), un consensus aura finalement été trouvé concernant les nombreux accords issus de la rencontre entre les citoyens du Comité de Volonté Publique et l'exécutif Floralien, ouvrant la voie à une adoption des traités par les échelons communaux.

Ce n'est pas une surprise et les débats furent en fait assez rapides : le contenu des accords ayant été préparé avant la rencontre de Cuetlachquiauhco par le Commissariat aux Affaires Extérieures, et des accords et modifications pré-discutés entre les différents représentants parlementaires, sous la tutelle du Commissariat au Consensus. Ce fut donc une prise décision rapide et consensuelle au sein de laquelle les quelques débats, loin d'être aussi houleux qu'ils ne le furent sur des sujets moins préparés, servirent principalement à marquer à nouveau les positions des différents mouvements idéologiques composant la Convention, à justifier certains accords, certaines modifications, certaines virgules changées dans les traités.

Globalement la grande majorité des députés s'accordent à dire qu'il est important de soutenir la politique du Comité, nommé pour ouvrir le Grand Kah à la diplomatie étrangère et préparer la création d'un ordre mondial pacifié et démocratique. Cet accord n'est qu'une étape parmi d'autres, et à été reconnu conforme aux buts idéologiques et éthiques de l'Union.

Tout a été fait plus vite que prévu, nous confie à ce sujet un fonctionnaire du Commissariat aux affaires étrangères. Le Comité était réservé quant à ses chances de créer un dialogue constructif avec les puissances régionales. Nous préférions une implémentation incrémentale, se faisant sur la durée. Même après le sommet Tiarmina qui a prouvé qu'on pouvait faire beaucoup en une fois. Mais quand on voit ce qui se passe à l'étranger, en Eurisie notamment, il devient évident qu'il faut rapidement sécuriser le Paltoterra, assurer des ententes solides dans la région. Créer des nœuds qu'un prochain gouvernement, peut-être plus chauvin ou belliciste, ne pourra pas délier aisément. C'est vrai : on a pressé le pas sur le calendrier.

Et à raison, car c'est un ensemble d'accords ambitieux qui a été signé, un ensemble qui pourrait bien servir d'exemple dans la région, et de modèle à suivre pour les prochaines avancées du Comité sur le plan de sa politique extérieure..

On note ainsi la création de missions diplomatiques permanentes entre nos deux gouvernements, la mise en place d'un certain nombre de droits douaniers favorables sur des secteurs économiques clefs tel que l'industrie culturelle, minière et les produits manufacturés, la création d'un important programme d'échanges culturels facilitant la collaboration entre nos universités, musées, un programme d'échange universitaire et, peut-être le plus notable, un programme d'échange d'élèves officiers et une collaboration armée sur les questions de la protection du commerce maritime, sujet à la piraterie étrangère.

Ce bloc particulièrement exhaustif d'accords visa à permettre une collaboration militaire assurant d'une part la sécurité régionale et la mise à niveau de nos deux armées, et une entente culturelle et économique rendant toute trahison de ces accords, tout conflit à venir, inenvisageable. Nous préparons la voie à un avenir en commun permettant de désenclaver l'Union et de fortifier ses positions en tant que puissance régionale importante. Nos nouveaux camarades doivent penser la même chose.

C'est que malgré quelques positions gouvernementales pouvant nous sembler étrange (interdiction aux citoyens Floraliens d'obtenir une double nationalité, illégalité de la pornographie), la République reste un acteur régional plus fiable et moins obscènement autoritaire que le Yuhanaca voisin. Un régime libéral classique, à ça près que la protection de l'environnement y est inscrite dans la constitution, ce qui a pu jouer sur la décision du Comité, ainsi que l'égalité des citoyens et le rejet des théories racistes. On sait bien entendu ce que vaut cette « égalité » dans une société capitaliste, mais mieux vaut ça que la monarchie…

Pourrait-on croire. Pour citer la constitution Floralienne : Article V : Droit de fondation
L’article V stipule que le fondateur de Floralie et ses descendants, possèderont toujours un droit de regard sur la gestion du pays, et ce, même s’ils ne sont pas en fonction. Ceci s’appellera le droit de fondation, et il se transmettra par le sang. Cependant, certains membres de la famille peuvent perdre ce droit s’ils divulguent des informations confidentielles ou nuisent à l’intégrité du pays.


