Ministère impérial des affaires étrangères - Office de Dona Anterra - Page 3

Excellence,

Puisque vous disiez vous-même connaître, en substance, bien peu de chose sur notre pays, il convient, je crois, par sympathie et politesse, de vous mettre au courant de l'essentiel pour que le dialogue émergeant de votre demande puisse se faire dans les meilleures conditions possibles.

Voyez-vous malgré toute votre bonne volonté, et malgré la mienne, soyez assurée que je n'entretiens aucune forme, quelle qu'elle soit d'inimité à l'égard du peuple Listonien ou des individualités composant sa gouvernance, je me dois de parler au nom du Commité de Volonté Publique qui, lui-même, a le devoir nécessaire de représenter tant que possible la médiane de l'opinion populaire. Celle-là est la suivante, la même depuis des générations et des générations : le Kah, en tant que confédération de communes libres et non-contraintes, déteste les structures hiérarchies injustes. Par conséquent, ne peut supporter la notion même de monarchie.

Si cette notion, idéologiquement parlant, vous semble étrange, voire inconcevable, permettez-moi au moins de vous en présenter le contexte historique. Le Kah, en tant qu'Idée, est issue de trois oppressions différentes, détruites par le peuple ultimement souverrain. Déjà les peuples colonisés. Je crois que ce terme vous est familier, n'est-ce pas ? Autochtonés pré-occidentaux, massacrés, réduits en esclavages, dont on chercha à détruire la culture de toutes les façons envisageables, des plus perverses aux plus brutales. Du génocide culturel au génocide pur et simple. Vint ensuite les esclaves exportés du Nazum par les seigneurs de guerre qui en venait. Forcés d'ériger des forteresses et des temples pour leurs maîtres. Brutalisés. Massacrés. Tués pour quelques fortins de montagne. Enfin, les colons occidentaux. Arrivant par vagues. Petits bourgeois, paysans déshérités, penseurs fuyant leurs dettes et leurs ennemis. Tous s'écrasaient sur la côte Est de ce qu'allait devenir le Kah. Pour y souffrir un système d’oppression capitaliste typique de la colonisation. Les propriétaires terriens, accaparant tous les pouvoirs économique et politiques. Détruisant tout sur leur passage. Violant les lois les plus fondamentales de la société.

La colonisation charrie dans son cours les corps de millions d'innocents.

Elle est la fille prodigue de la monarchie. L'incarnation la plus pure du racisme. La conclusion logique du capitalisme.

Le Kah, construit sur une révolte naturelle, nécessaire. Sur la destruction de ces institutions. Sur le rejet de leur valeur. Sur la haine féroce de l’oppression, du meurtre, du massacre, et l'exploitation, ne pouvait être que fermement opposé à cela. Nous sommes anti-racistes. Anti-capitliastes. Anti-autoritaristes. Nous sommes les pères et mères de tout ce que l'ordre établit craint. Les géniteurs du socialisme utopique, immature, scientifique, insuffisant, de l'anarchisme inconséquent. Nos fils et filles représentent tout ce que, traditionnellement, les pays tels que le vôtre, détestent. Notre pays représente tout ce que les rois craignent. Tout ce que les empires redoutent. Le juste retour du peuple sur le devant de la scène. La nécessaire destruction du pouvoir. L'auto-organisation. La liberté, en fait.

C'est ce qu'est le Kah. La Liberté. Précisément.

Le contexte ayant été clarifié, permettez-moi de répondre point par point à vos demandes en préparation de la rencontre qui aura lieu.

– Concernant la Défense le Kah ne saurait défendre les intêréts impérialistes étrangers. Votre nation tient encore des territoires coloniaux ce qui en fait, par définition, une ennemie idéologique de notre lutte décolonial. Notre coopration en la matière risque donc d'être très limitée. Peut-être pourrions-nous travailler ensemble sur des notions moins étendues telle que le contre-terrorisme et la lutte contre la piraterie sévissant notamment en Mer du Nord.

– Pour ce qui est de l'économie, nos positions anti-capitalistes sont moins zélées ; Nos consortiums coopératifs sont ouverts à toute proposition et notre politique fiscale particulièrement avantageuse.

– Pour ce qui est de la recherche et de tout éventuel autre domaine, nous n'y voyons pour ainsi dire pas d'objection.

Est-ce que cela vous semble acceptable ?

Respectueusement,

Excellence,

Soit, je ne reviendrais plus sur la question de vos « colonies ». Ou de votre « fédération impériale », appelez ça comme vous le voulez. Pour nous une gouvernance centralisée imposant ses coutumes et les lois de son église à des terres étrangères de part leur culture, leur histoire et leurs aspirations, n'a aucune valeur. Mais je pense qu'il convient de nous accorder sur un désaccord à ce sujet. Concentrons-nous sur les sujets plus consensuels.

Ainsi-donc :

Le gouvernement Pharois ?

Financer la piraterie ?

Allons ! Tout de même ! Rien ne le prouve. Rien ne pousse même à le penser. Et vous devez savoir quel profond respect nous lie aux Pharois et à leur système de penser libertaire. Ce sont des amis idéologiques et des partenaires politiques essentiels, avec lesquels nous avons, si vous me permettez l'expression, fait les quatre cents coups. Ce serait comme nous dire que notre tendre ami d'enfance, retrouve au hasard de la vie, battrait en fait sa femme et dévorerait des chats. Quelle horreur. Non, non.

Cependant je vous l'accorde : l'Eurysie du nord est un nid à pirate et c'est une très mauvaise chose pour le transfert des ressources et des personnes. Vos positions en Mer du Nord pourraient faire de vous un acteur important pour lutter contre cette plaie terrible.

Si le Kah ne peut pas s'engager contre ses bons et innocents amis du Pharois, nous pouvons effectivement réfléchir ensemble – et avec d'autres, à ce propos j'aimerais savoir qui vous avez déjà contacté à ce sujet et ce qu'il en est ressorti – à la question de la Piraterie, et à ses solutions concrètes.

Respectueusement,