La Floralie est donc une nation à la démocratisation encore très imparfaite, et qui devra relever de nombreux défis à l'avenir. Des défis que le Kah aidera sans doute à remporter aisément. Après tout nous sommes maintenant des nations amies.
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Akai Kagami
Le Regard, une autre vision du monde.


Le Temple du Travail Damaniste ouvre à Commune Ville-Libre !

Après une longue intégration dans la société Kah-tanaise et une non-moins longue bataille pour obtenir une parcelle dans une ville traditionnellement ouverte à toutes les cultures mais rendue plus prudente par les récents actes terroristes ayant secoués le pays, le premier grand temple Damanniste de l'Union ouvre au sein de sa ville la plus peuplée.

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On compte un peu plus d'un million de Damanniste au sein du Kah. Ce qui représenterait, dans d'autres pays, une part importante de la population, fait ici de l'antique religion celtique l'une des moins représentées sur le sol de l'Union, devant les Sikhes (sept-cent miles croyants recensés) et autres sectes locales. Cela explique peut-être cette ouverture tardive. La communauté damanniste a qui plus est toujours été assez discrète. Qualifiée historiquement de « peu intégrée » à l'union, existant pacifiquement dans ses communes isolées, sans entretenir d'ambitions nationales ou se lier au reste de la nation. Plutôt qu'une victoire de cet isolement, le conseil communal métropolitain de Lac-Rouge est formel : l'ouverture de ce temple, au sein d'une ville aussi cosmopolite et habitée, est la preuve s'il en fallait-une que la communauté Damann est enfin arrivée à maturité dans son intégration à l'Union. On se souvient par exemple des brigades vertes qui, lors de la dernière Révolution, prirent spontanément le parti de la Liberté contre l'Empire, sans doute pour contrer la nature fondamentalement catholique de ce dernier.

Toujours est-il que c'est maintenant une communauté bien intégrée dans la vie publique Kah-tanaise qui, après une longue bataille et de nombreux débats au sein de nombreuses communes, a réussi à obtenir une parcelle de terrain bien en vue près des portes sud du Lac pour y construire une structure d'inspiration celtique. Les principaux arguments de l'opposition ? Qu'il n'y avait pas assez de croyants au sein de la ville pour justifier de la création d'un temple, que d'autres structures plus importantes attendaient encore un emplacement ou, bien que cette parole soit minoritaire, que la création du temple était en fait poussée par un fondamentalisme similaire à celui agitant les milices druidistes sévissant au sud de la Confédération.

Malgré ces critiques, émanant entre-autre de riverains craignant que la création du temple ne s'accompagne d'une parole radicale, ainsi que des clubs les plus à radicaux, toujours premiers de cordés sur la question de la laïcisation de la vie publique, le temple a pu ouvrir ses portes sans incident notable, pour le plus grand soulagement des damannistes de Commune Ville-libre. La cérémonie qui se tint sur place fut l'occasion pour de nombreux ville-libriens de découvrir les rituels et l'esthétique de cette religion méconnue, et de participer à un grand festin ouvert à tous, au cours duquel l'ambassadeur de la République socialiste de Damanie donna d'ailleurs un discours.

L'évènement est, selon certains, un grand pas dans la direction de l’apaisement des tensions, de l'intégration des damanniste au sein du Grand Kah et, peut-être, du développement de cette religion au sein de l'Union.
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Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


Déploiement des nouveaux Char léger Ocelot : quels indices sur la politique de l'Union ?

Véritable marotte du Directoire de l'Armée lors de la remilitarisation des Communes, les nouveaux chars légers de la Garde ont enfin été déployés. Faciles à entretenir et à déployer, que disent-ils de la stratégie militaire de l'Union ?

Un char léger Ocelot en compagnie d'une unité d'infanterie.

Le Commissariat à la Paix et la Garde sont, d'accoutumer, très discrets dans leur communication. Malgré une image d'autant plus positive qu'elle profite pleinement des récents succès Eurysien, qui ont réanimé la flamme de l'imaginaire militaire de l'Union, le Commissariat n'oublie sans doute pas quelles profondes oppositions politiques ont précédées sa conception. Le projet avait été défendu bec et ongle par un Commité de Salut Public Estimable mis en difficulté par la première fois du nouveau Cycle. On craignait des tendances centralisatrices, la répétition de vieilles guerres continentales, le premier pas d'une longue confiscation du pouvoir des communes au profit d'Axis Mundis, dont la normalisation des forces de défense territoriale ne serait qu'une première étape…

Pour le moment ces craintes s'avèrent infondées. Et si le Commissariat s'est révélé, par son fonctionnement, ses succès et ses missions actuelles de sécurité dans le sud du pays, aussi essentiel que respectueux des règles du Consensus et de la Démocratie Directe, les oppositions pourraient se ranimer au premier faux pas, comme une vieille blessure peut se rouvrir au premier mauvais coup.

Alors on s'est habitué à ce Commissariat humble, dont les directeurs et citoyens-généraux ne s'expriment que quand sollicités, insistent sur leur nature de serviteurs de l'Union, sur leur organisation cellulaire et fluide, sur le caractère défensif de leur doctrine. C'est vrai que le Grand Kah a désormais une armée majoritairement articulée autour de l'Infanterie. Et cela n'a rien de surprenant : reconstruite sur le modèle de la Garde d'Axis Mundis, dont les effectifs composent encore un huitième du corps armé, elle a d’abord été pensée comme une force de défense gérée localement, formée de volontaires et préparée à défendre vaille que vaille l'Union contre toute opposition. On se souvient encore de l'entretien que le citoyen Atl Mikami nous avait accordé. Une armée d'infanterie équipée pour répondre à toute éventualité, obéissant aux ordres des communes et coordonnée par un commissariat d'élus. Une armée sans flotte d'invasion, sans aviation de bombardement. Sans moyens de destruction massive ou de déploiement invasifs. Une armée, en bref, de défense.

Depuis la situation a évoluée. Et on est en droit de se demander ce qu'il s'est passé. La réponse la plus courte est aussi la plus exacte : Kotios. Et tout ce que cela sous-entend. Le Grand Kah, semble croire la Convention Générale, a une mission révolutionnaire importante, celle de défendre d'autres communes, d'autres Républiques, ainsi que ses alliés toujours plus nombreux et menacés. Cette armée de défense a été déployée pour la première fois en Damannie, à la demande de son gouvernement, puis à Kotios, en réponse à l'agression impériale. Ces opérations étaient-elles strictement défensives ? Par exactement. On se souvient des contre-offensives menées sur les forces fascistes dans les environs de Baidhenor, par exemple. Accompagnées d'un débarquement de fusiliers marins. Il est évident que la défense de nos alliés passe par une doctrine moins attentiste que celle qui, présentée à la Convention, avait permise de faire accepter à ses députés la fondation du commissariat et la remilitarisation de l'Union. De même, si notre armée se décrit comme une force de défense d'infanterie, ce sont surtout nos aviateurs, les chevaliers si remarqués que leurs exploits inspirèrent jusqu'à un film au succès international, et nos équipes d'infanteries mobiles qui ont marqué les esprits, et sur les succès desquels ont été pensées les futures doctrines du Commissariat à la Paix.

Tout de même, cette évolution de Doctrine ne fut pas suivie d'un changement du discours des Directeurs, qui en restèrent à leur silence poli et à leur communication épurée. Ainsi on peut juger étrange que l'annonce du déploiement des Chars Ocelots, qui aurait pu être faite discrètement comme à l'accoutumer, ait été l'occasion d'une telle cérémonie. Visite du citoyen Mayhuasca du Comité de Volonté Public, qui avait défendu le projet à la Convention, parade de bataillons d'infanterie, exercices de tir réel sur cibles. Le tout sous l’œil attentif des caméras et appareils photos de tout les médias de la Confédération. Ce que d'autres ont peut-être interprétés comme un changement de doctrine, nous le voyons plutôt comme une tentative par le Commissariat de contrôler son image et le discours entourant le déploiement de ces premiers chars.

Le Char Léger est un concept vieux, peut-être même éculé dans la plupart des pays du monde. Fréquemment abandonné au profit de chars plus lourds, on lui reprochait entre-autre un blindage insuffisant pour résister à un tir direct de char de bataille moderne, et une puissance de feu insuffisante pour percer le blindage de ces mêmes chars. En situation de bataille de blindés frontale, le char léger ne présentait en somme aucun intérêt en comparaison à ses successeurs plus modernes. C'est ce qu'expliquait la porte-parole du Commissariat. L'Ocelot, en reprenant le nom de ce discret chasseur nocturne, abandonne toute prétention de grandeur. Il ne s'agit pas d'un char destiné aux grandes opérations dans les pleines Eurysiennes, ou aux sièges prolongés de villes Afaréennes. C'est un appareil qui assume son format, qui a été pensé pour un set précis de missions dans les territoires de notre cherre continent Paltoterrien. Pensé pour se déplacer rapidement d'une région à l'autre, capable de gravir des collines, de circuler sur des montagnes escarpées et de zigzaguer dans la canopée hostile où se pressent traditionnellement les guérillas réactionnaires et les marais où échouent systématiquement nos ennemis, l'Ocelot est un appareil pensé pour la défense du territoire plus que pour l'attaque. Pensé comme un support d'infanterie lourd, son canon est capable d'abattre la plupart des blindages intermédiaires. Sa manœuvrabilité et longueur réduite de sa tourelle, limitant sa portée pratique à trois kilomètres, permettent cependant de prendre part à des combats rapprochés en pleine jungle, ce que ne pourraient pas faire des engins plus lourds.

C'est en tout cas ce que nous dit le Commissariat. Ce sur quoi il a insisté. La doctrine du Kah justifiait de créer en premier lieu des appareils capables d'agir efficacement sur les sols de ses communes. Dans les jungles, les montagnes, les collines, les marécages. Si de tels appareils pourraient théoriquement être déployés tout aussi efficacement au Nazum ou dans d'autres pays Paltoterriens, le Commissariat n'a pas – officiellement – envisagé cette possibilité. De même qu'il n'a pas souligné l'autre avantage de ces chars légers : ils sont en mesure d'être déployés très rapidement. Depuis les airs, ou via chalands de débarquement. Contrairement à ses aînés, le char léger est un appareil d'invasion par excellence. Demandant peu d'approvisionnement, facile à transporter et à entretenir. Parfait pour une intervention extérieure avec les moyens de déploiement limités de l'Union.

Tant de caractéristiques qui le rendent parfaitement flexible et promettent à l'Ocelot une longue carrière dans la défense de la Révolution, quoi qu'en pensent les timorés et qu'en disent actuellement les Directeurs.

En attendant nous souhaitons une excellente chance, un bon karma et le soutien absolu de la Roue aux équipages des deux bataillons de blindés, déployés dans le sud du pays pour un premier contact contre les guérillas Damannistes, dont on nous a assuré qu'elles n'étaient pas équipées pour attaquer le blindage de chars, même légers. L'occasion de former les troupes et d'affiner les stratégies de guerre paltoterrienne de l'Union. Nos prochains ennemis n'ont qu'à bien se tenir.
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Akai Kagami
L’Observateur du bien Commun, Bulletin officiel et quotidien du Parlement Général.



Sur le renouvellement des membres du Comité de Volonté Publique, portée par le Comité de la Volonté Publique par l’intermédiaire du Citoyen MAYHUASCA.

Le Citoyen MAYHUASCA arrive au Parlement Général à 16H30. Son apparition se fait dans le calme. L’ordre du jour suit son cours jusqu’à 17H20 où la question renouvellement des membres du Comité de Volonté Publique, avancée par le Comité de la Volonté Publique le 08/04/2007 doit être discutée ; Le citoyen MAYHUASCA se rend à la tribune centrale sur invitation du Premier Orateur de la Convention.

C. MAYHUASCA : Citoyens, citoyennes ; Délégués de toute l’Union et de toutes les communes, syndicats, républiques de notre confédération. Merci de me recevoir au sein de cette prestigieuse institution, que je n’ai quitté qu’à regret il y a sept ans de cela pour rejoindre l’Estimable Comité dont l’Union demandait alors la refondation autour de principes nouveaux. Avec votre permission je vais me permettre de rappeler dans quel état d’esprit se trouvait notre confédération lors de la fondation et de l’estimable, et quelles intentions immuables étaient inscrites dans les préceptes de sa fondation, justifiant du cap pris jusqu’à ce jour et justifiant par la même du sujet m’ayant amené ici et sur lequel il est de notre devoir commun de statuer dans les plus brefs délais. Nul n’ignore quels impératifs nous pressent.

Au tournant du millénaire, notre union était une puissance dans rang bien inférieur à celui qui devrait être le sien. Une puissance dans l’État aurait pu faire oublier quelle importance capitale elle a eu sur l’histoire contemporaine comme ancienne du monde. Pour dire les choses sans détour, citoyens et camarades, il était évident pour tous les partis concernés que le temps du Grand Kah était fini, et bien fini. Il était évident pour tous les partis que, d’une grande puissance, d’un Empire de Liberté, d’un Phare lumineux au sommet du mont Victoire, pour citer quelques lignes dont vous connaissez la suite, le Grand Kah n’était plus qu’un rêve brisé. Comme un vieil homme, honorable vétéran, dont les glorieuses années de service s’effaçaient lentement sous l’effet de la sénescence ; ou plutôt d’une mauvaise chute.

(Le citoyen MAYHUASCA lève les mains pour faire taire des protestations émanant entre-autre du quadrant radical et modéré du parlement. Le premier orateur laisse faire. Le calme revient.)

Le Second Comité de Restauration, qui a précédé l’Estimable de la Révolution à l’an 2000, a fait un travail plus qu’important et il ne me viendrait pas à l’esprit de critiquer l’action de nos aïeux. La purger des éléments fascistes, l’enquête sur les soutiens étrangers de la junte, les commissions d’union nationale, la minutieuse recomposition de nos administrations, de la Magistrature, la refondation d’une Égide officielle, quittant son statut clandestin. La dissolution de l’Armée des Ombres Rouges au sein des Protections Civiles. Tout cela demandait bien une décennie, et tout cela permis à l’Union de revenir pour de bon. Mais ce n’était là que l’action d’un Comité d’anciens résistants. Nommé dans des circonstances exceptionnelles compliquées pour répondre à des problématiques particulières d’un impact assez pauvre sur ce qui anime, habituellement, la gouvernance. L’économie, le bien-être, la diplomatie. Lorsque le Second Comité de Restauration a fait son temps, il s’est présenté ici comme je le fais, et, après un bilan de ses succès, a demandé sa dissolution. Cette illustre institution le lui a accordé, et a nommé à sa suite l’Estimable.

Nous savons ce qu’a fait la Convention et le Comité de Volonté Publique depuis. C’est l’histoire récente. Les privations de quatre-vingt-dix sont si fraîches dans les mémoires. Le Grand-Kah n’est-il pas à nouveau une puissance à la hauteur de sa mission et de son histoire ?

C. AUDELINE : La Conserve refuse l’utilisation du terme Mission !

P.O CAIPA : L’objection des députés de la Conserve est notée. Continuez Aquilon.

C. MAYHUASCA : C’est un autre sujet. Le reste, au moins, est indéniable, et ma conclusion en restera inchangée. En Sept années, l’Estimable quatre fois reconduit a créé les outils nécessaires à la reconstruction de l’Union. La production industrielle et agricole ont doublés. Les rapports des commissions à la planification participative font État d’un secteur de la recherche d’une extrême vivacité, notre réseau diplomatique – inexistant avant-cela – s’étant sur tous les continents, a donné naissance a une puissante alliance, le Liberlaintern, a permis la protection des intêréts élémentaires de l’Humanité à travers différents pays, différents territoires, a inspiré des révoltes légitimes jusqu’au coeur du vieux continent. En sept années la culture populaire du Grand Kah, alors un phénomène d’initié, s’est répandue sur le monde pour y être appréciée à sa juste valeur ; Nos vêtements, notre musique, nos équipes de sport, nos séries, nos jeux vidéos, notre littérature populaire et classique. Récemment, encore, nos films. Dois-je rappeler qu’alors, notre seule exportation était la citoyenne Actée et ses discours universitaires ?

(Quelques rires. Le citoyen MAYHUASCA attendra avant de reprendre.)

C. MAYHUASCA : Maintenant, pour être parfaitement honnête, il faut revenir sur le point ignoré jusque-là. Nous ne pouvons pas le contourner en ça qu’il représente comme bien souvent le point de crispation, le nœud de cette situation. Il ne peut y avoir d’opposition entre le Comité et la Convention. La relation des représentants du peuple et de leurs expansions doit être aussi harmonieuse que celle de la main et de l’outil. Cette symbiose a été mise à mal lorsque, il y a trois ans de cela, je me tenais face à vous et vos prédécesseurs pour demander à la Convention Générale qu'elle donne à l'Union les armes de sa défense. Il y eut énormément de débats et je me souviens très bien que l’on craignait ce réarmement dangereux pour nous. On m’a traité de centralisateurs. On a accusé le Comité de préparer un coup. La Garde d’Axis Mundis, sur le modèle duquel la Garde fut composée, menacée à plusieurs reprises de dissolution. Je défendais un modèle que l’on trouvait trop extrême. Les internationalistes radicaux peut-être moi. Encore une fois j’émerge de leurs rangs, et mes idées en sont nécessairement proches. Certes leur soutien fut essentiel et rapide pour ce projet, mais nous trouvâmes ensemble les mots justes pour codifier le fonctionnement de cette nouvelle force. L’Armée du Grand Kah existe, maintenant. C’est une force que nous ne pourrions dissoudre aisément, tant elle a prouvée son utilité. Je ne crois pas que l’erreur ait été de nous donner les moyens de notre liberté. De notre défense. De notre ambition.

Cette force, cependant, fut conçue sur la base de nombreux compromis et…

C Lucuesco : Nous ne tolérerons aucune réforme de son fonctionnement

C. Ouverture : Taisez-vous donc le fédéraliste, laissez le citoyen parler !

(D’autres exclamations suivent. Les rangs des isolationnistes réformateurs se taisent finalement lorsqu’il s’avère que les interventionnistes et les radicaux sont tout à fait capable de faire plus de bruit qu’eux. Le citoyen MAYHUASCA  reprend.)

C. MAYHUASCA : La voix du peuple s’est clairement exprimée en faveur d’une politique plus radicale. Cette législature compte plus d’Accélérationistes, d’Avant-gardistes, de Splendides que la précédente. Où sont passés le Temple, les sociaux-démocrates ? Je vois aussi que la Conserve a maigrie de presque moitié, bien que cela lui aille beaucoup mieux.

P.O CAIPA : Citoyen, l’ordre du jour n’est pas à l’invective.

C. MAYHUASCA : Le peuple s’est exprimé en faveur d’une politique qu’il n’a pas été possible de mettre en place du fait d’une prudence peut-être légitime mais s’étant avérée délétère. Il aurait fallu…

(A nouveau quelques cris d’indignation. Il attendra avant de reprendre.)

C. MAYHUASCA : La Garde manque de supervision politique. S’il n’était pas entendable pour la Convention de confier au Comité la gestion stratégique de la force armée, il aurait au moins dû nous être permis de réfléchir à l’instauration d’une vision politique de l’armée. Cette arme devait avoir un but, mais une forme d’obstruction parlementaire a assurée qu’elle manque de conviction et ne soit à jamais qu’une de ces épées que l’on range sous verre, pour la montrer à ses amis impressionnés et pour ne jamais, en fait, l’utiliser ; Et je sais ! Laissez-moi finir, citoyens !

P.O. CAIPA : Au calme ! Citoyenne, descendez de votre siège s’il vous plaît !

C. MAYHUASA : Je sais, citoyens, que la mission de l’Estimable n’était pas de concevoir une stratégie d’ordre militaire ! Je sais sur quelles bases notre comité a été construit ! Les auspices généreux de l’ouverture, de la reconstruction et de la prospérité nous ont donnés le devoir de remplir une mission essentielle et satisfaisante, tout en essayant de nous aveugler lorsque notre regard s’attardait sur les questions fâcheuses ! Et nous en sommes las ! Aujourd’hui nous le disons ! C'est notre erreur ! Nous aurions dû prendre conscience des limitations même de notre mission, et demander la dissolution de la Commission dès la question de l'armée avancée. Nous avons, comme celui de Restauration en son temps, terminé notre mission, et ce depuis trois ans ! La mission qui a été confiée au Comité est remplie et c’est une union riche, prospère et accessible au monde que nous laissons en héritage à nos successeurs ! Mais il est temps que cette Convention se penche sur la question de la prochaine Volonté Publique ! Réparer ne suffit plus ! Réparer n’est plus nécessaire. Il faut construire, et construire dans tous les domaines ! Il faut que le Commissariat à la Paix et ses Directeurs puissent profiter d’une vision politique, que la Planification démocratique s’oriente dans un but plus précis que la simple génération de richesses et que…

C. MAUVE : Tropismes de Radicaux ! Voyez donc si l’Union ne peut survivre sans Comité ! Je propose que l’on vote pour la dissolution, mais pas pour...

P.O. CAIPA : Au calme, seconde fois !

C. MAUVE : Mais pas pour l’élection d’un nouveau comité !

P.O. CAIPA : Au calme, dernière fois. Huissiers, veuillez prendre acte que la citoyenne Mauve, le citoyen Moketlin, le citoyen...

C. MAYHUASCA : Ce n’est rien, le Comité de Volonté Publique a exprimé ce qu’il avait à dire. Citoyens et citoyennes, vous allez pouvoir vous disputer sur la question. Vous savez, quoi qu’il en soit, quelle est notre position et sur quelles bases nous la justifions.
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Billet d’opinion de la citoyenne Alice Rossi, du Commissariat au Consensus.

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"Je ne dis pas qu'il faut être intransigeant. Mais nous ne sommes pas comme eux, et ils ne sont pas comme nous." - Citoyenne Alice"la dératiseuse" Rossi


La Convention Générale se renouvelle dans les grandes lignes. N'oublions pas ce qu'elle est, et ce qu'elle doit être.

La décision du Comité de Volonté Publique de se dissoudre et de dissoudre par la même le Parlement Général, décision approuvée par ce dernier après une cession dont on peut au moins saluer l’inhabituelle longueur, a exposée l’Union à la bassesse d’un scrutin général. L’espace d’un bref instant de son histoire, de quelques semaines, quelques mois, la Confédération a été le théâtre où l’on joua la démonstration ridicule de la démocratie représentative. Votes majoritaires, disputes territoriales, oppositions de principes… Sectarisme et idiosyncrasies inadmissibles des régimes libéraux que nous conspuons tant, triste rappel que derrière le triomphalisme de notre révolution se cache tout de même l’échelle nationale d’une politique, perdant son pendant humain au profit de cette cuisine détestable. La contre-révolution faite soupe électorale.

Je souhaite que le résultat soit donné dans les plus brefs délais et que, comme l’entends la tradition, les candidats choisis par les différentes communes le soient sur les bases d’un consensus. Qu’ils n’oublient pas qu’ils ne sont pas de ces pontifes siégeant aux bancs des oligarchies. Ils sont délégués d’un peuple, envoyés avec une mission et, dans la plupart des communes, susceptibles d’être rappelés sitôt cette mission remplie ou trahie. Que ces gens se rappellent qu’ils n’ont pas de partis politiques, mais des communes. Qu’ils ne répondent à aucune autre commission partisane ou transpartisane que celles de leurs concitoyens, de la communauté amniotique d’où ils ont émergés. Qu’ils sont non-pas les dirigeants de ces communes mais leurs représentants, et qu’ils sont là pour en porter la parole, sans plus.

Oui certains qualifient l’Union de territoire anarchique, d’autres de république des conseils. On nous compare aux fils et filles du Kah, idéologie primordiale. Aux variations du socialisme, solidarisme, des idées libertaires, des républiques diverses. D’un communalisme libertaire qui nous est cher, d’un municipalisme démocratique qui, lui seul, donne au peuple les clefs réelles du pouvoir. La vérité c’est que la Convention Générale c’est l’ordre sans la hiérarchie. Notre gouvernement est un ordre sans pouvoir. Notre Union est humaine, rien qu’humaine, rien en dehors de l’humain. Et ces élections doivent une fois de plus démontrer que le Grand Kah et la forme la plus pur d’ordre sans le pouvoir. Le Grand Kah n’est pas l’anomie, pas plus que la représentativité. Les communes ne sont pas représentées. Elles sont.

Il n’y a pas de politique à l’œuvre. Ne l'oublions pas malgré la tentation de l’instant.
1823
Akai Kagami
Le Miroir Rouge, définitivement radical.


URGENT : DES TIRS RETENTISSENT A AXIS MUNDIS LORS DE LA CÉRÉMONIE D'INVESTITURE DU NOUVEAU COMITÉ DE VOLONTÉ PUBLIQUE !

Commune Ville Libre est déclarée ville en siège, tout les vols hors de la ville sont interdits et la Protection Civile se déploierait.

Un char léger Ocelot en compagnie d'une unité d'infanterie.

La cérémonie d'investiture du Nouveau Comité de Volonté Publique dit de "Renouvellement" se passait normalement, commençant avec un léger retard, à 19h12, du fait de l'affluence extrêmement importantes de spectateurs. Le discours de l'ancienne première oratrice de la Convention, Nuna Choque Caipa, s'est passé normalement et elle a pu remettre ses fonctions au citoyen Elias Benedict. Les membres du Comité Estimable et de Renouvellement se sont ensuite brièvement entretenus avant de se serrer la main, cérémonie au cours de laquelle les citoyens réélus (Mayhuasca, Notario, Sukaretto) quittèrent les rangs du comité de Renouvellement, où ils furent accueillis par la citoyenne Meredith. C'est à ce moment que des détonations ont été entendues. D’après les témoignages, la citoyenne Nuna Choque Caipa se serait effondrée en arrière, et la citoyenne Actée Iccauhtli aurait poussée ou serait tombée sur la Citoyenne Meredith hors de l’estrade où se déroulait la cérémonie tandis que les citoyens Mahuasca, de Rivera, Maxwell Bob et Ixchet se seraient placés à couverts en sortant leurs armes. La situation a donné lieu à une panique indescriptible durant laquelle les agents de l’Egide présents pour maintenir la sécurité organisèrent rapidement des nasses et une évacuation des élus et des spectateurs.

À cette heure aucun bilan n’est disponible sur le bilan des blessés. Le commissaire inquisiteur Liam Aragon Ixazaluoh a déclaré l’état de siège : plus personne ne peut entrer ou sortir d’Axis Mundis sans passer par des barrages de la protection civile. Dans une brève déclaration, l’Égide a annoncé qu’une chasse à l’homme avait été ouverte et que de nouvelles informations seraient bientôt communiquées.
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